À force de jouer avec le feu, on finit par se brûler les doigts. Mais jouer avec Amanda Waller, cela revient à plonger volontairement la main dans le brasier. Rosie le sait très bien, mais elle n'a pourtant pas hésité quand Lucian lui a demandé de le rejoindre au pied de l'immeuble de Steve Trevor. Quelque chose se trame au sein de l'agence, quelque chose de terrible. Et Rosie n'a pas eu besoin de prescience pour le deviner, il lui a suffit de faire attention aux détails des dernières missions, et à sa façon de réorganiser l'agence. À croire qu'elle n'attendait que cela, une excuse pour secouer A.R.G.U.S et tout bouleverser. L'élection de Luthor à la tête du pays n'est qu'une façon pour elle de justifier ses changements – non pas que quiconque ait osé lui demander des comptes, cela reviendrait à se porter volontaire pour passer à la guillotine. Mais n'est-ce pas exactement ce que Lucian et elle s'apprêtent à faire, en s'alliant à d'autres pour mettre à jour les manigances de Waller ? C'est peut-être la meilleure chose à faire, d'un point de vue humain, moral et éthique, mais... Les répercussions seront forcément désastreuses, parce que personne n'échappe à Amanda. Personne. Une fois dans l'appartement de Steve, que Rosie ne connaît pas aussi bien que Lucian, elle s'empresse de se mettre dans un coin, là où elle est certaine que personne ne la touchera par mégarde. La dernière chose qu'elle veut, c'est apprendre comment les uns ou les autres vont finir leurs existences. Méfiante malgré tout, elle fait un rapide tour des esprits présents pour s'assurer que personne ici n'a l'intention de les trahir en les dénonçant à Waller à la première occasion donnée. Quelque peu rassurée, Rosie écoute Lucian entamer la conversation et dévoiler la précieuse clé USB contenant toutes les données convoitées par Amanda. S'ils n'ont pas encore étudié ce qu'elle contient, elle a tout de même de nombreuses informations à leur dévoiler. « Waller m'a envoyée à ce congrès parce qu'elle savait que je pourrai fouiller tous les esprits présents et... Eh bien, disons que mon esprit à moi fonctionne un peu comme une clé USB, lui aussi. Beaucoup de choses sont floues, je n'ai pas encore fait le tri dans tout ce que j'ai appris, mais j'en sais assez pour avoir pu en déduire certaines choses. » Elle prend une profonde inspiration. Elle déteste être le centre de l'attention, mais cette fois elle n'a pas le choix, c'est pour le bien commun. « Tous ces gens là bas travaillaient en particulier sur la génétique méta-humaine, mais pas uniquement. La plupart des scientifiques présents conduisaient des expérimentations illégales allant à l'encontre de toutes les règles de l'éthique. Modifications de l'ADN, expériences in utero, introduction du gène méta-humain sur des cobayes, calibration cognitive, clonage... Ce genre de choses. Et le plus préoccupant, c'est que toutes ces... recherches... sont très avancées. » Entre les mauvaises mains, ces recherches pourraient avoir de terribles conséquences. Et celles d'Amanda ne sont-elles pas les pires de toutes ? Parce qu'avec elle, tout est méticuleusement calculé, elle ne fait rien sans avoir au moins une dizaine de plans de secours. « Elle a dit qu'elle réactiverait des anciens programmes... Steve, est-ce que vous savez desquels il s'agit ? Si elle voulait toutes ces données sur des recherches scientifiques, je suppose qu'elle n'a pas rouvert un programme d'entraînement militaire, ou autre chose du même genre. » Quelque part, Rosie se sent idiote. Toutes ces informations, elle aurait pu les obtenir en s'introduisant elle-même dans l'esprit d'Amanda, sans qu'elle ne le sache jamais – ou du moins, pas immédiatement. Mais il faut croire que ses principes, elle les applique en toutes circonstances. Peut-être va-t-elle devoir se forcer à changer cela, si cela peut les aider – voire les sauver. Mais en attendant, elle n'a pas l'intention de se faire remarquer, et se contentera de suivre le même chemin que Lucian.

