Welcome to my world [Feat. Jason]

Time is but a concept when I'm with you.

You are the flame in my heart
You light my way in the dark
You are the ultimate star...

Le son n'était pas optimal à travers le simple baffle de sa radio à dynamo, ce qui n'empêchait pas Jason de bouger en rythme sur la douce mais puissante basse de Lenny. Entre deux pas de danse il observait son lit, sur lequel il avait posé deux chemises, une blanche et une bleue marine, se demandant laquelle il allait mettre. Quelque chose lui disait que Rayna allait opter pour quelque chose de sombre. Ce n'était "que" le quatrième rendez-vous entre eux mais depuis leur première rencontre il avait commencé à cerner ses goûts. Et comme pour le coup il avait envie de jouer le contraste, il opta pour la chemise blanche, qu'il endossa toujours en rythme, sans discontinuer. La touche de couleur serait légère, venant de son pantalon et du gilet sans manche, qu'il avait choisi dans les tons crème. Là encore la basse dictait le tempo de ses mouvements, même pour mettre le pantalon, qu'il enfila d'un petit bon bien placé dans une pose limite sortie d'une comédie musicale. Sur le refrain il ne put s'empêcher de chanter en coeur avec Lenny, profitant de l'harmonie pour masquer les imperfections de sa propre voix. Ne restait plus qu'à retrousser ses manches, glisser la ceinture dans les boucles de son pantalon, mettre sa montre et lasser ses bottines, avant d'apporter les dernières touches devant son miroir. Face à son reflet il le voyait clairement, il était.. Heureux. Malgré la crise générale, le climat anxiogène, l'inquiétude qu'il avait face à l'arrivée plus ou moins proche de Brainiac, à chaque fois qu'il s’apprêtait à passer du temps avec Rayna, tous ses soucis s'envolaient. Le simple fait de penser à elle soulageait son esprit, imaginer le temps qu'il allait passer à ses côtés l'emplissait d'une énergie positive. Concrètement, ils n'avaient encore rien fait de spécial, aucune véritable étape n'avait été franchie, mais Jason s'en moquait. Rien que parler avec elle suffisait à le mettre en joie, il apprenait à la connaître, sans barrière, elle s'était ouverte à lui et chaque conversation était un régal. De son côté il en avait également révélé un peu plus, lui expliquant son ascendance divine, expliquant ses pouvoirs sur l'air, ainsi que son lien avec Diana, sa soeur jumelle. C'était assez drôle de tomber sur quelqu'un qui ne tombait pas des nues face à cette information, pour Rayna Wonder Woman était certes un nom qu'elle avait entendu mais dont la portée lui échappait un peu, étant encore assez nouvelle sur "Midgard". Le concept de dieux et autres panthéons lui était aussi un peu étranger, mais après quelques explications ce n'était pas non plus super compliqué à comprendre, du moins en surface...

Allaient-ils franchir une étape malgré tout, ce soir? Certes Jason se disait qu'il s'en moquait, mais la question lui effleurait tout de même l'esprit. Il avait remarqué au fil de leurs rendez-vous, Rayna n'avait pas beaucoup d'expérience avec ce genre de chose, peut-être même aucune. Face à ce constat Jason ne voulait pas la brusquer, il préférait lui laisser la main, s'adaptant à son rythme. En même temps, il n'était pas impossible qu'à cause de son inexpérience, Rayna n'osait tout simplement pas faire le premier pas, ou attendait-elle possiblement qu'il vienne plutôt de Jason. L'attirance entre eux était toujours bel et bien là, elle s'intensifiait même, c'était certain. Il fallait juste ce premier geste qui enclenche la machine pour de bon... Sur le coup là devant son miroir, Jason se demanda si ce n'était pas effectivement à lui de faire quelque chose à ce sujet. Enfin bon, pas la peine de se stresser là-dessus non plus, les choses arriveraient si elles devaient arriver, un point c'est tout. Il devait plutôt penser au rencard en lui-même, et ce qu'il avait préparé pour l'occasion. A bout de souffle, la radio dynamo s'éteignit toute seule, il était temps de se mettre en route.
Comme il l'avait escompté, Rayna avait opté pour une robe sombre. Le style était contemporain, un peu différent de son habitude, mais néanmoins fort élégant. Jason en était déjà au stade où même si elle portait un vieux pyjama trop large il la trouverait superbe, mais çe ne l'empêchait pas d'être ébloui par son choix du jour. Pour le moment il trichait un peu, il attendait au coin de la ruelle le moment précis où elle lui tournerait le dos, et lorsque ce fut le cas, il se faufila discrètement vers elle, la surprenenant d'un petit son de clochette. Attendez, quoi? Entre ses mains, un guidon. A côté de lui un cadre, deux roues, des pédales, un vélo quoi. Un petit sourire aux lèvres il exécuta une petite courbette, annonçant gaiement:

"Mademoiselle, votre carrosse est avancé. Enfin, carrosse..." Il marqua une petite pause comme pour observer sa réaction. Il se permit néanmoins de reprendre. "Tu en as peut-être déjà vu depuis ton arrivée mais juste au cas où, ceci est un vélo, ou bicyclette. Une invention du dix-neuvième siècle qui a rapidement su s'imposer comme un moyen de transport populaire depuis. En ville c'est plutôt uniquement les coursiers qui s'en servent pour se faufiler dans la circulation mais c'est généralement plus un outil de promenade, surtout ce genre de modèle. Je me suis dis, vu le nombre réduit de véhicules motorisés en ce moment, c'est l'occasion de t'emmener faire un tour puisqu'aujourd'hui, nous allons au parc." En début de soirée oui, le parc, pourquoi pas. Evidemment il y avait bien plus que ça au programme, mais Jason préférait garder la surprise. Comme il venait de l'annoncer, il s'agissait là d'un vélo essentiellement destiné à la promenade. Il y avait le petit panier de circonstance à l'avant (rempli, d'ailleurs, mais couvert) et le porte bagage sur l'arrière, qu'il avait pour le coup arrangé pour que Rayna puisse s'y installer plus ou moins confortablement. Il se doutait bien que la robe n'était pas l'attirail idéal pour être sur un vélo, mais assise jambes d'un seul côté, ça allait pouvoir le faire sans trop de mal. Il l'invita donc à prendre place, avant d'ajouter: "Pour l'aller c'est moi qui conduit mais si tu le souhaites sur le retour je peux t'apprendre comment ça se contrôle. Ca a l'air compliqué au début mais une fois qu'on comprend le principe, ça vient tout seul... Il faudra juste peut-être faire quelque chose par rapport à ta robe, sublime au passage, mais je ne doute pas que tu puisse conjurer temporairement quelque chose de plus approprié le moment venu."
Jason ne doutait pas que pour l'instant, Rayna devait être assez confuse. Il espérait tout de même qu'elle joue le jeu et se laisse emporter, vers ce qui n'était que le début de ce qui s'annonçait comme une merveilleuse soirée...  

Jason avait donc décidé de t'emmener au Centennial Park. Tu l'avais bien évidemment reconnu. Il s'agissait là d'un choix intéressant qui laissait encore planer tout son mystère. Car ce parc, tu le connaissais, tu l'avais déjà arpenté. Et même si tu devais admettre qu'il était d'une beauté à couper le souffle, il n'avait rien de particulier à tes yeux, tu le connaissais déjà en long, en large et en travers et Jason le savait. Tu te demandais alors vraiment pourquoi il l'avait choisi pour ce quatrième rendez-vous. Jusqu'ici il ne semblait avoir fait aucun choix par hasard, te surprenant à chaque fois. Chaque rendez-vous avait été une découverte, une surprise et un véritable plaisir. Tu ne doutais donc pas un seul instant qu'il en serait de même ce soir mais pour la première fois, même en arrivant sur les lieux, tu ne savais vraiment pas à quelle sauce tu allais être mangée. Tu étais très excitée de découvrir ce que Jason t'avait réservé. Tu lui avais demandé la suite du programme, il s'était contenté d'embarquer son vélo afin de s'engouffrer dans le parc avec. Il te disait alors d'être encore un peu patiente. Tu souriais. La patience n'était pas forcément ta principale qualité, mais avec lui, tu savais l'être, patiente. Tout simplement parce que sa seule présence te suffisait, tout le reste autour n'était que du bonus, du superflus néanmoins toujours agréable car il savait comment te toucher, comment te faire plaisir. Tu avais l'impression qu'il te connaissait si bien. En fait, et tu en prenais réellement conscience à cet instant précis, en te faisait cette réflexion, il était tout simplement la personne qui te connaissait le mieux et ce parmi toutes les dimensions. Tu lui avais tout dévoilé de toi, ou presque, et ce qu'il ne connaissait pas encore de toi, personne d'autre ne le connaissait et tu avais bien prévu de lui dévoiler à lui et à lui seul.

Tu allais devoir marcher pour découvrir ce qu'il t'avait concocté. Parfait, la nuit était propice à cela, douce et étoilée. Jason te tendait alors son bras, tel un vrai gentleman. Tu aimais cette facette de lui, toujours élégant, attentionné et distingué. Pourtant, sur Arcadia, tu détestais les nobles de la Cour, toujours bien apprêtés et trop courtois. Mais avec Jason, ça n'avait rien à voir. Lui, il était différent. Oui il prenait soin de lui, oui il avait un certain niveau de vie. Il connaissait les bonnes manières et savait les appliquer. Mais il n'avait rien de l'arrogance ou de l'égocentrisme de ceux que tu méprisais à Arcadia. Il n'avait rien à voir avec les gens de la Cour. Jason, lui, était un homme humble, simple et modeste. Il était attentionné, généreux et altruiste. Il était naturellement élégant sans aucune prétention ou vanité. Il ne faisait signe d'aucune vantardise ou mépris envers les autres. Il était un homme profondément bon et respectueux, doux et bienveillant. Tu aimais tout de lui, absolument tout. Et ce soir, quand tes yeux se posaient sur lui, ils brillaient d'une lumière qui ne trompait pas... tu étais entrain de tomber amoureuse de lui Rayna Brodveldt, éperdument amoureuse de lui. C'était la première fois que tu ressentais cela... Tu étais alors aussi enthousiaste que perdue, impatiente et prudente. Tu ne te faisais donc pas prier un seul instant pour prendre délicatement son bras. Tu aimais de plus en plus te sentir proche de lui, la gêne et la timidité laissant progressivement place au plaisir et au désir. Chaque contact, même infime, devenait alors un précieux instant que tu gravais dans ta mémoire en attendant le prochain.

Une fois devant la statue de Superman, tu peinais à détacher tes pensées de Jason. Honnêtement, ce que le super héros venu de Krypton pouvait faire, tu n'en avais strictement rien à faire à cet instant précis. Tu n'avais d'yeux que pour Jason. Tu avais tout de même jeté un œil à la statue et écouté ce qu'il avait à en dire, par pure politesse... Mais clairement, ton esprit était ailleurs. Cette soirée était à vous, rien qu'à vous, et la seule personne qui t'intéressait ce soir, c'était lui. Vous poursuiviez ensuite votre chemin et, à ta grande surprise, le parc était encore bien animé pour l'heure tardive. Tu avais d'ailleurs bien failli te faire bousculer au passage mais le pire avait été évité. Tu riais alors en voyant ces enfants se poursuivre, ils étaient adorables. Ça te rappelait ta propre enfance. Combien de fois avais-tu bousculé les passants en courant à toute vitesse à travers le marché de la grande place? Tu affichais un large sourire nostalgique en y repensant. Cette époque te manquait. Une époque d'insouciance où tu étais le plus simplement du monde heureuse. Mais grâce à Jason, tu l'étais tout autant, du moins ce soir. Car ce soir, tu avais décidé d'être à nouveau insouciante, tu avais décidé d'oublier tous tes problèmes auprès de l'homme qui faisait chavirer ton cœur. Qu'il était doux et agréable de se laisser aller ainsi, pour une fois. C'est alors que tu vis une lanterne, puis une autre et encore une autre. La surprise n'était plus qu'à quelques pas et ton regard s'illuminait d'avantage. Sans t'en rendre compte, tu pressais légèrement le bras de Jason, tu trépignais d'impatience. Quelques instants plus tard, ta patience était enfin récompensée et tu découvrais plusieurs stands, semblables aux échoppes que tu connaissais à Arcadia. C'était bien sûr différent, d'une autre époque, mais l'ambiance y était et tu étais émue. Quelle merveilleuse surprise encore une fois. Tu étais très touchée par l'attention de Jason. Il avait eu vent de cette installation et il avait tout de suite pensé que ça te plairait. Il avait tapé dans le mille.

