What A Wonderful World [Feat. Orm Marius]

D'un point de vu strictement personnel, ton retour sur Terre n'aura pas été sans heurt. Un retour à la case départ inattendu, comme si tout, finalement, était éphémère. Après avoir erré pendant des années sans autre but que d'essayer de récupérer ton trône, tu étais parvenu à retrouver un semblant de paix dans le petit cabanon d'une humaine serviable. C'est du moins tout ce qu'elle était à tes yeux, avant que votre relation ne se transforme en réelle amitié. Et puis les aléas de la vie ont fait leur œuvre, vos routes ont pris un détour différent, et c'est à nouveau au milieu des océans, accompagné de Scylla ton fidèle tylosaure, que tu encaisses le poids de ce retour compliqué. Tu as vu là-bas ce que serait votre avenir si tu parvenais à prendre le pouvoir sur les Hommes : guerre, misère et désolation. Tu portes toujours en horreur ces êtres destructeurs et égoïstes, mais depuis que tu t'es frayé un chemin parmi eux, tu commences à reconsidérer certaines de tes opinions. Parmi ceux que tu exècres, se trouvent aussi des innocents. Tu les as rencontrés à Morro Bay, t'as marché à leurs côtés, bu une bière en leur présence, et peu à peu, la haine que tu éprouvais à leur encontre, s'est transformée en quelque chose de beaucoup plus ambiguë. Ton extrémisme, tu le sais désormais, n'est en rien une solution aux problèmes de vos océans. Ce n'est pas ainsi que tu les empêcheras de déverser leur poisons dans les eaux. Non, il te faut trouver une autre alternative. Ton double de Terre-4, c'est sans aucune once de compassion que tu lui as ôté la vie. Il n'était pas toi. Bien que tu aurais pu être lui, dans un avenir proche ou lointain, si tu t'étais évertué à suivre la même pente glissante vers un absolu dangereux et sans limite. C'est une chance d'avoir assisté à tout ce chaos, pour éviter que l'histoire ne se reproduise ici. Maintenant que tu es seul, tu n'as plus d'autres choix que de reprendre ton avenir en main, plus d'excuses pour te morfondre sur ton triste sort. Il est grand temps d'assumer tes erreurs et tes responsabilités, pour enfin construire quelque chose à ton image. Pas celle de jadis, mais celle que tu viens de dresser aujourd'hui, le regard tourné à la fois vers le passé et vers ce qui a été fait ailleurs, pour mettre le doigt sur qui pourrait vous sauver. Tous vous sauver. Car si eux habitent sur la terre ferme et toi sous l'eau, finalement, vous appartenez tous à la même planète.

Sur le dos de Scylla, sur le point de regagner la crique qui te sert de refuge, l'eau tout autour de toi se met alors soudainement à émettre de drôles de vibration. Presque un appel. Ou une communion. Quelque chose que tu ne ressens que très peu souvent, et encore moins dans un lieu aussi reculé. Attentif, tu finis par entrevoir un chemin invisible qui te rapproche chaque seconde un peu plus de l'origine de cette interférence. C'est de plus en plus fort. De plus en plus intense. De la magie, il ne peut s'agir que de magie. Mais de quelle sorte ? Avec une telle perturbation à des kilomètres à la ronde, non seulement elle est puisante, mais elle est en plus intimement connectée aux océans. Curiosité piquée à vif, tu accélères la cadence, jusqu'à remonter à la surface, sur une plage abandonnée au clair de lune. C'est ici que se trouve celle ou celui que tu cherches, tu le sens, intimement, comme un sixième sens. Tu ordonnes à Scylla de t'attendre ici, tandis que tu marches sur le sable humide de l'île sauvage et inconnue. Et c'est là, à quelques mètres seulement, que tu vois un corps inanimé chatouillé par les vagues. C'est elle la réponse à ta question. Cette femme inconsciente que tu t'empresses d'éloigner de l'eau pour lui éviter la noyade. A genoux, après l'avoir délicatement posée un peu plus loin, tu l'observes avec attention, et remarque aussitôt la flèche qui transperce sa chair. Si tu veux en apprendre plus sur la nature de cette étrangère, il va d'abord te falloir lui sauver la vie. Bien. Sans avoir une moindre idée d'où vous êtes, ni à combien de pas se trouve la civilisation, tu vas devoir faire avec les moyens du bord. C'est à dire tes mains. Et la douleur ne manquera sûrement pas de lui faire rependre connaissance. Un... Deux...

...trois. Tu retires la flèche de son omoplate par le côté qui n'est pas pointu, et appuies aussitôt tes doigts sur sa plaie pour contrer l'hémorragie. Sans surprise, tu vois ses yeux se rouvrir automatiquement sous l'intensité de la douleur. « Restez calme, je suis là pour vous aider. » Tu ôtes ton masque d'Ocean Master pour éviter de l'effrayer plus que de raison, tout en essayant de maintenir la pression sur la blessure malgré son agitation on ne peut plus justifiée. Tu ignores qui lui a fait ça, mais ce qui est certain, c'est que le coupable ne se trouve plus dans les parages. Tu l'aurais déjà entendu, ce qui s'est passé s'est passé très récemment, sinon tu serais arrivé trop tard pour la sauver. Le sang est encore frais, et qu'elle se rassure, ses jours ne sont pas en danger. Mais pour que tu puisses la soigner correctement, il faudrait que tu retournes dans l'eau récupérer des algues et autres ingrédients connus que des Atlantes pour soigner efficacement les plaies. Ce qui signifie essayer de la calmer avant tout. « Je m'appelle Orm et je viens de vous trouver inconsciente sur cette plage. Je ne vous veux aucun mal. » Des mots qui ont pour unique but de la rassurer. Tu peux en effet comprendre que se réveiller avec un visage étranger au-dessus de soi puisse être un petit peu effrayant. « Vous êtes blessée, j'essaye de stopper l'hémorragie. » Désormais, la suite repose entièrement entre ses mains à elle. Est-ce qu'elle te fera assez confiance pour te laisser l'aider ? Ou va t-elle prendre la fuite une fois qu'elle aura complètement retrouvé ses esprits ? Tu espères qu'elle fera le bon choix. Pour son propre bien, mais aussi parce que t'as vraiment très envie de savoir qui elle est.

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Il n'y a pas un seul mot qui franchit la barrière de ses lèvres, si bien que tu en viens à te demander si vos deux langues sont communes. Après tout, elle arrive forcément de quelque part, et ce quelque part n'est peut-être pas près d'ici. Il y a de la magie qui émane d'elle, et elle pourrait être la raison de cette apparition soudaine sur une plage désertique. Tant de questions, mais aucune qui se doit impérativement d'être posée maintenant. Pour l'instant, vous vous contentez de vous regarder, simplement. Elle ne fuit pas, bien que la peur puisse se lire dans la couleur particulière de ses yeux. Le tableau est étrange, deux inconnus qui se trouvent dans un endroit reculé, sans parvenir à communiquer, tout en laissant quelque chose d'autre s'exprimer. C'est un soulagement, aussi, d'être face à quelqu'un qui ne sait absolument rien de toi, et qui par conséquent, n'a aucun à priori quant à ta personne. Ils sont rares désormais sur cette planète à ignorer qui est Ocean Master et ce dont il est capable de faire pour assoir sa puissance. Mais elle, elle ne voit pas le matricide. Elle ne voit pas le roi des océans. Elle ne voit pas non plus le paria. Elle ne voit que l'homme qui fait de son mieux pour lui venir en aide. Et de sa main, elle fait balayer toute la méfiance que tu éprouvais encore à son égard. Des doigts qui se posent sur ta joue, sans aucune crainte, de la plus délicate des façons. C'est ainsi que vous apprenez à vous faire confiance, d'un simple geste aussi anodin qu'intime. Il y a de la reconnaissance dans ce rapprochement, et un lien fantomatique et énigmatique qui s'instaure. « Il faut que vous mettiez vos mains sur la blessure. » Et doucement, tu les attrapes pour accompagner ce que tu viens de lui dire, dans le doute où elle ne te comprendrait pas bien. Toi aussi, c'est sans geste brusque que tu tentes de l'aider, posant maintenant ses mains sur sa plaie ouverte, et l'incitant à appuyer très fort dessus. « Je vais chercher de quoi vous soigner. Je reviens très vite. Mais vous devez continuer d'appuyer. » En espérant que le message soit passé, tu te relèves pour regagner ton habitat naturel. Et une promesse étant une promesse, tu comptes revenir le plus rapidement possible.

