Esquissant un sourire, Arthur devait avouer que son amie avait vraiment un très beau bébé. Posant son trident dans son dos, il se pencha et chatouilla la demoiselle qui semblait apprécier ce qu’il faisait. Par le passé, il n’avait jamais fait attention aux bébés ou enfants l’entourant, mais cette fois-ci, il devait avouer que ça l’amusait beaucoup. Une de ses amies de Amnesty Bay avait donné naissance à cette belle demoiselle quelques jours plus tôt et il lui avait promis qu’il passerait dès qu’il le pourrait. Ca n’était pas parce qu’il était le roi d’Atlantis qu’il en oubliait ses amis de la surface. Ca faisait donc un peu moins d’une heure qu’il était là, mais il en profitait pleinement. Il avait commencé par parler avec les heureux parents avant de se concentrer sur le bébé. Demandant à son amie s’il pouvait prendre sa fille dans ses bras, elle accepta. Délicatement, il déposa la demoiselle contre son bras et il la fixa. Puis, il joua avec ses petits doigts. Ca faisait bizarre, parce que lui avait de grandes mains larges. Esquissant un nouveau sourire, il continua de jouer avec ses doigts avant refaire de lui refaire des chatouilles. Un bébé. Ca n’était pas dans ses habitudes de prendre le temps de s’en occuper. Ca l’était encore moins de s’extasier de la sorte. Il avait fait la même chose quelques mois plus tôt devant un bébé atlante. La déposant dans son petit lit, Arthur se demandait si ça voulait dire quelque chose. Quand son père était encore en vie, ce dernier lui avait dit que le jour où il serait prêt à être père il le saurait. Etait-ce le cas ? Non, c’était trop tôt. Il avait encore plein de choses à faire pour calmer les esprits entre Atlantis et la surface. Seulement, en jouant à nouveau avec le bébé, la chatouillant, lui parlant et chuchotant pour ne pas lui faire peur avec sa voix grave, il regarda ses grands yeux ouverts sur lui et il lui fit des grimaces. Entendant un rire près de lui, il tourna la tête, remarquant que son amie se moquait de lui.
Se reprenant, il se redressa et indiqua qu’il devait y aller, mais qu’il serait ravi de passer dès qu’il le pourrait. Saluant les deux adultes, il fit un signe au bébé qui semblait plus intéressé par son pied désormais. Sortant de l’hôpital sous les regards surpris de certaines personnes, il retourna près de l’eau et plongea pour retourner à Atlantis. Il avait beaucoup de choses à faire et il devait aussi voir Mera pour savoir si elle serait libre le soir même. Elle travaillait dur et ça faisait un moment qu’ils n’avaient pas pû passer un peu de temps ensemble. Ils avaient dû faire en sorte que Atlantis reste non touchée par ce qui se passait à la surface. Avec le Syndicat du Crime, ils devraient sans doute aider la Justice League sous peu. Arthur se doutait que Diana aurait besoin de son aide. Après tout, faisant tous les deux parties des membres fondateurs, il ne pouvait refuser. Après avoir parlé avec le conseil, Arthur alla jusqu’à l’école de magie. Regardant son épouse parler avec les enfants pour leur nouvelle leçon, il devait avouer qu’il était heureux de la voir ainsi. Lui qui avait longtemps eu du mal savoir où était sa place, il devait avouer que sa vie de roi et de super héros lui plaisait grandement. Evidemment, il y avait aussi des problèmes, surtout avec Orm et Black Manta, mais il préférait voir les points positifs. Sortant de ses pensées quand les enfants passèrent près de lui, il hocha la tête vers eux avant d’aller vers Mera.