Le décor était chaleureux, conviviale, simple et lumineux. C'était tout simplement magnifique et incroyablement romantique. Tu avais l'impression que vous étiez seuls au monde et tu aimais ce sentiment que lui seul parvenait à t'insuffler. A ses côtés, c'était comme si plus rien ne pouvait t'atteindre, comme si tous tes problèmes disparaissaient en fumée. Tu étais heureuse Rayna, tout simplement heureuse. « C'est merveilleux Jason. Je suis conquise... Et je ne parle pas que du décor... » Disais-tu en esquissant un sourire malicieux avant de lui lâcher le bras. Tu sous-entendais bien évidemment que c'était lui, surtout et avant tout lui qui t'avait conquise. Tu t'éloignais alors de lui pour te rapprocher des échoppes et en découvrir tous les divertissements. Tu avais envie de tout voir, de tout essayer, de tout goûter. Mais Jason t'annonçait alors qu'il te laissait les commandes pendant une demie-heure, pas plus, c'était court, beaucoup trop court pour profiter de tout. Mais tu savais que s'il avait un timing aussi précis, c'était qu'il t'avait prévu autre chose. Et cette simple idée faisait disparaitre la frustration de ne pas pouvoir profiter d'avantage de tous ces stands. Tu allais donc devoir bien choisir ce que vous alliez faire ce soir. Mais comment te décider? Toutes ces choses étaient si nouvelles pour toi. Jason t'annonçait ensuite le reste du programme. Vous alliez donc aller regarder un film en plein air. Tu avais entendu parler de ce genre de séances cinéma et tu étais ravie de pouvoir essayer, tu étais certaine que ça serait très agréable. La soirée que Jason avait prévu était absolument parfaite. Il terminait alors par dire qu'il était entre tes mains, n'omettant pas de souligner qu'il te trouvait belle. Tu étais ravie de l'entendre le dire, tu aimais savoir qu'il te trouvait séduisante. Tu avais besoin de savoir qu'il te trouvait séduisante. Tu revenais alors vers lui, prenant ses mains dans les tiennes, plongeant ton regard dans le sien. Mais, comme si tu ne contrôlais plus rien, tes yeux se posaient sur ses lèvres, tu avais irrésistiblement envie de l'embrasser, là, maintenant, tout de suite. Tu pinçais tes lèvres pour te retenir car tu n'osais pas... Et si ce n'était pas le bon moment? Et si lui ne voulait pas? Et si tu gâchais tout?

Tu forçais alors ton regard à revenir vers ses yeux, espérant qu'il n'ait rien deviné de ton désir charnel. « Merci Jason. Cette soirée est vraiment parfaite. Personne ne s'est jamais donné autant de mal pour moi. J'espère pouvoir un jour te rendre la pareille. J'en ai très envie. » Tu devais parler, dire quelque chose pour faire disparaitre ce désir ardent de presser tes lèvres contre les siennes. Alors tu avais laissé parler ton cœur. Et si cela ce n'était pas une invitation à te laisser prendre les rennes pour votre prochaine sortie... ça y ressemblait beaucoup. En tout cas une chose était sûre, toi aussi tu avais très envie de le surprendre, de lui faire plaisir en organisant quelque chose qui l'enchanterait comme il t'enchantait encore une fois ce soir. « Mais avant, j'ai très envie de goûter... ça! » Tu te retournais subitement, gardant une des mains de Jason dans la tienne, l'entrainant avec toi vers un stand de... Barbe à papa, était-il écrit en grosses lettres sur une pancarte. C'était amusant, très rose et ça sentait délicieusement bon. Une fois ton tour arrivé, tu demandais une grosse barbe à papa pour deux, tu comptais bien la dévorer avec Jason. Tes yeux brillaient de mille feux lorsque le vendeur te donnait la friandise sur un bâton. Tu esquissais un sourire gourmand. « Pourquoi ce nom étrange? » Demandais-tu à Jason. Il savait tellement de choses, tu étais certaine qu'il saurait t'expliquer pourquoi une barbe à papa s'appelait une barbe à papa. Tu avais vu les gens autour de vous en manger, tu savais donc qu'il suffisait d'en arracher délicatement un morceau pour le mettre dans ta bouche et... hum... c’était effectivement délicieux, doux, aérien et sucré. Tu avais l'impression de manger un petit nuage rose. « Hum... Moi j'aurais plutôt appelé ça le petit nuage rose sucré trop bon... » Disais-tu amusée en tendant la barbe à papa vers Jason pour qu'il puisse se servir. « Mais c'est vrai que c'est beaucoup moins vendeur et un peu trop long. » Ajoutais-tu en plaisantant. Puis, tu te précipitais vers un autre stand, tu savais que le temps t'était compté. Tu n'avais pas une seule seconde à perdre. Ce jeu avait l'air très amusant, tu ne le connaissais pas du tout, contrairement au chamboule tout qui était juste à côté. Là, sur cette pancarte, il était écrit "Jeu de la taupe". Tu ne savais pas du tout de quoi il pouvait s'agir mais tu mourrais d'envie de le découvrir. « Dis moi tout. Qu'est-ce qu'il faut faire? » Demandais-tu enthousiaste à Jason.

AVENGEDINCHAINS

Jason s'était montré favorable à l'idée que tu prennes les choses en main pour votre prochaine sortie en tête à tête. Car c'était certain, ce rendez-vous ne serait pas le dernier. Tu étais consciente de l'attirance que Jason pouvait ressentir pour toi, il te semblait même la ressentir de plus en plus au fil de vos rencontres. Mais il était tout de même plaisant et rassurant de constater que lui aussi envisageait déjà un prochain rendez-vous. Ton cœur palpitait à nouveau. Tu songeais d'ailleurs brièvement à ce que tu pourrais lui préparer, tu avais déjà quelques idées en tête, tu y réfléchirais avec beaucoup plus d'attention plus tard. Ce n'était ni le moment ni l'endroit. Tu voudrais assurément lui concocter quelque chose de parfait, quelque chose à la hauteur, à sa hauteur. Tu devrais donc t'y atteler sérieusement et longuement. Or, ce soir, tu avais bien l'intention de profiter de Jason et de toutes ces merveilleuses choses qu'il t'avait préparé. Il n'y avait pas de place pour d'autres pensées. Quelques instants plus tard, et ce à ta demande, il se lançait dans une explication au sujet de la dénomination de la barbe à papa. Tu esquissais un large sourire amusé et complètement séduite lorsqu'il entamait, sans même hésiter un seul instant, son exposé. Il était incroyable... si intelligent, si cultivé. Ça faisait indéniablement parti de son charme et tu ne te lassais jamais de l'écouter encore et encore. Tu pouvais lui poser n'importe quelle question, sur n'importe quel sujet, il connaissait la réponse. Cinq mille ans à fouler cette Terre, il la connaissait assurément mieux que personne. Quelle délicieuse coïncidence que ton cœur se soit amouraché d'un tel homme. Toi qui avait toujours rêvé de percer tous les secrets de Midgard... Tu ne pouvais pas mieux tomber que sur Jason Clay. Mais à ses côtés, ce n'était plus la Terre et ses secrets qui importaient, non, c'était lui et lui seul. Il avait ce pouvoir hypnotisant qui te faisait tout oublier, comme s'il n'y avait plus que lui qui comptait et tu aimais cela. Tu aimais tout ce que Jason pouvait te faire ressentir. Et même si tu en appréhendais parfois les conséquences car tu n'avais jamais connu cela, pour rien au monde tu ne ferais marche arrière. Au contraire, tu avais envie d'avancer avec lui, d'approfondir votre relation. Tu espérais simplement que ton inexpérience et ton manque d'initiative qui en découlait ne le ferait pas fuir ou abandonner. Tu savais qu'il ne te forcerait à rien, tu savais qu'il irait à ton rythme, qu'il te respecterait toujours, mais tu savais aussi qu'un homme avait des besoins et des désirs. Surtout un homme expérimenté comme Jason. Il avait passé l'âge des amourettes ou des simples flirts qui trainaient en longueur. Tu avais donc peur, terriblement peur qu'il ne se lasse de ta candeur. Tu ne voulais pas le perdre mais tu ne voulais pas non plus jouer un rôle. Tu voulais rester toi même, tu savais d'ailleurs que c'était exactement ce qu'il attendait de toi, comme c'était exactement ce que tu attendais de lui. Tu espérais simplement que cela serait suffisant pour le garder près de toi.

Vint ensuite le jeu de la taupe. Tu adorais ce genre de stand, tu les avais toujours adoré, surtout lorsqu'il s'agissait de jeux que tu n'avais jamais eu l'occasion de tester. Et c'était le cas ce soir. Tu étais sincèrement enthousiasmée à l'idée de découvrir un nouveau divertissement, visiblement typique de Midgard qui plus est. Ta barbe à papa dans une main, le maillet dans l'autre, tu écoutais avec attention les instructions de Jason. Il s'était placé derrière toi, glissant sa main sur la tienne, comme lorsqu'il t'avait fait découvrir sa fresque. Et de la même manière que ce jour là, un frisson t'avait parcouru l'échine au simple contact de vos deux peaux. Mais très vite, tu avais porté toute ta concentration sur ces petites taupes rapides et vives comme l'éclair. Le jeu s'était révélé très amusant et toi plutôt douée. Entre deux parties, tu avais donné ta barbe à papa à Jason, histoire d'avoir les mains libres et toutes tes chances de ton côté. Ce qui s'était avéré payant au final, car si tu avais laissé quelques taupes t'échapper au premier tour, tu avais fait un sans faute au second, remportant une belle récompense au passage. Une demi-heure plus tard, vos bras s'étaient drastiquement chargé de friandises et peluches en tout genre. Tu n'avais pas eu beaucoup de temps pour profiter de tout, mais tu l'avais largement rentabilisé. Tu t'étais beaucoup amusé et tu avais eu l'impression qu'il en avait été de même pour Jason. Oui, cette demi-heure avait été un instant très agréable et complice entre vous. Tu avais énormément apprécié. Mais il était désormais temps de passer à la suite du programme et vous vous dirigiez donc vers la zone où le film allait être projeté. Tu étais encore une fois toute excitée. Tu avais hâte que Jason te révèle le contenu du panier et aussi très hâte de voir quel film était programmé. Une fois sur place, tu étais ravie de voir que vous étiez un peu à l'écart des autres spectateurs. Tu avais envie de partager un moment spécial avec Jason, un moment plus intime. Le choix de l'emplacement était donc parfait et tu étais très satisfaite.

Une fois les peluches et friandises posées au sol, Jason mettait tout en place et tu ne pouvais qu'observer, c'était sa surprise à lui et encore une fois il avait visé juste. La nappe, le panier repas, la lanterne, le film... C'était tout simplement
idyllique. Oui, décidément, il était le premier à se donner autant de mal pour toi. Et c'était un franc succès. Pas une seule ombre au tableau. Après vous être installés, Jason t'expliquait le contenu du panier et tu étais émue de découvrir des spécialités de sa région d'origine. Encore une part de lui que tu découvrais et en plus, il avait tout préparé lui même. Tu étais impressionnée, vraiment. A Arcadia, les hommes ne cuisinaient tout simplement pas, ils ne se pliaient jamais en quatre pour une femme comme Jason pouvait le faire pour toi. Tu étais épatée et conquise. Et tu l'étais encore plus après avoir entamé tous ses mets, c'était absolument délicieux. « C'est incroyable, j'arrive pas à croire que tu aies fait tout ça... C'est délicieux! » Disais-tu tandis qu'un groupe de musiciens venait s'installer près de l'écran. Tu t'apprêtais alors à demander ce qu'ils faisaient là mais Jason t'avait devancé et rapidement il te donnait l'explication que tu attendais. Tu trouvais cela fascinant, le cinéma était un art midgardien que tu avais immédiatement su apprécier. Tu étais ravie d'en apprendre plus à son sujet. Tu avais surtout hâte que le film commence. Une fois cela fait, tu t'étais laissée transportée. Le film était drôle et passionnant. Ce Buster Keaton était vraiment très doué, tu t'étais vite prise d'affection pour lui. Durant les vingt premières minutes de film, tu avais largement fait honneur aux plats de Jason, entre deux fous rires. Puis, une fois rassasiée, ce qui fut rapide après toutes les confiseries que tu avais goûté, tu avais décidé de te rapprocher de lui. Non pas parce que tu t'y sentais obligée, au contraire, parce que tu en avais tout simplement envie. C'était absolument naturel et spontané. Prenant exemple sur un couple que tu avais aperçu un peu plus loin en arrivant, tu étais venue te glisser devant lui, t'asseyant entre ses cuisses, posant délicatement ton dos sur son torse. Ainsi, blottie dans ses bras, tu avais savouré les vingt dernières minutes du film dans les meilleures des conditions.