Il y a énormément de choses que les Hommes ignorent sur les océans, mais aussi sur la faune et la flore qui les composent. Vous n'avez jamais eu besoin d'hôpitaux pour vous soigner, et toujours vous avez usé de ce qui se trouvait à votre disposition. Un cadeau de la mer que vous exploitez avec respect, et uniquement dans le plus grand besoin. Votre métabolisme est en effet plus rapide que celui du commun des mortels, mais parfois, quand les blessures sont graves, il vous faut requérir à des remèdes particuliers, à base d'algues essentiellement. C'est ce que tu cherches maintenant dans les eaux du monde, parcourant plusieurs kilomètres pour trouver le nécessaire. Quelques pousses par ci, quelques pousses par là, et tu peux remonter à la surface avec ta potion magique. Rien de bien mystique, simplement une connaissance poussée de tout ce qui se trouve dans ton environnement, et particulièrement d'à quoi tout peut bien servir. De retour sur la plage, heureux de constater qu'elle n'a pas pris la fuite, tu te remets à genoux dans le sable pour pouvoir être à peu près à son niveau. « Bon, il faut que j'applique ces algues sur votre blessure. Ça permettra une cicatrisation rapide et évitera en même temps le risque d'infection. » Tu ne prononces pas le nom de ton produit miracle, cependant, encore trop peu enclin à faire entièrement confiance à cette étrangère. Tu connais les Hommes, tu sais qu'ils seraient nombreux à se ruer sous l'eau pour piller tout ce qui tomberait sous leurs mains si vos méthodes venaient à se faire connaître. Ce que tu fais là, c'est un secret Atlante, et c'est déjà un risque en soit que de l'utiliser sur elle. « Est-ce que vous voulez bien baisser un peu votre haut, s'il vous plait ? Je dois pouvoir atteindre votre épaule. » Délicate situation, où tu n'as pas d'autres choix que de lui demander ce petit sacrifice d'intimité. Mais c'est pour son propre bien, alors aucun doute qu'elle s'exécutera sans trop broncher.

Bien. Une fois la plaie à l'air libre, tu viens tapoter la première algue dessus. Aussi précautionneusement que possible. Celle-ci, c'est pour éviter l'infection. Puis vient la seconde, qu'elle doit maintenir un temps, pour faciliter la cicatrisation. Bien sûr, il faudra plusieurs semaines pour que tout disparaisse complètement, mais elle devrait déjà moins souffrir dans les prochaines heures. Et voilà, c'est tout ce que tu peux faire pour cette énigmatique jeune fille, ayant rempli ton rôle inattendu de bon samaritain. Soins apportés avec succès, tu te remets debout, incertain maintenant sur la suite de cette rencontre. Elle a l'air complètement perdue, et incapable de s'en tirer toute seule pour l'instant, serait-ce bien raisonnable de la laisser livrée à elle-même dans un monde aussi hostile ? « Est-ce que je peux faire quelque chose d'autre pour vous ? » Question un peu bête, puisque tu ignores encore si elle te comprend vraiment, mais tu te refuses à partir comme un voleur sans être certain que tout ira bien pour elle. Si ta présence n'est plus requise, tu retourneras à tes occupations, ravalant ta curiosité quant à ce que tu ressens chez elle. Mais si dans le cas contraire, elle attend de toi autres choses, tu seras plus que ravi de faire ce que tu pourras. Etre avec elle, finalement, c'est quelques heures en moins sans ressentir la pesante solitude.

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Jane Doe est un mystère, mais malheureusement, elle ne t'accorde que bien trop peu d'indices pour parvenir à le percer complètement. Tout ce que tu as réussi à deviner n'est que sens de l'observation et fiable instinct. Tu sais qu'elle n'a rien d'une humaine normale, mais sans pouvoir déterminer exactement quelle est sa véritable nature. Un point d'interrogation qui te pousse à te plier en quatre pour cette parfaite inconnue, alors qu'ordinairement, c'est à peine si tu aurais porté ton intention sur une âme en détresse. Tu méprises les Hommes, et leur porter secours est une option rarement choisie par tes soins – sauf quand tu n'as pas d'autres choix, comme sur la plage de Morro Bay contre les trenchers. Mais là, tu sens du plus profond de toi que cette rencontre est différente de toutes celles que tu as connues depuis ton exil. T'as touché sa peau, à la jeune fille, et t'as senti une force puissante émanée d'elle. Un secret qu'elle ne pourra pas garder bien longtemps en ta présence, puisque toi-même sensible à la magie, tu sais la reconnaître même quand on cherche à te la cacher. Tu l'as lu des centaines de fois dans les bibliothèques d'Atlantis, vos descendants sont des homo-magis, et c'est ceux qui ont donné toute sa grandeur à votre cité. Vous étiez intelligents, certes, mais sans l'usage de la magie pure, jamais vous n'auriez été capable de construire ce que vous avez construit. Des procédés largement en avance sur leur temps, des bâtiments semblables à des monts et merveilles, et des objets aussi mystiques que le trident que tu détiens. La magie coule dans tes veines, et sans l'avoir pratiquée toi-même assidument, des cours sont donnés à Atlantis pour aider ceux qui y sont particulièrement sensibles et chercheraient à mieux l’utiliser. Ton casque maitrise les eaux, ton trident contrôle le tonnerre, que dirait-elle de tout ça, si tu venais à lui montrer ? Elle se méfie de toi, à juste titre, mais en vérité, il y a peu de chance qu'elle trouve un homme qui lui ressemble autant sur cette planète. Son attachement aux forces élémentaires est palpable, et tu peux lire dans la couleur améthyste de ses yeux tout le potentiel qui se cache derrière son apparence erronée de demoiselle en détresse.

Elle parle. Elle te comprend. T'es presque surpris d'entendre le son de sa voix après l'avoir tant attendu. Voilà qui devrait faciliter grandement vos échanges. Jusqu'à présent tu étais le seul qui tentait d'établir le contact, mais maintenant, tu vas peut-être enfin en apprendre d'avantage sur elle, unique raison de ta prévenance aussi poussée. Et ce qui serait, en soit, que mérité. Tu lui as confié plus sur toi en quelques minutes qu'en plusieurs années d'errance au quatre coins de la planète. Pas sur ton identité ou ton histoire, mais sur ton environnement et ses vertus. Elle t'a vu plonger dans l'océan, sans souffrir d'un quelconque manque d'oxygène propre aux humains, et elle pourra constater également que les algues posées sur sa plaie feront leurs effets très vite sur la cicatrisation. Ce sont des secrets que tu lui as confié, et ce même sans eu à faire usage des mots. « J'apprécie votre gratitude et votre reconnaissance, mais ce que j'attends de vous en contrepartie de mon aide est une parfaite honnêteté. » Est-ce trop demander ? Non, tu n'en as nullement l'impression. Disons que c'est un échange de bons procédés, et tu estimes que le prix est bien maigre à payer en comparaison de ce qu'aurait pu demander d'autres que toi. Les humains sont fourbes et vicelards, tomber sur l'un de ces immondes personnages aurait rendu son arrivée beaucoup moins agréable qu'elle ne l'est avec toi. Quant à son ultime demande à elle, elle te laisse... presque sans voix. « Une auberge ou une taverne ? » Qu'elle ne prenne pas mal ton soudain éclat de rire, il n'est pas moqueur, simplement l'expression de ton étonnement. Cette femme ne vient définitivement pas du coin, car même pour un Atlante xénophobe, l'existence des bars et des hôtels n'est plus un secret depuis longtemps. Quelle drôle de façon de les désigner, comme si elle venait... d'un autre temps ? Possibilité que tu ne réfutes pas, pas avant d'avoir posé quelques questions. « Moi qui pensais ne pas connaitre grand chose de la culture humaine, voilà que je trouve pire que moi. Il y a bien longtemps que les endroits où dormir et manger ne s'appellent plus des auberges et des tavernes. » Mais d'où elle vient, si. Alors d'où vient-elle exactement ?

