SEVEN SINS ✸ (soirée Métropolis, groupe 1)

Il n'y a rien de drôle à se rendre compte qu'on est une névrosée accroc au sexe... Bien sûr, je n'en suis pas à ce point-là. Enfin, je peux m'en passer. D'ailleurs, ça m'arrive de le faire assez longtemps entre deux conquêtes. Mais là, depuis quelques jours... J'en suis là. Soumise à des désirs charnels tellement ardents que le brasier est dévorant. Je me passe une main derrière la nuque. Floyd synthétise ce que je viens de dire, avec des mots très crus et je le fusille un peu du regard mais je ne dis rien. A quoi cela servirait-il ? Layla reprend la parole. Elle répond en posant d'autres questions. Elle évoque le film Seven et je souris un peu, en acquiesçant un peu. Je ne sais pas si c'est ça exactement, mais en l'occurrence, ce sont bien les péchés capitaux qui sont évoqués dans ce film et qui sont notre problème ce soir. Un souffle capiteux. La suite me fait froncer les sourcils. Floyd tente de détendre l’atmosphère, mais cela ne marche pas très bien. Quant aux paroles de Layla, elle me révolte un peu. Mais elle devance mes protestations ce qui me tire un sourire amusé. Je secoue la tête de gauche à droite. Nous nous en sommes sorti, mais est-on vraiment indemnes ? Je n'en sais rien. J'en doute. Je pense surtout à Layla, possédée par cette enfant. Pas mal de questions me traversent et d'inquiétudes aussi. Va-t-elle bien ? Ce n'est surement pas le moment de le lui demander. Mais ce qu'elle dit n'est pas totalement idiot. Pour une fois, j'ai le droit d'être un peu égoïste. Finalement, je me penche pour attraper une bière. J'ai bien le droit. Même si je me sens déjà dans un état second, tant pis. Ils me repousseront maintenant qu'ils savent. Zatanna prend la parole à son tour. Elle nous explique que cela est une magie plus ancienne. Qui existe depuis que l'homme existe. Je la regarde simplement songeuse. La manifestation de notre propre faiblesse. Je souris un peu et baisse les yeux un instant. Une grande faille. Mais rien ne saurait nous apaiser hormis le fait d'emprisonner à nouveau les péchés. Alors je demande : « Le mythe de Pandore est fondée ? Elle a vraiment existé ? Elle et sa boîte ? ». Puisqu'il faut les enfermer, cela semble accorder un certain crédit au mythe qui raconte l'histoire de Pandore et des péchés capitaux. Ceci dit, savoir qu'il faut les enfermer, c'est une chose, mais la question principale reste la façon dont on peut le faire. Alors je demande : « Comment on fait, pour les emprisonner à nouveau ? ». Non parce que... Il faut que ça s'arrête. Avant que je ne finisse par violer quelqu'un.

Plusieurs sorciers. Elle demanderait bien lesquels, mais elle a déjà envoyé pas mal d'infos à Steve et à Jason. Je ne vais pas en envoyer encore. Cependant, je relève mon regard sur Floyd et je demande l'air de rien : « Ca ne te dit rien ? Un sorcier capable de relâcher les péchés capitaux. Enfin... Une sorcière. Satan. Waller ? ». Après tout... ça serait bien le genre de Waller. Je n'ai pas besoin des dossiers de S.H.A.D.E pour le savoir. Il me suffit de regarder Luka. D'écouter Steve en parler. Waller est un monstre. Je ne serais pas étonnée qu'elle soit impliquée. D'ailleurs, sa présence ici est assez surprenante, non ? Il est peut-être là en mission pour elle. Et je me fiche bien de le dévoiler. Si Layla n'est pas au courant, elle mérite de l'être avant d'aller plus loin avec lui. Savoir dans quoi elle s'engage. Waller est un vrai démon. Un danger. Et je m'inquiète de savoir que Layla gravite autour de l'un des membres de sa suicide squad. Zatanna n'a pas de solution pour nous aider à affronter cela. J'imagine qu'il faudra souffrir encore quelques temps, le temps que la Justice League ou n'importe qui qui en soit capable réussisse à maîtriser tout ça et à renvoyer les péchés là où ils devraient être. S'isoler. C'est déjà un peu le cas. Je me suis éloignée de Washington pour ne pas me jeter sur Luka qui a déjà eu à essuyer une fois mes désirs incontrôlables. Heureusement... Cela devait être le début, j'ai réussi à me reculer, à me stopper avant d'aller trop loin. Mais quand même. Quelle image cela renvoie de moi ? J'ai honte. Vraiment. « Au moins on le sait maintenant. On sait que ce n'est pas normal. On sait qu'on doit faire attention ». Je bois plusieurs gorgées de bière avant de les regarder à nouveau. Cela sera peut-être plus simple pour moi que pour eux. Enfin, surtout elles. La colère est difficile à maîtriser. Surtout si elle est si intense. Quant à Floyd, il préfère ressentir ça plutôt que rien du tout. Moi, je m'en passerais bien. Franchement. Les bouffées de chaleur, les envies irrépressible. Non merci. Il questionne sur Amy. Je ne sais pas trop quoi dire de plus. Je ne peux m'empêcher de penser qu'il n'est pas là pour rien. Heureusement que je ne suis pas parano. Sinon, cela aurait été une vraie obsession.