Steve ne croit pas au karma. Pourtant ces derniers temps, le numéro deux a l’impression que ledit karma lui fait payer quelque chose. Quelque chose dont il n’est même pas au courant, mais quelque chose tout de même. Dont l’événement déclencheur a été l’élection de Lex Luthor à la tête du pays. Cet événement, aussi surprenant que révoltant, a surtout été une excuse pour Amanda de mettre à exécution ses desseins. Couper les maigres liens avec la Ligue, rendant ainsi son rôle d’agent de liaison caduque, restructurer l’agence gouvernementale seule et surtout, embrasser la politique anti-métahumains que veut mettre en place Luthor. Tout ceci a été la goutte d’eau pour Steve. Lui qui a déjà vu d’un très mauvais œil la formation de la Suicide Squad, et d’un plus mauvais œil tous les secrets et le caractère particulier d’Amanda, a très mal pris tous ces changements. A.R.G.U.S. s’en va dans une direction qu’il n’apprécie pas du tout et cette fois, il n’arrive pas à rester les bras croisés. Mais seul, numéro deux de l’organisation gouvernementale ou pas, Steve sait qu’il ne peut rien faire. Seul, à part créer une immense dispute avec la numéro une qui, in fine, ne l’écoutera pas, il n’arrivera à rien. Et surtout seul, il sait que les risques sont bien trop grands. Il n’est pas assez fou pour confronter Amanda seul de cette manière, sauf s’il rêve d’échouer. C’est pour cette raison qu’indirectement depuis quelques temps maintenant, Steve s’entoure de personnes de confiance. Qu’elles soient d’anciennes ou de nouvelles recrues, l’ancien pilote sonde et analyse et fait attention à tous ses faits et gestes. Cela n’est pas par hasard qu’il a approché puis recruté Calypso Goodwin. Cela n’est pas par hasard qu’il ne s’est entouré que d’une équipe restreinte d’agents lorsqu’il s’est retrouvé à devoir sauver une certaine blonde d’un kidnapping. Rien n’a été laissé au hasard et cette fois, Steve sait qu’il est temps de passer à la vitesse supérieure.

Steve lâche un soupir, observant son salon bien vide. Une semaine que cette « certaine blonde » est partie. Sans un mot, sans un au revoir. Sans même prendre du temps de parler. En cinq mois, Steve s’est habitué à ne pas retrouver un appartement complètement vide le soir. A la retrouver elle, aussi compliquée soit-elle. Pourtant, cela ne l’a pas empêchée de s’enfuir comme une voleuse (quelle ironie, franchement), mettant ainsi sa vie personnelle au même niveau que la professionnelle : celui du chaos. Un chaos impressionnant que Steve n’a pas vraiment eu le temps d’anticiper et qu’il doit maintenant gérer. Autant dire que lorsque le numéro deux décide, après plusieurs échanges avec Lucian Thorne, de l’accueillir – ainsi que d’autres agents dont il a pleinement confiance – chez lui pour leur première réunion secrète, il est loin d’être dans la meilleure des configurations. Mais il n’a pas le luxe de laisser ses émotions contrôler quoi que ce soit.

Dès les premières heures de sa matinée de repos, il s’est attelé à s’occuper l’esprit, que ce soit en réalisant son entraînement sportif quotidien ou en passant du temps derrière les fourneaux pour ses invités – réunion secrète au sommet ou non, il ne peut tout de même pas les accueillir de manière spartiate. Steve en profite également pour contacter Tracy – une avocate, en qui il a pleinement confiance, n’étant pas de refus si besoin est – et lui demande de venir sans lui donner trop de détails. Sa sœur accepte sans se faire prier, retenant ses interrogations derrière ce simple SMS de réponse. Car une voix dans sa tête essaye encore de le dissuader, lui soufflant que c’est une folie. Mais cette voix, aussi persistante soit-elle, n’arrive pas à le convaincre. Y compris lorsque Steve se doit d’ouvrir au premier agent arrivé. Si c’est une folie, pourquoi est-ce la meilleure chose à faire ?

