Bienvenue dans le monde caché ! (Pv avec John Constantine)

S’il y avait bien un endroit dans lequel John ne s’était pas attendu à se retrouver de sitôt, c’était l’hôpital de Central City. D’une part parce que ses pas ne le menaient jamais dans les parages, d’autre part parce qu’il avait tendance à éviter les hôpitaux comme la peste – trop de médecins en blouse blanche qui se prenaient pour Dieu et remodelaient le monde à grands renforts d’aiguilles à son goût. Oh, John savait très bien ce qu’il foutait là à une heure aussi tardive. Sa plus vieille amie, la synchronicité, ce que certains appelaient instinct et d’autres coïncidences et sur laquelle John surfait avec l’aisance d’un Atlante sur les courants marins, l’avait poussé dans cette direction sans qu’il ne puisse faire grand-chose pour lutter. Il y avait quelque chose de pas net dans cet hôpital – il sentait les poils se hérisser sur ses bras, frissonnant au contact d’une magie résiduelle noire familière. Songeur, il tira une dernière bouffée de cigarette. Il est encore temps de te tirer, John. De faire demi-tour et d’aller t’installer tranquillement dans un pub, vider quelques pintes, peut-être dégoter un hôtel miteux ou des bras dans lesquels passer le reste de la nuit et essayer de te débarrasser des résidus d’Enfer qui te collent à la peau. Il exhala la fumée de sa cigarette, avant de l’écraser par terre. A qui est-ce que t’essayes de mentir, Johnny-boy. If there’s something strange in the neighbourhood…

Il soupira, remonta le col de son trenchcoat, et grimpa les marches de l’hôpital, étrangement désert malgré l’heure tardive. L’espace d’un instant, il se demanda s’il n’aurait pas dû demander à Chas de l’accompagner – avant de se sermonner, se rappelant que Chas passait la semaine avec sa fille. Les couloirs, vidés de leurs patients, étaient plus silencieux qu’une tombe (encore que, John avait connu des cimetières particulièrement bruyants). L’énergie démoniaque, elle, était en revanche bien présente, comme des ronces s’enroulant autour de ses poignets, de son cou pour l’attirer au cœur de la nasse.

Entendant des voix approcher, il fit un pas de côté et se dissimula au détour d’un couloir, dans l’ombre du mur, se risquant à jeter un œil pour cerner les deux inconnus. Un homme – grand, brun ou châtain, sans doute pas plus vieux que lui, et une jeune femme dont les vêtements lui indiquèrent qu’elle était sans doute une patiente.

Un seul regard suffit à lui confirmer que le type faisait partie du gang mystique, et John retint un soupir contrit. Un collègue. Lui qui préférait travailler en solo ; finalement il ferait sans doute bien de faire demi-tour et repartir. Une option qu’il envisagea sérieusement, comptant rester caché jusqu’à ce que es deux loustics ne s’en aillent, une excellente stratégie à son humble avis d’expert. Enfin, ça, c’était avant que la jeune femme ne se mette à léviter. « Oh, bollocks. » lâcha-t-il dans un murmure.
Dans quoi tu t’es encore fourré, Constantine.

Curieux de voir comment son supposé ‘collègue’ allait gérer la chose, il roula ostensiblement les yeux au ciel lorsque ce dernier s’adressa directement à l’entité dans le corps de la jeune femme. Ben voyons. Demander à un démon d’abandonner un hôte humain pour récupérer celui d’un autre, avec bonus pouvoirs magiques. Soit ce type-là était de mèche avec le démon, soit il avait trouvé son diplôme d’exorciste dans une pochette surprise. Et c’était lui qu’on appelait l’escroc ?

« Et après quoi, mon pote ? Tu t’exorcises toi-même ? Sois sérieux cinq minutes. » cingla-t-il en sortant de l’ombre, les mains enfoncées dans les poches de son manteau – gardant prudemment ses distances avec le deux autres protagonistes de la scène. Il aurait vraiment mieux fait de rester couché. Mais son instinct lui disait que s’il attendait que Damien Karras ici présent ne se fasse posséder, le problème allait être encore plus casse-pieds à régler. Sa présence soudaine sembla déplaire au démon, qui hissa tel un serpent dérangé en pleine chasse.

« Minute, Linda Blair, on peut bien causer un peu, non ? » rétorqua-t-il, avant de se tourner vers l’autre exorciste, le jaugeant d’un regard, l’air peu amène. Constantine n’aimait pas qu’on vienne empiéter sur ses plates-bandes, mais hé, si le collègue voulait faire le show. Après un instant de réflexion, John haussa nonchalamment les épaules. « Mais ne me laissez pas vous interrompre, surtout. Je m’en voudrais de ruiner votre tête-à-tête, faites comme si j’étais pas là. » s’exclama-t-il en s’éloignant de quelques pas, et d’un geste de la tête, invitant l’autre énergumène à faire ce qu’il était censé faire. Après tout, moins il en faisait, mieux il se portait.