Puis, lorsque le générique de fin apparaissait, le public applaudissait et tu en faisais donc de même, c'était amplement mérité. Tu te redressais alors pour te tourner vers Jason. « J'ai adoré! Ce Buster Keaton est vraiment très drôle. Surtout la scène où... la scène où... » Tu aurais voulu argumenter d'avantage mais tu avais été happée. Ton regard plongé dans celui de Jason, votre proximité, ses lèvres, son sourire. Tu étais subitement prise par le même désir qui t'avait animé plus tôt dans la soirée. Mais cette fois, c'était plus fort, plus intense, presque incontrôlable. Tu en avais terriblement envie Rayna et tu ne voulais plus résister. Au Diable tes appréhensions, tes angoisses et tes doutes, tout cela s'envolait finalement. Tu ne pouvais rêver meilleur partenaire que Jason. A ses côtés, tu étais rassurée et apaisée. Seul le bonheur d'être dans ses bras comptait désormais. Alors, doucement, tu approchais ton visage du sien pour lui faire comprendre que tu étais prête à franchir une étape. Tu y allais lentement pour qu'il comprenne aussi que tu avais besoin qu'il t'accompagne dans cette première fois. Tu prenais alors conscience qu'en réalité tu ne lui avais jamais clairement dit. « Jason, il faut que je te dise que... » Murmurais-tu en approchant toujours un peu plus ton visage du sien, ton regard oscillant entre ses yeux et ses lèvres irrésistiblement attirantes. « ... ils sont là... » Ce n'était pas du tout ce que tu avais eu envie de lui dire mais, durant ces quelques secondes où vos visages continuaient à se rapprocher doucement mais sûrement vers votre premier baiser, tu avais senti leur présence. Les hommes de ton père. Le moment était brisé et tu te stoppais dans ton mouvement. Tu te retournais alors vers les spectateurs et cherchais du regard les hommes qui te traquaient. Ils n'étaient pas loin, tu pouvais sentir leur aura, leur magie. Tu te retournais à nouveau vers Jason, déçue, furieuse et inquiète à la fois. Tu n'étais pas inquiète pour vous mais tu étais inquiète pour tous ces humains. Les mages avaient déjà montré à Gotham qu'ils étaient prêts à prendre les midgardiens en otage pour parvenir à leurs fins. Tu craignais donc le pire. « Les hommes de mon père, ils sont là... Nous devons les trouver et les attirer ailleurs, c'est trop dangereux pour les humains. Enfin, nous... tu n'es pas obligé... »

AVENGEDINCHAINS

Time is but a concept when I'm with you.

Si Jason s'était retiré bien vite du jeu de la taupe pour éviter d'éveiller les soupçons du forain tenant le stand, il devait bien avouer qu'il ne s'attendait certainement pas à ce que Rayna s'adapte aussi vite à la difficulté de l'épreuve. Son entraînement à l'épée et au combat en général devaient sans doute jouer mais il n'y avait pas que ça, elle avait clairement un sens de l'adaptation assez étonnant et un talent certain pour l'apprentissage. Il n'avait évidemment pas de référence par rapport aux autres gens d'Arcadia, mais dans les souvenirs qu'elle lui avait montré à travers les visions, Rayna était considérée comme une prodige et Jason commençait à comprendre pourquoi. Sur le coup il s'était presque inquiété, observant le forain avec un peu de stress mais c'était plus dû à son habitude de vouloir rester discret qu'autre chose car en réalité, il n'y avait pas le moindre danger. Le forain avait déjà reçu l'argent pour la partie et le jeu de la taupe n'avait rien d'une arnaque, il s'agissait juste d'un jeu d'adresse donc peu importait ce qu'il arrivait une fois que la partie avait commencé. Mais bon, l'homme semblait épaté par les prouesses de Rayna sans pour autant être méfiant, au grand soulagement du demi-dieu. Après ça, pas étonnant qu'avant le début du film, malgré le peu de temps à leur disposition, le couple s'était retrouvé des prix plein les bras. Et une fois encore, pas vraiment de raison de stresser, les exploits de Rayna étaient certes prodigieux, mais pas non plus outrageux au point d'attirer l'attention...

Pour Jason le stress avait donc rapidement laissé place au soulagement et bien vite son sourire et son rire revinrent agrémenter ces charmants petits moments plein de douceur et de légèreté. Plus tard devant le film il ne l'avait pas forcément montré, mais il était plutôt fier de sa propre cuisine. Récolter les ingrédients, les conditionner, les préparer avec amour et attention, faire ses propres petits plats était un passe-temps qu'il appréciait vraiment beaucoup. Ainsi lorsque Rayna le complimenta, il tenta du mieux qu'il pût de ne pas trop montrer sa satisfaction, même si les mots de la belle magicienne le touchèrent sincèrement. Il ne put néanmoins retenir un nouveau sourire. "Disons qu'avec mes années, j'ai eu un peu de temps pour pratiquer." Le film se déroula sans encombres et... Etait aussi bon que dans les souvenirs de Jason. Pour beaucoup l'oeuvre phare de Buster Keaton était Le Général, mais pour lui ça avait toujours été Sherlock Jr. L'oeuvre lui parlait beaucoup plus et bon d'accord, le fait qu'il avait assisté à l'époque aux tournage sur les lieux-mêmes jouaient sans doute un chouïa sur son objectivité mais soit. Keaton était un homme que Jason avait toujours admiré, tout en le considérant presque comme une énigme. Son sens du timing incroyable et les risques inconsidérés qu'il prenait pour tourner ses scènes, plus aucun studio n'accepterait de tels dangers de nos jours et c'était évidemment tant mieux, mais ça faisait de Keaton un espèce d'ovni. Plusieurs fois Jason s'était demandé si l'acteur n'avait pas été en réalité un méta-humain, mais jamais il n'obtint de réponse. Ce qui ne changea absolument rien à son admiration pour lui, que du contraire... Plus tard dans le film Rayna vint s'installer de manière bien plus intime entre les cuisses de Jason. Une initiative qui ne manqua pas de le surprendre, agréablement. La voir quitter sa zone de confort était toujours une bonne chose, un signe pour le demi-dieu que toutes ses impressions jusqu'à présent étaient justes. Acceptant tout naturellement son geste, il vint placer ses bras autour de sa taille, laissant son dos se poser sur son torse et sa tête dans le creux de son cou. Elle sentait si bon. Un parfum à la fois emprunt de nature et hors de ce monde, doux mais intense. Sa présence contre la sienne rendit l'instant magique, chaque rire, chaque émotion partagé plus fort.

Une fois le film terminé, après les applaudissements de rigueur, Rayna ne tarit pas d'éloges, méritées, pour ce cher Buster Keaton. Jason voulut lui répondre, déjà prêt à partir dans de nouvelles anecdotes à son sujet mais lorsque leurs regards se fixèrent les mots n'avaient plus raison d'être, le moment avait déjà changé de sujet. Cette fois ça y était. Rayna était prête à franchir le cap et à nouveau le coeur de Jason sauta un battement. Ils étaient en symbiose, le reste du monde n'existait plus, il n'y avait plus qu'eux deux et cet instant. Cette fois la belle ne se cherchait plus d'excuse, elle ne posait plus de questions, elle attendait juste que sa moitié l'accompagne dans le geste, qu'il avance lentement ses lèvres tout comme elle, et qu'une bonne fois pour toute un baiser vienne sceller ce qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre. Leur souffle se rencontrait, une dernière petite phrase futile de la part de Rayna et... Une conclusion clairement différente de l'expectative. Ils sont là, lança-t-elle avant de rompre le moment devant un Jason incrédule. Qui? Quoi? Oh. Il lui fallut quelques secondes pour comprendre ce qui était en train d'arriver. Rayna parlait des hommes de son père. Ces mages chasseurs de tête en provenance d'Arcadia, venus pour elle et le voyageur qu'elle avait aidé par le passé. Leur timing était des plus... Mal avenu mais malgré cela, Jason conserva son calme. S'ils étaient dans le coin, il y avait bien trop de monde pour les distinguer. Cela n'empêcha pas Rayna de balancer des regards nerveux un peu partout, avant d'à nouveau fixer Jason. Elle s'inquiétait pour les gens du coin, parlant d'attirer les chasseurs ailleurs. Devant l'air préoccupé de la magicienne Jason n'eut qu'un seul réflexe, celui de venir poser sa main le long de son cou, juste en dessous de son oreille. De son pouce il caressa la joue de Rayna et d'un sourie rassurant il ajouta: "Hey, ça va aller, ne t'en fais pas. Hors de question que je te laisse t'occuper de ça toute seule. De toute façon, il faut encore que je t'apprenne à rouler en vélo... Ce parc est grand, allons dans un coin plus calme."
Sans agitation aucune, Jason rassembla le reste du pic-nique et ferma la nappe sur elle-même dans un noeud. Il posa peluches et autres restes de friandises dans le panier de la bicylette et invita Rayna à le suivre.

L'idée était simple. Pas besoin de débusquer ces gars là, puisqu'ils étaient après Rayna. Juste changer d'endroit les inciterait à venir jusqu'à eux sans pour autant mettre en danger la population. Bien évidemment ils pouvaient s'avérer fourbe et prendre un otage avec eux, mais au moins en intervenant loin de la foule, ils éviteraient un mouvement de panique. Si otage il y avait, Jason se chargerait de leur sauvetage... Après avoir jeté la nappe dans la première poubelle croisée, le couple s'enfonça donc dans une zone plus déserte du parc, laissant les lumières et la chaleur du festival des lumières derrière eux. Jason avait imposé un rythme calme, s'il y avait une chance d'encore faire croire qu'ils n'avaient pas remarqué leurs poursuivants, autant la prendre. Néanmoins de temps en temps il ferma les yeux, comme s'il était occupé à se concentrer sur quelque chose. Sur le chemin il demanda nonchalamment, sans trop élever la voix. "Souhaites-tu juste les faire fuir ou les capturer? N'hésite pas si tu as des instructions particulières à me donner..."
Une vaste zone d'herbe, pas trop d'arbres et ni de passage de badaud, du moins pas à cette heure-ci, la zone semblait convenir. Posant le pied du vélo pour le laisser en équilibre dans son coin, Jason ferma une nouvelle fois les yeux. Cette fois Rayna put le remarquer, le bout des doigts de la main gauche du demi-dieu semblait presque fantomatique, bien vite elle put comprendre qu'il s'agissait de vent. Elle sentit d'ailleurs ce léger courant d'air qui maintenant qu'elle y prêtait attention, les avait accompagné tout le long de leur trajet. Toujours aussi calmement, Jason annonça: "Trois personnes semblent nous suivre, d'après le vent ils ont bougé plus ou moins en même temps que nous et emprunté la même route, tout en gardant leur distance, ils arrivent. Quoi que tu choisisses de faire, je te suis." Le visage du demi-dieu était toujours aussi serein, il n'était pas inquiet le moins du monde. Ce n'était pas vraiment de l'arrogance mais plutôt de la totale confiance, en ses capacités, mais surtout envers Rayna...  

Ces hommes, ce danger, cette traque, c'était ton combat et tu ne voulais l'imposer à personne, surtout pas à Jason. Tu n'avais aucune crainte pour lui, il était indéniablement l'un des hommes les plus puissants que tu aies jamais rencontré. En réalité, tu étais certaine qu'il ne ferait qu'une bouchée de ces mages. Mais tu ne voulais pas qu'il se sente obligé de quoi que ce soit sous prétexte que vous aviez développé des sentiments l'un pour l'autre. Tu savais qu'il aimait sa discrétion tout comme tu savais qu'il avait le cœur sur la main et qu'il n'hésiterait pas à intervenir une seule seconde pour protéger un innocent. Il était comme ça Jason... Prêt à tout pour les autres sans attendre ni récompenses, ni lauriers. Combien d'hommes pouvaient se prétendre être aussi humble et généreux? Tu n'en connaissais pas d’autre comme lui en tout cas. Jason était tout simplement incroyable et admirable. Et ce n'était pas ton amour plus que naissant pour lui qui parlait, c'était tout simplement la vérité, en toute objectivité. Mais malheureusement, tu n'avais plus le temps de t'extasier devant toutes les qualités incalculables de ton preux chevalier, les hommes de ton père étaient là, et c'était sur eux que tu devais désormais te concentrer. Tu étais alors stressée et anxieuse, tu t'inquiétais pour tous ces humains. Tu ne supporterais pas que le moindre mal leur soit fait. Tu avais déjà tant fait souffrir de monde à Arcadia. Hors de question que cela se répète ici. Tu étais entrain de te laisser submerger Rayna. La peur, l'angoisse d'être responsable d'un nouveau drame, ton inexpérience face à ce genre de danger immédiat... Tu perdais pied et tu ne savais que trop bien ce que cela donnait lorsque tu perdais pied. La dernière fois, tu avais dangereusement flirté avec les ténèbres et tu avais bien failli te perdre en route. Cela aussi t'effrayait au plus haut point. Mais il avait suffit d'un geste, d'une caresse de Jason pour t'apaiser et te ramener sur terre.

