There is nothing on this Earth more to be prized than true friendship ⚔ Zatanna

Nombreuses des références qu'elle entendait chaque jour passaient complètement au-dessus de la tête de Kory. D'une, parce qu'elle n'était pas le genre de personne à absolument vouloir tout décortiquer au point de tuer le fun, comme on dit, et de deux parce qu'elle n'était pas issue de cette planète, alors, évidemment, elle ne comprenait pas tout. Elle y mettait du sien, pourtant, mais on ne peut tout rattraper en seulement quelques années, surtout lorsque cela touche à des références profondes, ancrées dans une population depuis si longtemps que ces personnes là elles-même en viennent à oublier qu'il y a là une référence à comprendre. Pour elles, peut-être que cela tombe sous le sens et que c'est passé dans le vocabulaire commun. Comme le mot « frigidaire », par exemple. Kory aussi savait ce que c'était, merci bien, elle n'était tout de même pas sotte et ne vivait pas sous un rocher ! Ils en avaient plusieurs, d'objets de ce type, à la Tour. En même temps, quand on vie avec quelqu'un comme Garfield, mieux vaut que ce soit le cas ! Sauf qu'en fait, ce terme n'était pas un vrai mot, mais une marque. Et il y avait plein de choses comme ça sur lesquelles la jeune femme se heurtait, la faute à cet énorme abysse culturel et identitaire. Sans que cela ne la choque, car après tout, c'était comme ça, elle n'y pouvait rien. De leur côté non plus, les gens n'y comprenaient pas toujours grand chose à ses propres références à elle. En tout cas, dans tout ce flot de mots, d'expressions et de références, il y avait aussi ces plaisanteries qui n'en étaient pas forcément, d'ailleurs, et qui se rapportaient au fait d'être gardien de zoo ou garde-chiourme, ou bien encore de devoir gérer une crèche ou un cirque. Kory ne comprenait pas tout à cela, et pourtant, sans doute était-ce parfois ce qu'elle devait faire, étant la Leader des Teen Titans et vivant auprès de jeunes gens un peu moins âgés qu'elle. Et maintenant, il fallait rajouter à cela la présence de Mar'i.

Ce n'était pas tant qu'elle ne s'en sortait pas, non. Après tout, elle avait vécu bien pire et avait déjà dû gérer des situations autrement plus compliquées et complexes. Mais tant de paramètres entraient en compte, et elle ne pouvait pas uniquement se focaliser sur un monobloc de sa personnalité ou de ses responsabilités. Elle devait être tout à la fois : la Leader, la jeune femme, la partenaire, la coéquipière, la Tamaraneanne, et maintenant, la maman. Un dernier rôle auquel elle n'était absolument pas préparée, et qui lui était un peu tombé dessus par hasard. Ou plutôt fallait-il voir là la preuve que, parfois, les chronologies et les temporalités se prennent les pieds dans le tapis, gaiement. Fort heureusement pour elle, sans vouloir être méchante, éduquer Mar'i se rapprochait un peu d'éduquer les Titans quand ceux-ci exagéraient un peu ou qu'ils laissaient pleinement leur jeunesse se vivre. Et puis, elle avait quelques restes de sa période passée dans la mauvaise dimension, si l'on pouvait résumer les choses comme ça. Cependant, cela n'était pas toujours facile, et elle ne pouvait pas exactement compter sur Dick pour l'épauler. Le jeune homme était encore bien chamboulé de ce qui s'était passé, et la présence de Mar'i parmi eux n'avait fait que rajouter à son trouble. Mais fort heureusement pour elle, Koriand'r n'était pas non plus toute seule. Elle était bien entourée. Même si confier Mar'i était un peu compliqué pour elle. Elle se sentait pleinement responsable de son bien-être, et tous les matins, elle se levait la boule au ventre en se demandant si la fillette serait bien encore là, et si elle n'avait pas rêver. Le tout en devant en plus gérer le fait que Mar'i ne semblait absolument pas surprise d'être ici, que tout lui semblait normal et qu'elle n'avait aucun souvenir d'avoir eu un petit frère, John, dans cette autre réalité de laquelle elle provenait. Ce qui ne pouvait que pousser Kory à entre autre se demander si John était lui aussi quelque part, mais qu'il avait juste atterri au mauvais endroit ...

Enfin, bref. Présentement, Mar'i était posée devant la télé, pendant que Kory tentait de faire marcher le lave-vaisselle. La veille au soir, quelqu'un l'avait un peu trop chargé, et elle avait dû éponger toute l'eau qui avait fuit, et maintenant, la bête du diable ne fonctionnait plus ! De quoi la pousser à quelque peu perdre patience et à donner un coup de poing dans le panneau de commande électrique pour faire fonctionner la machine ! Sauf qu'à cause de la graisse qu'elle avait fini par mettre partout, sa main dérapa quelque peu, ou en tout cas suffisamment pour glisser jusqu'à l'angle du plan de travail, jusqu'au dessus. Lui faisant récolter au passage une belle estafilade, la poussant à jurer en tamaranean, tout en se maudissant en entendant Mar'i piailler qu'elle avait tout entendu et que donc, Kory devait mettre 10 dollars dans le pot aux gros mots. Visiblement, dans cette autre réalité, la jeune femme n'avait pas manqué d'enseigner sa langue natale à sa fille ... Et quand elle l'entendit bondir hors du canapé, alors qu'elle, elle lavait la plaie sous le robinet de la cuisine, elle crut que c'était parce que Mar'i allait venir à sa rencontre. Au lieu de ça, elle la vit revenir tenant la main de ...

« Zatanna ? Qu'est-ce que tu fais là ? » Pas qu'elle n'avait pas envie de la voir, ni rien de tout cela, mais ... Mais oui, que faisait-elle là ? « Je l'ai appelée Maman, avec ton portable ! C'était trop beau, il y avait un cœur après son prénom ! » Souriant de toutes ses dents de lait, Mar'i bomba le torse, avant de regarder fièrement les deux jeunes femmes. « Je suis désolée ... Elle a dû prendre mon portable pendant que j'essayais de réparer ce fichu lave-vaisselle ! » La jolie brune avait sûrement bien des choses à faire en ce moment et Kory était sincèrement désolée du dérangement causé.