Spoiler:

Seven Sins

Aux questions de Tracy, Zatanna ne put que hausser les épaules. Tout était toujours vrai, chaque mythe, chaque légende urbaine, ce n’était pas bien sorcier à comprendre – aha. Cependant, l’interrogation dans la voix de Tracy la ramena quelque temps en arrière, un temps plus apaisé où toutes deux, assises sur un banc, avaient joué à ce jeu de questions-réponses, qu’à l’époque Zee avait trouvé inoffensif. Elle, elle pouvait bien penser à plusieurs personnes capables de faire une chose pareille, capables en termes de pouvoir. Qu’ils en aient la volonté, en revanche, c’était autre chose, ça la foutait trop en l’air pour qu’elle veuille y réfléchir plus avant. Et puis : Waller ? Pourquoi fallait-il que le nom de cette garce apparaisse dans toutes les discussions, ces derniers temps ? Elle eut une expression agacée alors que son regard allait de Tracy à Floyd, et de nouveau quand Floyd interrogea Layla sur Amy, sans avoir conscience qu’en cette seconde, sous l’influence de la magie des péchés, lui et le petit fantôme partageaient des points communs. Fuite, aveuglement, égocentrisme ou simple incompréhension, tout se mélangeait en une perte de temps et d’énergie, un instant d’apaisement que tout son être rejetait, elle ne voulait pas s’asseoir, elle ne voulait pas être calme.

Elle se leva et, passant à côté de Layla, lui tendit la bague de Zach. « Tu n’es pas forcée de me faire confiance à nouveau, mais ce sort de protection est bien réel, lui. » Sans attendre de réponse, elle se mit à faire les cent pas pour se défouler, marchant le long de la digue et des bateaux amarrés, laissant les autres à leur conversation, sentant la colère monter de nouveau, inexorable, telle la marée immuable et éternelle. Si tout le monde s’en foutait, pourquoi aurait-elle donc dû trouver un moyen de les libérer ? Et même si tout le monde ne s’en foutait pas ? Elle ne devait rien à personne. Tu ne leur dois rien. Les hommes commettaient toujours les mêmes erreurs, étaient toujours butés, aveugles et sourds, refusant la vérité sous quelque forme que ce soit, tout prêts à perpétrer encore et encore les mêmes conneries, alors pourquoi se fatiguer ? Et s’il en meurt, un ou deux, ou beaucoup, à qui est-ce que ça profitera sinon à nous ? Cheminement de pensée, comme un cercle vicieux, qui ne faisait qu’attiser sa rage.