Les personnes conviées arrivent et s’installent dans son salon les unes après les autres. Steve les salue tous de manière presque protocolaire (y compris Goodwin et Thorne) dans cet appartement qui, en si peu de temps, en a vu de toutes les couleurs. Mais alors que la discussion commence, sa sœur, aussi à l’heure que le Lapin Blanc d’Alice au Pays des Merveilles, manque à l’appel. Assis parmi les autres agents conviés, Steve ne peut s’empêcher de regarder sa montre nerveusement pendant que Lucian parle. Que fait-elle, bon sang ?, pense-t-il tout en compilant les informations données à la fois par Lucian et Rosalie. Congrès de scientifiques fétichistes des métahumains. Expérimentations illégales sur des cobayes métahumains, dont la modification de l’ADN et du clonage. Des données à récupérer. Plus les discours des deux agents continuent, plus les sourcils de Steve se froncent et sa réflexion augmente. Recherches très avancées et un besoin de données ? Oh non. Elle n’a pas osé…

Trois coups sont alors frappés contre sa porte peu de temps après que Rosalie l’interpelle sur d’anciens programmes. Le cœur de Steve rate un battement pour deux raisons : la première par apaisement de savoir que sa sœur n’était qu’en retard (ça ne peut être qu'elle derrière la porte, il le sait), la seconde par effroi. Evidemment qu’Amanda a osé. « Malheureusement, tout ceci ne me dit rien qui vaille et… Un instant, excusez-moi. » Steve répond tout en se dirigeant vers sa porte d’entrée. Après avoir vérifié par le judas que la personne derrière est bel et bien sa sœur, Steve ouvre à Tracy avec un petit sourire. « Ça n’est pas grave, entre vite. », rétorque-t-il plutôt rapidement. Il referme la porte derrière elle alors qu’elle se présente et explique la raison de sa venue. « Comme l’a dit Lucian, quitte à faire une chose aussi stupide que de s’opposer à Amanda, autant essayer de se protéger de manière légale avec une vraie avocate à nos côtés. Bref, voici ma sœur, qui est avocate et qui peut être également utile pour autre chose que l’aspect légal. » Ne dévoilant pas que sa sœur est métahumaine avec des pouvoirs pouvant les aider s’ils vont jusqu’au bout de leur folie, Steve retourne s’installer à sa place avant de continuer. « Reprenons. Cette histoire de clonage, modification génétique et autre joyeusetés me rappelle un seul programme que je pensais complètement terminé : CADMUS. Le fameux programme à l’origine de Superboy et qui est loin d’en être à son premier coup d’essai, donc. » Steve se passe une main sur son visage dans un soupir. Que compte-t-elle faire exactement ? De nouveaux Superboy ? Ou alors des métahumains dangereux ? « Que contiennent les données récupérées sur la clé, Lucian ? » La fameuse clé usb. Leur seconde vraie piste pour comprendre ce qui se cache derrière la nouvelle folie d’Amanda Waller. Et peut-être un moyen de pression pour contrecarrer ses plans et l’évincer pour de bon.