Sans doute Kory n'avait-elle pas encore appris à avoir toutes les attitudes appropriées à chaque cas de figure, à chaque évènement. Et peut-être qu'un tel jour n'arriverait jamais, car elle refusait de gommer le naturel de sa propre personne. Après tout, Dick lui avait dit, un jour, que de dompter le naturel ne le faisait que revenir au galop, bien qu'elle n'était pas très sure d'avoir tout saisi à l'expression employée, ce qui serait loin d'être une première, et ce qui n'avait donc rien de bien alarmant, quand on y pensait. Après tout, les contrepèteries humaines étaient bien souvent insignifiantes en terme de conséquences et de dangerosité. Quoi qu'il en était, ce qu'elle pensait avoir compris, c'est qu'il l'aimait telle qu'elle était, et qu'il n'était sans doute pas le seul dans ce cas là. C'était ce qui faisait sa particularité autant que son piquant, à Kory, très probablement. Alors, non, toutes ses réactions n'étaient pas forcément celles qu'on s'attendait à voir dans telle ou telle situation, et cela s'illustrait sans doute présentement par le fait qu'elle n'était plus affolée que ça de voir Zatanna surgir de nulle part, alors que quelques secondes avant, la magicienne n'était pas du tout là. Cela faisait partie des capacités de la jolie brune de pouvoir apparaître partout, tout comme le fait de pouvoir voler dans l'espace sans difficultés et sans attirail particulier était de l'apanage de Kory. Chacune ses qualités, chacune ses avantages, et cela leur convenait très bien comme ça, d'autant plus qu'aucune jalousie et aucune animosité existait entre elles, bien au contraire. Alors Kory était bien contente de voir son amie à la Tour, et le questionnement de sa présence ici se posait donc bien plus sur les raisons que sur le fait en lui-même. C'était ça, sans doute, qui mettait un peu Kory en alerte, et pas juste le fait de voir Zatanna ici. Elle se demandait si quelque chose de grave était survenu, si l'on avait besoin d'elle, aussi. Être en alerte était quelque chose qu'elle savait très bien faire, mais il était vrai que, depuis le retour à la réalité, la jeune femme était sans doute encore plus en état d'alerte permanent comparé à avant. C'était qu'elle devait veiller sur Mar'i tout autant qu'elle devait les protéger, elle et les Titans. Après tout, tout ceci était survenu parce qu'on les avait tués, et ... Et elle ne pouvait pas trop s'appuyer sur Dick pour l'aider à y voir plus clair, à relativiser ou à relâcher un peu la pression, le pauvre étant dans un état de choc dont il ne s'était pas encore entièrement remis. Cependant, ce qui sembla d'abord alarmer la jolie magicienne, ce fut la main blessée de Kory, et celle-ci la laissa faire ses petits tours de passe-passe ou de magie, lui faisant entièrement confiance, bien qu'elle n'y comprenait pas tout. Mais fallait-il toujours tout disséquer pour tout comprendre à chaque instant ? Le mystère, c'était très bien, et il paraît que cela avait aussi une part d'érotisme et de sexy, et ce bien que la Tamaraneanne n'avait aucune envie de passer Zatanna à la casserole, pour peu qu'elle ait réellement compris l'expression et que cela signifie bien quelque chose !

« J'ai beau parler toutes les langues de cette planète, celle-là m'échappe encore ... Peut-être que je devrais t'embrasser pour la comprendre, mais j'ai bien compris qu'on devait d'abord demander la permission avant de faire ça. » Grâce à Dick, le premier être humain qu'elle avait rencontré, ou plutôt le premier sur lequel elle était presque littéralement tombée, après s'être crashée sur Terre, elle avait appris à parler anglais, ce qui avait été pratique pour communiquer, comprendre ce qu'on lui disait, et quelque peu rassurer, ou pas, sur ses intentions. Mais c'était réellement grâce à Diana qu'elle avait pu dénouer tous les fils des langages humains et terriens, anciens comme présents, encore parlés ou disparus. Mystérieux et mythiques ou banals comme tout. Secouant légèrement la tête avant d'observer sa main, elle sourit pratiquement jusqu'aux oreilles en constatant qu'elle n'avait plus rien. « Tu as vu Mar'i ? Ça, c'est de la vraie magie ! Merci Zatanna ! » Tapant dans ses mains et trépignant de joie sur place, la petite ne manqua pas d'imiter sa mère. « Oh ouiii, merci Zatanna ! C'est encore plus fort que les bisous magiques de Maman ! ... Haaan, des cookies ! » Grimpant sur le comptoir sans attendre que Kory l'aide, en décollant suffisamment du sol pour léviter jusqu'au rebord en bois, elle tendit les mains pour attraper l'un des cookies enfermés dans un grand bocal, de ceux que Rachel avait fait la veille. Mais polie et bien élevée, la petite se stoppa, attendant que Kory l'autorise à en prendre un d'un simple signe de la tête, avant de fourrer un bout du biscuit dans sa mouche en le mastiquant avec délectation, yeux mi-clos. De quoi faire sourire Kory avant que celle-ci ne reporte son attention sur Zatanna. « Tu as bien fait ! ... En fait, je ne sais pas où est Rachel, mais je sais qu'une grande partie des garçons dort encore. Alors, c'est un peu comme s'il n'y avait que Mar'i et moi, oui. ... Elle vit avec moi, Dick n'est pas trop en état de ... » Jetant un coup d’œil sur sa fille, elle la descendit du comptoir en la prenant dans ses bras. « Ton dessin-animé est recommencé je crois ! ... Petit bisou d'esquimau ? » La petite s'exécuta sans se le faire dire deux fois, et une fois posée à terre, elle se précipita de nouveau vers le salon, tout en tenant fermement son cookie. De quoi permettre à Kory de pouvoir parler plus librement. « Disons que la situation échappe un peu à Dick, en ce moment. Et Alfred m'a bien proposée de s'occuper de Mar'i si j'en avais besoin, mais dans l'autre réalité, celle d'où vient Mar'i, Bruce et Dick avaient depuis longtemps coupé les ponts. Elle ne le connait donc pas, sans parler du fait que je ne sais pas trop ce que Bruce pense de tout ça. »

