Il faut savoir faire des sacrifices - garth.

il faut savoir faire des sacrifices
arthur & garth

Je naviguais en eaux troubles. Depuis que le Syndicat du Crime avait déplacé la lune de sa place initiale, les océans avaient du mal à reprendre leur rythme. Les mouvements de la Lune et les changements dans la gravité avaient modifié les marrées et il avait fallu toute la technologie atlante pour limiter la casse. Et quand je dis limiter, j’entends bien évidemment éviter que d’autres villes finissent comme Métropolis. Cela demandait beaucoup de travail mais éventuellement, nous avions limité la casse. Pour autant, il n’en restait pas moins que les océans avaient pris un sérieux coup. En me déplaçant entre Washington – où j’avais passé la nuit – et Atlantis, je pouvais une nouvelle fois constater que la flore était agitée au possible et que la faune aquatique avait subit de sérieux ravages. Je pouvais voir des milliers de plantes aquatiques déracinées par les mouvements brusques, les coraux qui se brisaient en mille morceaux, tout l’équilibre océanique en avait pris un coup. Et malheureusement, nous ne pouvions pas faire grand chose. Le plus malheureux dans cela, c’est qu’il allait éventuellement falloir remettre la lune en place et que cela engendrerait de nouveaux mouvements brusques. En bref, quoiqu’il arrive, si nous devons sauver la Terre, il va falloir l’abimer un petit peu. Putain de Syndicat du Crime, si je tombe sur l’un d’entre eux, je lui casse une dent, à défaut de pouvoir faire mieux. J’avais eu leur équivalent Lantern entre les mains, mais il nous avait échappé. Nous nous étions engagé dans un combat avec Kyle et Carol Ferris – oui, je l’avais reconnu finalement – contre Orm et Sinestro qui en voulaient à son pouvoir. Je savais que sa mort aurait été plus efficace mais Kyle avait raison, on avait besoin de lui à ce moment-là pour récupérer des infos sur le Syndicat. Et puis Arthur n’aurait sûrement pas aimé que je participe au meurtre d’un super vilain. Moyen pour Atlantis.

C’est d’ailleurs lui qui m’avait convoqué et c’était la raison de mon retour à Atlantis. Ces derniers temps, j’avais passé un peu moins de temps dans la cité aquatique. Entre les Teen Titans, Washington et Cassandra, j’avais passé plus de temps sur la terre ferme. Et je savais que cela ne déplaisait pas Arthur. C’était lui qui m’avait ordonné de sortir les pieds de l’eau et apprendre à les connaître. Mon rôle était de promulguer Atlantis parmi les humains, en quelque sorte. Et ces derniers temps, j’avais l’impression de faire un meilleur travail. J’avais sympathisé avec des gens, j’avais appris à montrer qu’Atlantis n’était pas une cité obscure mais une cité de lumière, elle aussi. Et c’est lorsque j’arrivais à faire comprendre cela aux humains que je comprenais ma mission et que je l’appréciais, presque. Je m’étais fais des amis et je commençais de faire changer des opinions, que demander de plus ? Maintenant, la mission la plus difficile, c’était de faire changer l’opinion des atlantes sur les humains. Ça, c’est pas gagné. Les atlantes sont aussi têtus que je l’étais au moment de mon « déménagement ». Autant dire que la mission est rude et compliquée. Il n’empêche que j’avais du mal à identifier les raisons pour lesquelles Arthur m’avait convoqué. Ces derniers temps, nous nous rencontrions peu. Je faisais souvent mes rapports par écrit et je ne le croisais que guère. Bien souvent, nous faisions l’alternance, je rentrais à Atlantis quand il n’y était pas et inversement. Son objectif devait sûrement être d’avoir un atlante parmi les humains à tout moment. Je ne saurais l’expliquer. Je ne pensais pas avoir fait de bêtises particulières. La seule chose qu’il pourrait me reprocher, il n’en a pas connaissance. Du moins, je doute de savoir comment. Et quoiqu’il en soit, pour l’instant, je doute que ça mettre les relations diplomatiques d’Atlantis. Au contraire, cela peut forger des alliances ce qui ne serait pas pour lui déplaire, j’imagine.

