Sweet Spices [Feat. Donna]

Assise sur le siège totalement inconfortable de l'amphithéâtre principal, tu mordillais le bout de ton crayon tandis que tu peinais à rester concentrer sur le cours du jour. D'ordinaire, tes cours d'histoire te passionnaient, et en plus tu adorais ce professeur, mais là... là il s'agissait d'un sujet que tu connaissais déjà par cœur. Un sujet que tu avais déjà traité pour un devoir, il n'avait donc plus aucun secret pour toi. Il n'y avait pas à dire Kara Kent, tu t'ennuyais ferme en cette belle après-midi où le soleil trônait dans le ciel bleu de Métropolis. Tu te laissais alors à rêver que tu n'étais plus ici, coincée entre quatre murs, à écouter ce que tu savais déjà, mais libre comme un oiseau au grès du vent. Tu esquissais un sourire avant de réajuster tes lunettes sur ton nez. Si seulement les autres autour de toi savaient que tu n'en avais absolument pas besoin. Comme Clark, il ne s'agissait là que d'une panoplie, un accessoire pour préserver ta véritable identité. Car si pour beaucoup tu n'étais que la naïve et studieuse Kara Kent, étudiante en quatrième année à lunettes, jeune femme bien sous tout rapport qui ne sort jamais des clous, tu étais en réalité bien plus que cela. Tu étais Supergirl. Cousine de Superman, une des dernières survivantes de la planète Krypton. Tout comme ton cousin, tu avais développé des pouvoirs extraordinaires au contact du soleil jaune. Tu étais puissante, encore trop inexpérimentée, mais puissante. D'ailleurs, tu commençais à te dire que tu perdais réellement ton temps dans cet amphithéâtre. Tu pourrais tellement être ailleurs à t'entrainer, à te perfectionner. Au lieu d'être là à bailler littéralement toutes les cinq minutes. Tu ne pouvais pas tolérer cela, non, tu ne pouvais pas te permettre de perdre une seule seconde quand tu pouvais devenir meilleure. C'était inacceptable! Sécher les cours? Ce n'était clairement pas dans tes habitudes. Non, toi, Kara Kent, tu étais célèbre pour être ponctuelle et assidue... L'élève parfaite, l'élève modèle. Bon sauf quand tu loupais une flopée de cours pour sauver le monde... Ce qui était parfaitement excusable n'est-ce pas? Mais le reste du temps, tu ne manquais jamais et encore moins sans la moindre raison. Mais il était temps aussi que tu profites un peu de ta liberté non? Et puis, tu ne faisais rien de mal. Au contraire, tu transformais une perte de temps certaine en une après-midi constructive et productive. Tu devais penser à Kara Kent mais tu devais aussi penser à Supergirl. Bon d'accord, c'était plus des arguments pour te déculpabiliser qu'autre chose tout ça mais ça marchait plutôt bien et ça te suffisait amplement.