Bon, elle l'a sans doute remarqué d'elle-même, mais dans le coin, il n'y a pas l'air d'avoir grand chose. « Nous sommes sur une île déserte perdue au milieu du pacifique, ça risque d'être un peu compliqué. » A moins que ? Voilà que te vient une idée qui pourrait te permettre de faire d'une pierre deux coups. Dont lui venir en aide. « A moins que vous nous emmeniez loin d'ici, de la même façon que vous y êtes arrivée. » Ton regard bleuté plongé dans le sien, voilà le moment de franche sincérité que tu attendais et espérais. Tu viens peut-être de lui montrer une belle image de ta personne pourtant instable, mais qu'elle n'ose pas jouer de mensonges en ta présence. Ce serait un choix fort mal venu, et de quoi lui faire regretter. Tu n'es pas idiot, sans bateau ou objet volant, aucune chance qu'elle ait pu atterrir sur cette plage. Non, tu le sais, elle est venue à travers un portail. « Emmenez-nous à Morro Bay, village de pêcheurs sur la côte-ouest des Etats-Unis, et je vous promets que je reste avec vous pour trouver de quoi manger et où dormir. » Morro Bay, car en plus d'être un endroit que tu connais bien – et probablement le seul – est le lieu d'habitation de Layla. Chez elle, tu sais qu'il reste encore des affaires à toi, que tu portais du temps où tu vivais dans son cabanon. Car oui, tu préfères éviter de te trimballer partout en ville dans ton costume d'Ocean Master. C'est un détail que tu n'as pas encore partagé avec elle, mais t'es un homme recherché par les autorités du monde entier et la Ligue de Justice elle-même. L'aider, oui, mais risquer ta liberté, non. « Je sais de quoi vous êtes capable, je  sens la magie émaner de vous par tous les pores. Et vous n'aurez rien à craindre de moi, tant que vous serez honnête à mon égard. » Les cartes sont entre ses mains. Morro Bay et l'assurance de se faire un allié utile, ou le mensonge et la certitude de se condamner à une errance solitaire dans un monde qu'elle ne connait visiblement absolument pas.

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Et bien, en plus de savoir parler, maintenant elle sait aussi sourire. Quel bonheur. Elle semble finalement de plus en plus à l'aise avec toi, et ce, malgré ton air un peu ferme d'homme qui a horreur de se faire duper. Et qu'elle se rassure, la réciproque est vraie, puisque toi aussi tu lui réponds d'un sourire. Soulagé qu'elle accepte ton deal, tu te sens désormais prêt à faire du mieux que tu pourras pour initier cette demoiselle à sa nouvelle vie. Les raisons du pourquoi du comment de son arrivée ici ne t’intéressent pas pour l'instant, et il ne fait aucun doute que viendra un moment où elle aura l'occasion de te conter ses aventures. Pour l'heure, vous devait quitter cette île qui ne vous apportera pas grand chose, et essayer de lui trouver un endroit où dormir. La transition risque d'être compliquée, mais si elle persévère, elle parviendra à trouver sa place parmi vous – ou plus justement, parmi eux. Il n'y a personne de mieux placé que toi pour faire une telle affirmation. Pendant longtemps réfractaire à la vie humaine, désormais, tu apprécies de sortir de temps en temps dans leurs bars pour boire une bière ou manger une pizza. Et tu espères devenir tout aussi bon guide que Layla, quand tu étais jadis celui qui avait besoin de repères dans un monde confus et hostile. Elle partait de très très loin avec un cas aussi extrême que le tien, et pourtant, c'est haut la main qu'elle a remporté le challenge. Et c'est d'elle et de sa patience que tu vas t'inspirer quand viendra ton tour de faire découvrir Morro Bay à ta nouvelle camarade. « Il semblerait qu'effectivement votre présent soit le passé de notre Terre. Et je vous préviens tout de suite, vous risquez d'être... déroutée, par tout ce que vous allez voir. » Si pour elle auberge est synonyme de quotidien, que pensera t-elle de la nouvelle technologie ? Prendra t-elle peur face à toutes ces voitures qui roulent à vitesse folle sur la route ? Et les téléphones portables, est-ce que cela fera sens pour elle ? Finalement, elle revient d'encore bien plus que toi, et lui enseigner les coutumes d'ici risque d'être à la fois folklorique et très compliquée. Il y a tant de choses qu'elle ignore encore, et probablement devra t-elle essuyer quelques chocs. Mais y allant avec douceur, tu comptes bien rendre cet apprentissage un peu plus agréable. Au moins, elle, ne passera pas par la case prison pour débuter sa nouvelle vie sur votre planète.

Quelle fascinante démonstration de puissance et de communion avec les éléments. Silencieux, dans un respect absolu, tu observes en retrait l'inconnue puiser sa force dans l'océan. La magie qui se dégage d'elle est si forte que tu la sens vibrer à travers toi, comme si tu appartenais toi aussi à l'ensemble qu'elle cherche à contacter, transformé en écho aux vecteurs de son incantation. Toute cette île, de la petite feuille frémissante à la minuscule fourmi ouvrière, semble participer à sa transe, pour lui offrir la force nécessaire de poursuivre son aventure en terrain étranger. Une alliance. Un échange. Impressionnant. Et quand elle se relève finalement, visiblement revigorée, tu restes d'abord sans voix. Fait assez rare pour être souligné. Il faut se lever tôt pour susciter ton intérêt et ton admiration. Mais cette femme y est parvenue sans difficulté. « Non, ici, ça s'appelle simplement la Terre. » Okay, ce qu'elle te demande ensuite pour ouvrir le portail n'est pas bien compliqué, et tu comprends parfaitement sa méfiance. Le seul endroit sûr que tu connaisses à Morro Bay, est bien évidemment ton petit cabanon au fond du jardin de Layla. Là où tu as passé plusieurs mois sans craindre d'être arrêté ou dénoncé. « Je n'appartiens effectivement pas à leur espèce. » Sourire en coin, fier de te différencier de cette bande de sauvages. Les maques tombent, et doucement mais sûrement, vous commencez à vous apprivoiser. Conscients tous les deux de votre non appartenance à l'espèce des Hommes, sans doute la confiance sera t-elle plus facile à gagner. En tout cas, tu ne comptes nullement lui cacher ta véritable nature. Quand viendra l'heure de déposer toutes les cartes sur la table, tu n'hésiteras pas à lui offrir la même sincérité que tu lui as demandé. Sans te faire prier, tu récupères ton casque et ton trident, avant de lui tendre ta main libre. Doigts serrés dans les siens, tu observes avec beaucoup d'attention le portail s'ouvrir devant vous, et sans une petite pointe d'appréhension, tu t'y engouffres avec elle...

...pour arriver à destination sans encombre. Contact rompu, tu ne peux que sourire face à la gêne qui s'est soudainement immiscée en elle. Qu'elle se rassure, tu ne t'es nullement senti perturbé par son rapprochement, bien au contraire, tu sais apprécier de temps en temps les contacts charnels. Bon, te voilà de retour ici, et sans vraiment en avoir l'autorisation. Tant pis, t'as plus qu'à prier qu'elle ne soit pas là le temps que tu changes de vêtements. D'abord, tu déposes le trident dans un coin, il ne te sera d'aucune utilité dans ce que vous vous apprêtez à faire. « Ici, ça s'appelle un bar. Et il y a beaucoup à boire, et un peu à manger. Il y a aussi toutes sortes de jeux pour s'amuser. Vous verrez, ce n'est pas désagréable comme endroit. » Attention, l'exploration commence. Et après lui avoir ouvert la porte du cabanon, tu l'invites à découvrir un peu le jardin. « Bon, ça c'est des poules, mais je pense que vous en avez aussi par chez vous. Je vais me changer avant qu'on y aille, parce que les humains n'ont pas vraiment le même style vestimentaire que moi. » Par chance, tu sais où Layla cache le double de ses clés, et c'est sans aucune difficulté que vous entrez à l'intérieur de la maison, non sans pousser un long soupire de soulagement en constatant l'absence de la propriétaire des lieux. Première étape du périple, d'ailleurs, puisqu'elle ne manquera pas de découvrir l'existence de tout un tas d'objets inédits. « Je reviens, je vous laisse admirer un peu en attendant. » Et elle va avoir de quoi faire. Entre la télé, le lave-vaisselle et la machine à café, elle aurait de quoi passer des heures à apprendre tout ce qui se trouve dans une maison humaine lambda. En attendant, tu vas dans la salle de bain pour enfiler des vêtements anciennement à toi – à moins que ce ne soit ceux de son copain –  pour pouvoir passer inaperçu lors de votre petite soirée au bar. Jean, baskets, tshirt avec écrit Jurassic Park dessus, et veste en faux cuir qu'elle t'a un jour achetée, costume parfait.

De retour dans la cuisine, tu gribouilles quelques mots sur un bout de papier à l'attention de ton ancienne colocataire : 'désolé, urgence personnelle, j'ai possiblement piqué des fringues à ton mec'. Voilà, comme ça, on ne pourra pas dire que tu t'es comporté comme un sale voleur. « On peut y aller ! Je vais vous faire goûter la pizza, c'est fabuleux. » Tu veux bien leur accorder ça, aux humains. Après avoir refermé la porte derrière vous, et remis le double dans sa cachette, tu ouvres la marche en direction du bar. Et souvent, tu tournes la tête vers elle, pour ne rien rater de sa découverte. Si elle a des questions, tu restes bien évidemment à sa disposition. Difficile pour toi de déterminer ce qu'elle connait déjà de ce qu'elle ne connait pas. Mais avant, toi tu en as une autre à lui poser. Peut-être la plus fondamentale. « Je connais pas votre prénom ? » Ouais, avec toutes ces émotions, vous avez un peu bâclé l'étape des présentations. Et t’aimerais beaucoup savoir comment elle s'appelle, cette jolie inconnue, qui vient d'enchanter ton morne quotidien.