J’arrivais finalement dans la salle du trône. J’avais réussi à éviter bon nombre de mes camarades. Je ne voulais pas passer des heures à discuter pour ne rien dire et me rendre compte que j’étais en retard. Je détestais le retard. Dans la salle du trône, il n’y avait que Murk. Il me lança un regard sombre – comme toujours. « Salut, tu sais où est Arthur ? ». Je voyais à son regard qu’il n’avait pas forcément envie de me parler. Je n’avais jamais compris pourquoi, d’ailleurs. « Le ROI Arthur est actuellement en réunion du conseil, il te rejoindra plus tard. ». Ah. Merci pour le renseignement. Toujours un plaisir de converser avec toi, Murk… Il disparu finalement de la salle du trône, me laissant seul avec moi-même. Juste le temps de gamberger comme il le fallait. Après quelques minutes, le roi arriva. Il me gratifia d’un léger sourire et sans attendre plus, il m’énonça la raison de ma convocation. Il avait besoin de moi à Atlantis. La ligue allait reprendre le combat contre le Syndicat et il me voulait dans la cité pour sa protection. J’étais un peu perplexe et la nouvelle me tomba dessus sans réelle préparation. Je ne savais pas si je devais être honoré, énervé ou déçu de sa nouvelle. Je pensais que si j’étais parmi les humains, c’était justement pour aider dans ce genre de crises. Je me retournais vers lui, un regard interrogateur. « Je pensais que les Titans participaient au combat… ». Ma voix grave laissait bien sous-entendre que je n’étais pas particulièrement d’accord avec sa décision. Quoiqu’il en soit, je m’y plierais, il est mon roi, sans parler du fait que je l’avais choisis en tant que roi, j’aurais très bien pu rester à l’écart si je l’avais voulu. « C’est à cause de la débâcle de Métropolis, c’est ça ? Tu me punis pour cela ? ». J’étais un des rares atlantes à tutoyer le roi. La raison étant qu’il était mon ami avant d’être mon roi. Je l’avais toujours vu comme cela. Quoiqu’il en soit. Je m’éloignais lentement du roi et me rapprochait d’un mur où j’abattais mon poing dessus. Les murs atlantes étaient plus solides que ceux des humains, il n’y avait donc aucun moyen que je lui fasse du mal. « Je te promets que je n’y suis pour rien. Je ne suis pas Mera, j’étais incapable d’arrêter le raz-de-marée… J’ai tout essayé, j’étais au bord du malaise. Et… j’ai eu un choix à faire. Je ne pouvais pas laisser Kyle mourir aux mains de son équivalent topaze… ». J’étais persuadé que c’était pour cela qu’il me confinait à Atlantis. Je ne pouvais imaginer d’autres raisons.

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Je regardais le roi d’Atlantis avec un mélange de trouble et d’énervement. Un énervement montant. Je n’avais pas envie de rester les bras ballants à Atlantis. J’avais d’autres choses à faire. Et sa réponse me suffisait à comprendre une chose : oui, les Teen Titans allaient aider. Mais je n’étais apparemment un assez bon Teen Titans pour être intégrés à ces derniers. Je n’étais bon qu’à rester à Atlantis pour éviter tout problème diplomatique ? Pour qui me prenait-il ? Je n’étais plus un enfant qui avait besoin d’être supervisé. J’avais déjà suffisamment de problème avec l’idée de supervision de la Justice League pour qu’en plus, il m’empêche de faire mon travail correctement. Qu’allais-je faire que Mera ne serait pas capable de faire ? Elle est une bien meilleure magicienne que moi, elle est capable de défendre la cité mieux que quiconque. Alors pourquoi moi ? D’autant plus que j’étais persuadé que les habitants de la Cité avaient toujours un problème avec moi et qu’ils ne me faisaient pas totalement confiance. En bref, tout me portait à croire que je n’étais pas le candidat idéal pour cette mission. J’étais, au mieux, la seule personne, mais clairement, il y avait bien des personnes capables de protéger Atlantis. Tula, Murk, Mera et j’en passe et des meilleurs. Je passe la majorité de mon temps sur la terre ferme et Arthur également, aucun cataclysme n’est arrivé à la Cité. Au contraire, elle s’en sort plutôt bien au vu des événements qui ont secoué les nations humaines. D’où mon étonnement, mon trouble et mon énervement. Quoiqu’il arrive, j’allais me plier à la décision de mon roi, mais franchement, ça me faisait royalement chier. Sans mauvais jeu de mots.