Tu n'y tenais donc plus, tu envoyais un sms à ton amie Donna Troy, la personne avec laquelle tu appréciais le plus t'entrainer au monde. Vous vous étiez rencontrés cinq ans auparavant, lorsque Kal-El t'avait confié à Diana de Themyscira pour apprendre à contrôler tes nouveaux pouvoirs. Tu t'étais alors retrouvée perdue au milieu des Amazones, dans un monde que tu ne connaissais pas, encore traumatisée, meurtrie et terrassée par la perte du tien. Tu avais tout perdu lorsque Krypton avait explosé et pour toi, pour toi c'était comme si c'était hier. Tu avais été mise en stase profonde à l'intérieur de ta navette. Celle-ci avait dérivé pendant trente ans et quand tu étais arrivée sur Terre il y a cinq ans, pour toi, c'était comme si tu venais de quitter Krypton. Comme si tu venais tout juste d'étreindre pour la dernière fois tes parents. C'était dur, très dur, et tu avais beaucoup pleuré. Mais Donna... Donna avait été l'Amazone qui s'était le plus occupée de toi. Elle avait senti ta détresse et ton chagrin. Elle avait été comme une sœur pour toi, elle avait pris soin de toi, elle t'avait consolé, elle t'avait remotivé. Elle t'avait aidé à te relever, à trouver un but à ta vie. Kal-El n'avait plus besoin de toi, tu n'avais plus de mission. Comme si tout cela n'avait servi à rien. Mais Donna t'avait aidé à comprendre que ce n'était pas le cas, que tu pouvais devenir quelqu'un, que tu pouvais avoir une vie et un but sur Terre, car ce monde était désormais le tien et il avait beaucoup à t'offrir comme toi tu avais beaucoup à lui offrir. Jamais tu n'oublierais tout ce qu'elle avait fait pour toi. Bien sûr, les autres Amazones avaient elles aussi été là pour toi. Ils existaient entre elles une sublime solidarité féminine dont tu avais largement bénéficié. Mais Donna avait été celle qui t'avait indubitablement le plus marqué, celle dont tu t'étais sentie la plus proche. Tu avais d'ailleurs pour habitude de t'entrainer avec elle à l'époque, elle t'avait appris beaucoup de choses qui t'avaient grandement aidé, et qui t'aidaient grandement encore, dans ton rôle de Supergirl. C'était elle aussi qui t'avait soutenu après ta terrible défaite face à Ocean Master. Cette terrible défaite où tu avais bien failli sombré dans l'obscurité. Donna avait toujours été là pour toi comme tu avais toujours été là pour elle. Tu espérais donc qu'encore une fois, elle répondrait à ton appel. Un appel beaucoup moins solennel et beaucoup plus agréable, tu lui proposais simplement une petite séance d'entrainement cette après-midi, histoire de vous dégourdir un peu les jambes et de perfectionner tes attaques et ta défense. Ce serait aussi l'occasion de vous retrouver pour un chaleureux moment de rires et de complicité, comme toujours lorsque vous vous retrouviez. Tu lui avais donc envoyé ce sms: "Salut Donna! Ça te dit une séance d'entrainement cet aprem? Si t'es libre rejoins moins au Starbucks à côté de ma fac".

Et sans attendre une seconde de plus, tu t'éclipsais discrètement à l'extérieur de l'amphithéâtre. Tu faisais un petit coucou à tes amis et tu disparaissais. Tu te rendais alors au Starbucks du coin. En chemin, tu avais reçu une réponse de Donna. Elle te rejoignait, elle serait là dans quelques minutes. Tu commandais alors deux boissons pour l'accueillir comme il se devait. Tu savais ce qu'elle aimait, tu ne pouvais donc pas te tromper. Puis, tu t'installais à la terrasse et tu attendais sagement que ton amie te rejoigne.

La désolation demeure le maître mot de ce nouveau monde. L’absence, le déni, probablement l’usurpation et l’insécurité gravent petit à petit chacune des âmes survivantes de l’apocalypse. Les cavaliers agissent surement dans l’ombre et rappellent combien l’équilibre ne tient qu’à un fil. Ce fil, qui, vacille vers une tendance puis une autre jusqu’à l’instant présent. La survie est pourtant victorieuse, l’Espoir conquérant, mais persiste ce malaise général duquel le silence accroit sa posture dangereusement. L’attente n’en devient que plus impatiente alors que les groupes se forment de-ci de-là les parcelles de chaque ruelle. Il se faut rapidement trouver une solution et cette dernière requiert évidement l’intervention de sa sœur, Diana. Donna appose sa confiance entière en sa personne et la suit déjà sans même qu’elles n’aient eu à échanger un seul mot. L’Humanité dépend des tournures à venir, des alliances et des combats qui ramèneront très certainement un réel équilibre dans cet espace, sur cette Terre. Les Hommes ont besoin de stabilité et il est hors de question que l’Amazone reste en retrait. Elle tient à les aider, à leur apporter une once de bien être pour ainsi leur permettre de perdurer encore. Parce que les Hommes sont sources de meilleur et d’espoir, qu’ils agissent toujours en suivant leurs instincts, ce même instinct qui leur a prouver à tous à quel point la confiance était belle. Partenaires jusque dans les moments les plus difficiles métahumains et hommes trouvent toujours résonnance dans leurs agissements pour permettre la survie, ce à quoi tous aspirent en réalité. Alors, assise sur l’un des fauteuils de son studio, la brune étudie les quelques plans rapportés depuis son retour du Mexique. Elle y appose des intentions tantôt succinctes, tantôt plus élaborées, dans lesquelles la bonté gagne toujours. Oh oui elle gagnerait, par Zeus, elle le promet déjà à l’ensemble de ses convictions. Parce qu’il ne peut en être autrement. Une alliance serait surement à rapprocher dans l’avenir et elle se hâte déjà de participer à la réunion. Elle espère simplement que les messages seront réceptifs, ainsi que les chemins semblables. Elle ose l’espérer, elle se doit de le faire pour Diana, pour Themyscira, pour ses sœurs, pour l’Humanité. Le tintement de son téléphone la sort de ses pensées. Lui annonce l’arrivée d’un nouveau message et l’amène à rapidement détourner ses onyx pour les apposer sur l’écran à peine illuminé. Un sourire la gagne en lisant l’émetteur ou plutôt l’émettrice de ce dernier : Kara. L’ironie de l’affaire tend à agrandir son sourire puisqu’elle entrevoit déjà l’espoir de la jeune fille. Cette étincelle fait écho à la sienne et embrase déjà ses ardeurs pour l’inciter à lire la missive. Le rire lui échappe, heureuse de retrouver des attitudes qui ne changent pas dans ce chaos. Elle s’empresse de pianoter à son tour sur son écran. Salut Kara, je me dépêche, j’arrive. A tout de suite. Sa réponse est brève, mais elle sait d’ores et déjà combien leurs retrouvailles seront une bouffée d’air pour elles. L’Amazone ne tarde pas à ramener ses affaires, les rassembler pour mieux les ranger, avant de rattraper ses effets personnels et s’extirper du studio.