Rosie est nerveuse, elle a presque l'impression qu'Amanda est là, quelque part, à les observer et à attendre le moment idéal pour bondir et leur annoncer qu'elle va détruire leurs vies pour avoir osé songer à s'opposer à elle. Comme si elle était la seule personne au monde à pouvoir échapper à sa prescience. Elle imagine des scénarios tous plus improbables et apocalyptiques que les autres, et c'est justement à ce moment là qu'on frappe à la porte de l'appartement ; Rosie sursaute comme si le Diable en personne venait d'apparaître devant elle. Instinctivement, elle tend son esprit vers celui de la personne derrière la porte, et retrouve son calme lorsqu'il s'agit de la sœur de Steve. Cependant, sa présence la laisse songeuse. Aucune avocate au monde ne ferait le poids face à Amanda Waller, qui travaille à présent main dans la main avec le Président. Mais quand Rosie comprend que Tracy est méta-humaine, elle fronce les sourcils, se demandant si elle pourra réellement les aider, ou si elle ne vient pas de se jeter dans la fosse aux lions sans le réaliser. Elle écarquille les yeux quand elle entend parler du projet CADMUS. Elle sait qu'elle sait quelque chose sur le sujet, mais il faut qu'elle retrouve les informations dans son esprit embrouillé par des milliers de pensées étrangères. Quand elle voit Lucian sur le point de brancher la clé à un ordinateur, elle a un sursaut de conscience. « Enlève la carte wi-fi. Si Waller a placé un logiciel espion sur l'ordinateur, déconnecté du réseau il ne pourra pas envoyer d'informations sur cette cession, le système restera fermé. Cela nous fera gagner un peu de temps, même si les données sont envoyées plu tard. À moins que vous n'ayez plus l'intention d'utiliser cet appareil, Steve... » Les bras croisés sous sa poitrine, elle reste auprès de Lucian tout en conservant ses distances avec les autres individus dans la pièce pour éviter le moindre contact physique. Elle continue à fouiller sa mémoire pendant plusieurs minutes, et quand elle met la main sur les informations qu'elle voulait, elle s'éclaircit doucement la gorge. « Au congrès, il y avait un généticien qui a travaillé sur le projet CADMUS pendant qu'il était actif. Il était financé par Lex Luthor dans sa quasi totalité, les laboratoires du projet étaient à Lexcorp. CADMUS a donné naissance à Superboy, mais il y a eu de nombreux ratés, c'est tout sauf une chose aisée de chercher à recréer et modifier différents ADN pour les combiner. Je crois que le projet a été abandonné après le passage de Darkseid sur Terre, mais je n'en suis pas certaine. » Elle regarde Steve ; certains détails sont flous dans son esprit. « Luthor devient Président et Waller réactive le projet, ce n'est pas une coïncidence... Mais elle, elle ne veut pas des Superboy, elle veut des Superman. » Cela lui semble évident. Elle veut toujours plus, toujours plus puissant, toujours plus efficace. « Et si elle cherchait à créer sa propre... je ne sais pas, race de méta-humains, des soldats surpuissants qui n'obéiraient qu'à elle ? » Un programme illégal de clonage, associé à des recherches sur la calibration cognitive. C'est plus que probable, et Amanda n'aurait pas de scrupules à pousser la science au maximum, sans se soucier de l'éthique. Rosie sait qu'elle est capable de tout, ayant elle-même été victime de sa soif de pouvoir. « Écoutez, je... Je ne suis pas un soldat et je n'ai rien d'une super-héroïne, mais... Je crois pouvoir nous faire gagner du temps. Je peux forcer Waller à regarder ailleurs, la mettre sur de fausses pistes, occuper son esprit avec d'autres pensées, l'inciter à faire certaines choses sans qu'elle ne le réalise. » Elle soupire. « Du moins, pas tout de suite. » Puisque Waller étant Waller, elle le saura forcément un jour ou l'autre. Et elle le lui fera payer très, très cher. Mais ce n'est pas le moment de manquer de courage.