Incapable de prendre une décision dans un sens ou dans un autre, de lâcher prise ou au contraire d’insister encore pour tenter de leur faire comprendre la situation, elle serra les poings, debout face à l’eau du port lisse et noire, laissant échapper de nouveau un cri silencieux, sentant la magie, comme une soupape, s’échapper d’elle, créant une onde légère sur les flots et faisant tanguer doucement les navires. Quelques jours encore auparavant, elle s’était crue au paradis. Elle avait cru que le temps pouvait s’arrêter. Elle aurait dû le faire, sur cette plage, figer le temps, et elle avec, à jamais. Elle hésitait à l’appeler pour savoir comment il allait et lui demander ce qu’il pensait de tout cela. Mais la rage, et une voix pernicieuse lui disaient qu’elle n’avait pas besoin de lui, un paradoxe pour elle qui savait qu’elle avait toujours besoin de lui. Qui d’autre pouvait l’aider ? Jason ? Nick ? Va te faire voir ! Fate ? Teth ? June ? Pendant quelques minutes encore, elle égrena la liste des mages, sorciers et entités magiques qu’elle connaissait, plus pour compter les moutons magiques qu’autre chose. Dans le groupe, on évoquait désormais Waller, avec qui Tracy et Floyd semblait avoir quelques accointances. Un jour, dans une autre vie, elle avait cru bien faire en conseillant la prudence à Tracy. Elle s’imagina en train de serrer le cou de l’horrible bonne femme - Waller, pas Tracy - jusqu’à ce que ses globes oculaires éclatent. Baissant les yeux sur ses paumes, elle vit que ses ongles y avaient tracé des demi-lunes sanglantes. Elle se vit tout entière, sa robe déchirée et trempée, ses bras ensanglantés à cause de la magie du sang. Sans même prononcer un mot, elle changea sa tenue pour du jean, du cuir et de la résille – tout en noir évidemment – avec un claquement sec.

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Spoiler:

Tout ça est vraiment dingue. Nos états, nos réactions, nos vies. Et cette soirée... Je n'aurais pas du venir. Je ne pensais pas que cela dégénèrerait de la sorte... Et maintenant que nous sommes là à tenter de comprendre, à tenter de mieux se préparer à réagir... Je ne peux m'empêcher de me dire que ce monde nous réserve tellement de surprise et que nous sommes malheureusement très démunis. Tous autant que nous sommes. Car même Zatanna qui m'avait mise en garde contre les forces démoniaques n'est pas protégée de cette magie qui nous touche... Alors, difficile de faire la leçon après ça, n'est-ce pas ? Alors que je pose une question à Floyd qui en sait peut-être plus qu'il ne le dit, Zatanna semble agacée, nous regardant l'un et l'autre à tour de rôle. Je ne dis rien, me contentant d'attendre la réaction de Floyd. Et malgré ses paroles son ton et son regard me suffisent pour comprendre que j'ai visé juste. Il est bien celui que je pense qu'il est. Et maintenant, je peux mettre un visage sur le nom et le dossier trouvé dans les archives de S.H.A.D.E et dans les affaires de Steve. Bien sûr, je ne suis pas censée fouiller dans ses affaires, mais ce qu'il ne sait pas ne lui fait pas de mal. Bien sûr, Floyd pourrait se défendre en se retournant contre Steve qui expose des informations, pour autant, qui pourrait bien le prouver ? Je sais bien plus de choses que je ne le montre et pas seulement parce que je fouine chez Steve. Parce que l'un de mes plus grands talents c'est justement ça : fouiner. Trouver des informations dans les rues, auprès de ceux qui sont toujours là, qui veillent. Les plus jeunes comme les plus anciens. Ceux qui savent. Et ils sont bien plus nombreux que les hautes instances d'A.R.G.U.S ne pourraient s'en douter. Car quand la Suicide Squad intervient, ils ne laissent pas que des morts derrière eux. Il y a des mémoires. Elles sont dures à trouver, mais elles existent. Je pince les lèvres à cette réponse mais ne répond rien de plus car déjà il change de sujet et interroge Layla sur Amy. Layla ne semble pas très à l'aise avec le sujet et je l'écoute d'une oreille. Je ne peux pas lui en vouloir de vouloir garder certains secrets. Certaines blessures n'appartiennent qu'à nous. Et je souris un peu tristement en entendant ce qu'elle dit. Une amie à elle, morte, qui s'accroche à elle parce que c'est probablement la seule chose qu'elle peut faire. Une enfant de 13 ans, prise au piège entre deux mondes, emplie de colère et d'incompréhension... Enfin, c'est ce que je peux imaginer avec ce que j'entends. Elle clôt ce sujet clairement. Et je n'évoque pas les questions qui me viennent. Après tout, j'imagine que Zatanna aurait pu l'en débarrasser. Enfin je le suppose. Mais pourquoi ne l'a-t-elle pas fait ? Comment aider l'enfant et l'hôte auquel elle s'accroche ? Par respect pour Layla, je garde le silence. Je vois bien son regard fuyant et je n'insiste donc pas, regardant les flots pendant que Zatanna, elle, lui donne une bague accompagnée de quelques mots avant de commencer à faire les cents pas, probablement pour tenter d'évacuer un peu la colère qui l'anime.