Sa main dans ton cou, son pouce sur ta joue, son sourire, son regard... C'était comme s'il avait su saisir tout ce qui te chamboulait pour l'emprisonner dans une sphère et te libérer. Il n'y avait rien de magique là dedans, c'était juste son pouvoir naturel sur toi. Il avait cette faculté hors du commun de te rassurer en toutes circonstances, de te canaliser, de chasser tes angoisses les plus profondes. Il était le seul à savoir faire ça et tu aimais cela. Tu avais l'impression que le lien qui vous unissait déjà n'en était que plus fort. Tu fermais alors les yeux un instant, savourant ce geste si tendre et rassurant. Tu savais qu'avec lui à tes côtés, rien de mal ne pourrait arriver. De sa voix calme, chaude et posée, que tu aimais tant, il te disait de ne pas t'inquiéter, que tout allait bien se passer. Tu le croyais. Ces mots, d'ordinaire, n'avait pas de poids pour toi mais lorsqu'ils sortaient de la bouche de Jason, tu savais qu'ils étaient lourds de sens, qu'ils étaient tout simplement vrais. Tu rouvrais alors les yeux, plongeant ton regard améthyste dans le sien. Tu esquissais un mince et bref sourire. Il t'affirmait qu'il était hors de question qu'il te laisse t'occuper de cela seule, ton cœur s'emplissait de joie. Tu aimais qu'il y est un "vous", un "nous". Tu étais si heureuse de voir qu'il était là pour te soutenir et t'accompagner dans les bons comme les mauvais moments. Bien sûr, tu n'en avais pas douté une seule seconde mais c'était incroyablement savoureux de l'entendre le dire. Tu te demandais alors ce que tu avais bien pu faire pour mériter qu'un homme pareil s'intéresse à toi, pour mériter de croiser sa route et de te faire une place dans sa vie. Tu esquissais un sourire plus franc, détendu et amusé lorsqu'il parlait du fameux vélo. Jason ne se démontait pas pour un sou, il était le roc dont tu avais besoin, le pilier qu'il te manquait pour te construire et t'épanouir. Tu avais tant besoin de lui, il avait tant de choses à t'apprendre, tant de choses à t'offrir.

Avec une sérénité à toute épreuve, il te proposait simplement d'aller plus loin. Tu venais alors caresser tendrement sa main de la tienne. « Merci... » Soufflais-tu, puis, tu le suivais. Tu étais bien plus sereine toi aussi désormais même si tu restais méfiante et sur le qui-vive. Pauvre Rayna, tu étais loin, bien loin de t'imaginer ce qui t'attendait. Tu aidais alors Jason à ranger le pic-nic et tout votre barda. Tu t'efforçais de ne plus montrer aucun signe d'inquiétude. Et tranquillement, vous aviez quitté les lieux. Tu avais confiance en Jason, tu l'aurais suivi n'importe où les yeux fermés et c'était assez rare pour être souligné. Car même si tu étais du genre à vouloir voir le meilleur chez les autres, tu n'étais pas pour autant naïve et insouciante. Tu n'accordais pas si facilement ta confiance. Mais avec Jason, c'était comme une évidence, c'était limpide. Tu n'hésitais pas avec lui, tu étais sûre, plus sûre que jamais. Tu aurais pu mettre ta vie entre ses mains dans la seconde s'il l'avait fallu. Une fois éloignés, il te demandait ce que tu voulais faire, les faire fuir ou les capturer. Il te disait même que tu ne devais pas hésiter si tu avais des instructions en particulier. Tu étais gênée, lui qui avait tant d'expérience et de vécu, tu ne te sentais pas de lui donner la moindre instruction. Surtout que, à vrai dire, tu ne savais pas vraiment ce que tu faisais, ni où tu allais. Tu étais toi même perdue Rayna Brodveldt. C'était la première fois que tu étais confrontée à une telle situation. Tu devais affronter une ribambelle de mages que tu connaissais depuis ton enfance. Des hommes avec qui tu avais grandi ou qui t'avaient vu grandir. Ils étaient en réalité un peu tous ta famille... Tu ne voulais pas les tuer évidemment mais tu devais protéger le voyageur, tu devais te protéger toi. Tu devais protéger Arcadia. Tu avais alors opté pour la seconde option, les capturer. Tu avais fabriqué plusieurs amulettes pour les y enfermer en attendant de retourner dans votre royaume, mais il ne s'agissait là que d'une solution temporaire. Une solution qui ne te convenait pas mais en attendant, tu ne savais pas quoi faire d'autre.

« Nous devons les capturer. Je ne sais pas vraiment quoi faire d'eux pour l'instant mais je préfère cela que de les savoir en liberté sur Midgard. Et promets moi une chose... tu m'arrêteras si tu dois le faire... » Quelques instants plus tard, vous arriviez dans une aire dégagée, parfaite pour l'affrontement s'il devait vraiment avoir lieu. Tu ne savais pas encore leurs intentions. Allaient-il chercher le combat comme dans le métro à Gotham ou la discussion comme au bord de la baie? Une chose était sûre, tu avais déjà capturé deux d'entre eux, et tu étais prête à recommencer, peu importait le nombre, peu importait la puissance que tu allais devoir déployer. Jason calait alors le vélo, tu t'arrêtais, tu l'observais, il fermait les yeux. Tu ne savais absolument pas ce qu'il était entrain de faire mais tu sentais une aura surnaturelle émaner de lui, comme lorsque tu l'avais croisé en coup de vent la première fois. C'était fort, intense, c'était divin. Jason était si simple, si humain, que parfois tu en oubliais sa va véritable nature. Mais il était bel et bien un demi-dieu... Tu voyais alors le bout de ses doigts devenir spectre, c'était un spectacle absolument somptueux. Tu comprenais alors que cette légère brise que tu n'avais eu de cesse de ressentir tout au long du trajet venait de lui. Avec un calme à toute épreuve, il t'annonçait qu'il avait dénombré trois individus sur vos pas. Il était incroyable. Mais encore une fois, pas le temps de t'y attarder, les hommes de ton père arrivaient. « Tu es incroyable... » Prenais-tu tout de même le temps de lui dire avec un respect et une admiration sans limite. « Ce qui est vraiment incroyable très chère, c'est que tu batifoles avec le premier venu alors qu'une guerre se prépare chez nous. A cause de toi. Et nous nous sommes là à perdre notre temps parce que tu as encore fais les mauvais choix. » Cette voix... tu l'aurais reconnu entre mille et un frisson d'effroi te parcourait. Tu n'osais alors pas te retourner. Tu te concentrais sur le regard de Jason pour prendre toute la force et le courage qu'il voudrait bien t'insuffler. Puis, tu te résignais finalement à faire face à ton oncle, Herrath Lorch et tu te tournais vers lui. Il vous avait pris à revers et ses trois autres compagnons vous rejoignez par derrière.

Ce face à face que tu avais tant redouté, il était là et tu ne pouvais plus, tu ne devais plus, lui échapper. Ton regard croisait le sien et déjà tu sentais tes émotions bouillir en toi et tes pouvoirs se réveiller. La haine que tu avais pour cet homme, cet homme qui t'avait trahi, cet homme qui avait assassiné ta mère, sous tes yeux... Cette haine te polluait de l'intérieur et te rendait, malgré toi, dangereuse. C'était d'ailleurs pour cela que tu avais mystérieusement fait promettre à Jason de t'arrêter s'il devait le faire. « Regarde toi Rayna... Une vraie catin, tu avais pourtant tellement de potentiel. Tout ce gâchis... Tes parents seraient tellement déçus de te voir ainsi. » Tu serrais les poings, tu serrais les dents, il essayait de te provoquer pour que tu perdes pied tandis que les trois autres vautours rôdaient derrière vous. Pour l'instant, personne ne semblait vouloir lancer les hostilités, l'heure était à la discussion. Ton oncle était un homme imposant, charismatique et ténébreux. Sa simple présence t'impressionnait, elle l'avait toujours fait. Le voir ainsi face à toi te perturbait énormément et déjà le vent se levait autour de vous. Il était le symbole de ta colère qui montait et bientôt les autres éléments viendraient s'en mêler, mettant en danger toutes les créatures dans les alentours. Non... tu devais contrôler ça, tu ne devais pas te laisser dépasser comme dans la forêt de Tolberry. « Nous savons tous les deux que c'est faux mon oncle alors cessez de jouer à ce petit jeu. Venons-en au fait. Que voulez-vous? Que voulez-vous vraiment? » Tu précisais car tu savais très bien ce qu'il voulait. Il voulait le voyageur, il voulait te ramener à Arcadia mais ce que toi tu voulais savoir c'était pourquoi. Pourquoi le voyageur avait-il tant d'importance? Pourquoi son éloignement d'Arcadia avait déclenché un tel cataclysme dans vos vies?

« Tu le sauras bien assez tôt ma nièce. Pour l'heure suis-nous et aucun mal ne sera fait à qui que ce soit. » Te répondait-il, prenant bien soin d'entretenir le mystère. « Et si je refuse? » « Ton ami ici présent est immunisé contre notre magie mais ce n'est pas le cas de tout le monde sur cette Terre. Es-tu vraiment prête à sacrifier de nouvelles vies? » Ton oncle était l'un des mages les plus puissants d'Arcadia. Il avait décrypté l'aura de Jason et comprit que la magie n'aurait aucun effet contre lui. Il jouait alors sur ta corde la plus sensible, menaçant d'autres vies si tu n'obtempérais pas. Mais tu savais qu'il bluffait, il n'avait aucun intérêt à se faire remarquer, ici, sur Midgard. « Est-ce là la seule option que vous me proposez mon oncle? Je crois bien en avoir une autre. » Tu t'avançais alors vers lui, saisissant lentement ton amulette, dissimulée jusque là sous ta robe, dans le creux de ta main. « Je vous arrête, personne ne meurt et personne ne vous suit. » Tu lançais alors ton sort sur ton oncle, persuadée que vos deux magies allaient devoir s'affronter pour que l'une d'elle prenne le dessus. Persuadée que Jason saurait très bien s'occuper des trois autres mages pendant que tu t'occuperais de ton oncle... Mais tu avais eu une bien mauvaise surprise. Comme tu l'avais imaginé, les trois mages s'étaient rués sur Jason, matérialisant chacun une épée dans leur main. La surprise ne venait pas de là, la surprise venait de ton oncle. Ton sort s'était heurté à un bouclier magique qui n'avait rien à voir avec la signature d'Herrath Lorch. Comme si... comme si un envoutement très puissant l'enveloppait. Tu en avais perdu tes moyens et Herrath en avait profité pour te lancer un champ de force qui t'avait propulsé au pied d'un arbre. Il s'était alors téléporté près de toi, t'attrapant par la gorge avant de te soulever comme une brindille et de te plaquer violemment contre l'arbre. Il était si près de toi que tu pouvais sentir son souffle sur ta peau. Tu ne comprenais pas, tout cela n'avait aucun sens... Et tandis que tu entendais au loin les lames se croiser, tu plongeais ton regard dans celui de ton oncle. Tu devais briser l'envoutement qui l'entourait pour avoir des réponses. Tu ne connaissais alors qu'une manière, risquée et douloureuse, de le faire.

Faisant appel à l'un des sorts les plus puissants qui existait, tu plongeais ta main dans le torse de ton oncle pour y saisir littéralement son cœur entre tes doigts et le libérer du mal qui le rongeait et obstruait sa liberté. Qu'il était alors tentant d'écraser ce cœur si fragile pour mettre fin à sa misérable vie... Pour enfin exercer ta vengeance. L'idée t'avait bien traversé l'esprit mais tu avais su y résister. Tu ne tuais pas de sang froid Rayna Brodveldt, jamais. Une lueur vous enveloppait alors tous les deux, signe que tu n'étais pas loin de la réussite et soudain, un sceau se dessinait dans un nuage de fumée, celui du mage qui avait lancé l'envoutement. Tu imprimais ce sceau dans ton esprit, il s'agissait d'un détail qui aurait une importance capitale. Le sort était brisé et ton oncle s'écroulait à genoux au sol, épuisé mais vivant. Tu avais su contrôler ta magie et le sortilège de désenvoutement ne l'avait pas tué. Il relevait alors la tête vers toi et tu avais le souffle coupé. Ce regard, cette expression, tu ne les avais pas vu sur son visage depuis si longtemps, enfin tu retrouvais ton oncle. Enfin tu retrouvais cet homme que tu avais tant admiré, que tu avais tant aimé. Cet homme qui ne t'aurais jamais fait le moindre mal, ni à toi, ni à ta mère, sa soeur. Tu commençais à comprendre et ton cœur tressaillait. Tu voulais alors t'approcher d'Herrath mais un portail s'ouvrait soudainement derrière lui, cinq autres mages en sortaient. L'un d'eux plantait une épée dans le dos de ton oncle qui hurlait de douleur. La fureur dans tes yeux, tu matérialisais deux épées dans tes mains et te lançais à l'assaut des nouveaux arrivants. Un combat épique commençait alors entre fers croisés et sortilèges lancés. Jason et toi alliez devoir vous battre côte à côte. « Ne les tues pas! Ce sont eux les victimes! » Lui hurlais-tu entre deux coups de lames.

AVENGEDINCHAINS

Time is but a concept when I'm with you.