Avoir des amis, c'était important. Kory l'avait bien observé, mais sur cette planète, les humains avaient beau dire et faire, ils cherchaient toujours plus ou moins à se faire des amis. Que ce soit en se créant des alliances, jusqu'à l'échelle mondiale, ou tout simplement en ayant des gestes d'affection toute simple, comme en aidant à traverser les vieilles dames quand le feu pour pétions est passé au vert. La première fois qu'elle s'y était essayée, elle avait accompagné un retraité, et il n'avait pas voulu la lâcher. Une autre fois, visiblement, elle avait fait traversé une dame qui n'en avait pas du tout envie. D'une certaine façon, c'était sa manière à elle, à l'époque, de se calquer sur ce qu'elle voyait. C'était ainsi qu'on apprenait, en reproduisant, par mimétisme, non ? Tout comme les enfants apprennent à se brosser les dents en regardant leurs parents faire, la jeune femme avait appris un bon nombre de choses en observant les humains qui gravitaient autour d'elle. Même si elle n'y avait pas tout compris du premier coup, au milieu de tous ces paradoxes et de tous ces mensonges. Car les Terriens mentent. Souvent. Avec acharnement. Et avec une bonne dose d'hypocrisie et de mauvaise foi, aussi. Et toutes ces émotions là, si elle les comprenait, étant tout de même une Tamaraneanne, alors même que son peuple se nourrissait justement des sentiments et des émotions pour contrôler et utiliser leur don, et bien, la jeune femme, elle ne les avait pas bien appréhendé. Pas bien appréhendé du tout, même, car c'était alors comme si elle recevait un tas de signaux contradictoires. Cela partait en tous sens, et quand elle pensait finalement avoir tout compris et tout cerné, et bien non, elle voyait quelque chose qui la projetait en sens inverse et la mettait face à bien des contrariétés. Elle était patiente, très patiente, même. Elle s'acharnait, et elle ne lâchait pas prise, consciente du fait que, désormais, il y avait de fortes probabilités pour que la Terre soit la planète sur laquelle elle continuerait de vivre pour le restant de ses jours. Retourner sur Tamaran était bien trop risqué et trop dangereux, sans parler du fait qu'elle n'en avait que peu de nouvelles, et ... Et donc, s'acclimater aux humains, essayer d'être un peu comme eux, cela avait vite été essentiel, pour elle. De sorte à ne pas toujours se sentir totalement à côté de la plaque, même si aujourd'hui encore, elle savait très bien qu'elle continuait de détonner dans le paysage. Sans pour autant que ceux qui ignoraient qui elle était réellement parviennent à bien identifier la somme des raisons qui faisaient qu'elle était qui elle était. Mais, oui, se faire des amis, cela lui avait paru vite important, pour ne pas se sentir seule et esseulée, elle qui, pourtant, était bien l'unique représentante de son peuple, à des milliards de kilomètres de sa planète natale. Et fort heureusement pour elle, elle avait été bien entourée dès le début, de sorte à ce qu'elle n'ait pas multiplié les mauvaises rencontres. Zatanna était d'ailleurs l'une des plus belles personnes qu'elle ait rencontré. Pas pour celle qu'elle était à l'extérieur, même si la jeune femme était très jolie, mais surtout pour la personne qu'elle était, intérieurement. Une personne qui ne l'infantilisait pas et qui ne cessait visiblement pas d'être curieuse et intéressée par tout ce qui la concernait, elle. Elle qui venait de si loin et était si peu comme tout le monde.

« Ne le répètes à personne, mais en fait, techniquement, je n'ai besoin que de toucher suffisamment quelqu'un pour faire fonctionner mon assimilation linguistique. Mais c'est bien plus amusant et agréable de faire ça grâce à un baiser ... Tu es d'accord avec moi, n'est-ce pas ? » Ce n'était pas forcément une question rhétorique, car la jeune femme cherchait toujours à connaître l'avis et l'opinion de ceux qui l'entouraient, du moins, assez souvent. Pas pour rechercher leur approbation ou lire dans leurs yeux ce qu'elle devait faire, mais par réelle curiosité et envie de partage. En tout cas, la jeune femme ne put qu'échanger une œillade complice et amusée avec Zatanna lorsque cette dernière semblait visiblement vouloir souligner le fait que, oui, il n'y avait pas de doute, Mar'i était bien sa fille ! C'était étrange. Étrange de, finalement, se sentir moins perdue qu'on ne l'aurait pensé sur certains points, et complètement larguée pour d'autres. Mari' lui posait des questions auxquelles elle n'avait pas toujours les réponses, cherchant encore, elle aussi, à se familiariser avec son environnement. Et en parallèle, la jeune femme comprenait parfaitement les troubles et multiples questionnements de la petite, pour les partager, ce qui revenait à dire qu'elle ne s'agaçait pas, et ne se fâchait pas non plus, le tout sans perdre patience. Et puis, finalement, le ton se faisant plus sérieux, suite au départ de Mar'i en direction du canapé, Kory passa une main dans ses cheveux, en se mordillant quelque peu la lèvre inférieure, en réfléchissant. « Est-ce qu'on peut lui en vouloir ? ... C'est étrange, parce que ... Parce que dans le même temps, moi-même, j'ai du mal à ... J'ai du mal à demander de l'aide, la concernant. Tu me connais, tu sais que je n'hésite jamais à être franche et directe, non sans que je sois sans doute également bien innocente et naïve, à vos yeux, concernant certaines choses, mais là ... C'est comme si, concernant la gestion de Mar'i, je me mettais d'immenses panneaux stop devant les yeux. Parce que je sais que personne ne s'attend à son existence, et ... Tu vois, je ne suis pas du tout magicienne, mais visiblement, moi, je suis parvenue à devenir maman sans prendre un seul gramme, sans passer mes matins au-dessus de la cuvette des toilettes, et sans connaître ce que, vous, les humains, vous appelez ironiquement, visiblement, les joies de l'accouchement ! » Faire de l'humour n'était pas dans sa nature, du moins, pas comme on l'entendait. C'était juste que, très souvent, étant franche et directe, elle créait des situations bien cocasses pour ses proches, sans jamais se priver de dire les choses telles qu'elle les pensait et telles qu'elles lui venaient.