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D'un point de vu extérieur, sans doute avez-vous l'air de deux personnes totalement normales, marchant tranquillement vers la destination de leur soirée. Pourtant, c'est loin d'être aussi évident que vos apparences le laissent deviner. Toi, Orm Marius, qui entraine une inconnue dans un bar, endroit typiquement surfacien où il y a encore quelques mois, tu n'aurais jamais voulu mettre les pieds, est plus qu'hors du commun. C'est fou ce que les choses peuvent changer. Que ce soit ta tenue ou ton état d'esprit, tout est à mille lieux de ce que tu étais il n'y a encore pas si longtemps. C'est sans doute cela, qu'on appelle l'évolution. Et tu l'admets, t'es pas peu fier du chemin parcouru. D’extrémiste aux goûts portés sur le massacre de toute une espèce, tu parviens désormais à te fondre dans la masse et à leur ressembler. Si bien que tu peux à ton tour devenir le guide de quelqu'un d'autre. Bien sûr, tout sera approximatif, et tu ne promets pas de dresser un portrait élogieux de tout ce qui se trouve à la surface, mais cela reste un début prometteur pour la suite de tes aventures dans le monde des Hommes. Et sourire aux lèvres, tu observes ta camarade découvrir doucement ce tout nouveau monde, tout en restant aux aguets. Tu n'oublies pas que derrière l'excitation peut se cacher aussi une certaine crainte. Les véhicules, les bâtiments, les gens, tout ce qui est attrait à la nouveauté pourrait se révéler synonyme de malaise. Alors tu la surveilles, attentivement, pour être là si le besoin se faisait subitement ressentir. « Enchanté, Rayna. » Et voilà, le mystère est levé, tu peux enfin mettre un prénom sur ce visage qui vient tout juste de faire irruption dans ta vie. Au moment où tu en avais le plus besoin, probablement. Car abandonné à ton sort par Layla, la solitude recommençait à te peser. Jusqu'à tout à l'heure, où sentant sa puissance, tu es parvenu à te frayer un chemin jusqu'à elle. Peut-être que c'est ça, le destin. Si elle a besoin de toi pour apprendre de ce monde inconnu, toi, t'as besoin d'elle pour trouver un peu le courage d'avancer. Plutôt que de te morfondre dans les océans, voilà que tu es sur le point de manger une pizza. De quoi véritablement te redonner le sourire. « Attention, ça ressemble à de la drague ce que vous me dites là. » Et même que tu t'autorises à être taquin ! Mais ne voulant pas mettre à l'aise Rayna, tu fais une mou désolée pour qu'elle te pardonne ta plaisanterie. Même si, vraiment, ça ressemblait à une bonne vieille technique de drague surfacienne.

Une fois à l'intérieur du restaurant, tu laisses le serveur vous guider à la table la plus discrète de la salle – évidemment demandée par tes soins – puis vous vous installez sur les deux chaises, face à face. Lui apprendre les us et coutumes humaines, oui, mais tu n'oublies pas non plus que vous avez beaucoup de choses à vous dire, et la discrétion est de mise pour pouvoir conter vos récits respectifs. Après avoir commandé une pizza, la plus simple pour commencer, tu adresses un sourire à ta nouvelle partenaire. Ça lui va plutôt bien finalement les tenues surfaciennes. Cette femme semble décidément parfaitement s'accoutumer à tout très vite. Et c'est drôle de se sentir à l'aise avec elle sans même savoir d'où elle provient. Toi qui étais on ne peut plus méfiant tout à l'heure, voilà que tu baisses peu à peu ta garde, et laisses Rayna pénétrer dans ton intimité. Une intimité dont elle aimerait en apprendre davantage. « Déjà, on va commencer par se tutoyer. » Si tu en viens à lui raconter ta vie et tes origines, c'est quand même la moindre des choses que d'oublier cette politesse qui n'est déjà plus de mise entre vous. Il ne s'agit pas là d'un repas entre collègues ou simples connaissances, comme elle l'a elle-même souligné en s'adressant au serveur, vous êtes un peu plus que tout ça. Parce que vous vivez quelque chose de très particulier, évidemment, mais aussi parce que vous vous ressemblez. Et que vous le sentez très bien. « Je suis Atlante. » Les bras sur la table, tu commandes une bouteille de vin blanc au serveur avant de poursuivre quoi que ce soit. Ça aussi, le vin, c'est quelque chose que tu apprécies beaucoup. En espérant qu'elle ne soit pas trop réfractaire à l'alcool. Mais existe t-il meilleur façon que d'apprendre à se connaître ?

Bien, par où commencer ton histoire, sachant qu'il y a certains passages que tu ne pourras pas lui confier tout de suite, sous peine de la voir partir en courant. Et si tu attends avant de dévoiler tes facettes les plus sombres, ce n'est pas pour sciemment lui mentir, c'est simplement parce que tu as espoir, que plus tard, votre amitié soit assez renforcée pour qu'elle le prenne un peu moins mal. C'est sans doute une technique bancale, mais si Layla est parvenue à tout accepter de toi, pourquoi Rayna ne le pourrait pas ? Entre espoir et naïveté, la limite est parfois très floue. « Le monde d'où je viens s'appelle Atlantis, une magnifique cité sous-marine. Il y a plusieurs centaines d'années, nous vivions comme tout le monde à la surface, mais suite à un incident, tout notre royaume a sombré dans les eaux. C'est suite à ça que notre corps s'est adapté. Nous avons évolué. Et aujourd'hui, toute mon espèce est capable de respirer sous l'eau. Il est même plus facile pour nous de le faire sous l'eau qu'ici. Je ressemble à un humain, mais je n'en suis pas un. Ma force, mon agilité et mes sens sont bien plus développés que le commun des mortels. » Tu te coupes un instant pour laisser le serveur vous servir le vin. Suspense, que va t-elle en penser ? « Goûte, mais t'es pas obligée d'aimer. Il m'a fallu un peu de temps à moi aussi pour m'y habituer. » Et après avoir bu quelques gorgées, tu reprends là où tu en es resté. Après ce rapide résumé sur les Atlantes, tu peux maintenant t'attarder un peu plus longuement sur ton propre cas. « Je suis le fils d'une reine, et par conséquent, j'ai été roi, moi aussi. Pendant longtemps, j'ai régné sur mon peuple du mieux que je le pouvais. Tu sais, les Hommes peuvent se montrer cruels, et ils n'ont que faire de la Terre qui les abrite. Si bien que nos océans ont été pollués et nos animaux tués. Des horreurs ont été perpétrées, et je ne pouvais plus le supporter. Alors j'ai pris une décision difficile, radicale, et qui m'a tout coûté. » Ton sourire enjoué devient aussitôt un peu plus triste. C'est ton histoire que tu lui contes, en lui accordant une confiance absolue, puisque tu n'omets pas de mentionner ton échec. Lourd échec qui pèse encore maintenant sur ton cœur. « Aujourd'hui, je n'ai plus rien d'un roi. » Et ce que tu ne rajoutes pas, c'est que tu ne sais plus vraiment quoi faire de toi-même. Atlantis était toute ta vie, et sans elle, tu crains de ne plus avoir de réel dessein. Tu es né pour être roi, sans ça, qu'est-ce qu'il te reste ?