Finalement, c'est au tour de Layla de poser des questions dérangeantes. Et je sais que je ne peux pas aller trop loin dans ce que je vais dire. La confidentialité, tout ça. Mais dans le fond, cela ne me concerne pas réellement. Et j'aurais largement de quoi protéger mon frère avec toutes les informations pêchées à droite et à gauche... Mais j'imagine que les filles n'ont pas besoin de tout savoir. J'écoute les questions qu'elle adresse aussi bien à Floyd qu'à moi. A nouveau, Floyd se protège. Il dit ne pas comprendre. Et rappelle qu'il ne me connait que depuis une heure tout en me menaçant du regard. Est-il idiot ? Pense-t-il vraiment qu'elle ne le remarquera pas ? Qu'elle ne comprendra pas ? Je plisse un peu les yeux. J'agite les doigts inconsciemment tant l'envie est forte de débarrasser ce monde de ce type. De ce jouet de Waller. Parce qu'il nous tuerait toutes - peut-être pas Layla à bien y réfléchir - si Waller le lui ordonnait. Pour survivre. Je pince les lèvres. Et qu'est-ce qui me retient hein ? De ne pas dévoiler son secret ? De ne pas protéger Layla de cette noirceur qui habite l'homme dont elle semble si proche sans l'être à la fois. A nouveau, mes doigts s’agitent mais cette fois je m'en rends compte et je ferme les poings. Il serait malheureux de déclencher un accident. Je secoue la tête de gauche à droite, un peu méprisante. Ce qui n'est pas réellement mon genre. Mais cette façon de se protéger et les questions que posent Layla semblent bien indiquer qu'elle ne sait pas. Ou en tout cas qu'elle ne sait pas tout. « Tu as l'air bien crispé pour quelqu'un qui ne comprend pas... Mais j'imagine que j'ai dû faire erreur après tout cette ville est grande... ». Ce pays aussi. Je ne le crois pas un seul instant. Non seulement il est bien celui que je pense qu'il est mais il sait peut-être quelque chose qui pourrait aider Zatanna a arrêté tout ça. Et il ne dit rien. Pendant ce temps, partout dans la ville - en espérant que cela ne soit que là, ce dont je doute - des gens sont aux prises avec ces pêchés. Et il serait idiot de penser qu'il n'arrivera rien. Car partout des gens céderont. Des meurtres. Des vols. Des viols. Des accidents. Des tas de morts et lui reste là, et protège peut-être des informations qui peuvent nous aider. Ce n'est pas la colère qui m'habite, pourtant, c'est bien celle-ci qui me pousse à me lever, me débarrassant ainsi de la couverture qui me protégeait du froid. Je ne supporte pas de rester inactive alors que je pourrais faire quelque chose de plus utile ailleurs. Et oui, j'ai toujours envie de me jeter sur tout ce qui bouge. Mais cela ne m'empêche pas de vouloir aider les autres. Parce que de toute façon, Luka ne me pardonnerait jamais d'avoir fait ça. Et que cela devrait être suffisant pour ne pas céder. Mais maintenant que mon regard accroche Zatanna qui est changée et à présent vêtue de cuir et de résille, un long frisson remonte le long de mon dos. La pulsion de colère se transforme en pulsion sexuelle et je me détourne retenant un cri de frustration pour m'approcher du bout du ponton. Me jeter dans l'océan semble la meilleure option que j'ai de faire quelque chose de bien soudainement. Et comme ce n’est pas non plus une option, je reviens et j’interpelle Zatanna : « Qu’est-ce qu’on peut faire ? ». Je ne supporte pas d’être là, à ne rien faire, à me tourner les pouces.

Seven Sins

Impossible de dire si c’était dû à la mauvaise influence sous laquelle ils étaient ou si les choses se seraient passées ainsi quoiqu’il arrive. À leur place à tous les trois, ce n’était pas ce moment qu’elle aurait choisi pour aborder des trucs personnels, vu l’état dans lequel ils étaient tous. Plutôt que de se faire du mal les uns aux autres, ils auraient dû se séparer. Et puis ensuite, quoi, idiote ? Attendre assis sur un lit à fixer un mur que les choses s’arrangent toutes seules ? Elle entendit Tracy s’approcher, lui demander ce qu’ils pouvaient faire. Le premier réflexe de la magicienne fut de hausser les épaules. Elle leur avait dit ce de quoi il retournait et en réponse il n’y avait eu que des tactiques de fuite et des détournement de la conversation. Elle n’était pas la dernière à vouloir faire l’autruche, elle était honnête avec elle-même. Et les mots qui franchissaient ses lèvres en ce moment ne faisaient qu’aggraver la situation.

