hellblazer - all trenchcoat and arrogance

Ni Dieu, ni maître – du moins c’est ce dont on essaye de se convaincre dans ce bas monde où rien ne va plus et tout fout le camp. Pourtant, personne n’est mieux qualifié que John Constantine pour rappeler à l’humanité, non sans sarcasme, qu’elle est tous les jours menacée par des forces terrifiantes qui la dépassent complètement. Et que si Dieu existe, c’est un beau sagouin pour les laisser mariner là-dedans. Bonjour, John Constantine, détective de l’occulte, pessimiste notoire et teigne blasphématrice, à votre service.

John est né à Liverpool au même moment que le mouvement punk, fils de la classe ouvrière et de ces blue collars désargentés et désillusionnés auxquels Ken Loach rend hommage dans chacun de ses films. S’il commence la vie au ras des pâquerettes, cette dernière décide très tôt de l’enfoncer plus bas que terre en le privant de sa mère, Mary Anne, morte en lui donnant naissance. Un matricide aux yeux de son père trahi et brisé par sa propre chair et son propre sang, un meurtre que le petit John commence à payer dès le début en négligences, puis en maltraitance dès que le daron se sent capable de lui mener la vie dure sans le tuer d’une bête torgnole. Affublé du surnom acerbe de « tueur », le môme n’a d’autre choix que d’endurer les sorties au pub (quotidiennes) de son alcoolique désespéré de père et d’attendre son retour, qui se solde sans jamais déroger à la règle à une salve de coups (de préférence sur la tête – Constantine en a conclu que c’est pour ça qu’il a la tête dure) et de brûlures de cigarettes sur le bras quand le vieux se sent d’humeur plus pernicieuse. Des mauvais traitements que la sœur aînée de John, Cheryl, doit aussi endurer, et auxquels elle décide de faire un doigt d’honneur en s’enfuyant de la maison alors que John n’est encore qu’un jeune adolescent.

Un abandon que son père lui fait d’autant mieux payer et qui pousse le jeune homme, au bord de la rupture, à s’absorber dans l’étude de l’occulte et la découverte de la magie, trouvant son échappatoire dans l’idée folle d’un jour réussir à ramener sa mère d’entre les morts. Son premier exploit consiste à enfermer son innocence et sa vulnérabilité d’enfant dans une boîte – se débarrassant ainsi de ce qui, à ses yeux, le rendait faible face à son monstre de géniteur et se placerait en travers de son chemin dans sa quête de puissance magique. A seize ans, enfin, John défonce la porte de sa cage : après une nouvelle dispute avec son père durant laquelle celui-ci a décidé de brûler ses livres de magie, le garçon cède à l’appel de la vengeance et jette une malédiction à son paternel, le réduisant à l’état de vieillard faible et agonisant, avant de prendre la poudre d’escampette. Après avoir erré un peu partout en Angleterre, c’est à Londres qu’il s’installe définitivement à l’âge de dix-sept ans, faisant la rencontre de Chas Chandler, son colocataire, et depuis meilleur ami. Le seul encore en vie à l’heure actuelle.

C’est à cette époque que John fait ses premiers pas dans la scène punk londonienne, et commence à prendre ses galons de magicien. Alcool, drogues, sex and rock’n’roll, John s’adonne à tous les vices  et se perd à l’occasion dans les vapes de la magie noire qu’il n’a jamais cessé d’étudier sous l’œil attentif et vaguement concerné de Chas. Gagnant son pain à grands renforts d’arnaques dans lesquelles il excelle, John n’écoute que son envie de liberté et d’aventure et s’envole pour San Francisco, où il fait la rencontre du duo de magiciens et couple Zatanna Zatara et Nick Necro. Eux aussi sorciers, d’un calibre bien au-dessus de celui de John, ce dernier s’accroche à leurs basques et refuse de les quitter jusqu’à ce qu’ils lui aient enseigné leur savoir. Une symbiose nouvelle s’installe dans le trio, chacun nourrissant les ambitions et talents des deux autres, les complétant dans une harmonie inédite pour Constantine… qui ne peut s’empêcher de tout réduire à zéro en entamant une relation avec Zatanna. Lorsque Nick découvre la tromperie, John sait qu’il n’échappe que de peu à un destin pire que la mort – et c’est sans se retourner, mais le cœur lourd et la tête pleine de connaissances de l’occulte qu’il revient à Londres et reprend sa vie avec Chas. Désormais un sorcier confirmé s’étant frotté à démons, esprits et autres succubes, John prend de l’assurance et n’hésite pas à prendre de plus en plus de risques dans ses études, s’aventurant dans les territoires les plus dangereux du monde démonique, à ses risques et surtout à ses périls. Ses acolytes de l’occulte, Chas Chandler, Beano, et Gary Lester le rejoignent aussi dans une toute autre aventure, celle des Mucous Membrane, leur groupe de punk avec lequel ils partent en tournée et qui leur sert de couverture dans leurs aventures héroïques de l’occulte. Du moins, jusqu’à l’incident de Newcastle.

Il est tellement trop facile de se croire invincible quand on est trop malin même pour les démons de l’enfer.