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Si tu n'es plus un roi alors qu'est-ce que tu es ? Elle n'imagine pas, Rayna, à quel point Atlantis était toute ta vie. Tu es né pour succéder au trône, pour devenir le futur régent d'une cité magnifique. Tout ce que tu as fait, tu l'as fait dans le but de protéger ton peuple. C'est pour eux que tu t'es battu, pour eux que tu as enduré multiple souffrances, pour eux que tu t'es plié à l'enseignement extrémiste de ton père. Tu n'avais jamais eu autre but que de devenir roi. Presque comme une machine que l'on programmerait à l'avance, avec un objectif bien défini, et dotée d'une durée de vie obsolète dès lors que celui-ci est accompli. C'est du moins ainsi que tu le ressens, un cuisant échec qui t'a transformé en fantôme errant dans les océans. Sans peuple, sans royaume, sans reine, sans rien. Alors, réellement, maintenant que tout est perdu, que reste t-il de toi ? T'aimerais pouvoir lui expliquer, lui démontrer que ce n'est malheureusement pas aussi simple qu'elle a l'air de le penser, mais il est bien trop tôt pour ouvrir autant ton passé et ta psyché à une inconnue. Tu apprécies sa bienveillance, vraiment, mais il lui manque bien trop de morceaux au puzzle pour mesurer l'impact que le bannissement a eu sur toi. Quand tu as été battu par Arthur, t'as préféré mourir. T'aurais été prêt à le laisser te transpercer des lames de son trident, plutôt que de vivre avec la perte de ton monde. Et en y repensant aujourd'hui avec le recul nécessaire, même si tu es parvenu à t'en sortir, tu aurais sans doute trouvé la mort plus supportable que la prison. C'est ainsi que le roi d'Atlantis a fini, au fond d'une cellule, à la surface, entouré de tous ces êtres qu'il méprisait. Quelle triste fatalité. Un destin qui se devait être hors du commun, et qui finalement, se résume à une terrible humiliation. Est-ce qu'elle changerait son jugement si elle savait tout ça, Rayna ? Est-ce qu'elle verrait toujours l'homme derrière le roi ? Car honnêtement, il n'y a plus rien à voir. Le roi est mort, et l'homme ne sait plus qui il est. Après avoir été une seconde fois abandonné et expulsé de chez toi, te voilà revenu à ce que tu étais avant de trouver la force d'avancer à Morro Bay.

Alors Rayna s'est elle-même confrontée à la couronne. Voilà un avis qui te surprend et t'intrigue. Et renforce ta décision de ne surtout pas lui dévoiler toute l'histoire de ton règne. Elle a raison, le pouvoir est un sentiment dangereux, il ne peut être rassasié, et il pousse même les meilleurs à basculer vers une obscurité dont il est après difficile de réchapper. Et s'il y a bien quelqu'un qui en mesure pleinement les conséquences, c'est toi. « Peut-être. J'imagine qu'il est encore trop tôt pour en juger. » Car tu ne te sens pas plus heureux maintenant que tu es débarrassé de la couronne, bien au contraire, tu as passé des années à essayer de la récupérer. Comme une drogue dont il est impossible de se passer, et dont le manque se fait ressentir chaque jour un peu plus durement. Aujourd'hui, tu te sens capable de t'en détacher, mais combien de temps as-tu perdu à essayer de récupérer ce que tu pensais être ton seul héritage ? Beaucoup trop. Et tu n'es pas à l'abri de retomber dans tes dangereux desseins. Tout est tellement bancale dans ta vie, que t'as l'impression de marcher constamment en équilibre sur un fil, un ouragan dans le dos. « Mais j'espère devenir un meilleur homme que je n'ai été roi. » Oh oui, elles ont été nombreuses tes erreurs, et tu portes encore leur très lourd poids sur les épaules. Un poids dont tu refuses de te débarrasser, ou de partager avec qui que ce soit, parce qu'il te rappelle tout ce que tu as sacrifié aveuglement, pensant que le seul but de ton existence était de détruire les Hommes. T'en as besoin pour ne jamais oublier ce que tu as été, et ce que tu aurais pu devenir. Encore plus maintenant, après avoir constaté de tes propres yeux ce qu'aurait pu devenir votre monde si tu étais allé jusqu'au bout de ta folie. Ce n'est plus ce que tu veux. Sans savoir vraiment ce que tu désires. Un paradoxe, un mystère, que personne n'a pu élucider jusqu'à présent.

Et tandis que le serveur vient déposer votre pizza sur la table, en vous souhaitant bon appétit, tu écoutes ta partenaire avec attention, cherchant déjà quelques clés pour tenter d'ouvrir le coffre qui renferme ses origines. Sans vouloir la presser, tu estimes qu'il est désormais temps d'échanger les rôles. Tu viens de lui raconter un morceau de ton histoire, mais tu sais que la sienne est probablement d'autant plus fascinante. Ton intérêt n'a rien de feint, et ta curiosité rien de polie. Cette femme t'intrigue depuis votre rencontre sur la plage tout à l'heure, et qu'elle te pardonne ton impatience, mais tu doutes réussir à contenir tes questions encore longtemps. « Et bien, si un jour l'occasion de rencontrer ta grand-mère se présente, je serais ravi de lui raconter tout ce qu'elle voudra savoir. » Un mythe. Voilà qui t'arrache un franc sourire. En plus d'éprouvé une certaine fierté. Votre peuple a bercé l'imagination d'hommes et de femmes par delà votre dimension, à quel point est-ce incroyable ? Cependant, tu espères ne pas avoir touché un point sensible en suggérant un hypothétique échange avec sa grand-mère. Tu l'as bien compris, elle est la seule à avoir passé le portail jusqu'à votre monde, ce qui signifie qu'elle a laissé tous ses proches derrière elle. Est-ce qu'elle peut malgré tout rentrer chez elle quand elle le veut ? Est-ce que c'est trop dangereux ? Et sa grand-mère est-elle seulement en vie ? Après la dégustation du vin, un peu provocante que tu accueilles d'un sourire, tu n'y tiens plus, et te lances dans le grand bain de son histoire : « Et toi ? D'où tu viens ? Quelle est cette contrée où le vin est meilleur qu'ici, et où mon peuple n'appartient qu'aux livres des légendes ? » T'es tellement intéressé, que tu en oublies de déguster ta pizza. Preuve que tu as bel et bien le sens des priorités, et que Rayna, pour l'instant, figure en haut de la liste.

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C'est drôle, t'as l'impression de voir une toute autre personne à présent. Et il ne s'agit pas que sa main qui vient de temps en temps toucher la tienne en guise de réconfort, mais aussi de ce sourire qu'elle arbore presque à chaque fin de phrase. Quand tu l'as retrouvée inconsciente sur la plage, jamais tu n'aurais imaginé que quelques heures plus tard vous seriez là, tous les deux assis dans un restaurant, à vous raconter vos vie en dégustant une pizza. Mais tu aimes ce que tu vois, ce qu'elle laisse transparaitre maintenant qu'elle semble bien plus à l'aise en ta présence. Elle s'autorise à plaisanter tout autant qu'à s'intéresser réellement à qui tu es, et ce savant mélange te berce le cœur de félicité. Tu ne pensais pas retrouver quelqu'un qui parviendrait à t'apprivoiser aussi rapidement – enfin, tout est relatif. Après le fiasco avec Layla, tu t'étais interdit de commettre la même erreur, celle de laisser qui que ce soit entrer dans ton monde, ou tenter de te confier. Et te voilà, face à cette inconnue qui n'a désormais presque plus rien d'une étrangère, à qui tu contes le récit sacré de ton peuple. T'apprécies qu'elle ne pose pas plus de questions que de raison, préférant vraisemblablement que tu prennes toi l'initiative le moment voulu. Elle le sait tout aussi bien que toi, chacun dispose d'un jardin secret, et parfois, il faut du temps pour autoriser quelqu'un d'autre à y entrer. Ce que tu as fait, ce que tu étais et ce que tu aurais pu devenir, est une blessure encore fraiche, loin d'être cicatrisée, et que tu refuses d'exprimer avant d'être certain qu'elle ne prendra pas la fuite le moment où il te faudra t'y épancher. Tu ne supporterais pas un nouvel abandon. Et sans doute es-tu trop naïf de faire aussi rapidement confiance à cette femme, toi qui pourtant t'étais juré du contraire, mais t'as envie de tenter le coup. Parce que c'est ça aussi, avancer. Tes efforts englobent tellement de domaines différents, et laisser une chance aux gens, sans les mettre tous dans le même panier, en fait clairement partie. Tu risque de te brûler à la flamme de cette nouvelle relation, mais tant pis, cette fois, tu tiens à faire les choses correctement. C'est peut-être là ce qui te manquait avec Layla, baisser complètement la garde, sans avoir peur de ce qui pourrait advenir ensuite. Si c'était à refaire, si tu pouvais te retrouver à nouveau face à elle dans cette cuisine quand elle t'a demandé de partir, tu ne ferais plus les mêmes choix. Finalement, cette dispute t'aura elle aussi beaucoup appris.