Dans le fond, la jeune femme ne savait même plus trop à qui elle avait éventé la nouvelle. Ce n'était pas qu'elle était du genre à tout cacher, à multiplier les mystères et à faire des cachotteries, c'était juste que ... Juste qu'elle-même avait encore du mal à comprendre que c'était visiblement ça, maintenant, la réalité. Que Mar'i était là et qu'elle ne repartirait pas. Alors, si elle-même avait du mal à tout gérer, à tout comprendre, comment pourrait-elle bien expliquer la situation aux gens ? Sans parler du fait que ce n'était pas non plus le genre de nouvelles facile à entendre et à présenter, n'est-ce pas ? Il ne s'agissait pas d'annoncer à tous ses proches qu'elle venait de s'acheter une nouvelle télévision, ou que, ça y est, elle sautait le pas et allait désormais laisser de vrais coiffeurs s'occuper de ses cheveux plutôt que de faire ça soi-même ou de laisser un proche le faire. Même si tout ce qui concernait ses cheveux n'était pas non plus un sujet à prendre à la légère, ça non !

« Je te remercie Zatanna ... Fort heureusement, aucune mission ne m'a encore réellement appelée trop loin de Mar'i, mais ... Je ne sais même pas comment je ferais si je devais aider à sauver le monde et à combattre le crime, parce que la laisser à la Tour, cela ne se fait pas, n'est-ce pas ? ... Tu sais comment Diana et Jason font ? Il y a une garderie pour les enfants comme Ophelia et Mar'i, ou pas du tout ? » C'étaient sans doute là des questions bien naïves, auxquelles, en plus, Zatanna n'avait pas forcément la réponse, mais d'un point de vue pratique et pragmatique, cela tenait tout de même bien la route, non ? Dans ce contexte, effectivement, peut-être qu'Alfred était un bon élément de réponse. « Aucun des Robin n'était visiblement parvenu à mettre le feu au Manoir en étant sous la surveillance d'Alfred, donc je ne doute pas de son habileté à maintenir l'ordre là-bas, mais ... Dick, Jason, Tim' et maintenant Damian, ce sont des garçons. C'est pas pareil, les garçons, non ? Et puis aucun d'eux n'est réellement capable de mettre le feu sans allumette ni rien du tout, Mar'i, si ! Et puis ... Tu crois que, si elle décidait de voler, il arriverait à lui courir après sans se casser une hanche ? Il est quand même un peu vieux, non ? » Sans doute le majordome serait-il ravi, ou pas, de l'entendre parler ainsi de lui ! Mais en attendant, comme les humains disaient que les absents avaient toujours tord, et parce que, fidèle à elle-même, Kory faisait du Kory, en toute franchise, et bien ... Une franchise que Zatanna ne semblait pas redouter, demandant même plus amples informations sur la façon dont la Tamaraneanne gérait la situation présente. « J'ai traversé bien des choses. Connue des ... Connue des épreuves dont je n'ai jamais vraiment parlé à personne, parce que ... Parce que vous ne comprendriez pas, malgré toute la bonne volonté que vous avez, et malgré votre gentillesse et le fait que vous m'aimez tous beaucoup. Mais là ... Là, je sais que, normalement, vous seriez plutôt capable de m'aider, en lisant des livres, en ayant vu des choses à la télé ou avec vos connaissances personnelles de base, mais Mar'i est ... Elle est différente. Différente de vous, différente de moi, aussi. Ce n'est pas une Tamaraneanne à 100%, mais en même temps, ses gênes humains ne l'emportent pas sur ceux qui lui viennent visiblement de moi ... Ça me perd et me désoriente beaucoup. Et je regrette que ... Je regrette que je n'ai pas vraiment été enceinte, parce que c'est comme si j'avais perdu 4 ans. Je ne l'ai pas senti bouger en moi, j'ai pas vu vos regards paniqués ou heureux en vous apprenant que j'allais avoir un bébé, et ... Malgré tout, c'est impressionnant, parce que j'arrive encore à aligner un pas après l'autre sans tomber. Je n'ai pas encore provoqué de catastrophes, et ... Et avec Dick, je sais qu'on devrait parler, mais je crois que c'est encore moins évident pour lui que pour moi ... » Ce qui était sans nul doute un bien bel euphémisme ...

Il lui était toujours agréable de se trouver en compagnie de Zatanna. Non seulement elle avait de la conversation et ne racontait pas toujours la même chose, mais en plus, bien qu'ici, sur Terre, une décennie les séparait en terme d'âge, on pouvait sans doute dire qu'avec tout ce qu'elle avait vécu et expérimenté, Koriand'r, de son côté, avait mûri plus que de raison. Enfin, dans certains domaines, car dans d'autres, peut-être certaines pourraient-ils penser qu'elle était plus proche de l'âge adolescent que de l'âge adulte. Mais cela lui était bien égal, dans le fond et dans la forme. Car pour peu que cela ne mettait pas sa vie en péril, elle se fichait bien de ce que l'on pouvait penser d'elle. Après tout, ils n'avaient pas toutes les cartes en main, ces gens qui se voulaient bien pensants et qui passaient surtout leur temps à critiquer les autres, comme si ce qu'il y avait dans le plat du voisin, bien trop alléchant pour eux, comparé à ce dont ils devaient se contenter, devait impérativement les pousser à donner leur avis biaisé. Une fois, sur un plateau télé, Kory avait entendu une dame répliquer à une autre que si elle était si jalouse, c'était qu'elle était mal baisée, tout simplement, ce qui avait plongé la principale concernée dans une rage folle, la faisant presque virer au rouge. Koriand'r, elle, elle était restée bien songeuse et dubitative. Dans son esprit, rater le simple fait de faire l'amour était une aberration sans nom. C'était incohérent, parce qu'il n'y avait rien de plus facile, de plus instinctif et de plus naturel, n'est-ce pas ? Même pour les humains, non ? Certes, sans doute que, dans ce domaine là parmi tant d'autres, le fait qu'elle soit Tamaraneanne faussait grandement son jugement, mais quand même, non, ce n'était pas très logique, dans son esprit, qu'on puisse être mal baisée, comme l'avait dit la femme à la télévision ! En tout cas, Zatanna, Kory ne savait pas si elle était toujours pleinement satisfaite, sexuellement, mais que ce soit le cas ou non, cela ne la poussait jamais à être méchante et mesquine avec elle, ou à s'impatienter. Bien au contraire. Et parfois, cela poussait la jeune femme à se demander qui, entre elles, était la plus curieuse et la plus intéressée par les richesses du monde et de tous les autres qui pouvaient exister !