"Je n'aurai pas à le faire..." Sa réponse sonnait presque comme un non catégorique. Rayna venait de lui demander de promettre de l'arrêter si les choses venaient à déraper, mais Jason ne l'entendait clairement pas de cette oreille. Elle lui avait pourtant déjà expliqué cette colère, ces ténèbres qui l'habitaient lorsqu'elle perdait ses moyens. Un pouvoir qui selon elle était capable de tout détruire sur son passage, déclenchant la fureur des éléments. Mais pour Jason, même s'il n'y avait jamais assisté, il n'y voyait qu'une peur irraisonnée, une immaturité des pouvoirs de la belle magicienne. C'était le lot d'à peu près tous les gens à pouvoirs à un jeune âge, surtout les plus puissants et talentueux. Il s'agissait de quelque chose qui pouvait se dompter, que Rayna pouvait surpasser. Mieux, qu'elle pourrait peut-être un jour canaliser. "Tu es plus forte que tu ne crois Rayna, tu parviendras à garder le contrôle sur ta colère, j'ai confiance en toi." Il avait bien conscience que ses mots seuls ne parviendraient pas à supplanter l'influence des noires émotions que pouvait avoir Rayna. Ce n'était pas parce qu'il avait confiance en elle que le pire ne pouvait pas arriver. Et au fond de lui, il savait qu'elle avait besoin qu'il lui dise les fameux mots, au moins pour ce soir. Il poussa alors un petit soupir, puis se résigna. "Mais juste au cas où... Je te le promets."

Il ne fallut que quelques instants à peine pour que la tête pensante du groupe ennemi fasse son apparition. Même si Jason n'en doutait pas, Herrath Lorch était visiblement quelqu'un d'intelligent. Il avait aisément vu venir que le couple chercherait à s'isoler des badauds pour affronter leur poursuivants, et que l'endroit idéal pour cela par rapport au festival était cette zone du parc. Positionné à l'avance, il n'avait plus eu qu'à attendre qu'ils arrivent, lentement mais sûrement. De sa langue de vipère il avait lancé des provocations pour déstabiliser Rayna. La pauvre cherchait du réconfort dans les yeux de Jason, avant d'affronter ceux glaçant de son oncle. Un réconfort qu'elle trouva sans mal, le demi-dieu n'ayant pas quitté son air serein, ni même son fin sourire toujours aussi rassurant. Pas besoin de mots pour lui faire comprendre ses pensées, toujours les mêmes, "ça va aller"... Enfin elle se décida à affronter le regard de son tourmenteur, et à nouveau des mots plein de poisons sortirent de la bouche de ce dernier, allant jusqu'à la traiter de catin. Sur le coup Jason voulut intervenir mais ce combat n'était pas le sien. C'était à Rayna de régler son compte à son oncle et à personne d'autre. Néanmoins, le vent qui se leva soudain autour d'eux n'annonçait rien de bon au demi-dieu. Il ne s'agissait pas du sien mais bien de celui de sa belle, plus froid, plus erratique, plus... Colérique. Derrière eux, les trois mages qui les avaient suivi depuis le festival étaient désormais arrivés sur les lieux, guettant le moment propice pour intervenir. Pas tout de suite cependant. Malgré l'apparente colère de Rayna, la discussion allait plus avant. La magicienne tentait d'extirper des informations de Lorch, malheureusement en vain. L'homme n'avait aucune intention de révéler quoi que ce soit. Pire, il semblait au courant pour l'immunité à la magie de Jason, ce qui ne manqua pas de surprendre ce dernier, même s'il n'en montrait rien. Les négociations, si l'on pouvait les nommer ainsi ne menaient nulle part, l'affrontement s'annonçait de plus en plus inévitable.

Les hommes de Lorch l'avaient évidemment bien compris et sans plus attendre, ils se précipitèrent sur Jason, pendant que Rayna serait occupée avec son oncle. Armés d'épées qu'ils venaient de matérialiser, leurs mouvements étaient plutôt adroits pour des pratiquants des arts occultes, mais clairement grossiers pour un guerrier de la trempe du Fils de Themyscira. S'ils n'arrivaient pas à le toucher, ils parvinrent malgré tout à créer de la distance entre eux et leur leader, séparant ainsi efficacement Jason de Rayna. Sur le coup Jason ne prêta pas trop attention à sa belle, continuant de lui faire confiance. A la place il se demandait pourquoi ses assaillants se contentaient d'armes blanches, ce qui n'était clairement pas leur spécialité. Mais évidemment, se dit-il alors, son immunité. "Vous savez, il y a bien d'autres moyens d'utiliser votre magie que de me l'envoyer directement à la figure... Enfin, moi je dis ça pour vous hein, parce que vos talents de bretteurs laissent tout de même sérieusement à désirer..."
Et là au détour d'un regard, il aperçut plus loin Rayna, plaquée par Lorch contre un arbre avec une force qui n'était clairement pas humaine. A la vision de cette scène, sa décontraction laissa place à un sérieux presque glaçant. Derrière lui, un des trois mage tenta de lui trancher la tête, mais sa lame rencontra plutôt les doigts du demi-dieu qui l'avait stoppée net. Jason n'avait même pas daigné le regarder, ses yeux étaient restés figés sur Rayna et le danger dans lequel elle se trouvait. Le changement de ton et surtout la prouesse de leur adversaire paralysa les deux autres mages dans leur mouvement, n'en croyant pas leurs yeux. La lame du troisième était littéralement figée entre les doigts de Jason, telle Excalibur dans la roche, elle ne bougeait pas d'un millimètre. Puis soudain celui-ci tira la lame vers l'avant, entraînant le mage avec elle. Le pauvre se mangea alors le coude du demi-dieu en pleine figure, nez cassé, arcade sourcilière explosée, il était déjà hors jeu. Comme ressaisis par cet acte de violence, ses deux compagnons repartirent à l'assaut, à leur plus grand malheur. Saisissant la lame toujours entre ses doigts par le manche cette fois, Jason para le premier des deux assaillant, faisant enfin sonner le métal. Il s'abaissa ensuite pour esquiver le coup d'épée du deuxième mage, plantant l'arme volée au troisième déjà ko dans son pied. Le cri de douleur en résultant fut bref, car d'un revers de la main le demi-dieu le sécha brutalement dans l'inconscience, la claque résonnant presque aussi loin que la zone du festival. Avant de laisser le piètre guerrier toucher le sol, Jason lui subtilisa à son tour son épée, qu'il lança directement vers le dernier quidam, assez mollement pour lui permettre d'esquiver et ainsi tomber dans son piège. Car en portant son attention sur le projectile de fortune, le mage ne put se préparer à la véritable offensive du demi-dieu qui déjà sur lui, porta une droite qui l'envoya à son tour, lui et ce qui restait de ses dents dans les bras de Morphée.

Le tout n'avait pas duré plus de quelques infimes secondes, ainsi lorsqu'il reporta son attention sur Rayna, Jason s'attendait toujours à la voir dans la même situation. Cependant, la magicienne semblait avoir reprit le dessus, usant d'un sort qu'il ne parvenait pas trop à comprendre. Elle avait les mains plongées dans le torse de son oncle? Du moins en apparence, difficile à dire d'ici. De la fumée, un sceau étrange, Lorch semblait avoir perdu la bataille, ou peut-être en sortait-il gagnant, d'une autre manière. L'affrontement s'annonçait réglé, les ennemis vaincus mais sans crier gare, un portail s'ouvrit près de Rayna et Lorch et cinq nouveaux mages en sortirent, toutes lames dehors. Un premier planta la sienne dans le dos de Lorch, les suivants prêts à en découdre avec Rayna. Après une parade, elle cria vers Jason de ne pas tuer les nouveaux intrus, mais il était déjà arrivé dans son dos, presque instantanément dans un éclat doré. Revêtu de l'imposante armure de Zeus, il avait usé du pouvoir d'Hermès pour joindre le combat en un instant, et profiter de l'inertie de son poids pour envoyer voler sur plusieurs mètres, main tendue l'un des mages qui allait porter un coup mortel à la vaillante magicienne. La force employée fut telle que le pauvre fut immédiatement mis hors jeu. "Je ne tue pas, Rayna. Plus depuis bien longtemps." De cette même main tendue Jason invoqua la Lance d’Hippolyte, s'en servant pour bloquer l'assaut d'un second mage, visiblement surpris. "Quoi, vous pensiez être les seuls à savoir faire apparaître des objets pointus à partir de rien?" Un pivot, un tour complet de la lance et un puissant mais fin tourbillon emmena le mage haut dans les airs, avant de brutalement le ramener au sol. Ca faisait déjà deux sur les cinq qui ne se relèveraient pas de sitôt. "Je prends les deux en face, je te laisse celui qui a planté ton oncle. N'oublie pas, tu contrôles ta colère, pas l'inverse."

D'un revers de lance, Jason déclencha une bourrasque qui empêcha les deux mages qu'il avait désigné d'aller plus avant. Il les garderait bien éloignés de Rayna et sa cible, cet affrontement ne les concernait pas. Comprenant qu'ils n'avaient pas le choix, les deux acolytes s'échangèrent un regard entendu avant de se disperser de part et d'autre du demi-dieu. Entre leurs pas des murmures, de même que des signes de leurs mains libres. Une lumière, ambre pour l'un et fantomatique pour l'autre couvrit brièvement leur corps l'espace d'un court instant, signe sans doute qu'ils venaient de se buffer magiquement. "Un peu plus malins que vos camarades, hein... Good." La magie ne fonctionnait certes pas sur Jason, mais ça ne voulait pas dire que les sorts de support personnel étaient inefficaces. Il en fit d'ailleurs rapidement l'expérience, car la première attaque de ses adversaires fut plutôt inattendue. au lieu de foncer directement sur lui, le mage de gauche se servit de son épée comme d'un club de golf et envoya un bon gros bout de terrain à toute vitesse dans la direction du demi-dieu, qui n'eut d'autre choix que d'exploser le projectile terreux, obstruant ainsi temporairement sa propre vision. Un peu à l'image de sa propre technique plus tôt contre le groupe précédent, Jason vit trop tard son assaillant déjà sur lui, prêt à lui asséner un coup d'épée difficilement esquivable. Cependant ses réflexes surhumains lui permirent de bloquer le coup à l'aide de sa lance, non sans se voir reculer de plusieurs mètres sous la puissance de l'impact, définitivement renforcé par la magie.
Là il vit l'autre mage sur sa droite, ou plutôt sur sa gauche? Le deuxième mage était soudain devenu multiple, se délectant déjà de l'incompréhension du Fils de Themyscira. Sourire aux lèvres, les deux doubles partirent à leur tour à l'assaut dans un rire, bien décidés à prendre la tête de leur adversaire. Le premier des deux perdit alors son rictus en passant à travers un Jason devenu courant d'air, seulement l'espace d'un instant. Il reprit bien vite forme solide dans le dos de son assaillant, lance en travers de sa tête. "Chat, c'est toi le fake." D'un mouvement vif du poignet, Jason créa une impulsion dans la lance qui se prolongea en tourbillon, explosant l'illusion qu'était le double et envoyant voler l'original. Mais sans attendre, il rétracta son bras, créant un violent courant d'air opposé, ramenant le mage vers lui à toute vitesse. Terminant d'un pivot, le pied de la lance vint cueillir le malheureux dans le front, le sonnant pour le compte.
Ne restait plus que le premier des deux mage, qui venait de... changer de taille? Visiblement il avait passé sa magie de renforcement physique au niveau supérieur car désormais, il était presque deux fois plus grand. Prenant un gros bout de gazon à main nues cette fois, il retenta la même offensive que précédemment, mais Jason n'étant pas dupe l'avait vu venir. Sautant sur le côté pour éviter l'imposant projectile il ne quitta pas son imposant adversaire des yeux, fonçant sur lui avec force et vitesse. L'épée devenue presque dague entre les mains gigantesques du mage heurta la lame de la Lance d’Hippolyte dans une onde de choc monumentale, créant des sillons et autres craquelures dans le sol déjà bien endommagé. Cependant, ce que le mage n'avait pas vu venir c'était que contrairement à son épée, la Lance d’Hippolyte était invulnérable. Et après un choc pareil, seule une des deux lames survécut à l'impact. Surpris par la perte de son arme, le mage ne prêta pas assez attention à Jason, déjà complètement dans sa garde. Usant à nouveau du pied de sa lance, le demi-dieu atomisa à l'aide de la puissance d'Hercule l'abdomen du colosse, qui tomba ko sur le champ, non sans cracher un peu de bile...

Ce fut un affrontement un peu plus bruyant et destructeur qu'il ne l'aurait espéré, mais Jason était au final parvenu à vaincre tous ses adversaires. Et pendant qu'il jetait un oeil du côté de Rayna pour s'assurer qu'elle ait elle aussi vaincu son opposition, il posa une main au sol, invoquant silencieusement le pouvoir de sa tante Déméter. De la terre meuble jaillit plusieurs racines, venant ligoter sur place les différents mages inconscients...            