Tu n'auras donc jamais l'occasion de rencontrer sa grand-mère, mais même sans la connaître, tu comprends qu'elle avait tout d'une femme extraordinaire. Tu peux le deviner dans le sourire de Rayna, dans le pétillement dans ses yeux quand elle en parle, et même dans le ton de sa voix. Il est important d'avoir de tels piliers dans sa vie, c'est même indispensable pour ne pas emprunter de mauvais chemins. Rayna a eu cette chance, et t'es déjà certain que sa grand-mère serait ravie de voir quel genre de femme elle est devenue. Le genre à tendre la main à un parfait étranger, à l'écouter avec attention, et à faire le choix de s'attarder sur le beau plutôt que sur le laid. « Je n'en doute pas, ça se ressent dans la façon dont tu la décris qu'elle était formidable. » Sourire sincère à son égard, après une pensée pleine de respect pour la disparue, puis enfin, tu goûtes à cette pizza, sans manquer une seule miette du récit de Rayna. Ça y est, des réponses, celles que tu espères et attends depuis votre entrevue sur la plage. Et oui, bien sûr que tu la comprends, sans doute même mieux que personne. Protéger ton peuple a toujours été le but de ton existence, et c'est un intérêt qui te porte toujours extrêmement à cœur. Tu n'es rien sans Atlantis et sans ceux qui l'habitent, c'est ce que pour quoi tu es né, être roi, et défendre ta cité au péril de ta propre vie. Elle n'a peut-être pas était reine, mais elle en porte les mêmes valeurs, et c'est tout à son honneur. En guise de confirmation à sa juste supposition, tu acquiesces sans dire un mot. Pas besoin, tout était de toute façon purement rhétorique. Tu ne seras pas celui qui la poussera à mettre l'un des siens en danger, bien au contraire. Si d'une quelconque façon tu peux l'aider, tu le feras sans hésiter.

Le Dark World. Tu fais une pause dans ta pizza – dégustée avec les mains – pour réfléchir dans les tréfonds de ta mémoire si un tel nom pourrait faire écho à l'un de tes souvenirs. Mais non, rien de rien. Tu ne te souviens pas avoir entendu parler de ce monde, que ce soit dans les livres, ou de la bouche de quelqu'un d'autre. Sa dimension est donc un grand mystère pour toi. Pour sa nature d'Homo Magi, en revanche, ça oui, tu l'avais deviné, et depuis l'instant où tu as senti son énergie ricocher dans l'océan. « Qu'est-ce que tu veux dire par en partie ? T'es venue pour trouver des réponses à tes questions ? Pour connaître tes origines ? » Ou en élargissement, celles de son peuple ? Elle reste encore bien énigmatique, Rayna, bien que tu commences doucement mais sûrement à entrevoir beaucoup de choses. Tu espères qu'elle ne tiendra pas compte de ta curiosité poussée, ou des multiples questions que tu risques de lui poser. « Pour quelles raisons t'as voulu venir ici, Rayna ? » Et tu penses l'avoir deviné, pour y parvenir, le risque a été grand. « Quelqu'un n'avait visiblement aucune envie que tu partes du Dark World. » A en juger par la blessure qu'elle arborait quand tu l'as trouvée sur l'île, elle a été attaquée par des gens de son monde, qui cherchaient sans doute à l'empêcher de franchir le portail. Mais pourquoi ? Le puzzle est encore bien trop nébuleux. « Quoi que ce soit, je peux t'aider. » En plus de posséder des connaissances conséquentes sur l'un des éléments qu'elle maitrise, et d'avoir la possibilité de trouver beaucoup plus sur une multitudes de questions qu'elle pourrait avoir, t'es enclin, sans hésiter, à être une aide dans sa quête. Tu ne sais encore pas grand chose de tout ça, mais qu'importe. L'aider, c'est exactement ce dont tu avais besoin aujourd'hui, pour passer outre le trouble qui embrumée ton esprit.

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Connaître son passé pour avoir un avenir, si tu n'es pas directement concerné par cette règle, tu connais néanmoins quelqu'un qui l'a été. Ton frère, Arthur. Avant d'être le héros nommé Aquaman et le roi d'Atlantis, il vivait sur terre, dans son phare près de la mer. Il se savait être humain, oui, mais pas que. Partir en quête de ses origines a été un chemin périlleux pour lui, et tu l'avoues, tu ne lui a pas facilité la tâche. Imbu et jaloux, tu n'as jamais accepté qu'un sang mêlé prenne le trône d'Atlantis. Opposition virulente, propos blessants, tu ne lui as pas fait le moindre cadeau, préférant autrefois voir ce frère disparaître complètement de ton existence. Mais maintenant que tu es face à quelqu'un qui semble également chercher quelque chose dans les méandres du passé, tu allèges ton jugement hâtif et auparavant catégorique. Ce que ton frère a éprouvé, jamais tu ne pourras le comprendre, et sans doute ne t'es-tu pas rendu compte de la souffrance qu'il a pu ressentir en ne sachant à quel monde il appartenait vraiment. Des tiraillements et des questionnements que se posera sûrement Rayna un jour, mais tu l'espère, cette fois, tu pourras être présent l'aider à voir plus clair. Tout ce que tu n'as pas fait pour Arthur, préférant lui mettre des bâtons dans les roues plutôt que de l'aider, tu le feras pour elle. Pas par regret ou conscience, simplement parce que les choses ont changé. Tu n'es plus celui que tu fus jadis, et t'as encore tant à apprendre et à prouver. « Je vois ce que tu veux dire, même si je n'en pas fait moi-même l'expérience. » C'était même tout le contraire, ton avenir était déjà tracé. Fils du roi Orvax, tu étais destiné à prendre la couronne de ton père. Un rôle qui t'a mis un poids énorme sur les épaules, et qui t'a poussé dans tes retranchements dangereux. Tu l'aimais, ton père, malgré toutes les horreurs commises. Tu voulais lui ressembler, marcher dans ses pas, sans réaliser à quel point tu faisais fausse route. Alors parfois, sans doute est-il préférable de voir le passé nous échapper, cela évite un présent et un futur écrits d'avance. C'est du moins ce que tu ressens aujourd'hui, après avoir mis tant d'années à prendre conscience de tes erreurs. Devenir comme lui était la pire chose à faire, et tu es bien content d'être finalement parvenu à séparer ton chemin du sien. Tu n'es plus que toi, désormais, sans l'ombre de qui que ce soit au-dessus de la tête.

C'est donc par pur altruisme que Rayna a risqué sa vie. Pour sauver un homme perdu, dont elle ignorait presque tout. Et la menace, qui s'est faufilée jusqu'ici avec elle, reste un danger pour lui. Est-ce qu'elle est vraiment prête à risquer autant pour quelqu'un qu'elle connait à peine ? Attention, ses intentions sont parfaitement louables, mais en tant qu'ancien roi, tu sais malheureusement que tout le monde ne peut être sauvé. C'est une défaite toujours difficile à accepter, mais combien d'Atlantes as-tu perdu au cours des guerres ou des méfaits de la surface ? Beaucoup trop pour les compter. T'aurais aimé pouvoir sauver chacun d'entre eux, mais la tâche était bien trop rude. Si le combat que mène Rayna est clairement différent du tien, tu ressens cette même compassion qui t'animait autrefois, et la même déchirure qui pourrait suivre si elle venait à échouer dans sa mission.  « Si ces ennemis sont éliminés, vous serez définitivement libérés, lui et toi ? Vous serez libres de vivre votre propre vie ? » Ou d'autres pourraient-ils suivre jusqu'à obtenir satisfaction ? T'aimerais savoir s'il s'agit là d'un cercle sans fin, ou s'il existe un espoir que tous les deux parviennent à retrouver la paix et la tranquillité. Il y a des combats qui ne valent pas la peine d'être menés, et celui-ci pourrait en faire partie, s'il se révélait effectivement sans aucun point final possible. « Pourquoi toi ? Pourquoi avoir tout risqué ? » Bien sûr, tu comprends qu'il y a de la curiosité là-dedans, une envie d'en découvrir plus sur ce monde, mais est-ce suffisant pour risquer sa vie ? Existe t-il un lien indéchiffrable entre ce voyageur et elle ? Loin de toi de juger ses actes, t'essayes simplement de les comprendre pour devenir la meilleure aide possible.