« Personne d’autre que moi ? ». Je croyais m’étouffer. Je le regardais, l’air béat. « Tu as une armée entière ta disposition, une garde personnelle, des combattants tout aussi doués que moi et bien plus fédérateurs. Que vais-je faire de plus qu’eux ? ». Car oui, qu’allais-je faire pendant tout ce temps si ce n’est tourner en rond – littéralement – en attendant que les choses bougent. En gros, la seule manière que j’avais de ne pas être inutile totalement dans son scénario, c’était en cas d’attaque de la cité. Ce que je ne souhaitais bien sûr pas. Ses mots se voulaient rassurant mais ça ne fonctionnait pas. Tout ce que j’entendais c’était un blabla visant à me faire croire que j’étais le mieux placé pour cela. Ce en quoi je ne croyais pas du tout. J’étais persuadé que j’aurais été bien plus utile à la surface qu’à Atlantis. Il n’y aura jamais assez de combattant contre le Syndicat du Crime alors qu’Atlantis est pleine de réserve concernant ses défenses. Avec le Sea Master hors d’état de nuire, Atlantis était probablement l’endroit le plus sûr de la planète concernant la sécurité des habitants. Je gardais tant bien que mal mon calme en regardant Arthur. « Les atlantes ne sont pas prêts à aider à la surface mais je le suis. Je m’en contrecarre de leurs avis. ». J’avais cette tendance à rester malpoli même en présence de mon roi. Là, je n’étais plus son sujet, j’étais son ami. Je lui parlais en tant que tel. Car s’il ne pouvait pas comprendre les plaintes d’un sujet, il pouvait comprendre celles d’un ami. Trop de choses étaient en jeu, je ne pouvais pas laisser les choses comme cela.

Car une autre pensée me venait en tête. Celle de Kyle, Wally, Koriand’r, Artémis, Lilith, Victor, Garfield, morts au combat avec au-dessus de tout, le visage de Cassandra ensanglanté. Ce qu’il me demandait c’était de les abandonner à leur triste sort. Or, je n’étais pas capable de cela. Je n’étais pas capable d’abandonner mes amis. « Tu me demandes de rester derrière pendant que mes amis vont se battre ? Tu me demandes d’abandonner mes amis ? Tu me demandes de t’abandonner toi ? Qui va veiller sur toi ? Que se passera-t-il si tu meurs au combat ? T’y as pensé à ça ? Là, on parle du Syndicat du Crime, pas du petit méchant du coin ! On parle d’un véritable danger ! Mon devoir est également de te protéger. Je ne peux pas faire ça ici ! ». Je me retournais, face au mur, les yeux fermés. « Je ne peux pas rester les bras ballants ici pendant que mes amis jouent leur vie. C’est toi qui a insisté pour que je rejoigne les Teen Titans. Et maintenant que je commence à m’intégrer à l’équipe, tu me demandes de les abandonner. ». Il pouvait peut-être, au moins, comprendre cela.