Elle siffle un taxi à la mode qu’elle a pu apprendre dans ce monde. Le véhicule jaune et noir ne tarde pas à s’arrêter et voilà qu’elle lui indique l’adresse pour rejoindre au plus vite l’une de ses plus grandes amies. Pour ne pas dire sa meilleure. Parce que Kara est celle qui sait lui redonner le sourire et ce qu’importe les circonstances, celle dont l’espoir fait écho au sien et dont l’attitude ne cesse de lui donner de belles leçons sur le meilleur. Son aura est telle qu’elle apparait comme une véritable bienveillance, un cœur encore quelque peu naïf des habitudes terriennes mais à qui personne ne peut enlever la bonté grandissante qui en ressort. Frêle d’apparence, la blonde est en réalité une véritable force dont la nature n’a de cesse que de grandir encore et encore. Donna se souvient encore de ces longues séances durant lesquelles toutes les deux ont pu entreprendre des débats sur tout et n’importe quoi. Des conversations riches de sens à même de développer ce lien si fort qui les unie aujourd’hui : une amitié sincère et unique. Aussi, tout comme pour Nathaniel, Donna ne peut s’empêcher de répondre à l’affirmative dès lors que Kara la réclame. Elle accourt sans se faire attendre plus longuement et s’impatiente à l’idée de la rejoindre.

Le taxi s’arrête en double file, l’Amazone paye le chauffeur et rejoint rapidement l’intérieur de l’enseigne américaine. Il ne lui suffit que d’un seul balayage d’ensemble pour la trouver, pour que son sourire s’immisce sur ses lèvres d’une manière sincère et confiante. « Salut la plus belle. » n’hésite-t-elle pas à l’interpeller avant de se rapprocher pour l’étreindre amicalement. Les natures humaines ont eu raison d’elle depuis longtemps et si Donna se montre méfiante devant les inconnus, elle sait être beaucoup plus avenante pour ses amis. « Comment te portes-tu ? » Rajoute t-elle tout en admirant l’état général de sa petite protégée. Car même si elle reste sa meilleure amie, il n’en demeure pas moins qu’elle ne peut s’empêcher de la couver telle une grande sœur. Puis sont regard se dévie et trouve les gobelets bien installés à table. « T’as déjà commandé… » débute t-elle sur ce même ton riche de joie de la retrouver en continuant de prendre place sur sa chaise. «… le caramel macchiato, mon préféré. » Son sourire n’en devient que plus grand au moment où elle rapproche le dit café et hume ses effluves. « Merci. » lui témoigne t-elle avant de finalement regarder directement Kara. « T’as vraiment envie de t’entraîner toi ! » commente t-elle tut en retrouvant ses attitudes naturelles à chaque fois qu’elle est avec la jeune Kryptonienne. Elle se hâte déjà d’y aller, mais attends d’entendre les attentes de sa meilleure amie dans l’éventualité où elle aurait déjà un plan à lui proposer.