Mais d'un autre côté, être en présence de son amie n'était pas seulement une source de détente et de divertissement, pour elle. Zatanna était d'ici, de la Terre. Et elle comprenait bien mieux qu'elle tout un tas de choses tout à fait terriennes, qui échappaient encore à Kory. Et comme elle était patiente, bien intentionnée, tout ça tout ça, en plus de comprendre pourquoi la Princesse était perdue et tout, sans qu'on ait à lui expliquer pourquoi, et bien elle donnait les informations nécessaires. Elle partageait ce qu'elle savait, elle enrichissait l'échange, en faisant souvent en sorte de ne pas créer de questions supplémentaires dans l'esprit de Kory, ce dont la principale intéressée lui était plus que reconnaissante ! Et si, dans le fond, on faisait les bébés sur Tamaran presque exactement comme on les faisait ici, il n'en demeurait pas moins que, si l'issue était elle aussi la même, le contexte variait quelque peu. Et pas qu'un peu, même. Sur Tamaran, les femmes accouchaient seules, et dans la nature, comme leurs ancêtres, sans que cela ne soit compris comme une coutume barbare préservée des anciens temps juste pour le folklore. Mais dans tous les cas, que ce soit sur sa planète natale ou sur celle sur laquelle elle avait trouvé refuge, Kory n'avait jamais été enceinte. Ce qui rendait la présence de Mar'i, ici, à ses côtés, quelque peu ubuesque, et plus que déconcertante. Ce dont elle n'hésitait pas réellement à se confier à son amie. Zatanna ne comprendrait pas forcément tout de bout en bout, car Kory le savait, mais elle était faite de nombreux paradoxes et d'une complexité sans bornes, mais l'essentiel était là, tout de même. De quoi permettre aux deux jeunes femmes de communiquer sans que les incompréhensions et les approximations ne se mettent en travers de leur route, ce dont la Tamaraneanne était plus que bien aise ! De quoi pousser la jeune femme à écouter tout attentivement, bien que persuadée qu'elle devait sans doute encore passée à côté de certaines subtilités. Mais tant que le propos essentiel était compris et maîtrisé, sans doute cela n'était-il pas bien grave. « Tu trouves vraiment que je fais ça bien ? ... En vrai, je me rappelle de comment c'était, dans l'autre réalité, et c'est comme si j'avais gardé des réflexes de là-bas. Même si, dans le fond, la plupart du temps, Mar'i n'est pas trop difficile. Tant qu'elle mange, qu'elle peut jouer et regarder la télé, ça va ! Ce sont surtout les questions qu'elle peut me poser qui me déstabilisent parfois beaucoup ... » Réfléchissant un instant, et jetant un rapide coup d’œil sur là où elles se trouvaient, elle ne put que hausser les épaules en éclatant de rire. « Tu as raison, on pourrait monter un cirque, je suis sure qu'on aurait beaucoup de succès, et beaucoup d'argent ! Si ça se trouve, on pourrait même donner l'argent à la Ligue pour qu'ils en aient encore plus ! » L'argent était une notion à la fois si floue et si concrète, pour Kory, qui avait bien compris que c'était ça qui faisait tourner le monde humain, mais pour qui la valeur concrète des billets et pièces lui passait plus ou moins complètement au-dessus, elle qui ne manquait de rien et avait un compte en banque bien garni à son propre nom.

Mais le sérieux était toujours là, et heureusement que c'était le cas. Il aurait été bien triste et très dommage que ses relations, avec Zatanna, ne se résument qu'à de l'amusement, et que rien de bien sérieux et mature n'existe entre elles. Car cela réduirait leur champ des possibilités, tout en amenuisant les raisons pour lesquelles elles pourraient bien se voir. Même si elles n'avaient pas franchement besoin d'avoir de réelle raison pour se voir. La preuve en était, c'était par l'intermédiaire quelque peu comique de Mar'i qu'elles étaient présentement l'une face à l'autre ! Et le fait de se confier, ainsi, à blanc, sans chercher à amoindrir les choses ou à tomber dans le consensus, c'était très bien, et ce même si, concernant le sujet en cours, Zatanna n'étant pas maman elle-même, elle n'était sans doute pas spécialiste. Mais tant mieux, parce que Kory non plus, et que les spécialistes, c'était parfois très ennuyeux. Comme à la télévision, quand certains semblaient vouloir jouer au Scrabble en n'employant que des mots compliqués, comme si cela les rendait plus intelligents, tss ... « J'essaie de la ménager, tu sais, car je ne sais pas si quelque chose de mal pourrait bien arriver si elle réalisait soudainement qu'elle n'est pas dans le bon monde. Je ne veux pas qu'elle reparte, maintenant qu'elle est là. Mais je ne veux pas qu'on lui fasse du mal ou qu'on la rende triste non plus, involontairement ou non ... Je crois que si je fais ce que tu me conseilles, je vais d'abord devoir bien expliquer tout à tout le monde, pour éviter les bêtises. ... Tu te rends compte ? Les rôles vont être inversés ... » Un léger sourire illumina ses traits et son visage, et l'effet s'amplifia à la mention d'Alfred. Le simple fait d'imaginer le majordome sermonner Bruce, c'était ... Pour peu que celui-ci ait été aussi tête de bois que son fils, et bien, pauvre Alfred de l'époque, et bravo à lui quand même ! Sans parler des autres images mentales qui lui venaient à l'esprit, relatives aux différents Robin qui s'étaient succédés et qui s'étaient tenus au côté de la Chauve-Souris elle-même ! « Je crois que celui qui dit le plus de gros mots, c'est Jason ... Quoi qu'avec Damian, j'ai des doutes ... Lui, il fait mine que non, mais en fait, si, il est parfois très très malpoli, c'est juste qu'il utilise des mots plus compliqués ! ... Dick aussi dit des gros mots. ... On va mettre une grosse jarre, à la Tour, au Manoir, et même dans le QG de la Ligue s'ils sont d'accord, et dedans, il faudra mettre de l'argent à chaque gros mot, comme ça, plus tard, Mar'i, Ophelia, et les futurs autres, ils pourront bien s'amuser ! » Elle, elle était plutot polie, car on l'avait bien élevée. Et en plus, si elle jurait en Tamaranean, ça ne compterait pas, puisque personne ne pourrait valider l'injure, n'est-ce pas ?