Alors que Lucian sort la fameuse clé usb de sa poche, Steve se dirige dans sa chambre pour récupérer un de ses ordinateurs. Un mini-ordinateur qu’il n’utilise que rarement et beaucoup plus sûr que ce que sa petite taille peut le laisser croire. Durant ce laps de temps, le numéro deux ressasse. Le projet CADMUS, s’il se souvient bien, impliquait également Lex Luthor. Est-il une nouvelle fois de mèche dans toute cette histoire ? Egalement, a-t-il bien fait d’impliquer Tracy dans tout ça ? Oui elle a des pouvoirs qui peuvent leur être utiles d’une manière ou d’une autre mais… Est-elle réellement prête ? Si Steve imagine les pensées de sa petite sœur (sûrement aux anges d’être impliquée dans une histoire pareille), il sent une pointe de regret monter. Mais il est trop tard pour faire machine arrière. Steve chasse alors la pensée du mieux qu’il peut lorsqu’il apporte l’ordinateur portable à Lucian. « Ne vous inquiétez pas, Rosalie, ce PC n’a jamais vu l’ombre d’un réseau Wi-Fi. Je ne m’en sers que très rarement et en plus d’être hors connexion, il est loin d’être la victime d’une des lubies dangereuses d’Amanda. Tu peux brancher ta clé USB sans te soucier de quoi que ce soit, Lucian. » Steve comprenait parfaitement les précautions de l’Homo Magi – il aurait eu le même réflexe chez quelqu’un d’autre et avec un autre ordinateur. Mais de la même manière qu’Amanda, Steve n’a jamais rien laissé au hasard. Et certainement pas maintenant qu’ils comptent faire un coup pareil. Il leur adresse un sourire compréhensif alors que Lucian continue ses manipulations. Nerveux, bien qu’il ne le montre pas, Steve se déplace derrière la chaise de Lucian alors que Rosalie continue de fouiller dans ses souvenirs. Projet financé par Lex Luthor, ça il le savait malheureusement déjà – et se contente d’hocher la tête d’un air grave. Steve croise son regard tandis qu’elle continue. Au moment où Rosalie annonce qu’Amanda veut des Superman plus que des Superboy, quelque chose se connecte dans son esprit. « Des Superman ? J’ai bien peur qu’elle ne cherche pas à se contenter de plusieurs Superman mais bien de plusieurs répliques de membres de la Ligue. A croire que le Syndicat lui a donné des idées… Et pour les contrôler… Elle trouvera sûrement un moyen, je ne pense pas que ce soit sa priorité première là. Puis je crois que le projet s’est terminé car Superman est intervenu… », réagit-il d’un ton grave. Peut-être doit-il songer à contacter Clark pour savoir.
Dans tous les cas, Steve est bien placé pour savoir qu’Amanda a toujours cherché à avoir la main mise sur les héros. La pensée sinistre de plusieurs Diana, Clark, Hal et Barry – pour ne citer qu’eux – obéissant aux ordres d’Amanda, s’impose dans l’esprit de Steve. Et cette fois, la coalition des Ligues de Justice et Injustice ne se ferait pas pour les contrer…

Lucian demandant de l’aide fait revenir Steve sur Terre. « Laisse-moi regarder… » Les yeux de Steve parcourent l’écran à la recherche d’un nom familier. « Là, regarde ce dossier ! », dit-il en pointant du doigt le dossier portant le nom de « Hermione ». Sans qu’il ne cherche comment, un souvenir s’impose dans la mémoire de Steve en lisant le nom de ce dossier. Cadmus et Hermione… Une tragédie lyrique de Lully dont ses grands-parents étaient férus. Steve se souvient des nombreuses discussions qu’ils pouvaient avoir sur le sujet, avec son lui petit en simple spectateur (et en ayant surtout marre d’entendre parler de cette maudite tragédie). Il lève la tête vers Tracy. « Tu te souviens ? Cadmus et Hermione… Je ne pensais pas que ça me serait utile un jour… » Il reporte à nouveau son attention sur Lucian, étonné de se souvenir de cette référence du passé. « Clique dessus, je suis sûr de moi. » Alors que Lucian s’affaire, Rosalie reprend la parole. Steve relève la tête et recroise le regard de Rosalie. « Comment comptez-vous la mettre sur une fausse piste ? Je suis certain que je peux vous aider pour la convaincre de certains faits, ayant plus facilement accès à son bureau que vous autres en tant que bras droit. » Tout ce qu’il leur faut maintenant est un plan d’action. « Des informations intéressantes, Lucian ? »