Les années passent, les Mucous Membrane prennent de l’assurance et Constantine se taille un nom dans ce milieu de l’occulte qui est maintenant le sien, véritable figure de proue du paranormal et du surnaturel, digne descendant des Laughing Magicians qui ont peuplé son arbre généalogique et se moquent des dieux et des démons depuis des générations. John et son gang, accompagnés d’Anne-Marie (une de leurs camarades de la scène à l’époque) interviennent dans une cérémonie occulte particulièrement glauque, durant laquelle une jeune enfant, Astra, douée elle aussi de pouvoirs magiques, a par accident invoqué un démon pour se venger des terribles sévices que les adultes présents lui ont fait subir – mais, trop jeune et inexpérimentée, elle n’a pas pu résister au démon qui a fini par prendre possession d’elle. Persuadé de pouvoir la tirer de ce pétrin, John a une idée brillante : invoquer un autre démon, plus puissant, pour se débarrasser de celui possédant Astra. Las, le démon Nergal tire profit de la maladresse de John et de sa bande, et après avoir délivré Astra, la tue dans d’atroces souffrances et l’entraîne avec lui en Enfer, damnant son âme à une tourmente éternelle. Un échec désastreux qui marque John et ses acolytes au fer rouge – le poids de la culpabilité si lourd que John se fait internet à l’asile de Ravenscar, dans l’espoir que les traitements radicaux tels que les électrochocs finiront par effacer ces terribles souvenirs de sa mémoire. En vain : John ne fait que s’enfoncer de plus belle dans la dépression, la souffrance, et les remords. Ses comparses de Newcastle ne veulent plus entendre parler de lui… et franchement, il peut difficilement les blâmer.

Une poignée d’années passent, John quittant et revenant à Ravenscar, avant qu’enfin une affaire ne le force à sortir de l’enfer personnel dans lequel la mort d’Astra l’a enfermé. Constantine décide de reprendre les choses en main, sort pour de bon de l’hôpital, et rendosse son trenchcoat démoniaque pour faire face à de nouvelles menaces qui ont réussi à l’atteindre même dans l’enceinte de Ravenscar. Le détective de l’occulte reprend du poil de la bête et se jette à tête perdue dans le travail, renouant avec son unique ami restant, Chas, et formant avec lui un nouveau duo de justiciers qui refuse de se considérer comme tel.

Quittant l’Angleterre, John rejoint les Etats-Unis où l’activité magique est à son comble, entre apparitions monstrueuses et démoniaques, super-héros, magiciens de ce monde et d’autres, dieux et entités immortelles. Clope au bec et sarcasme au coin des lèvres, Constantine s’aventure dans ce monde dans lequel il détonne tant, avec son bagout et sa débrouillardise pour meilleures armes. Bon gré mal gré, il s’associe avec les uns, trahit les autres à coups de pieds au train, se dresse entre l’humanité et les pires horreurs que l’Enfer a en réserve, les regardant droit dans les yeux avant de leur cracher à la tronche et les renvoyer d’où ils viennent.

Néanmoins, tout le sarcasme et la débrouillardise du monde ne suffisent pas face aux évènements qui se déchaînent sur le monde. Si John est sorti de Ravenscar juste à temps pour être témoin de l'invasion de Darkseid et participer, dans l'ombre, à la lutte contre ses paradémons (un nouveau challenge pour un Constantine un brin rouillé après ses séjours sous éclectrochocs), il décide de se mettre à l'écart des évolutions politiques et planétaires qui s'ensuivent, laissant soin a la Justice League de finir de régler tout ce fatras pendant qu'il s'occupe des quelques saletés surnaturelles qui ont pu survivre à la défaite de Darkseid. Conscient que toute cette lumière soduainement jetée sur les méta-humains et non-humains ne peut qu'apporter des déboires sur le long terme, il se planque et voyage de ville en ville, reprenant ses enquêtes en compagnie du fidèle Chas lorsque celui-ci trouve une minute à lui consacrer. Deux ans plus tard, John ne suit les attaques de l'Horloger et la chute de popularité de la Ligue que par les journaux, secouant la tête en se demandant celle de qui sera la première à rouler une fois qu'on commencera à leur demander des comptes un peu plus extrêmes. Fin juillet 2017, Constantine est forcé de sortir de sa tanière lorsque le Syndicat du Crime émerge et se met en tête de bloquer le Soleil avec la Lune - si le Tsunami Neptune et le refroidissement climatique n'étaient pas assez alarmants, les ténèbres qui gagnent la planète entière grâce à Ultraman favorisent les ténèbres d'en-dessous. Démons et autres entités maléfiques gagnent en puissance, et le passage entre notre monde et le leur se fait de plus en plus facile d'accès. Au milieu de cette crise mondiale, Hellblazer n'a d'autre choix que de colmater les brèches du mieux qu'il peut, usant s'il y est forcé de la coopération de la Justice League et son pendant des ténèbres. Une collaboration plus ou moins forcée qui propulse John dans le monde des héros - et lui donne amplement l'opportunité de se faire quelques ennemis de plus sur la route. Quand enfin le soleil revient en Janvier 2018, John se prend à espérer pouvoir prendre un peu de vacances - tout en se doutant que les vacances, dans ce milieu, ne sont qu'une chimère inaccessible.

John Constantine est une foutue saleté, mais entre Gotham, Star City et Metropolis, et leurs ligues de héros en collant et en une des journaux, faut bien quelqu’un pour donner un coup de pied dans la fourmilière et s’occuper de la saleté à laquelle même Superman refuse de toucher, pas vrai ?

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