Elle ne cherchait pas à se faire plaindre, Kory, mais elle ne doutait pas que Zatanna le savait et le comprenait parfaitement. Alors, comme à son habitude, elle ne se soucia pas du tout de ça. Son amie avait voulu qu'elle parle, alors elle parlait, sans pour autant se sentir obligée ou conditionnée à le faire. Le seul truc, c'était qu'elle surveillait discrètement que Mar'i était suffisamment loin, afin qu'elle n'entende rien. La petite était tout à fait Tamaraneanne dans sa manière de ressentir les émotions, de les vivre amplifiées et de les utiliser. Et elle était bien trop attachée à Kory pour accepter de la rendre triste. De quoi la pousser à parfois s'excuser pour des choses infimes, visiblement, ce que ne percevait évidemment pas directement la jeune mère, mais ce qu'on lui rapportait, ici, parmi ses compagnons de la Tour. Comme le fait de devoir laver les habits salis par Mar'i, qui avait renversé du soda à l'orange dessus, ou de devoir nettoyer le canapé parce qu'elle y avait fait tomber des miettes de cookies. Alors il était absolument nécessaire pour la jeune femme que sa fille n'entende rien. Elle ne voulait pas que la petite se dise qu'à cause d'elle, Kory était triste et perdue, et que ça la pousse à se cacher, ou pire, à partir. C'était sans doute une inquiétude un peu déraisonné et déraisonnable, mais qu'y pouvait-elle ? « Je ... Je crois qu'elle comprend déjà qu'elle n'est pas comme moi. Mais j'ai aussi l'impression qu'elle se sent parfois gênée de ça, comme si elle savait que celui qui pourrait mieux l'aider pour son problème d'alors, c'était son père. Dick, mais pas moi, parce que je ne suis pas une humaine. Et oui, ça fait bizarre de l'appeler ma fille. Ça ... Ça fait comme des picotements électriques quand je le dis, et en même temps, mon cerveau ne court-circuite pas en me donnant l'impression que je me suis trompée de mot. Mais c'est triste ... C'est très triste de ne pas pouvoir remonter le temps et de revivre tout ce que je n'ai pas vécu. Je ne me souviens pas de tout, de ce qui était là bas, dans cette réalité étrange. Et plus les jours passent, plus certains souvenirs s'effacent ... Et je ne comprendrais pas toujours tout, tu as raison ... Par exemple, pourquoi moi je me souviens qu'elle avait un frère, un petit frère, là bas. Et pourquoi elle, elle ne se souvient pas de John. D'une certaine façon, ça m'arrange. Elle n'a pas le cœur brisé, et pour elle, c'est normal. D'ailleurs, pour elle, tout est normal. Tu penses que je devrais me servir de ça, pour en profiter et tout ? Pour lui présenter tous les autres ? » Bon, peut-être pas tout le monde non plus, mais l'idée était là. « C'est ça, aussi, la magie, alors ? ... Je ne veux pas la perdre, non. Absolument pas, même. J'avais déjà des raisons pour botter les fesses et lutter contre le Mal, mais là ... Là, je sais que je fais aussi ça pour elle. » Finalement, prenant une grande respiration, elle réfléchit à la suite de ses paroles, car même si c'était finalement plus évident de parler de Dick, il n'en demeurait pas moins que cela restait une situation inconnue pour Kory, chez qui la stabilité sentimentale était un concept tout à fait humain, mais dont elle apprenait progressivement les sous-entendus et l'idée générale. « Non, pas encore. Je ne sais pas si c'est plus évident pour moi que pour lui, d'ailleurs. Et je ne sais même pas où on en est. On a fait ... On a fait des choses, avant l'étrange réalité, et puis, lui, il s'est comme réveillé là bas, perdu, alors que moi, j'étais tombée dans le panneau de cette dimension parallèle, où on ressemblait presque à la famille modèle, et puis tout c'est fini, il est mort là-bas, j'ai tué plein de monde, notre réalité est revenue et, paf, Mar'i était là elle aussi ... » Un vrai sac de nœuds, tout ça. Oui, assurément. Un vrai sac de nœuds.

Se marrer comme une baleine ... Koriand'r était Tamaraneanne, pas Atlante, mais elle se défendait tout de même très bien dès lors qu'il fallait nager, n'étant nullement handicapée par sa silhouette ou sa génétique. Voilà au moins une appréhension qu'elle ne partageait pas avec les félins, elle dont le peuple tenait plus des félidés que des humanoïdes. Cependant, bonne nageuse ou pas, elle n'avait pas encore eu l'occasion de croiser une vraie baleine dans les océans, et ne pouvait donc pas témoigner du fait qu'elles sachent se marrer. Cela lui paraissait assez étrange, comme idée, mais dans le fond, peut-être pas si saugrenu que ça. Après tout, les baleines mangeaient bien parfois des pantins en bois. Elle l'avait vu dans un dessin animé récemment diffusé à la télé et duquel Mar'i n'avait pas décroché. Elle, elle n'avait pas tout suivi, et n'avait donc pas tout compris, affairée à faire le ménage, à téléphoner pour des motifs professionnels, ou à faire tout un tas d'autres choses en même temps, comme à son habitude. En tout cas, elle ne comprenait pas forcément où voulut en venir Zatanna, mais si elle disait que sa fille allait bien et qu'elle n'avait pas à s'en faire, alors c'est que cela devait être quelque chose de gentil et de positif, non ? Pour le coup, si la petite était bien nourrie, Kory n'y était pour rien, sauf à avoir de bons goûts dans le choix des produits et des menus ? Parce que, cuisiner, elle ... Elle s'en passait. Pas par dégoût, mais parce que les incendies étaient si vite arrivés, avec elle. C'était très étrange, d'ailleurs, et au final, il était moins coûteux de se faire livrer, d'aller faire un grand plein de courses ou de laisser quelqu'un d'autre derrière les fourneaux, plutôt que de devoir demander une nouvelle cuisine parce qu'elle avait mis le feu à la dernière ! Soit parce qu'elle se trompait dans la cuisson, la façon de procéder, ou tout simplement parce que, fidèle à elle-même, rester camper sur place à ne se concentrer qu'à une seule tâche, elle ne savait pas faire. Alors s'il était moins grave d'oublier de vider la machine à laver dès qu'elle avait finit de tourner, parce qu'on était focalisé sur autre chose à l'instant T, pour une casserole sur le feu, en revanche, résultats et conséquences étaient bien différents ! Mais faire des erreurs, ce n'était pas toujours une mauvaise chose, visiblement, à en entendre parler Zatanna, et ce même si Kory était bien convaincue que son amie ne devait pas présentement avoir le domaine de la cuisine en tête. « Tu devrais écrire un livre, que je puisses lire n'importe quoi, pour me rappeler les paroles de la sagesse. En fait, je devrais acheter tout un tas de cahiers où vous écrirez tous, pour que je continue de me nourrir de vos idées. Je ne les vendrais pas, une fois finis, les cahiers, ils seront pour moi, et rien que pour moi ... » Elle sourit, avant de hausser les épaules. Pas parce qu'elle n'était pas convaincue ou soudainement désintéressé, cependant. « Moi, en tout cas, j'ai eu une belle enfance, et ma mère était ... Oh, Zatanna, si tu savais ... J'étais persuadée que tout le monde voulait l'approcher et lui parler parce qu'ils m'enviaient le fait qu'elle soit ma mère à moi, et pas la leur, mais je crois que cela avait surtout à voir avec le fait qu'elle était la Reine. ... C'est après que tout s'est détérioré, mais je n'ai pas mal tourné ... Alors, si je ne laisse rien arriver à Mar'i, tout ira bien. Tout ira bien, hmm ? » Elle la voyant, de là où elle était, Mar'i. Sa fille. La petite était assise sur le canapé et semblait boxer l'air, dans le vide, tout en riant aux éclats ou en poussant des exclamations admiratives, voire étonnées. Secouant un peu la tête, Kory se remit les esprits en place. « Il n'y a sans doute pas de vraie bonne façon d'annoncer ça, je pense. Surtout que personne ne comprendra tout. Personne ne comprend tout, quand j'explique : j'essaie de faire les mêmes blagues que vous, mais elles ne vont pas toujours avec la situation. Ou alors, ça crée des quiproco. » Comme cette fois où, en déjeunant avec Dick, alors qu'il avait commandé des saucisses supplémentaires pour ses hot dogs, elle avait cru bon d'ajouter un fameux « That's what she said », sans doute alors tout à fait hors de propos et des plus embarrassants pour le jeune homme.