Rosie grimace. C'est vrai, elle est capable de faire faire n'importe quoi à n'importe qui. Si elle le voulait, elle pourrait demander à l'un des agents présents de sortir son arme, la pointer sur sa tempe et presser la tête, et il le ferait en étant persuadé que l'idée venait de lui. Rosie elle-même est parfois effrayée par ses capacités encore mal maîtrisées ; que se passerait-il si un jour, elle incitait malgré elle quelqu'un a faire quelque chose de terrible ? Qui n'a jamais dit quelque chose comme "va au diable" sans réellement le penser ? Le problème, c'est que rares sont les personnes à pouvoir comme elle ordonner absolument tout ce qu'elle veut à d'autres, et quelques pensées un peu trop piquantes pourraient rapidement influencer son don et déclencher de véritables catastrophes. Elle ne serait hélas pas la première à sous-estimer ses pouvoirs. Même Waller, elle n'a pas envie de la tuer par accident, quand bien même cela réglerait efficacement leur problème. Mais Rosie n'est pas une tueuse, et encore moins une meurtrière. Les sourcils froncés, elle se concentre de nouveau sur leur affaire. Quand Lucian annonce qu'Amanda a trouvé la bonne formule, elle réfléchit quelques secondes avant de lui répondre. « Non, pas "la" formule, une formule. Souviens-toi de ce que nous avons appris des recherches des Ashcroft. Le gène méta-humain modifie spécifiquement l'ADN de chaque personne. Il existe autant d'ADN méta-humains que de méta-humains, puisque le gène en active une partie dormante ou en modifie une autre... Donc, l'ADN de Flash n'est pas le même que celui de Killer Frost, par exemple. » Être télépathe et capable d'absorber les pensées des autres a peut-être une utilité, en fin de compte. « Et puis c'est sans compter les différentes races... L'ADN d'un Kryptonien est différent de celui d'un Olympien, celui d'un Olympien différent d'un Atlante, celui d'un Atlante différent de celui d'un Martien, et ainsi de suite. Elle a réussi une fois, reste à savoir quel ADN ses scientifiques ont été capables de répliquer. » Quoi qu'il en soit, Rosie n'est pas certaine de vouloir faire face à une armée de ces choses là. Que Waller veuille posséder les moyens de neutraliser la Ligue de Justice était déjà bien assez effrayant, mais qu'elle possède sa propre version de l'équipe... Cela lui fait froid dans le dos rien que d'y penser. « Attendez... Attendez... Les récits des témoins publiés dans le Daily Planet à propos du "géant" de Washington n'avaient-ils pas en commun que la plupart des gens sont persuadés que la créature avait un regard incandescent, des yeux rouges et ce genre de descriptions... ? » Rosie pâlit quand elle pense commencer à comprendre avec quel ADN Waller a joué. « Le projet CADMUS est à l'origine de Superboy, et Luthor a créé un autre clone de Superman, le Bizarro dont nous avons beaucoup entendu parler dans la presse... Superman et le reste de la Ligue ont récupéré ces deux malheureux êtres, mais... Cela veut dire qu'en fusionnant CADMUS avec A.R.G.U.S, en passant un accord avec Luthor, Waller a eu accès à ses ressources. Elle a eu accès à l'ADN kryptonien, et aux recherches de CADMUS et de Luthor sur le clonage de cet ADN. » Les premières pièces du puzzle se mettent en place, mais l'image finale n'a rien de rassurant. « Je crois que c'est le résultat réussi de ses tentatives de clonage qui se promène dans les rues de Washington. » Un probable simulacre de Superman, avec tous les dangers que cela représente pour la population. « S'il possède ne serait-ce qu'un dixième de la force de Superman, ce ne serait pas étonnant qu'il soit parvenu à s'échapper. » Connaissant Waller, elle doit soit essayer de récupérer son expérience, soit chercher à l'abattre pour ensuite étouffer l'affaire et prétendre qu'elle n'a jamais existé. Rosie a l'impression de sentir son sang geler dans ses veines quand elle se souvient que les Kryptoniens sont vulnérables à la magie. Amanda n'oserait-pas... Oh mais à quoi pense-t-elle. Bien sûr, qu'elle oserait.

A nouveau, comme si cela est un synonyme de toute cette réunion, Steve fronce les sourcils. Car si la révélation de Lucian au sujet de Rosalie ne devrait pas l’inquiéter, il ne peut s’empêcher d’être heureux que l’agent soit de leur côté. Rentrer dans la tête des gens et leur imposer ce qu’elle veut ? Cela lui semble être à la fois un pouvoir dangereux à manipuler avec parcimonie et une malédiction. Ses traits se détendent cependant en remarquant la grimace qui se dessine sur le visage de la concernée. Cette réaction confirme ses dires : une malédiction et un très grand pouvoir à la fois. Et quelque part, Steve ne l’envie pas. « Très bien. Il nous faudra nous organiser plus tard sur la manière de procéder alors, Rosalie. Car vous envoyez seule au front, si on veut, n’est pas une option. Je pourrais jouer le rôle de back-up si jamais quelque chose cloche avec vos pouvoirs pour x raison. » On ne sait jamais ce qu’il peut arriver face à Amanda Waller, y compris quand elle vous a à la bonne, pense-t-il.

