Metropolis, 2017
Suicide SlumDes rues en terre battue, des cours en terre battue. Des terrains vagues, des châteaux de planches en abondance. Des bicoques aux toits en papier goudronnée et parois en parpaings. Une affiche municipale sur un mur :
Metropolis, la ville de demain.
Du travail pour tous et des maisons pour pas cher.
Le kiosque de journaux était en ruine, la façade d'un ancien pressing était délabrée, une affiche électorale déchirée montrait les deux candidats pour la présidentielle : Amelia Carter face à Amanda Waller. Une chose était sûre, le prochain président des USA, serait une femme. Un réverbère rendit l'âme, de la fumée sortait des plaques d'égouts. Les trottoirs étaient ponctués de sac d'ordures. D'ici on pouvait apercevoir la Lane Tower. C'était le siège de la plus riche entreprise de la ville, celle qui employait le plus d'habitants à Metropolis : La Lanecorp. Son fondateur et dirigeant, Sam Lane, était l'homme le plus riche de la cité en plus d'être son premier citoyen.
Sirène d'ambulance plus loin. Le bruit réveilla Alexander Luthor. Il était allongé sur une grille de métro, sur le seuil d'un magasin de brocante abandonné. Près de lui un sac à dos malmené chargé de ses effets personnels : journaux, bouteille, boîtes de conserves. Un carton peint à la main à coté qui lui servait lorsqu'il faisait la manche : J'AI FAIM, JE N'AI PAS DE MAISON, AIDEZ MOI ET MON PETIT CHIEN, SVP.
Le chien, un petit bâtard à poils ras, maigre comme un clou, était allongé à côté de lui, sur une pile de journaux datant d'il y a un mois. Luthor s'étira, il fouilla dans son sac et prit la toute dernière édition du Daily Planet qu'il avait trouvé dans une poubelle. En première page, la une sur 5 colonnes : Wonder Woman a Metropolis ! Suivit d'un photo de la célèbre amazone. Elle était connue pour avoir sauvé la terre de Brainiac il y a 2 ans. Elle avait décapité le génocidaire galactique collectionneur de son propre glaive divin. Wonder Woman affrontait les super-vilains aux 4 coins du globe, en particulier en Europe, son lieu de résidence, mais elle n'avait encore jamais mit les pieds en Amérique. Le fait qu'elle se rende à Metropolis était un événement. Une journée historique pour toute la ville et le pays. Luthor parcourut l'article. C'était bon ça, la venue d'une personnalité populaire, ça voulait dire les foules, ça voulait dire une journée de fête, les gens donnaient plus facilement de pièces dans ces moments là. Le chien leva les yeux vers lui, en agitant sa queue toute décharnée. Luthor lui caressa la tête. Il avait appelé son chien « Kal-El », comme le grand héros de Metropolis. Alexander portait un pull-over à col en V taché et un pantalon délavé malmené par endroits. Il avait des plaies sur les mains. Il avait des veines sombres sur le cou et son crâne chauve, dans le genre œdème et signes de malnutritions. Il compta la menue monnaie qu'il avait grappillé après 3 jours à mendier, il dit au chien :
« Eh ! La bonne nouvelle c'est que y'a moyen d'aller prendre un café dans un établissement décent avec ça ! »Alexander se leva, embarqua son sac et passa sous une affiche municipale annonçant : « Metropolis aime Wonder Woman ! » Son chien trottina à ses côtés. Le duo passa devant d'autres clodos qui vivotaient dans des emballages d'enceintes stéréos.
« Eh Al ! Tu ferais quoi si t'étais riche ? Tu construirais un immeuble encore plus grand que la Lane Tower ? »
« A d'autres ! Et pourquoi je me présenterai pas comme candidat pour devenir président du pays tant qu'on y est ?! »Tout le monde s'esclaffa.
………………………
La foule s'entassait dans la grande avenue, du bord du caniveau jusqu'aux devantures des boutiques. Des panneaux agencés pour l'occasion, affichant des portraits de Wonder Woman montaient jusqu'à 3 mètres de haut. Une banderole claironnait : bienvenue à Diana Prince !
Luthor descendit l'avenue sous les panneaux faisant la réclame pour les buildings en constructions : la ville de demain s'agrandit encore. Il fut obligé de se frayer un chemin centimètre par centimètre, en tenant son petit chien dans ses bras. Les fans de Diana Prince refusaient de céder un pouce de terrain. Les flics passaient leur temps à rameuter des individus en pleine rue pour les renvoyer à leur morceau de trottoir. Tout le monde voulait voir le cortège suivit du maire qui remettrait les clés de la ville à l'héroïne qui avait sauvé le monde. Des petits mômes chevauchaient les épaules de leur père. Un million de minuscules drapeaux américain à bout de petits bâtons voletaient au vent. Une pluie de confetti tombait sur la route. Luthor s'arrêta devant le grill d'Ollie Hammond. Il regarda la monnaie dans sa main. Ouais, il y aurait un café pour lui et un sandwich au pastrami pour Kal-El. Avec un peu de chance, il pourrait même avoir un sandwich corned-beef pour son chien.
Alexander entra, une foule pas très reluisante matait le spectacle : Mercy Graves en train de chanter avec son orchestre d'accompagnement. Luthor l'aimait bien cette petite. Il lui souffla un baiser de loin. Mercy leva les yeux au ciel, encore ce clodo. Un grondement déchira l'air dehors :
ELLE ARRIVE ! ELLE ARRIVE ! ELLE ARRIVE ! WONDER WOMAN ARRIVE !
Tous les clients, les barmaids, et même les gugusses des cuisines qui faisaient la plonge, se précipitèrent vers la porte. Aucun ne voulait manquer ça, tout le monde voulait apercevoir la célèbre amazone. Mercy se tapa une petite crise de jalousie : alors comme ça ils préfèrent allez reluquer cette brune plutôt que moi ? Elle enchaîna sur sa chanson en faisant comme si elle ignorait royalement la venue de la star du jour. Mercy avec sa moue boudeuse de grosse jalouse. Appelons ça miss de la sophistication 2017. Luthor s'approcha du bar pour commander, mais plus personne. Son petit chien s'agita dans ses bras dans tous les sens à cause de l’effervescence autours. Le grondement prit de l'ampleur. Un bruit de moteur se détacha lentement : le cortège de voitures équipée façon parade triomphale. Plus personnes dans l'établissement à part Luthor, son chien, Mercy et une autre femme. Tous les autres étaient sortit dehors pour voir Wonder Woman. Mercy quitta l'estrade furieuse et disparut par la porte du personnel. On pouvait lire sur son visage : mais qu'est-ce qu'elle a de plus que moi l'emmerdeuse au lasso ? Luthor observa la seule cliente qui était avec lui dans la salle. Le rugissement d'acclamations dehors augmenta d'intensité. Alexander demanda à Loïs Lane (car c'était elle) :
« Dîtes, c'est vrai tout ce qu'on dit sur elle ? »Fiche codée par NyxBanana