L'une des petites écolières tressait la chevelure brune et emmêlée de sa benjamine. Sur un banc de corail, elles s'étaient installées, avec dans le regard une discipline ferme et une douce curiosité. Une pause s'était imposée après les deux heures de pratique qui les épuisèrent. Alors, ils étaient là, avec tous ce sourire innocent, et cette joie de vivre à peine ramollie par la fatigue. Les fillettes s'amusaient en se tripotant les mèches, en rêvant d'un jour coiffer une reine. Ou m mieux encore, d'être la reine qu'on coifferait. Debout, les pieds ancrés entre les herbes aquatiques, Mera observait chaque coin du récif, d'un oeil attentif, aimant. C'était Atlanna qui lui avait offert le poste de directrice. C'était Atlanna encore qui l'avait fait rencontrer Arthur. Atlanna avait modelé une Mera digne de son fils, et ce n'était que bien des années après la mort de cette reine que Mera percevait enfin tout les cadeaux qu'Atlanna lui avait fait. Elle lui avait donné cette vie, si désirable, et complaisante. Alors, comme elle se l'était jurée depuis que Xebel avait subi un coup d'état, elle savourait ce moment de paix. Paix, certes instable, certes fragile, certes limitée, mais une paix dans ces eaux où Mera surveillait ses élèves avec bienveillance. La brunette qui désormais possédait, coulissant contre ses épaules, deux larges tresses en épis, accourait jusqu'à Mera pour coincer sa tête contre le bassin de sa professeur. Et, de sa petite voix fébrile, elle demanda en accentuant involontairement certaines syllabes: « Madame, vous avez des enfants? MOI, je veux plein d'enfants. ». Sur les lèvres de la reine s'esquissa un rictus délicat, puis, un souffle léger parcourut sa bouche. Non, pas agacée. Non, pas ennuyée. Simplement cette sensation puérile qui vous laisse muet un instant. Rien qu'un instant, mais un instant qui s'avère crucial dans l'esprit. Elle prit le temps de réfléchir, et après ce contre-temps se permit d'espacer la demoiselle qui se collait à ses jambes. Elle s'accroupit, se mit donc à sa hauteur, et les yeux dans les yeux, elle répondit: « Tu auras tout le temps nécessaire pour y songer. Rentrons en classe. ».
Elle saisit la main de cette petite aux rêves déjà grands et maternels. Mais se tut. Elle se tut parce que les mots lui manquaient quant à son propre parcours. Les enfants l'entouraient au quotidien. Arthur aussi avait cette aisance avec les bambins. Pourtant, et ce malgré les croyances, jamais un moment n'avait semblé parfait pour agrandir leur cocon. Créer une famille. Adolescente, Mera s'était jurée d'épouser et d'enfanter dès que le temps le lui permettrait. Le temps ne l'eut jamais permis, entre la guerre, les conflits, la mort d'Atlanna, le retour d'Orm, ou encore l'arrivée de Darkseid, le temps semblait manquer. Terriblement. Pour ne pas s'embourber dans cette abîme de non-réponses, et d'incompréhension, elle balaya le sujet. En classe, elle joua son rôle d'institutrice à la perfection, enseignant, transmettant sa passion. Les enfants ne lui avaient jamais paru comme les gosses terribles qu'à la surface les adultes critiquent parfois. Non, entourée des petits atlantes assagis par leurs parents, elle s'était sentie à l'aise. Mais, la question. La question de cette brunette à l'imagination débordante, elle transperça Mera en pleine poitrine. Les enfants, la question était un atome crochu, une particulaire dans l'air. La question était là, mais on ne savait pas où gratter pour la rejeter. Alors, elle restait là, dans un coin de la tête de madame Curry; sans réponse, sans but, sans conclusion. Pour seul écho; des points de suspension dans lesquels le temps se suspendait.