« Je te l’ai dit, à part t’isoler quelque part et attendre que quelqu’un, dans ce monde, ait la bonne idée de trouver une solution, il n’y a rien à faire. » Ce qu’il fallait faire, en vérité, c’était trouver le responsable de ce chaos. Réduire les possibilités aux coupables les plus probables, remonter le fil de la magie, échanger et finalement, agir. Elle aurait aimé pouvoir appuyer sur un bouton de sa montre ou lancer un signal dans le ciel pour appeler la JLD, et en quelques minutes tout aurait été réglé. Ou rien du tout ; ou tout aurait empiré. Cette pensée la fit sourire. Ils lui manquaient, tous, en cette seconde. Elle inspira à fond et se concentra de nouveau sur Tracy. Son regard franc, l’impatience qui tendait son corps – elle aussi ne supportait pas de ne rien faire, probablement pas pour la même raison. C’était dur de résister à un tel regard. « Je peux essayer de contacter des connaissances, pour voir ce qu’elles en pensent. Et j’imagine qu’en attendant, ça ne nous ferait pas de mal de méditer un peu. » Elle plaisantait à moitié. Même si elle craignait ce qu’elle pourrait trouver si elle tombait en transe maintenant. Mais s’enfuir de sa carcasse brûlante et intenable, s’élever dans un monde de limbes gris et morne et froid et calme – en temps normal… C’était presque un rêve. Irréalisable compte tenu des circonstances.

Elle sortit son portable, composa un numéro, s’arrêta au milieu. Elle savait qu’elle n’arriverait pas à verbaliser son problème. Elle passa aux textos, mais à mesure qu’elle tapait son SMS, elle appuyait de plus en plus fort sur l’écran de son smartphone qui payait pour les autres, et en se relisant, elle ne vit que des mots absurdes et hors contexte. Elle finit par envoyer un texto inquiet et cryptique à Rosie, son puits de connaissances magiques, et un smiley énervé, en flammes, à John, qu’il comprenne ce qu’il voulait – puis elle se rendit compte de l'horrible lecture qu'il pourrait en faire et l'affolement la traversa comme un éclair, qui la laissa le bec ouvert et fit se fendre l'écran de son téléphone. ecèpsE ed elibéd ! Elle glissa un bras sous celui de Tracy pour l’entraîner vers Floyd et Layla, un compromis avec elle-même, une tentative désespérée. « Tu as une idée, toi ? Je savais bien que ta curiosité t’entraînerait sur un chemin dangereux. » Elle parla assez fort pour signaler aux deux autres qu’elles étaient là, au cas où. Se rassit à côté des bières – stratégie –, en tailleur, respirant doucement, les yeux mi-clos, attentive aux bruits qui l'entouraient pour mieux ne pas s'éparpiller.