Finalement, observant son amie comme si elle était la voix de la sagesse, en plissant les yeux comme en phase de profonde analyse, Kory en déduisit que Zatanna était sans nul doute dans le vrai, ou, qu'en tout cas, elle savait bien mieux qu'elle de quoi elle parlait ! « C'est surtout que ... Je n'ai encore pas tout compris, à la vie sur Terre, avec vous, moi ... Par exemple, pourquoi certains évangélistes disent parfois, au sujet de Diana, ou à mon sujet, que l'on devrait cesser de jouer les fornicatrices, alors que tout le monde met de la sexualité partout, même pour vendre des yaourts ! » Enfin bon ... Elle allait donc devoir aller voir Dick, sans retarder encore plus longtemps l'échéance. Et, au pire, elle pourrait se remémorer les paroles de Zatanna, pour ne pas perdre la direction et le pourquoi du comment. Parce que si cela faisait comme ces autres fois, la jeune femme perdrait le fil, et se retrouvait sans vêtement avant même d'avoir réussi à aller au bout de ce pourquoi elle venait. Oh, pas que Dick soit plus à blâmer qu'elle sur ce point, car on ne lui fait jamais faire ce qu'elle ne veut pas, mais peu importe si les responsabilités sont partagées ou non, le résultat reste le même ! Dans le même temps, elle enregistrait une expression qu'elle avait déjà entendu, mais qui la mettait encore en défaut. Jusqu'à maintenant, entendre parler d'un verre à moitié plein la faisait osciller entre le vider dans l'évier et en sortir un autre, propre, ou le remplir presque jusqu'à ras bord avec la carafe ! Cela voulait donc dire 50/50 ? A moins qu'il ne s'agisse d'une évocation des compromis à faire et ... Peu importe, présentement, dans le fond ! Car elle se reconcentrait sur le petit John, comprenant seulement maintenant que, décidément, elle allait devoir s'ouvrir de bien des choses, quand elle présenterait Mar'i à tout le monde, pour être aussi complète que possible. « Il avait 2 ans, quelque chose comme ça. Comme pour Mar'i, son prénom avait été choisi pour honorer les parents de Dick. Dans cette réalité là aussi, ils étaient morts au cirque. ... C'est très étrange, en fait. Il me manque, d'une certaine façon, mais ... C'est comme manqué de quelque chose qui, au final, n'a jamais réellement existé, ou pas vraiment, et ... Et je suis désolée pour ton père ... Le mien me manque, aussi, terriblement. Alors je sais ce que c'est, même si c'est sans doute très différent, en même temps. » Sans que son amie ne lui ait sans doute fait le moindre appel du pied dans ce sens, la jeune femme s'approcha d'elle pour la serrer dans ses bras, avec sincérité et affection. « Je ne sais même pas s'il était encore vivant dans l'autre réalité. Ou s'il est encore vivant aujourd'hui. ... Dick dit que, parfois, pleurer un bon coup, ça fait du bien. Mais j'ai déjà entendu Damian dire qu'en pleurant, on allait moins souvent uriner aux toilettes. Je n'ai pas tout compris. » Haussant les épaules, pour le coup un peu perdu, un petit sourire s'arqua sur ses lèvres. « Tu es une amie extraordinaire, Zatanna Zatara. Et tu as raison, je vais rester debout. J'ai traversé bien pire, mais ... Mais non, tu as raison. Il faut juste que j'arrive à oublier certaines choses, et à me concentrer sur ce que j'arrive à vraiment contrôler. ... Je ne suis pas sure que, face à Dick, j'y arriverais, à me contrôler, mais je dois au moins essayer. » Pour Mar'i. Pour elle-même, aussi. Pour Dick, également.