Tout avait été vite, si vite. Comment cette soirée, incroyablement délicieuse et prometteuse, avait pu virer à un tel cauchemar? Tu étais bouleversée par ces retrouvailles mais tu n'avais pas le temps de te laisser envahir par l'émotion. Tu devais absolument garder la tête froide et ne pas te laisser submerger. Tes émotions étaient ta plus grande faiblesse, elles l'avaient toujours été. Jason en avait fait les frais dans sa boutique, tout comme les hommes de ton père dans cette maudite foret où tu avais, malgré toi, tout rasé sur des kilomètres à la ronde. Ton pouvoir était grand Rayna mais tu ne le connaissais tellement pas. Tu avais eu peur que les autres ne le convoitent et ne s'en servent à mauvais escient alors tu l'avais réprimé. Bien sûr tu avais continué à le développer, à l'entretenir mais tu n'avais pas suivi l'instruction qui aurait pu te permettre de le contrôler complètement et tu en payais encore aujourd'hui les pots cassés. Tu le sentais au plus profond de tes tripes, sans vraiment pouvoir l'expliquer, tu étais capable de mieux. Mais il te restait tant à apprendre, tant à comprendre. C'était rageant, c'était frustrant et tu commençais à regretter certains de tes choix. Et si tu avais poursuivi ton enseignement comme les autres? Et si tu avais accepté ta destinée? Avec des "si", on pourrait refaire le monde n'est-ce pas? Non... Finalement... Tu n'avais pas de regret à avoir car, et tu en étais intimement convaincue, rien n'arrivait par hasard. Si tu avais fait ce que tu avait fait, si tu avais traversé ce que tu avais traversé, c'était pour une raison. Une raison qui t'était encore inconnue et mystérieuse, emprunte de cruauté et d'injustice, mais un jour, tu savais que tu comprendrais. Et ce jour là tu pourrais enfin venger la mort de tout ceux et toutes celles qui n'avaient pas eu la chance de poursuivre le voyage. Puis tu n'arrêtais pas de te dire, à juste titre ou pour te convaincre, que d'autres choix de ta part auraient peut être conduit à bien pire... Le passé était le passé, il apportait son lot de remords et de regrets mais il fallait l'accepter, il fallait s'en inspirer pour avancer. Apprendre de ses erreurs, se relever, s'affirmer. Ton passé n'était peut être pas exemplaire, tu ne pouvais pas en être complètement fière, mais tu pouvais t'en servir pour devenir meilleure et rendre ce monde meilleur.

Puis... si tu n'avais pas fait tous ces choix... Tu ne serais peut être jamais venue jusqu'à Midgard, tu n'aurais peut être pas été dans cette boutique, tu n'aurais pas rencontré Jason... Une idée impensable aujourd'hui tant tu tenais sincèrement à lui. Son existence ne pansait pas toutes tes blessures mais bon sang ce qu'elle pouvait te rendre la vie bien plus belle. Et tu savais aujourd'hui que tu ne saurais plus t'en passer. Tu n'avais pas vraiment eu le temps de garder un oeil sur lui, tout s'était enchainé très vite et tu avais dû tenir tête à ton oncle. Mais pour le peu que tu avais vu, le demi-dieu avait largement été à la hauteur de ce qu'il t'avait conté. C'était la première fois que tu avais pu l'apercevoir se battre et même si cela avait été court, tu avais été impressionnée. Tu l'étais davantage lorsqu'il apparaissait derrière toi dans un éclat doré, arborant son armure absolument sublime. Il était... Il était simplement magnifique, il n'y avait pas d'autre mot. Et c'était là, en posant ton regard sur lui, assumant complètement sa part divine, que tu comprenais l'envergure des dieux de Midgard et l'engouement que les humains pouvaient avoir pour eux. Tu avais été toi même happée, captivée par l'aura de Jason. Comme hypnotisée. Tu en avais perdu le Nord, manquant de te faire trancher par l'un de tes assaillants. Mais, comme si le temps s'était subitement arrêté, tu avais pu observer, non, admirer, Jason te protéger et te débarrasser de ce vaurien d'un simple revers de la main. Quelle puissance, quelle assurance, il n'y avait pas à dire, l'expérience faisait la différence, et tu te sentais toute petite à côté de lui. Cela n'avait rien de péjoratif, rien dans le comportement de Jason n'était péjoratif, au contraire... Il te valorisait sans cesse, il te faisait sentir que tu était spéciale, exceptionnelle, rien qu'en posant les yeux sur toi. Tu ne te sentais donc pas inférieure ou minable mais... Tu prenais simplement conscience de sa grandeur, de sa magnificence. Car c'était exactement ce qu'il dégageait. Avec ou sans son armure d'ailleurs. Mais là, tu devais l'avouer, le voir ainsi, dans toute sa splendeur, c'était quelque chose... et un frisson indescriptible t'avait parcouru de la tête aux pieds. Cet homme était décidément incroyable, hors du temps et de tous les concepts que tu pouvais connaître ou appréhender.

Tu avais été désarçonnée et distraite l'espace de quelques secondes, signe encore une fois de ton inexpérience qui te faisait cruellement défaut... Mais tu avais su vite te resaisir, prenant toi aussi part au combat. Jason t'affirmait alors qu'il ne tuait plus depuis longtemps, tu acquiesçais d'un mouvement de tête confiant et satisfait. Une lance apparaissait alors dans sa main, tu esquissais un large sourire en le regardant la manier avec brio, envoyant un second mage tourbillonner dans les airs. Quelle classe, quel panache! Y'avait pas à dire, il savait y faire ton homme. Oui ce n'était pas encore officiel mais au fond de ton cœur, tu le considérais déjà ainsi, ton tout, ta moitié. Et bientôt, tu pourrais lui montrer à quel point tout cela était vrai pour toi. Il te disait alors qu'il s'occupait des deux autres mages, te laissant tout le loisir d'affronter celui qui avait blessé ton oncle. Un plan qui te satisfaisait amplement et que tu ne cherchais pas à discuter. Il était indéniable que Jason saurait bien mieux que toi gérer un tel combat. Tu savais l'admettre et tu n'en avais pas honte. Au contraire, tu aimais cette complémentarité entre vous, tu aimais te battre à ses côtés. C'était un sentiment étrangement exquis et galvanisant. Malgré la peur et le danger, te battre presque dos à dos avec Jason... C'était excitant. Tu ne manquerais d'ailleurs pas à l'avenir, si avenir il y avait, de lui demander de te perfectionner à l'art du combat. Mais vous en étiez encore loin, tu devais d'abord t'occuper de cette enflure qui avait enfoncé sa lame dans le dos de ton oncle. Et tu devais faire vite pour aider Herrath qui te semblait bien mal en point, tu étais d’ailleurs surprise de ne pas le voir user de la magie pour se guérir. Quelque chose clochait et tu n'aimais pas du tout ça. Jason te rappelait alors que c'était toi qui contrôlais ta colère et pas l'inverse. Tu lui lançais un regard reconnaissant et déterminé. Reconnaissante pour son soutien et sa loyauté sans faille. Déterminée à suivre ses bons conseils pour ne pas te laisser dépasser.  « Donne leur ce qu'ils méritent. » Lui répondais-tu sur un ton admiratif, vindicatif et confiant. Tu aurais pu lui dire de prendre soin de lui, de faire attention à lui... Mais à quoi bon? Cela aurait été presque insultant. Tu savais très bien que ces mages, il n'en ferait qu'une bouchée. Tu ne t'inquiétais pas une seule seconde pour lui, tu avais confiance en sa force et son savoir faire.

Jason partait donc de son côté et toi du tien. Vos techniques et vos approches étaient complètement différentes. D'une démarche féline et lente, tu t'approchais de ton adversaire pour le toiser du regard. Il tentait un sort de paralysie, tu le contrais sans même sourciller. Et tu continuais à avancer. Tu prenais même le luxe de plonger ton regard dans le sien et tu crus y voir un instant une lueur d'angoisse. Il tentait un autre sort offensif mais tu le contrais avec autant de facilité que le premier. Tu étais soupçonneuse, tu avais l'impression qu'il ne donnait pas tout ce qu'il pouvait. Clairement, il ne cherchait pas de vrai confrontation avec toi... comme ces hommes dans le métro ou ceux près de la baie... Tous ces mages auraient pu se réunir pour t'affronter et te vaincre alors pourquoi ne le faisaient-ils pas? Parce que ton père te voulait vivante? Déjà cela tu ne comprenais pas. Pourquoi, pourquoi mettaient-ils tous autant d'ardeur à te garder en vie alors qu'ils gagneraient plus à te savoir morte? Pourquoi perdre leur temps en vaines menaces et en dialogues inutiles? Tout cela n'avait aucun sens finalement et les questions commençaient à t'assaillir. Tu commençais à ouvrir les yeux. Et si tout ce temps tu t'étais trompée? Et si tout ce temps tu avais cherché du mauvais côté? La réponse devenait petit à petit évidente mais aussi très inquiétante. Tu murmurais alors un sortilège et ton adversaire s'immobiliser. Tu t'approchais de lui, ton épée tendue vers son cou et tu en laissais la pointe caresser sa peau. Bien sûr que tu ne le tuerais pas, tu ne le faisais qu'en cas de dernière nécessité. Mais tu avais vu la peur dans ses yeux et tu allais t'en servir. Il savait que tu ne le tuerais pas mais il savait aussi qu'il y avait pire que la morte pour faire parler un homme. Tu envoutais alors ton épée pour qu'elle décèle un envoutement, en effet, tu soupçonnais désormais tous les hommes de ton père d'être sous la coupe d'un sort très puissant. Et tu ne t'étais pas trompée. L'espace d'une seconde, un halo de lumière avait enveloppé la silhouette du mage, révélant la présence de l'envoutement. Tu devais lui aussi le libérer pour obtenir des réponses. Mais cela attendrait, pour le moment il était hors d'état de nuire, prisonnier de ton sort, et c'était amplement suffisant.

Tu te retournais brusquement, cherchant Jason du regard. Tu avais confiance en ses compétences, c'était certain, mais tu ressentais tout de même ce besoin viscérale de le voir, de t'en assurer. Tu le voyais alors, sa main posée sur le sol, et tu ressentais un soulagement indescriptible t'envahir. Il était bel et bien toujours là, victorieux de son combat. Tu esquissais un tendre sourire, tu avais envie de courir vers lui, de te blottir dans ses bras, de sentir son odeur si douce et réconfortante. Mais tu devais t'occuper de ton oncle. Tu te précipitais alors vers lui, il était toujours allongé sur le sol et son état avait empiré. Tu découvrais alors, avec effroi, de minuscules veines noires parcourir sa peau. Il peinait à respirer, ses yeux étaient injectés de sang. Il avait été empoisonné par un sort que tu ne connaissais pas, certainement lié à l'épée qui avait pénétré sa chair. Vous les mages, vous aviez la capacité de vous guérir de bien des blessures mais lorsque la magie noire s'en mêlait, lorsque les sorts les plus sombres et interdits étaient jetés... même la plus grande des magies ne pouvait vous sauver. Et ça semblait malheureusement être le cas pour Herrath. Tu t’agenouillais alors à ses côtés, consciente qu'il s'agissait très certainement de ses derniers instants. Tu faisais alors disparaitre tes épées et posais la tête de ton oncle sur tes cuisses, pour le soulager et lui rendre un minimum confortable ses dernières minutes sur Terre. Tu prenais sa main dans la tienne et tu te revoyais alors, enfant, courir dans la cour du château dans un éclat de rire, poursuivis par Herrath. Il avait toujours été un oncle incroyable, généreux et bienveillant. Tu n'avais jamais compris sa trahison, son changement de camp et surtout, son plaisir à tuer sa propre soeur sous tes yeux. Tu l'avais haït pour cela, oh oui, tu l'avais haït. Pendant cinq longues années, tu avais ressassé ce moment et imaginais mille façon de lui faire payer. Cette haine t'avait maintenu en vie... Mais aujourd'hui, tandis qu'il s'éteignait dans une agonie insupportable sous tes yeux, cette haine disparaissait. Tu savais désormais qu'il n'était coupable de rien, il avait lui aussi été une victime. Tu avais compris et il semblait soulagé, heureux de savoir qu'il pouvait partir en paix car maintenant, tu savais.