Son attention est alors à nouveau reportée vers Lucian et l’écran d’ordinateur. Les documents défilent et se ressemblent. Jusqu’au moment où Lucian tombe sur quelque chose d’intéressant. Des rapports sur des tests et expérimentations. Evidemment. Par réflexe, Steve se rapproche de l’ordinateur, à l’affût de la moindre information utile. Les rapports s’enchaînent et les voir tous au statut « Failure » le rassure bien plus qu’il ne l’aurait espérer de prime abord. Au moins, elle est encore loin d’avoir des résultats concluants, songe-t-il naïvement. Jusqu’à ce dernier rapport qui affiche un statut différent. « Success ». Le numéro deux s’écarte de la chaise de Lucian en jurant dans sa barbe. Il passe sa main sur son visage, agacé et dépité. Malgré le lot d’échec, un reste tout de même concluant. Et avec Amanda, Steve sait pertinemment qu’une réussite suffit. Lucian, tout aussi défaitiste, se fait cependant reprendre par sa collègue de division. Ce n’est pas la formule, mais une formule. Celle liée au gène du héros cloné. Steve n’a pas le temps de formuler sa question que Rosalie enchaîne : à qui appartient cet ADN ? « Je peux ? », s’enquit-il auprès de Lucian, qui lui laisse la souris, pour fouiller le dossier Hermione ainsi que les rapports. A l’intérieur, il doit sûrement y trouver l’indice qu’ils cherchent. A peine a-t-il le temps d’effectuer quelques clics sur l’un des rapports en échec que ses sourcils se froncent – une nouvelle fois, décidément. « Le géant de Washington ? » Steve relève la tête et fixe Rosalie. Depuis sa débâcle avec les médias, Steve évite de lire le plus possible les nouvelles dans les journaux – y compris celles publiées dans le Daily Planet, désolé Clark – et est donc passé à côté de ces rumeurs, et est visiblement le seul. Heureusement, Rosalie continue son explication et la main de Steve qui tient la souris d’ordinateur se crispe, comprenant où elle veut en venir. Encore une fois, elle a réussi à cloner l’ADN de Superman. Mais cette fois, le clone semble bien plus dangereux que Superboy voire Bizarro. « Pour l’arrêter, il nous faudrait surtout une énorme cargaison de kryptonite et je ne suis pas certain qu’il y en ait assez pour lui… », répond-il à sa sœur. Au début de cette réunion, jamais Steve n’aurait cru que la situation serait aussi grave et dangereuse. Désormais, il n’est plus question que de la mégalomanie d’Amanda et de ses nouvelles directives. Il faut maintenant prendre en compte un géant en pseudo-cavale avec de l’ADN kryptonien qui terrorise tout le monde. Joie. Steve rend alors l’ordinateur à Lucian et commence à réfléchir. Contacter Clark aurait été la meilleure chose à faire si et seulement s'ils voulaient que l'affaire s'ébruite. et qu'Amanda sache ce qui se trame. Chose que personne ici présente, lui y compris, ne souhaite. On ne prépare pas un pseudo coup d'état contre la numéro une pour que toute la Terre soit au courant. « Il nous faut récupérer les données des anciennes expériences de CADMUS pour ne pas à avoir à impliquer qui que ce soit d'autres. Ca n'est clairement pas anodin que le clone avec de l'ADN kryptonien ait fonctionné, quand on sait que ce n'est pas la première fois... » Steve parcourt alors les contacts de son téléphone à la recherche du seul ingénieur informaticien d'A.R.G.U.S. en qui il a confiance pour cette tâche.