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Me voilà aux côtés de Zatanna, à lui demander ce que nous pouvons faire. Parce qu'il n'y a qu'elle qui puisse me répondre. Il n'y a qu'elle qui puisse trouver quelque chose. Comment lutter contre quelque chose qu'on ne comprend pas ? Qu'on n'avait même pas envisagé d'affronter un jour ? Les péchés n'ont jamais été qu'un mythe pour moi. Une légende. Bien sûr, ce mythe trouvait une certaine résonnance face à nos émotions. La colère. L'orgueil. La luxure. Autant de traits de caractère pouvant se retrouver en chacun de nous. Certains plus que d'autres. Mais de là à imaginer qu'un jour, quelqu'un pourrait se servir d'eux pour nous envoûter. J'ai encore du mal à comprendre comment cela fonctionne. C'est loin d'être évident. Mais j'ai avec moi quelqu'un qui peut le savoir. Alors autant utiliser ses connaissances en magie pour faire quelque chose. Malheureusement, elle ne semble pas avoir réellement comprit ma question puisqu'elle me reparle de m'isoler tout en attendant que quelqu'un ait la bonne idée. Oui, mais je ne suis pas du genre à attendre. C'est bien ça mon problème. Je ne veux pas attendre que quelqu'un quelque part daigne venir me sauver. Je veux être celle qui sauve les autres. Parce que je le peux. Zatanna est d'accord pour contacter quelques connaissances qui pourraient nous aider. Je la regarde pianoter sur son portable sans vraiment lire. Cela m'importe peu ce qu'elle envoie et à qui elle l'envoie tant que nous obtenons des résultats. Et lorsqu'elle reste là, à contempler son portable la bouche ouverte et que son écran se briser, je m'apprête à dire quelque chose, mais elle ne m'en laisse pas le temps glissant son bras sous le mien. Un frisson remonte le long de mon dos à se contact. Elle m'entraîne jusqu'à Floyd et Layla tout en me posant une question tant pour me la poser que pour nous signaler. Laisser Layla avec Floyd n'était pas une bonne idée, mais j'espère qu'elle aura au moins eu la jugeote de lui poser des questions. Et que lui aura eu l'honnêteté de lui répondre. Je souris cependant un peu et je dis : « Ca c'est littéralement l'histoire de ma vie... ». Je souris amusée de moi-même. Je mourrais un jour, je le sais. A vouloir me retrouver sur des plages infestées de trenchers. A vouloir affronter des démons. A vouloir sauver le monde. Mais que pourrais-je bien faire d'autre ? Je suis née pour aider mon prochain. Et je le ferais jusqu'à mon dernier souffle. Floyd nous adresse une question et je darde un regard sur lui. N'est-ce pas sa mission ? Sauver le monde ? Sa place dans la suicide squad n'est pas dévolue à cela ? Des bonnes actions pour racheter des erreurs passées ? Oh.. J’imagine que Waller doit utiliser sa super équipe pour bien d'autres choses peu recommandables, mais soit. Je lui réponds : « Nous ne sommes jamais assez pour le faire... Et tu as l'oeil aiguisé, peut-être pourrais-tu voir des choses qui nous échappent si tu nous accompagnais ». Je ne sais pas s’il lui a parlé. Mais moi je ne crois pas une seule seconde qu'il ne sache pas de quoi je parle. Alors je préfère m'obstiner. Si Layla ne sait toujours rien, elle doit savoir. Je reprends la parole pour répondre à la question de Zatanna : « Pourquoi pas un exorcisme ? Ça pourrait marcher ? Après tout, ces péchés, est-ce qu'ils ne ressemblent pas un peu à des démons intérieurs ? ». Je marque une pause. Je ne suis pas sûre de ce que j'avance bien sûr, mais il faut qu'on fasse quelque chose, alors je propose. Puis je dis : « Tu dis que peu de personnes peuvent utiliser ce genre de magie. Mais est-ce que la magie laisse une trace ? Est-ce qu'on pourrait remonter la piste de cette magie ? Pour réussir à trouver celui qui est à l'origine de tout ça ? ». J'imagine une sorte de trace infime, un peu dorée, qui se déplace dans l'air comme une brume. Multitudes de petits filins qui nous lieraient tous à celui qui a fait ça. Mais je peux me tromper. Je ne m'y connais pas encore assez dans ce domaine. Les méta-humains sont bien plus simples à comprendre.

Seven Sins

Comme Tracy répondait à la question de Floyd, Zee sentit la colère flamber encore. Comme s’il pouvait prétendre ne pas se soucier du sort du monde quand le laisser brûler, ça revenait à regarder celle qui occupait ses pensées se consumer avec. La lassitude et la fatigue qui érodaient ses défenses, en même temps que la rage qui s’écrasait sur sa patience et en arrachaient des morceaux, la firent se laisser tomber par terre aux côtés des trois autres et elle appuya ses poings contre ses yeux. C’était épuisant d’être sans cesse en colère. Et de s’empêcher de mettre le feu à tout ce qui l’entourait. Elle serra et desserra les poings, enfonçant continuellement ses ongles dans la paume de ses mains pour se concentrer sur ça et garder le contrôle. Visiblement, pour la méditation, c’était mort. C’était le principal moyen qu’elle utilisait quotidiennement pour maîtriser sa magie et elle commençait à en sentir cruellement le manque. Et peut-être aussi que ça lui convenait, que ça lui donnait une excuse. Et que bientôt, elle allait éclater, fendre la pierre et la terre et fermer les yeux pour ne pas avoir à être témoin des conséquences dramatiques de ses actes. Ce petit rêve éveillé mené à son terme, elle revint à la réalité.