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Je nourrissais progressivement une certaine rancœur vis-à-vis de mon roi. Il ne s’agissait pas uniquement du fait qu’il me demande de rester à Atlantis alors que ma place n’y était pas mais plus du fait que je ne pouvais soutenir une telle décision. Il n’y avait pas de fondement, il n’y avait pas de logique. Pourquoi rester à Atlantis ? À quoi bon perdre un atout sur la surface alors que l’armée atlante est largement capable de se défendre, alors que Mera, à elle seule, a probablement de quoi stopper n’importe quel assaillant, probablement plus facilement que l’armée et moi-même réunis. Donc non, la logique, je ne la voyais pas. Si j’étais un tant soi peu accepté par les atlantes, je n’en restais pas moins un paria. Affublé de plusieurs noms, j’étais toujours d’une certaine manière soit le maudit, soit celui qui avait trahis les siens pour la surface. En bref, à Atlantis, je n’avais guère plus de poids que Mera. Nous étions tous les deux protégés par notre Roi. Nous avions un statut particulier parce qu’Arthur le voulait. Notre légitimité n’était pas parfaite, loin de là. Et j’avais découvert avec une certaine surprise que j’avais bien souvent plus ma place à la surface qu’ici. À la surface, certes, j’étais toujours l’atlante, le « poisson » comme ils aiment à dire. Pourtant, j’avais trouvé des amis, de vrais amis, des gens qui me soutiennent, des gens qui me respectent. Il y avait bien sûr Kyle, Artémis, les Teen Titans sans parler de Cassandra qui avait représenté, ces derniers temps, un support de taille. Elle m’avait écouté quand j’en avais besoin, soutenu quand il le fallait. Sur Atlantis, mes amis, mes alliés étaient restreint. Les gens en qui j’avais réellement confiance se comptaient sur les doigts de la main : Mera, Arthur, Tula. Même Murk avait toujours un œil inquiet me regardant. Car oui, quoiqu’il arrive, je serais toujours l’intrus. Même parmi les atlantes.

J’écoutais Arthur d’une oreille attentive, avec une oreille d’ailleurs bien plus attentive que celle qu’il m’avait porté, visiblement. Car ses mots marquaient un réel mépris pour mes craintes. Car si je voulais lui parler en tant qu’ami, Arthur avait décidé de me parler en tant que roi. Il savait l’effet que cela avait sur moi. Cela avait cet effet car contrairement à la majorité des habitants d’Atlantis, j’avais décidé de moi-même de me placer sous sa direction, sous ses ordres. Et c’était parce que je m’attendais à l’époque à un roi juste et attentionné, ce qu’il était la majorité du temps. En revanche, lorsqu’il utilisait son pouvoir pour m’imposer des décisions que je ne respectais pas, là, j’avais une certaine tendance à me braquer, à ne plus forcément l’écouter. Mais, malgré tout, je l’écoutais, chaque parole, chaque argument, je l’ingurgitais comme s’il m’en était vital. Et ce n’était pas de bonté de cœur. Car il y avait une autre chose qu’Arthur savait de moi, une autre chose qu’il n’oubliait pas, du moins je l’espère. J’étais rancunier, très rancunier. Et s’il se faisait un plaisir de me rappeler mes paroles du passé, si les choses venaient à mal tourner, j’étais persuadé qu’à un moment ou à un autre, je me ferais ce même plaisir. Je n’étais pas le petit héros parfait comme lui. Je n’enfilais pas un collant pour lui faire plaisir. Et, surtout, contrairement à lui, je n’avais pas confiance ne la Justice League. Je les considérais plus souvent comme une équipe de moralisateur, prête à tout pour donner des leçons aux plus jeunes qu’autre chose. Les tutelles opérées sur les deux équipes de super-héros et me rendait malade. Les occasions de prouver notre valeur se faisaient rares et j’en loupais une nouvelle.

« D’accord, je vois. Si tu veux user de ta sacro-sainte parole royale, fais-le, je resterais ici, je protègerais Atlantis. En revanche, je te rappellerais une chose, une chose qu’un conseiller est censé rappeler à son roi, car c’est également un de mes rôles : si les choses se passent mal et si, comme tu le dis, un jour tu n’es plus là, une seule personne a la légitimité pour prendre le trône et c’est ton frère, et, ce jour-là, tout ce que tu as construit jusqu’ici disparaîtra. Mera sera poursuivie comme une criminelle simplement pour t’avoir épouser. Tula et moi seront considérés comme des chiens. Et si j’ai en horreur la simple idée de me battre contre mon peuple, je me dresserais fièrement contre la folie de ton frère et contre Atlantis s’il le faut. » Je l’observais d’un regard vide, me dirigeant lentement vers la sortie de la salle du trône. « Alors en tant qu’ami et conseiller, je te conseille de revenir vivant. » J’attrapais le sac que j’avais laissé vers l’entrée de la salle du trône et je poussais lentement la porte. « J’ai des choses à régler avant de pouvoir exécuter ton ordre, une équipe et des amis à prévenir, je serais de retour à Atlantis dans deux jours. »