Griffonnant de leur plume, les filles et garçons se tuaient au devoir d'écouter et de comprendre. La magie atlante était indéfinie, chacun y trouvait son confort, sa voie, son plaisir. Les phrases s'enchaînaient pour décrire au mieux cette énergie illimitée, aux idéaux variables. Aux dernières minutes quand les élèves s'alignent pour sortir en précipitation de la classe, une lourde voix détonne. Cette voix, plus charnelle que les chants des sirènes. Cela faisait si longtemps qu'elle n'avait pas entendu avec tant d'attention cette mélodie. Ils s'étaient croisés, sûrement, brièvement embrassés en oubliant même pour quel sentiment, ils s'accordaient un tel baiser. Le temps de se revoir leur avait cruellement manqué, l'entendre, le voir, le toucher, c'était une idylle d'un instant. Elle ne put donc réprimer son enthousiasme, et Mera dans son élan, se pressa pour coller son corps contre le sien, sa tête contre son épaule. Humer son parfum. Sentir sa chaleur. Rester là dans ses bras pour l'éternité. Elle s'éloigna finalement de quelques maigres pas, et reprit en lui accordant un sourire rayonnant: « Très. Ca s'est bien passé, avec tes amis? ». Ses prunelles bleutées s'attardèrent sur le sol, avant qu'elle ne relève son visage pour poursuivre du même ton amoureux que tant d'années plus tôt: « Tu m'as manqué, ces derniers temps. »
Le jour où il avait fait face à Mera, il devait avouer qu’il avait été surpris. Déjà de par sa tenue, mais aussi du fait qu’elle arrive de l’océan et qu’elle maîtrise l’eau comme elle l’avait fait pour combattre des ennemis qu’elle semblait connaître. Arthur, forcément n’ayant pas encore découvert la vérité, avait trouvé la jeune femme forte, déterminée et il fallait bien le dire, extrêmement belle. Elle lui avait donné de l’espoir sur le fait qu’il puisse revoir sa mère. Puis, sur le fait qu’il était fait pour être le roi. Elle l’avait soutenu et été là pour lui dès qu’il en avait eu besoin. Il ne pourrait d’ailleurs jamais assez la remercier pour tout ce qu’elle avait fait pour lui. Arthur lui en serait éternellement reconnaissant. D’ailleurs, il était particulièrement content qu’elle s’entende bien avec les autres membres de la Justice League. Bon d’accord, il y avait les fois où Arthur s’emportait dans les bars avec Jason et là Diana et Mera n’étaient pas forcément contentes de les voir, mais il savait que son épouse serait là pour lui malgré tout. C’était sans doute pour cela que son état devant ce bébé l’amenait à penser qu’il pourrait se voir père. Le sien avait été le meilleur. Il avait toujours tout fait pour lui et même s’ils n’avaient pas été riches, Arthur avait été très heureux. Alors peut-être qu’il pourrait lui aussi devenir père. Il devait avouer que cette envie ne datait pas d’aujourd’hui, mais il l’avait toujours refoulé. En particulier parce qu’en étant roi et membre de la Justice League, ça ne serait pas simple de passer du temps avec son enfant ou il faudrait le protéger de leurs ennemis.
C’était un argument de plus pour que Orm et Black Manta décide de s’en prendre à lui et il ne le voulait pas. De plus, il n’en avait encore jamais discuté avec sa femme. Peut-être qu’elle ne sentait pas prête ou qu’elle n’avait pas envie d’enfants. Quoi que vu la façon dont elle se comportait avec ceux de ses cours de magie, il se disait que ça ne pourrait pas être un problème. Après avoir passé du temps à la surface, Arthur fila donc à Atlantis. Il avait plusieurs choses à faire et en particulier avec le conseil. Une fois ses charges de roi accomplies, il partit voir sa chère et tendre. Le laissant continuer ce qu’elle faisait avec ses élèves, il resta donc en retrait pour la regarder faire. Tout le monde semblait écouter et c’était une très bonne chose. Puis, une fois le cours terminé, il laissa tout le monde sortir, avant de rejoindre son épouse tout en lui demandant si les élèves avaient été attentifs. En la voyant venir rapidement vers lui, Arthur ne pû s’empêcher de sourire et il passa un bras autour des épaules de la rousse pour la garder contre lui, avant qu’elle ne recule un peu.
Oui très bien. Ils ont une magnifique petite fille.
Evidemment, il évita de parler de la façon dont il s’était comporté avec la demoiselle et du rire de son amie. Aux paroles de la jeune femme, il soupira doucement.
Tu m’as manqué aussi.
C’était malheureux qu’ils ne puissent pas passer autant ensemble qu’ils en avaient vraiment envie.
Pour une fois que Atlantis est plutôt tranquille, c’est la surface qui a besoin de moi. Avec tout ce qui se passe, je sais que la Justice League aura besoin de moi à un moment donné, mais d’ici là, on peut essayer de se voir plus.
N’ayant jamais du genre à baisser les bras, il comptait bien se rattraper. Mera lui manquait et il allait se battre pour son couple. Elle était importante à ses yeux, alors il ferait en sorte de lui trouver plus de temps.
Que fais-tu ce soir ? Nous pourrions dîner ensemble.
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