Elle observa ses compagnons d’infortune et au moins, on pouvait le dire, ils passaient tous une bonne grosse soirée pourrie. Voilà ce que ça coûtait, d’être habité par une magie étrangère à soi-même et clairement agressive. Ça mettait le corps et l’âme à rude épreuve et les choses n’allaient faire qu’empirer. Elle écouta les questions de Tracy et de Layla d’un air morose, avant de leur jeter un regard désolé. Leurs mots soulignaient plus que jamais sa propre impuissance – inutilité même, on pouvait le dire. « Ce n’est pas comme un si démon nous possédait. C’est quelque chose qui est en chacun de nous à la base et qu’une force extérieure exacerbe par la magie. Ça nous concerne tous, pas seulement les magiciens et le sorciers de ce monde. » Et peut-être qu’ils pouvaient tous lutter contre ça à leur façon, avec ou sans magie, mais Zee n’avait pas cette réponse là. Elle n’allait pas non plus bavasser sur la JLD ici et maintenant et elle regrettait bien, pour une fois, qu’ils ne soient pas aussi organisés qu’une certaine autre ligue. « Je suis sûre qu’en cette seconde, certaines personnes travaillent à régler la situation. Elles sont juste plus discrètes que d’autres. » Elle se doutait bien que certains membres de leur groupe savaient de quoi elle parlait, mais refusa de croiser les regards.

Ils attendaient une solution, et elle n’en avait pas. Surtout parce qu’elle avait peur d’user de magie alors qu’elle ne savait faire que cela. La solution d’urgence, ce serait de se couper de leurs émotions – une utopie pour les humains. Elle était certaine qu’elle pouvait faire une chose pareille. Elle était certaine aussi que c’était la pire idée qu’elle ait jamais eu depuis longtemps – enfin, quelques semaines, quoi. Elle s’assit en tailleur et ferma les yeux, laissant les autres à leur conversation. Il fallait essayer. Ou bien avant la fin de cette soirée, elle tuerait quelqu’un, ou quelqu’un ici tuerait quelqu’un. Paumes tournées vers le ciel, elle enfonça de nouveau ses ongles dans ses mains. Lèvres scellées, pour que rien ne lui échappe, aucune parole qu’elle avait envie de hurler au monde. Le sang sur sa peau se mit à tourbillonner lentement, avant de former des petites lettres qui coururent sur ses avant-bras. recaffE al eigam esurtni, ressahc al erèloc erègnarté. Sa peau sembla boire le sang et elle sentit aussitôt l’effet de son sort, une pression violente et soudaine dans sa tête alors que son esprit se battait contre lui-même. Intriqués, son âme et l’influence néfaste de cette magie intrusive, et elle pouvait en défaire les filaments poisseux, un par un. Si elle y arrivait pour elle-même, oserait-elle essayer sur Floyd, Layla ou Tracy ? Sachant que la dernière personne sur qui elle avait réellement utilisé ses dons psychiques se bavait désormais dessus depuis des années ?

Laisse-moi faire.
Laisse-moi m’occuper de tout.

Elle rouvrit les yeux soudainement. Elle se leva d’un bond avec l’impression désormais que des milliers de fourmis lui grimpaient sur les bras et que la colère allait l’incinérer de l’intérieur. Oh non, non, non. Stupide, stupide, stupide magicienne ! « Je dois partir. Je dois partir maintenant ! » Elle vit sur son bras que les mots de son sort n'avaient pas tout à fait disparu là où se trouvait son tatouage, ce qui lui permettait probablement encore de garder le contrôle. Elle avait besoin d’aide, et elle avait besoin de ne pas vaporiser les trois personnes réduites à des silhouettes floues qui se tenaient face à elle. Elle ne s’entendit pas prononcer un sort, mais sut qu’elle s’était téléportée quand tout autour d’elle disparut et que pendant une fraction de seconde il n’y eut que les limbes gris et mornes de l’entre-deux espace-temps. Au moins, à la Maison, elle ne tuerait personne, n’est-ce pas ?