Sans doute renvoyait-elle d'elle une image quelque peu erronée de celle qu'elle était vraiment. Mais dans le fond, elle le savait bien qu'elle n'était plus exactement la même qu'avant. Avant de quitter les siens, sur Tamaran, pour partir entamer sa formation auprès des Seigneurs de Guerre d'Okaara. De nombreuses années s'étaient écoulées depuis, sans parler de tout ce qu'elle avait subi et enduré depuis lors. Alors, d'une certaine façon ... D'une certaine façon, elle ne pouvait sans doute pas vraiment renvoyer d'elle-même le véritable reflet de celle qu'elle était. Et sans doute était-ce aussi bien ainsi, car les gens ont tendance à ne pas tout comprendre dès lors que trop de paramètres sont à prendre en compte, et aussi dès qu'il y a trop de facettes et de paradoxes dans l'équation. De toute façon, elle ne faisait pas autant attention que les humains à ce qu'on pouvait dire et penser d'elle. Son ego ne se fracassait pas face à la moindre petite contrariété. Mais elle comprenait, partiellement, et elle en avait conscience, ne serait-ce qu'un peu. En tout cas, parmi ces choses qu'on pensait savoir d'elle, chez certains, il y avait cette certitude de ne pas se tromper en voyant en elle une jeune femme moins cultivée qu'on ne le pensait, sans doute parce qu'on repérait rapidement son physique avant d'aller plus loin, et qu'on considérait qu'on ne pouvait pas avoir le physique qu'elle avait tout en ayant un cerveau bien développé et des plus efficaces. Ce qu'elle ne comprenait pas trop, mais bon, cela n'était jamais qu'à rajouter à la longue liste de ces choses qu'elle trouvait bien étranges chez les humains. Heureusement pour elle, Zatanna n'était pas dans ce lot là, et elle sembla en tout cas comprendre que si jamais elle écrivait réellement ce fameux ouvrage dans lequel elle dispenserait bien des conseils, cela ne serait pas le premier livre que Koriand'r lirait dans toute sa vie. Même si ce serait le premier sur lequel elle se jetterait dès qu'elle l'aurait entre les mains et dès qu'elle aurait du temps pour le lire. Enfin, le premier livre qu'elle lirait seule. Parce qu'en ce moment, elle en lisait de nombreux, oui, mais c'était pour Mar'i, avant qu'elle n'aille se coucher le soir, ou dans l'après-midi, pour la calmer et la préparer à aller faire une sieste. Elle avait vu, à la télévision, que cela se faisait beaucoup, de lire des livres aux enfants avant qu'ils ne dorment. Et elle se souvenait que sa propre mère faisait pareil, quand elle était jeune, même s'il ne s'agissait pas de réelles histoires enfantines, mais plutôt de passage sur l'histoire du pays, les grands mythes et les légendes. Du moins, c'était ce dont elle se souvenait concernant celle qui l'avait mise au monde. « Je n'ai pas revu Luand'r depuis mes 9 ans ... J'espère que ma mémoire ne me joue pas des tours, et que les souvenirs que j'ai d'elle ne se sont pas trop éloignées de la réalité d'alors ... Je ne lui ai pas dis au revoir, tu sais. J'étais censée revenir, après mes années d'entraînement et de formation. Mais ce n'est pas ce qui s'est passé. » Oui, c'était compliqué. Et elle avait vu suffisamment d'émissions de psychologie et de psychanalyse pour croire comprendre que la mémoire était un matériau bien malléable, qui s'adapte et se transforme avec le temps, pour protéger l'esprit et boucher les trous, quand il y en avait. « Je ne saurais même pas par où commencer ou comment faire s'il fallait la renvoyer dans l'autre réalité. Mais tu as raison, elle est là, et elle reste là. » Et si c'était compliqué, et bien cela serait compliqué. Car, après tout, la jeune femme ne savait même pas où en était cette autre réalité, si elle continuait d'exister, et si elle ne s'était pas effondrée avec ce qui avait fini par s'y passer.

En tout cas, heureusement pour Zatanna que Mar'i était trop loin pour les entendre, toutes deux, sinon, elle en aurait été bonne pour verser une contribution dans le grand bocal censé accueillir les pièces et billets pour utilisation d'insultes et usage de gros mots. C'était une technique mise en place par Kory, dans l'autre monde, visiblement, et elle devait bien avouer que cela semblait suffisamment dissuasif pour les garçons, histoire qu'ils n'influencent pas trop la politesse du langage de Mar'i. Sauf quand ils venaient d'aller faire un retrait au distributeur et se disaient qu'ils avaient suffisamment de crédit pour se délester un peu ! Cependant, même si elle pensait bien que la petite était trop loin pour entendre les propos de Zatanna, cela n'empêcha pas Kory de vérifier, quand même. Après tout, on ne sait jamais ! « Oui, je crois avoir fini par comprendre qu'il fallait demander avant de se déshabiller devant les gens ou avant de les embrasser. Cela a quelque peu de mal à rentrer dans mon esprit, mais ça va de mieux en mieux ! » Mais, évidemment, les situations étranges et les incompréhensions restaient encore légions, pour elle. Certains diraient que cela faisait une partie de son charme, alors, après tout ... Et puis, tout dépendait encore et toujours du facteur humain, sans doute, et le fait que tous les habitants de cette planète étaient différents les uns des autres offrait une variété de variations et de digressions. En suivre le fil était alors sans doute impossible, même pour les Terriens eux-même ! « Dick dit que ce n'est pas la faute de Damian s'il est comme ça. ... En vrai, moi, je n'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est qu'il mérite souvent une bonne paire de claques, parce qu'il parle souvent très mal ! Je crois qu'avec Damian, en vrai, on est très différents. Mon peuple connait bien plus de sentiments et d'émotions que les Terriens, et nous nous en servons pour être ceux que nous sommes, cela faisant tout autant notre force que notre faiblesse. Et parfois, quand je regarde Damian, je me dis que, lui, il n'en connait pas beaucoup des émotions, ou plutôt, qu'il n'est pas très familier avec beaucoup d'entre elles ! » En tout cas, trop plein d'émotions ou pas, cela n'empêchait jamais de se débattre au sein d'un curieux marasme, des fois, comme elle le vivait si souvent à ses propres dépends. Souriant face au baiser que lui claqua son amie sur l'une des deux joues, Koriand'r ne put s'empêcher de laisser un rire franc et sincère fuser d'entre ses lèvres. « J'aime beaucoup voir tes fesses se bouger sur la piste de danse tu sais ! Et j'aime beaucoup danser avec toi aussi, même quand on nous siffle de façon malpolie. Alors je ne peux pas réellement résister à de telles propositions, tu me prends par les sentiments ! » Il lui faudra alors juste trouver quelqu'un pour s'occuper de Mar'i et pour la surveiller. Quelqu'un de confiance. Mais elle ne doutait pas que cela se trouverait. D'autant plus que la distance ne serait alors ni un frein ni une contrainte. Voler, ça va très vite, et pour peu que Mar'i non plus n'est pas besoin d'oxygène pour ne pas s'évanouir, si elles allaient au-dessus de l'atmosphère, alors ce serait ultra rapide !

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