Car oui, qu'elle le veuille ou non, tu feras de ton mieux pour soulager le poids de sa tâche. Maintenant que tu as fait sa rencontre, comment pourrais-tu revenir à tes occupations sans te soucier de qui pourrait lui arriver ? Et peut-être que tu as précisément besoin de ça aujourd'hui. Après avoir perdu Layla, retrouver un objectif va considérablement t'aider toi aussi, d'une manière qu'elle n'imagine même pas. T'as besoin de retomber sur tes deux pattes, et pour y parvenir, l'accompagner dans ce périple pourrait être la solution. « Me mettre en péril ? Allons, je suis l'un des êtres les plus puissants de cette planète. » Et tu es très sérieux en disant ça. Elle n'a pas encore vu l'étendue de tes pouvoirs, mais qu'elle te croit sur parole, tu pourrais anéantir cette Terre si tu le voulais. Alors sans vouloir jouer les hommes trop sûr d'eux, qu'est-ce qu'un groupe de magiciens pourraient réellement contre toi ? Trop arrogant, peut-être. Inconscient, sûrement aussi. Mais tu doutes sincèrement qu'elle trouve quelqu'un de plus qualifié que toi. Elle connait la magie, toi tu maitrises l'eau et la foudre, à vous deux, ont-ils réellement une chance de l'emporter ? « Je t'assure que tu continueras d'avoir autant de pizzas que tu le souhaites. » Tu lui rends son sourire, toujours un peu présomptueux. C'est un défaut que tu sais avoir, mais qui peut s'estimer assez chanceuse pour considérer Ocean Master comme l'un de ses alliés. Depuis Layla, ça n'était pas arrivé. Et sans elle, ça ne serait plus arrivé.

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Tu te rendais compte, Rayna Brodveldt, que raconter ton histoire à Orm te faisait un bien fou. Après tant d'années plongée dans un silence presque constant et la culpabilité... Mettre des mots sur ce que tu avais vécu... Ce n'était ni une consolation, ni une rédemption, mais c'était quelque part une libération. Tu te rendais compte alors que vu de l'extérieur, ça pouvait aussi paraître absolument idiot. Tout sacrifier pour un homme que tu ne connaissais même pas. Mais en réalité, jamais tu n'aurais pu deviner l'impacte que tout cela aurait. A l'époque, quand tu avais décidé d'aider le voyageur à s'échapper, tu ne savais pas que la volonté de le voir mourir déclencherait une telle ferveur. Au contraire, tu étais persuadée que le faire disparaitre d'Arcadia arrangerait tout. Pour lui, comme pour ton peuple. Tu pensais le plus sincèrement du monde que cela était la meilleure solution. Au pire, si tu étais découverte, tu aurais été privé de tes pouvoirs, comme ta mère l'avait été. Et au fond... ce n'était pas une punition qui te faisait peur bien au contraire. Jamais tu n'aurais pu imaginer que sa mort pouvait avoir autant d'importance aux yeux de ton père. Pourquoi? Mais pourquoi donc voulait-il le voir mourir au point de déclencher de telles hostilités. Au point de s'en prendre à tes amis, à tes proches, à sa propre femme, pour te faire parler? Non, jamais tu n'aurais pu imaginer cela, tout simplement parce que tu ne savais pas tout. Et bien sûr que si tu avais su, si tu avais su tous ceux que tu allais emporter dans ton sillage, tu aurais fait les choses autrement. Tu aurais essayé de trouver une autre solution. Mais à l'époque on t'avait caché trop de choses et tu avais été naïve. Tu avais cru pouvoir sauver et préserver tout le monde. Tu étais jeune, inexpérimentée et insouciante. Tu ne referais plus la même erreur. Néanmoins, maintenant c'était fait et malheureusement, tu ne pouvais pas changer le passé. Tu pouvais simplement faire en sorte que toutes ces morts n'aient pas eu lieu pour rien. Protéger le voyageur était la seule chose que tu pouvais donc faire. Pour que tout cela n'ait pas servi à rien. Une fois cela fait, une fois ta puissance contrôlée et maitrisée, tu affronterais ton père et tu libérerais Arcadia de son joug. Tel était ton plan, telles étaient tes aspirations les plus profondes. Resterais-tu alors sur Arcadia ou reviendrais-tu sur Midgard? Tu n'avais pas encore la réponse à cette question. Une chose à la fois. Chaque chose en son temps.

Orm te posait alors une question très pertinente. Une question à laquelle tu connaissais malheureusement déjà la réponse. Seriez vous libres si tu parvenais à arrêter tous ces ennemis... « Honnêtement? Non. » Tu ne pouvais pas être plus franche et sincère avec lui. « Tant que mon père sera au pouvoir, tant que le Conseil restera inchangé, nous serons en danger. C'est pourquoi, une fois que je serai prête, j'ai bien l'intention d'y remédier. » Il était trop difficile encore de mettre des mots sur ce que tu allais devoir faire. Mais Orm pouvait voir dans ton regard ta détermination à en finir. Il te demandait ensuite pourquoi tu avais tout risqué. « Je ne savais pas que je risquais autant sinon... j'aurais fait les choses autrement. A l'époque, il y a cinq ans, je pensais sincèrement qu'éloigner le voyageur était la meilleure solution. Je pensais... J'étais idiote... Je pensais pouvoir arranger tout le monde. Mais j'avais sous-estimé le problème, j'avais voulu agir sans en connaître tous les paramètres. J'ai été naïve et stupide. Beaucoup l'ont payé à ma place et c'est pour ça qu'aujourd'hui, je leur dois de réparer mes erreurs. Parce que je ne veux pas que leur mort ait servi à rien. » Tu ne savais pas ce que Orm penserait de tout cela et soudainement, tu te sentais vraiment honteuse. Mais il pouvait te juger, il pouvait t'accabler pour tes mauvais choix égoïstes et présomptueux. Tu ne méritais pas mieux. Et c'était en cela que tu avais survécu, en cela que tu avais supporté toutes ces tortures physiques et morales. Parce qu'au plus profond de toi, tu estimais les mériter. Orm te disait ensuite qu'il était l'un des êtres les plus puissants de cette Terre et donc par conséquent que tu ne devais surtout pas t'inquiéter de le mettre en péril. Tu étais assez surprise par son sérieux un poil arrogant pour le coup. Tu n'aimais pas les vantards. Mais c'était Orm alors tu laissais couler. Puis, tu ne savais pas après tout, il ne faisait peut être que dire la vérité. Mais même s'il disait effectivement vrai... tu devais avouer que tu préférais plus de modestie. « Un des êtres les plus puissants de cette planète hein? J'aimerais beaucoup voir ça... Tu pourrais me montrer ce que vaut un Atlante, après tout je n'ai jamais vu. Enfin si tu le veux bien, je ne veux pas te forcer la main. » Tu prenais une autre part de pizza en attendant la réponse d'Orm. Tu espérais ne pas l'avoir braqué avec une telle requête.

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Elle n'a pas encore idée de qui se trouve face à elle. De la noirceur qui t'habite. Sacrifier des gens, tu sais ce que c'est, mais la différence entre elle et toi, c'est tu l'as fait de plein gré. Il ne s'agissait pas de simples dommages collatéraux, tu as tué des opposants parce qu'ils se mettaient en travers de ton chemin, et tu as tué ta propre mère parce qu'elle a osé s'éloigner de toi. Tu caches bien ton jeu, derrière ces sourires avenants et cette nonchalance en mangeant tes derniers bouts de pizza, mais si elle savait tout de toi, il y a bien longtemps qu'elle ne serait plus là. Tu n'es pas son ennemi, et jamais tu ne chercheras à lui faire du mal, mais ça n'enlève en rien ce qui pourrait vous opposer un jour ou l'autre. Tu sens beaucoup de bonté en elle. De la naïveté, de la jeunesse, mais une véritable intention de bien faire. Elle a voulu aider un étranger au point de perdre des gens qu'elle aimait sûrement, si ceci n'est pas la preuve d'une réelle empathie, alors qu'est-ce que c'est ? Toi, à l'inverse, tu apprends seulement maintenant à redresser la barre de ton navire de désolation et de haine. Voilà trop longtemps qu'il navigue sur les eaux déchainées de ton esprit tourmenté, et il va te falloir du temps pour espérer un jour sortir complètement de la tempête. Tu n'as pas cette générosité naturelle, pas cette envie d'aider ton prochain, mais tu apprends. Et tu penses avoir déjà fait un bout de chemin admirable, que ce soit en découvrant la surface aux côtés d'une humaine à qui tu as donné toute ton amitié, et maintenant, à essayer de tendre la main à une inconnue. C'est maladroit, c'est imparfait, mais c'est un bon début. Et le jour où elle apprendra toute la vérité, t'espères qu'elle se souviendra de ce que tu t'évertues de faire, plutôt que de te blâmer pour ce que tu as fait. Sans minimiser l'horreur de tes actes, à commencer par le meurtre de ta mère qui te déchire le cœur chaque jour qu'il t'est donné de vivre, t'aimerais pouvoir obtenir une seconde chance. Ou à défaut, un jugement qui ne sera pas catégorique.