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C’est la catastrophe et j’ai l’impression que je n’y suis pas pour rien. Oh bien sûr, je ne parle pas de ce qui se passe avec les péchés. Ca… ça je n’y peux rien. Je subis l'influence de mon péché comme tout le monde, et d'une certaine façon, j'ai l'impression de l'avoir bien mérité. Peut-être est-ce une punition pour avoir été si réfractaire à toute sorte d'amour ? Pour avoir saboter tant de relations et avoir fait souffrir autant qu'on m'a fait souffrir par manque de patience avec moi ? Si toute cette agitation, toutes ces questions, toute cette envie de protéger les autres a un peu occupé mon esprit, l'envie dévorante qui me ronge est toujours là. L'incendie se contient, mais j'ai l'impression qu'à un moment où à un autre, je vais me consumer intégralement et qu'il ne restera que des cendres. Et le simple fait d'y penser, d'imaginer le corps de Luka sous mes mains me fait prendre quelques degrés. Difficile de contenir le déglutissement que je suis obligée d'avoir pour desserrer ma gorge. Je parlais surtout de Layla. De cet air qui marque son visage. La conversation avec Floyd a-t-elle été honnête ? Difficile à dire. Mais la colère est toujours là, je n'en doute pas. Je me sens responsable, évidemment. Quel droit avais-je de m'en mêler ? Même si j'estime qu'elle avait le droit de savoir et que je ne pourrais jamais réprimer ce besoin de protection qui est une satanée malédiction, j'ai l'impression d'avoir fait pire que mieux. Hors de question de le montrer cependant. Tour à tour, ils réagissent tous. Layla semble partante pour laisser ceux qui s'y connaissent. Elle semble dépassée, ce qui n'est pas étonnant. Moi aussi. Mais cela ne m'empêchera jamais de vouloir essayer de faire quelque chose. Ce qui me coûtera cher un jour, je n'en doute pas. Mais bon.

Je retiens mon soupir. J'ai comme l'impression qu'on ne fera rien de plus ce soir si je reste avec eux. Peut-être que je devrais repartir seule, vers le centonnial park. Essayer de retrouver Blood pour voir s'il a avancé de son côté. Espérer qu'il n'y ait pas de souci avec son alter ego démoniaque. A son tour, Zatanna me répond. Ce n'est pas si simple. Les péchés font partie de nous, donc on ne peut pas les exorciser. Quant à l'énergie, les traces, elle ne répond pas réellement. Mais elle assure que d'autres sont surement déjà enfin de travailler sur cela. Probablement oui... Je l'espère en tout cas. Et soudainement elle s'agite. Floyd lui pose une question et je m'avance un peu vers elle mais la voilà qui disparaît sans un mot de plus qu'un simple je dois partir maintenant. Bon sang. Qu'est-ce qu'elle a ? Un souci ? Où va-t-elle ? L'inquiétude est soudainement très vive, presque brûlante. Mais je sais d'avance que je ne pourrais pas la retrouver ici. Peut-être au QG de SHADE mais je n'en suis même pas sûre. Je grimace un peu et Floyd profite du départ de Zatanna pour prendre congé lui aussi. J'imagine qu'il s'adresse plus à Layla qu'à moi, cependant je lui adresse tout de même un hochement de tête appuyé d'un « Bonne nuit » que j'imagine assez peu adapté vu la situation. J'ai l'impression que sa nuit sera mauvaise. Mais je ne peux rien y faire. Je ne veux rien y faire. Je suis peut-être un peu trop extrémiste et naïve mais rien ne justifie que l'on prenne des vies de cette façon. C'est l'une des raisons pour lesquelles je n'ai jamais intégré l'armée comme le reste de ma famille et qui me rend parfois si frileuse lorsque je parle avec Steve ou avec Luka. Savoir ce qu'ils ont fait m'impressionne lorsqu'on parle de protéger et servir. Dès lors que l'on parle de tuer des dizaines d'autres hommes, cela est parfois plus difficile à supporter. Bien sûr, l'un comprend l'autre et c'est assez difficilement comparable aux faits de Deadshot... A nouveau je retiens un soupire et je me tourne vers Layla, inquiète pour elle autant que pour Zatanna : « Tu vas bien ? Tu veux que je te raccompagne quelque part ? » j'avoue sans mal qu'avoir une bonne raison de ne pas prendre l'avion pour Washington sur le champ serait vraiment bien. Mais bon, j'imagine qu'elle ne doit pas avoir très envie de parler. Je récupère les dernières choses qui traînent pour ne rien laisser sur le ponton, attendant qu'elle me réponde, tout en revenant vers l'entrée du port pour la raccompagner ou simplement rentrer à mon hôtel. Retourner à la fête ? Non. A choisir, je crois que je préfère rentrer, même si ce n’est résolument pas la bonne chose à faire.

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