Il serrait ta main dans la sienne et plongeait son regard embué de larmes dans le tien. Ton cœur se serrait. « Ma douce Rayna... Que tu es belle, que tu es forte... Comme ta mère. » Tu fermais les yeux, laissant quelques larmes couler sur tes joues. « Ne pleure pas, je vais disparaitre mais je serai toujours là. Je suis enfin libre et ce grâce à toi. » Parvenait-il à dire entre deux gémissements de douleur qui lui coupaient le souffle. « Je n'ai plus beaucoup de temps alors je vais aller au fait. Je ne sais malheureusement pas tout, je n'ai pas les réponses à toutes tes questions. Je n'étais qu'un pion parmi les autres. Mais le Dark World est en grand danger et si on n'arrête pas celui qui a fait ça, celui qui nous a envouté, alors c'est toutes les dimensions qui le seront. Tu ne pourras rien faire seule Rayna, tu dois rallier et rassembler. Il te craint, je ne sais pas pourquoi, mais il ne veut pas te tuer. Trouve le voyageur, retourne à Arcadia et tue ton père, il est la clé. » La peau d'Herrath commençait à s'assombrir comme le charbon et devenait brûlante entre tes doigts. Pourtant, tu ne parvenais pas à te résoudre à le lâcher. Ta peau commençait elle aussi à brûler. Mais tu ne voulais pas qu'il soit seul, tu voulais être là jusqu'à la dernière seconde. Il fermait les yeux avant de puiser dans ses dernières forces pour te dire ces derniers mots. « Ta mère est toujours en vie... » Ton cœur s'était presque arrêté de battre. Non... C'était impossible, tu l'avais vu brûler. Vraiment? En était-tu si sûre? Tu te souvenais alors bien avoir vu les flammes courir autour d'elle mais ses cris avaient été trop insupportables et tu avais détourné le regard. Serait-il donc possible que...? L'espoir naissait immédiatement dans ton cœur, tu voulais y croire. « Il ne l'a pas tué pour continuer à garder le contrôle sur toi. Il sait qu'elle est ta plus grande faiblesse, il s'en est servie pour te détruire et il le fera encore. Mais maintenant tu sais, tu peux te préparer. Ne le laisse pas te manipuler, ne... » Ton oncle ne pouvait terminer sa phrase, la douleur le terrassait. Il grimaçait, son visage se transformait, ta main s'embrasait. Sa peau se craquelait, il hurlait de douleur avant de s'effondrer en un tas de cendres noires. Tu avais le souffle coupé. Tu ne criais pas, tu ne t'exprimais pas, aucun son ne pouvait sortir de ta bouche. Tu restais là, figée, le regard fixé sur ces cendres. Tu étais en état de choc. Tu tremblais comme une feuille.

Sans dévier ton regard, tu glissais lentement ta main sur celle qui brûlait encore, et d'une simple caresse tu éteignais les flammes, tu guérissais ta blessure. Tes yeux s'emplissaient de larmes et finalement tu craquais. Tu t'écroulais. Le vent se levait de nouveau autour de vous, il était cette fois différent. Ce n'était pas la colère qui le guidait, mais le chagrin, l'immense tristesse qui s'engouffrait dans ton âme. Celle d'avoir perdu ton oncle, celle d'avoir abandonné ta mère aux griffes d'un monstre que tu ne connaissais pas. Celle de découvrir que ton père était lui aussi une victime que tu avais cloué au pilori sans même chercher à le sauver, sans même penser un seul instant que lui aussi pourrait avoir besoin de ton aide. Tu étais dévastée. Tu ne parvenais pas à arrêter de pleurer. Des années que tu les retenais ces larmes, des années que tu la faisais taire cette souffrance... Les libérer était une expérience incroyablement éprouvante et puissante. Un cercle de feu se formait alors spontanément autour de toi et des restes de ton oncle, un feu qui prenait de plus en plus d'ampleur au grès de tes larmes...

AVENGEDINCHAINS

Time is but a concept when I'm with you.

Comme la réalité pouvait s'avérer si amère, parfois. Avant ce soir, Jason n'avait pas vraiment réalisé l'ampleur de la situation dans laquelle se trouvait Rayna. Certes, elle lui avait tout raconté ou presque. Certes, il avait eu un aperçu d'Arcadia à travers les souvenirs qu'elle lui avait fait voir dans ses visions. Mais avant ce soir, tout cela n'avait pas plus de poids qu'un songe dans l'esprit du demi-dieu. Pour lui être au près d'elle était tout ce qui comptait, le reste n'avait pas d'importance ou presque. Et en niant presque tout cet aspect de la vie de Rayna, celui-ci revint les heurter en pleine figure avec la force d'un ouragan et le poids d'une montagne. Rayna était une fugitive. Innocente, bien sûr, victime des circonstances certainement, mais une fugitive néanmoins. Une pièce apparemment maîtresse dans les plans néfastes d'un ennemi fourbe et puissant, bien décidé à ne pas la laisser tranquille ni aujourd'hui, et probablement encore moins demain. Vouloir passer d'agréables moments à ses côtés et jouer à un plaisant jeu de séduction c'était bien joli, mais ça ne changeait rien à cette foutue réalité. Ce soir pour la première fois depuis leur rencontre, la réalité leur rappela que tout conte de fée aussi magnifique pouvait-il être, avait toujours sa part de ténèbres.

La main toujours posée sur le sol, Jason continuait d'user du pouvoir de Déméter pour cette fois réarranger le terrain et tenter tant bien que mal de réparer les dégâts laissés par le combat. Ce n'était pas à ça que ce pouvoir servait mais avec assez de concentration, c'était faisable. Lentement les trous, sillons, craquelures et autres crevasses laissés au sol se résorbaient, réparant la terre meurtrie et restaurant l'herbe détruite. Durant tout le long de l'opération, Jason ne quitta pas Rayna des yeux. Il ne pouvait entendre ce qui se disait entre son oncle et elle, la distance était trop grande, mais l'homme était visiblement mourant. La blessure infligée par l'autre mage n'était clairement pas une blessure ordinaire, et bientôt le corps de Lorch se mit à dépérir, pire, à se consumer. La haine et la rancoeur avaient clairement quitté le visage de Rayna. L'homme à qui elle tenait la main dans ses derniers instants n'était pas le vil assassin qu'elle avait décrit à Jason, c'était son oncle, l'homme qu'elle avait admiré et adoré étant enfant. Quoi qu'elle ait fait avant l'arrivée des cinq autres mages, elle était clairement parvenue à bannir l'influence mauvaise qui avait perverti l'âme de ce pauvre Lorch, ce qui rendait la chose encore plus difficile. A peine sauvé qu'il se retrouvait assassiné, non sans être parvenu à échanger quelques mots avec sa nièce.

En cinq mille années d'existence, Jason avait connu la perte d'être chers, bien plus d'une fois. Des êtres de son sang jamais, mais il a été proche de tellement de gens qu'ils avaient tous été chers à ses yeux. Et jamais ce ne fut facile. Jamais ces instants ne l'avaient laissé indifférent, jamais la douleur qui les accompagnait s'en était trouvée réduite. Ça avait toujours été très fort, et jamais agréable. Ayant fini de réparer les dommages il avait commencé à s'approcher de Rayna. Il l'avait clairement entendu, la mère de Rayna était toujours en vie, selon Lorch. Une infime bonne nouvelle dans une situation tout sauf réjouissante. Alors que le vieil homme puisait dans ses dernières forces pour tenter de continuer ses révélations, Jason de son côté posa les yeux sur le mage meurtrier. Rayna l'avait paralysé mais il était toujours conscient. Silencieux, celui-ci assistait à la scène. Une scène qu'il n'avait aucun droit de voir, une satisfaction que le demi-dieu ne le laisserait certainement pas savourer. "Tu en as assez vu et assez fait, malfaisant. Il est temps de dormir à présent." Les doigts posés sur le front du mage, Jason le plongea dans un sommeil profond à l'aide du pouvoir de Morphée.
Le dernier souffle de Lorch fut loin d'être paisible. Après un cri de douleur il s'embrasa dans les bras de Rayna qui faisait fi des flammes et de la douleur. Le coeur de Jason se déchira à cette vision. Elle était si forte et avait déjà tant souffert, bien plus que la plupart des gens sur toute une vie. Il ne s'inquiétait pas de ses blessures physiques, il la savait capable de s'en débarrasser, mais c'était de celles de son âme qu'il se préoccupait. Alors qu'elle s'écroulait il sentit le vent empli de son chagrin, s'intensifiant au son de ses larmes. Il s'approcha pour la réconforter mais un cercle de flamme se dressa devant lui, tout autour de Rayna et des cendres de Lorch. Une réaction inconsciente et magnifiée par le chagrin de la belle, que Jason ne pouvait que comprendre.

Mais il n'allait pas laisser ce mur de feu l'empêcher d'avancer. Il n'avait aucune envie de laisser Rayna seule avec sa peine. Bien sûr il y aurait un moment où elle aurait besoin de l'être, où la solitude aidait parfois plus que le reste, mais ce n'était pas un de ceux-ci. Sans hésitation aucune il fit un pas dans les flammes, les laissant glisser sur son armure, lécher son épiderme sans parvenir à le blesser outre mesure. Sans marquer d'arrêt il vint se poser à côté de Rayna, la rejoignant sur la terre sale, passant ses bras autour d'elle, lentement, tendrement. Il la laissait pleurer toutes les larmes de son corps, pendant que son vent vint se mêler au sien, ajoutant son empathie à son chagrin, changeant la brise fraîche en air d'été, doux, mais pas dénué de tristesse. Pour les flammes il ne pouvait rien faire, sauf en invoquant peut-être le pouvoir d'Héphaïstos, mais il n'en avait pas envie, ce n'était pas à ça que le pouvoir de son demi-frère servait... Alors qu'il laissa son armure disparaître dans ses volutes de lumière dorée, il susurra, calmement. "On peut rester ainsi aussi longtemps qu'il te faudra, on n'a pas besoin de bouger, et tu n'as rien besoin de dire. Je suis juste là pour toi, toujours..."
Au loin, en direction du festival, des pétards de lumières colorés éclatèrent, haut dans le ciel. Si la soirée s'était déroulée sans encombres, le feu d'artifice en aurait été l'apogée. A la place, il allait juste servir à distraire les badauds, les empêchant de s'aventurer de ce côté peu fréquenté du parc, et de découvrir ces drôles d'individus inconscients enracinés dans le sol, et cet encore plus étrange cercle de flammes au centre duquel deux personnes semblaient se tenir dans une étreinte...              

Tout, c'était tout ton monde qui s'ébranlait Rayna. Ce n'était pas "que" la mort de ton oncle qui provoquait cet immense chagrin en toi. C'était un tout, un tout si immense, si compliqué, que tu croulais littéralement sous son poids. La mort, le mensonge, la trahison, les secrets, la peur, la désillusion, le pouvoir, l'espoir, l'avenir... si incertain et sombre... En venant ici, sur Midgard, en combattant ces mages, tu avais cru enfin voir la fin mais tu prenais conscience ce soir que ce n'était que le commencement de quelque chose de plus grand, de plus fort. Quelque chose qui te dépassait complètement et dans lequel tu allais devoir pourtant jouer un rôle primordiale. Et à cet instant précis, après toutes ces révélations, après tout ce que tu avais déjà enduré, tu n'étais pas prête. Pas prête à l'accepter, pas prête à l'assumer. Tu ne craquais jamais Rayna Brodveldt, tu avais été élevée en ce sens. Tu n'étais pas une pleureuse ou une faible mais là... là, c'en était trop. Le feu symbolisait alors assurément ce bouclier protecteur que tu te construisais inconsciemment depuis des années. Ce bouclier que tu ne laissais absolument personne franchir. Il symbolisait aussi les flammes purificatrices qui effaçaient les faux semblants et remettaient tout en question. Elles balayaient tout sur ton passage, tes certitudes, tes projets, tes ambitions. Tu allais devoir tout revoir, tout questionner à nouveau pour comprendre et surtout te préparer au combat qui t'attendait. Tu ne luttais alors pas contre cet élément qui s'était manifesté presque malgré toi, tu le laissais accomplir sa tâche et t'encerclait de sa chaleur protectrice. Tu étais en harmonie parfaite avec les quatre éléments et parfois, c'était eux qui prenaient soin de toi, comme une entité à part entière et tu aimais cela, car grâce à eux, tu n'étais jamais vraiment seule. Malheureusement, ce soir, cette nuit, cela ne semblait pas suffisant. Ton cœur était bien trop meurtri et tu étais perdue, désemparée. Inconsolable...

C'est alors que deux bras forts et rassurants venaient t'encercler avec tendresse, ton cœur se soulevait et ton âme s'apaisait immédiatement. Jason... Tu regrettais qu'il ait assisté à ce spectacle, tu regrettais qu'il ait à te voir ainsi, qu'il ait à subir les affres de ton passé. Mais bon sang, qu'il était bon de le sentir tout près de toi à cet instant précis. D'ordinaire, et avec n'importe qui d'autre, tu aurais fuit, comme un animal blessé souhaitant qu'on le laisse en paix pour panser ses blessures et se relever. Mais tu ne voulais pas le fuir lui, tu ne voulais pas être ailleurs. Ses bras étaient le meilleur endroit que tu connaissais en ce monde et dans les autres. Non, tu ne voulais pas fuir cette fois Rayna Brodveldt, au contraire, tu venais te blottir tout contre lui. Tu acceptais son soutien et son réconfort, parce que tu en avais cruellement besoin. Parce qu'il était le seul à pouvoir te les apporter. Parce qu'il était le seul que tu voulais sentir à tes côtés. Tu saisissais alors ton amulette et prononçais quelques mots en arcadien, le sort que tu avais créé pour emprisonner les mages à l’intérieur. Ils étaient tous inconscients, ce n'était donc qu'une formalité. Ces hommes tu devais les libérer, comme tu l'avais fait pour Herrath avant qu'il ne trépasse, mais pas ce soir, pas maintenant. Tu n'en avais plus ni la force ni l'énergie. Alors en attendant, tu les faisais tout simplement disparaitre dans cette dimension de poche que tu avais créé spécialement à leur attention. Ils y resteraient endormis jusqu'à ce que tu puisses enfin les libérer et en faire tes alliés. Car des alliés, tu en aurais assurément besoin à ton retour sur Arcadia. Plus encore, c'est une véritable armée qu'il te faudrait et peut être bien que ton père te l'avait fourni malgré lui en envoyant tous ses hommes sur Midgard. Mais tu verrais tout cela plus tard, pour le moment ils étaient hors d'état de nuire et toi, toi tu devais te ressaisir. D'un simple mouvement de main, tu faisais alors également disparaitre les cendres de ton oncle qui réapparaissaient dans une urne funéraire sur la commode de ta chambre au manoir de Zatanna. Tu ne voulais plus voir rien d'autre que Jason, tu ne voulais plus sentir rien d'autre que Jason.