Cette envie de réparer ses erreurs est tout à son honneur, et si elle a la chance de pouvoir le faire, alors qu'elle n'hésite pas une seule seconde. Il n'y a rien de pire que les regrets et les remords pour empoisonner l'esprit. « Tout le monde fait des erreurs, l'important c'est d'apprendre à ne plus les refaire. » Ecoutez donc ce grand sage qui n'applique pas ses propres conseils. Oh, t'aimerais beaucoup toi aussi pouvoir donner un sens à la mort d'Atlanna, mais il n'en existe aucun. Un crime de colère n'a rien de bon et n'est pas rectifiable. Toi, tout ce que tu peux faire, c'est l'accepter. « Je sais que t'y arriveras. Je sens une réelle détermination en toi, et à partir de là, qu'est-ce qui pourrait t'empêcher de réussir ? » Un obstacle n'est pas une fatalité, il faut simplement apprendre à s'en détourner pour reprendre le chemin, et tu sais qu'elle y parviendra sans difficulté. Ses fautes passées ne sont pas vaines, elles l'ont amenée là où elle est aujourd'hui, avec un peu plus de sagesse, un peu plus de volonté pour réussir là où elle a échoué autrefois. Un cycle sans fin d'apprentissage, qui la conduira tout droit là où elle veut être. Après avoir terminé ton dernier bout de pizza, tu l'observes un sourire en coin, parfaitement conscient que ton arrogance lui a déplue. Mais tu ne t'excuseras pas pour ça. Tu ne t'excuseras pas pour affirmer l'une des dernières choses qu'il te reste : ta confiance en tes capacités. Elle peut faire le choix d'y voir un côté bien trop présomptueux, et sans doute aurait-elle raison, mais il s'agit plus que de ça. Tu sais ce que tu vaux, tu sais ce dont t'es capable de faire, et il n'y a aucun mal à le dire ouvertement. Tu es un Atlante, fort, rapide, agile, un prince d'Atlantis qui est resté invaincu dans l'arène, et tu es également Ocean Master, protecteur des océans que rien ne peut arrêter. A moins d'être la Ligue de Justice réunie. Alors qu'elle l'accepte ou non, cette facette de ta personnalité de s'atténuera pas, et rien ni personne ne t'enlèvera cette fierté acquise après des années de dure labeur auprès d'un père abusif et tyrannique.

Elle veut te voir à l'oeuvre, la magicienne ? Aucun problème, elle verra. Mais l'heure n'est pas encore à la démonstration. De toute façon, vos routes vont finir par se recroiser, pas vrai ? Alors tu auras tout le temps de lui montrer de quoi tu es capable. Déchainer les mers, appeler la tempête, déclencher la foudre. Et elle verra, que tu n'as pas menti. Et que par conséquent, tu n'as rien à craindre de personne. « On va garder ça pour demain, je ne voudrais pas tout te dévoiler en une fois. » Toi aussi tu peux garder un certain mystère. Et puis ça lui donnera une bonne raison de vouloir te revoir. Vous avez encore tant à vous dire, mais c'est peut-être assez pour une première fois. « On peut mettre la suite à demain, le temps de digérer cette rencontre. » D'un geste de la main, tu demandes au serveur l'addition, tout en sortant quelques billets trouvés dans une cagnotte chez Layla, que ça aussi tu lui rendras en temps voulu. Après lui avoir fait manger de la pizza, il est maintenant l'heure de l'emmener dans l'endroit où elle va passer la nuit. « Je t'emmène à l'hôtel, c'est comme une auberge, tu pourras y dormir en sécurité. » Et prendre le temps de bien se reposer pour commencer d'aplomb son grand voyage dans votre monde imparfait, mais qui ne manquera sûrement pas de la séduire. Si t'as réussi à y voir de bons côtés, nul doute qu'elle y parviendra aussi.

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Tu étais vraiment très curieuse de voir ce que donner la puissance d'un Atlante, surtout après qu'Orm t'ait clairement affirmé qu'il était l'un des êtres les plus puissants de cette planète. Tu le croyais bien volontiers mais tu demandais tout de même à voir. C'était comme tout, quand on vous dit que vous avez ou que vous êtes le meilleur, et bien, vous voulez voir ce meilleur. Bien sûr, tu n'attendais pas qu'Orm te montre tout cela dans la seconde. Tu étais épuisée et lui aussi avait eu une sacrée soirée. Puis tu en étais certaine, vous auriez tout le temps de vous montrer de quoi vous étiez capables à l'avenir. Il te disait qu'il te gardait tout cela pour demain, tu acquiesçais d'un sourire, tu étais parfaitement d'accord, tout cela pouvait largement attendre demain. Il ajoutait qu'il ne voulait pas tout te dévoiler en une seule fois. Voilà un sentiment qui était sage et partagé. Déjà parce que tu avais beaucoup d'informations à assimiler et que, malgré ton air déjà bien intégré, c'était extrêmement difficile et éprouvant. Puis aussi parce qu'il était bon de développer le mystère, d'attiser la curiosité, de prendre le temps d'apprendre à se découvrir. Oui, tu aimais toi aussi cette idée. Et puis ce serait l'occasion de vous revoir, d'avoir une excuse pour profiter encore une fois de vos compagnies respectives. Car tu l'espérai bien, Rayna Brodveldt, que tu reverrais très vite Orm Marius. Tu voulais encore discuter des heures avec lui, profiter de sa présence amicale et pleine de sagesse, bénéficier de son savoir et de ses conseils, en découvrir davantage sur lui et son peuple. Ce n'était donc que partie remise, tu en étais certaine.

Et tandis que tu terminais ta part de cette délicieuse pizza, Orm faisait signe au serveur de revenir pour lui payer son dû. Tu remerciais bien évidemment ton ami pour t'avoir payé ce repas des plus appréciés. Tu espérais pouvoir un jour lui rendre la pareille. Il te disait ensuite qu'il allait t'amener dans un hôtel, ce que toi tu appelais une auberge. Tu n'étais pas du tout contre, tu avais très envie de dormir. Tu étais de plus en plus épuisée. Et plus tu pensais au moelleux confortable d'un bon lit, plus tu avais sommeil. Tu avais d'ailleurs baillé de nombreuses fois sur le chemin. Orm avait gentiment voulu te payer ta chambre mais tu ne pouvais pas encore une fois abusé de son hospitalité et de ses richesses, tu étais trop gênée. Alors, pour la première fois, tu usais d'un petit tour de passe-passe pour faire croire au gérant que tu avais payé ta note. Bien évidemment, dès que tu le pourrais, tu reviendrais dans cet hôtel pour t'acquitter de ta dette. Tu étais bien des choses Rayna Brodveldt, mais tu n'étais pas une voleuse. C'est d'ailleurs ainsi que naquit ton carnet de dettes, celui où tu notais tous les endroits où tu avais du user de la magie en absence de monnaie terrienne. Chacune de ces personnes, magasins, entreprises, etc... que tu avais dû, malgré toi, arnaquer, tu viendrais tout leur rembourser, parole d'honneur. Orm t'avait accompagné jusqu'à ta chambre et t'avait fait visité. Tu étais un peu perdue, tu avais besoin d'être aiguillée. Il avait, encore une fois, été très patient et amicale, tu avais grandement apprécié. Puis, tel un vrai gentleman, il s'était simplement eclipsé pour te laisser te reposer seule. Tu n'étais pas vraiment rassurée d'être seule. Tu aurais voulu lui demander de rester à tes côtés cette nuit, en tout bien tout honneur bien sûr, mais il semblait vouloir lui se retrouver seul, alors tu n'avais pas osé. « Merci pour tout Orm... Bonne nuit. » Lui avais-tu donc tout simplement dit avant d'aller essayer pour la toute première fois une douche. Un moment absolument divin. Toute cette eau chaude qui avait coulé en cascade sur ton corps, cette fleur de douche divinement agréable, ce gel douche fleuri qui avait enchanté tes narines. Tu aurais voulu que l'instant dure des heures et ça avait presque été le cas. Mais tu étais tellement fatiguée que tu avais dû te résoudre à quitter ce petit bout de paradis un peu plus vite.

Tu avais alors enfilé ton peignoir de bain et avait allumé la télévision. Tu savais désormais ce que c'était. Tu ne comprenais pas encore bien comment ça fonctionnait ni pourquoi ça existait mais en cette première nuit complètement seule dans ce nouveau monde, il était réconfortant de ne pas être plongée ni dans l'obscurité, ni dans le silence. Recroquevillée dans ton lit, tu étais tiraillée par l'excitation et la joie d'être sur Midgard, mais aussi l'angoisse et la crainte d'être seule et impuissante. Epuisée, tu t’endormais tout de même assez vite. Bientôt, de nouvelles personnes bouleverseraient ta vie. Tu n'étais qu'au début de ton aventure Rayna Brodveldt.

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