Une demi-heure, une heure? Tu n'aurais su dire combien de temps tu étais restée ainsi dans ses bras et ça n'avait pas la moindre espèce d'importance. Il te l'avait murmuré, tu pouvais prendre tout ton temps, il serait là, toujours. Ces mots... ces mots forts et émouvants t'avaient touché en plein cœur. Ils étaient d'un réconfort et d'une sincérité absolus. Ils étaient aussi absolument réciproques, toi aussi tu serais là pour lui, toujours. Mais les mots te manquaient pour le lui dire, tu avais simplement besoin de ce silence qu'il t'avait proposé. Ce n'était bien sûr que partie remise car un jour, un jour tu lui ouvrirais ton cœur et tu lui dirais tous ces mots qui te brûlaient les lèvres. Tu lui ferais sentir à quel point tu l'aimais, à quel point il était spécial et exceptionnel à tes yeux. Mais pour l'heure, tu ne voulais plus parler, tu voulais simplement t'abandonner à ce réconfort incomparable et indispensable. Tu te sentais apaisée et protégée à ses côtés, et, au fur et à mesure, petit à petit, les flammes s'amenuisaient. Un couple s'était aventuré par là mais tu leur avais jeté un sort d'illusion afin que vous et tout ce qui vous entourait restent invisible à leurs yeux. Ton oreille collée contre le torse de Jason, tu te laissais bercer par les battements de son cœur, réconfortants, relaxants. Ils battaient désormais à l'unisson avec les tiens. Jamais tu n'avais senti une telle osmose avec une autre personne, c'était troublant mais aussi incroyablement délectable. Tu comprenais alors que c'était justement à cela que tu devais t'accrocher, dans cela que tu devais puiser ta force. Tu devais te soucier avant tout des vivants, de ceux dont le cœur continuer à battre. Tu n'oublierais jamais ceux et celles qui vous avez quitté prématurément, c'était une certitude, mais tu ne devais plus t'enfermer dans cette douleur, dans cette noirceur, que cela provoquait en toi. Non, tu devais te concentrer sur les vivants, sur l'amour et la force qu'ils avaient à t'offrir comme Jason le faisait si bien à cet instant précis. Tu déposais alors un tendre baiser sur son torse, là où son cœur battait sous la surface. Puis tu relevais les yeux vers lui, ton visage semblait plus serein et apaisé. Tu aurais pu alors l'embrasser, l'instant pouvait s'y prêter. Mais tu ne voulais pas que votre premier baiser, celui que vous n'oublierez assurément jamais, ait lieu en cet endroit, en cet instant, là où ton oncle avait poussé son dernier soupir, là où ton monde s'était écroulé. Tu voulais un instant et un lieu rien qu'à vous pour sceller votre amour et vos destins.

D'un mouvement tendre, doux et aimant, tu caressais lentement sa joue, plongeant ton regard dans le sien. Tu aimais tant ce sentiment de protection inébranlable qu'il te faisait ressentir. « Merci... » Soufflais-tu tandis que les flammes disparaissaient complétement autour de vous. « Merci d'être là, merci d'être toi... » Tu hésitais un instant à poursuivre, à dire ce que tu ressentais, puis finalement, tu te jetais à l'eau. Jason avait tout vu de toi, tu n'avais plus à être gênée de lui faire part de tes désirs, des tes angoisses, de tes attentes. Tu pouvais tout lui dire, tu voulais tout lui dire. « Je ne veux pas être seule cette nuit Jason. Je ne veux pas être loin de toi... J'aimerais m'endormir dans tes bras. Emmène moi loin d'ici s'il te plait. » Bien évidemment, il ne s'agissait que de cela, dormir dans ses bras, tu n'étais pas prête pour davantage et la situation n'était absolument pas propice à plus de passion. Tu voulais simplement prolonger ce moment dans ses bras, oublier tes problèmes et tes malheurs, même si cela n'était que l'espace d'une nuit. Et c'était uniquement dans les bras de Jason que ce prodige serait possible, tu le savais. Il pouvait bien sur refuser, après tout, il ne devait pas avoir l'habitude de partager le lit d'une femme d'une manière aussi pure et chaste. En tout cas c'était ce que tu imaginais. Tu ne voulais rien lui imposer. Tu ne pouvais prédire comment il réagirait à ta requête, mais au vu de tout ce qu'il t'avait montré jusque là, tu le soupçonnais de bien vouloir y répondre favorablement, tel le véritable gentilhomme délicat et bienveillant qu'il était.

AVENGEDINCHAINS

Time is but a concept when I'm with you.

Combien de temps étaient-il restés ainsi, sans bouger, en silence au centre de ce cercle de flammes? Jason ne s'était pas donné la peine de compter. Même dans des instants sombres et solennels comme celui-ci, le temps perdait son importance. Le monde pouvait bien s'arrêter de tourner, ici il n'y avait qu'elle et seulement elle qui méritait son attention. On avait clairement passé le stade de l'attirance et de l'envie, malgré le fait qu'ils n'aient encore rien fait de concret, les considérations de Jason envers Rayna allaient déjà bien au delà de ça. Objectivement ils n'avaient pas passé tant de temps que cela ensemble, ils ne se connaissaient que depuis très peu de temps et pourtant, lui se sentait déjà prêt à faire tant de choses pour elle. Il voulait son bonheur, sa réussite bref, elle était devenue en quelques rencontres à peine une personne importante dans sa longue et incroyable vie. Et les évènements de ce soir avaient plus que jamais confirmé cela.
Lorsqu'il vit Lorch possédé la plaquer contre un arbre avec sa force surhumaine, son sang n'avait fait qu'un tour. Les autres mages n'avaient plus aucune espèce d'importance, le danger qu'ils pouvaient représenter, complètement ignoré. Il n'avait plus eu qu'une seule pensée, celle de vouloir la sauver. Pire encore à l'arrivée des renforts. Mais malgré tout ça, son instinct, son calme et son expérience ne permirent pas d'empêcher la suite. Trop focalisé sur Rayna, il ne put empêcher l'oncle de celle-ci de subir le coup qui mit fin à son existence. Il ne s'était d'ailleurs pas imaginé que le coup deviendrait fatal. Parfois il oubliait la fragilité des mortels et surtout, il sous-estimait le pouvoir de la magie. Une leçon qu'il gravait désormais bien profond dans son esprit, car s'il devait aider Rayna pour la suite, la magie il aurait à faire à elle bien plus d'une fois...

Mais il ne servait à rien de penser à l'avenir. Il y avait déjà assez d'angoisses liées à l'incertitude du lendemain, d'abord Brainiac et maintenant ceci. Non, l'instant présent était bien plus important, Rayna avait besoin de Jason et c’était pour cela qu'il était là avec elle au coeur des flammes. En la voyant conjurer le sort amenant les mages inconscients à l'intérieur de son amulette, son coeur s'allégea un peu. Plus encore lorsqu'elle envoya les cendres de son oncle dans une urne vers une pièce qu'il ne connaissait pas, sans doute son lieu de résidence. Si elle était déjà assez forte pour faire ces choses là, elle allait pouvoir s'en remettre, ou au moins aller de l'avant. Et si elle trébuchait et bien il était là, toujours, il le lui avait dit. En apercevant un couple au loin commencer à s'aventurer dans leur direction, Jason se crispa légèrement. Les flammes étaient encore bien visibles et n'avaient clairement rien de naturel, mais une fois encore, Rayna fut sur le coup. De quelques petits gestes élégants elle avait lancé une illusion, les rendant parfaitement invisibles aux yeux des deux humains. La magie était si différente des pouvoirs divins. Ca avait un côté bien plus complexe, intriguant, à chaque fois qu'il avait eu la chance d'y assister au cours de sa vie, Jason en était toujours émerveillé. Dans cette situation précise il était surtout rassuré, mais pas seulement car ils étaient désormais à l'abri de toute attention. Il le sentit, après le baiser qu'elle vint poser, son corps contre le sien. Leurs coeur battaient à l'unisson, sereins. Maintenant plus que jamais il en était convaincu, le pire était derrière eux, du moins pour aujourd'hui...

Il se contenta de lui sourire lorsqu'elle le remercia pour sa présence. Les mots étaient inutiles, il avait déjà dit ce qu'il avait à dire. La suite des paroles de la belle était plutôt inattendue mais pas insensée, que du contraire. Bien sûr qu'il ne la laisserait pas dormir seule cette nuit, après tout une fois encore il l'avait dit, il était là pour elle. Les flammes enfin dissipées il se leva, tendant sa main pour l'aider à faire de même. "Entendu..." Il lança un regard vers sa bicyclette, remplie à ras bord de leurs gains. "Pourrais-tu peut-être d'abord envoyer mon vélo dans ma boutique? Il ne nous servira pas là où nous allons." A nouveau il la regarda faire, non sans fascination. Comme c'était étrange d'apercevoir le centre de sa boutique à travers ce trou formé au milieu du vide... Lorsqu'elle eut terminé il la prit dans ses bras, comme la princesse sans défense qu'elle n'était certainement pas mais juste pour cette fois, elle allait devoir s'y plier. Car toute autre position allait s'avérer soit inconfortable, soit bien peu pratique. "Rentrons." Sur ces mots ses pieds quittèrent le sol et progressivement ils s'élevèrent, jusqu'à ce que les lumières du parc ne soient plus que de lointains petits points, bien des mètres plus bas. Il n'en avait pas l'air mais Jason vola assez vite, suivant le vent, évitant les courants contraires et les températures faibles des trop hautes altitudes. Depuis qu'il avait découvert l'existence de son ascendance divine, il avait plutôt été le vent au lieu de juste son passager. Mais par le passé il adorait voyager ainsi, volant tel un oiseau sur de longues distances. Il y eut donc sur le moment une certaine nostalgie, qu'il garda tout de même pour lui. Si elle prêtait attention plus bas, dans l'obscurité de la nuit désormais tombée, Rayna pouvait voir Metropolis défiler puis s'éloigner derrière eux. Un spectacle magnifique mais peut-être aussi un peu effrayant, à moins que les bras de Jason ne soient sécurité suffisante à ses yeux...

Au bout d'un petit quart d'heure de vol Jason amorça la descente. La zone dépendait certainement toujours du même État que Metropolis, mais les lieux avaient un aspect bien plus rural, et calme surtout. Jason posa alors le pied devant une jolie maison de campagne, dans un grand domaine fermier. Une grange siégeait plus loin sur la droite, et l'on pouvait deviner un énorme jardin à l'arrière de la maison à cause des nombreuses plantes et arbres qui le peuplaient, de manière assez extraordinaire d'ailleurs. Laissant Rayna quitter ses bras et retoucher le sol, il alla lui ouvrir la porte de la maison. "Bienvenue chez moi. Enfin, le chez-moi que j'occupe le plus en ce moment." De par son travail et ses habitudes, Jason avait bien évidemment des résidences un peu partout dans le monde. Mais depuis sa réunion avec Diana, cette maison était clairement celle qu'il pouvait considérer comme son domicile officiel. L'intérieur était confortable mais pas chargé. Ci et là, quelques pièces de sa collection décoraient les lieux, avec également quelques autres plus contemporaines. Rien d'extravagant, toujours dans l'élégance. Le reste de la maison avait cet aspect rural très chaleureux, sans paraître arriéré pour autant. Mais la visite pourrait attendre demain. Sans trop attendre, Jason conduisit Rayna vers la chambre à l'étage. Là également tout était propre et élégamment aménagé. Un large balcon était orienté sur l'immense jardin, qui vu d'ici ressemblait d'ailleurs plus à un mini écosystème qu'à un véritable jardin. Une certaine fille du Green était responsable de ça mais c'était une histoire à raconter une autre fois. Après avoir indiqué une porte dans un coin de la pièce, Jason expliqua, avant de disparaître quelques instants: "La salle de bain se trouve là, je te laisse te mettre à l'aise." Il revint plus tard affublé d'un pantalon de pyjama, d'un simple t-shirt et s'installa sur le lit, à côté d'elle. Plongeant son regard dans le sien une dernière fois, il posa un baiser son front, l'entourant ensuite de ses bras. "Je suis désolé pour tout ça... Laissons cette nuit panser ton âme, demain on réfléchira à la suite, ou pas, c'est comme tu voudras." Tendant le bras pour éteindre la lumière, il laissa le sommeil faire son oeuvre, son coeur encore en rythme avec le sien.