JUNE MOONE ✸ she can smell death on you

et je dois adresser à quel nom ? la propriétaire lève les yeux vers la nouvelle venue. son regard traduit le jugement, et tout le mépris que cette femme porte en elle. un regarde qu'elle adresse à absolument n'importe qui. moone, june. elle répond. un coup de stylo bille, et elle louait cet appartement miteux. quelque chose qui lui permettrait d'avoir un toit sur la tête, et de ne pas trop attirer l'attention sur elle. june, elle tourne légèrement sur elle-même pour observer la pièce de vie, tandis que sa propriétaire laisse son regard partir du visage de son interlocutrice pour rencontrer ses pieds, avant de revenir. à dire vrai, elle se demande pourquoi une femme de son genre, qui est loin de ressembler au peuple qui vit dans le coin, est intéressée par une demeure appartenant à l’un des pires quartiers de gotham city. ce n'est pas comme si elle est à plaindre ; elle a les moyens de se louer quelque chose mieux. l’argent n’a jamais posé le moindre problème, et ça ne se voit rien qu'à son accoutrement. mais cette femme, cette mystérieuse femme, elle a pourtant bien des raisons de choisir cet endroit plutôt qu’un autre. elle a besoin de poser bagages, hors de midway, dans un coin où elle a moins de chances d’être reconnue. il faut dire que sa vie est devenue plutôt compliquée, depuis quelques temps. et le pire, c'est de se dire que, au fond, la seule personne à qui elle peut en vouloir, c'est sa propre personne. tout est de sa faute, et aujourd'hui, elle en assumait les conséquences. votre visage. il m’est familier. la vieille femme déclare avant de tourner les talons. un léger frisson parcourt le long du dos de june, mais ses lèvres se fendent en un faux sourire. on me le dit souvent.

regarde-la, june : elle sait qui nous sommes. ne le comprends-tu pas ? ses yeux nous dévisagent. tu croyais vraiment pouvoir continuer à vivre comme si rien ne s'était passé ? les gens nous reconnaissent. les gens ont peur de nous. regarde-la, june. regarde-la bien.

son dernier carton rencontre enfin le sol, et la jeune femme pousse un soupire de soulagement. elle referme la porte à l'aide de sa nouvelle clé après le départ de sa nouvelle propriétaire, et s'empresse de déballer ses affaires. june, elle s'assoit alors sur le divan d’un gris sale qui ornait la pièce principale, et attrape une valise qui traînait là. elle allonge cette dernière sur la table basse, et bouge la fermeture pour ouvrir. voilà bien longtemps qu’elle n’a pas posé les yeux sur son contenu. les souvenirs qu'il lui apportent n'arrivent pas à empêcher le chagrin de l'envahir. son cœur se serre fort, si fort qu’elle sent la douleur se propager le long de chacun de ses membres. ses mains se mettent à trembler, la photo qu'elle tient aussi, puis ses bras, et son corps tout entier. sa gorge émet un gémissement qu’elle ne peut retenir, alors qu’une fois encore le démon s’adresse à elle, ne lui donne que cette unique envie de s’exploser le crâne contre le mur qu'elle connaissait maintenant si bien.

voyons june, ne me dis pas que tu es nostalgique. je te ferais découvrir des choses bien meilleures que toutes ces idioties de ton passé. nous allons tellement accomplir, toi et moi. une fois que nous aurons éliminé waller du tableau, ce monde sera à nos pieds.

l'expédition, celle qui lui a coûté toute une vie de travail, est l'événement le plus marquant de sa vie. la plus terrible des erreurs et son plus profond regret. c'est à ce jour même, que la succube s'est emparé d'elle. qu'elle s'est infligé la pire des maladies possibles ; la possession. emprisonnée dans son propre corps, souvent c'est elle, l'autre, qui prend le relais. c'est elle qui parle, c'est elle qui agit. et comme s'il n'y aait pas déjà assez de problèmes aux yeux de june, il fallait qu'elle tombe sur amanda waller. ou plutôt qu'amanda waller ne tombe sur elle. sur elles. l'existence de la succube attire le mur, et elle mène sa propre expédition pour en capturer le cœur de l'entité comme moyen de pression, afin qu’elle accepte de participer à son programme de task force x. mais, tout a dégénéré. l’enchanteresse tente alors sa première invasion sur l’espèce humaine, ramène parmi les vivants son frère dans un corps de mortel. l’incube périt peu après, cependant, et l’on crut que ce fut le tour de sa sœur lorsque la suicide squad semble la vaincre. mais elle revint. elles revinrent.

june, june, june. tu croyais vraiment t’être débarrassée de moi aussi facilement ?

geste de colère, june vient éclater contre le mur un cadre qu'elle a machinalement pris entre ses doigts en repensant aux derniers événements de sa vie. elle serre les dents de rage ; elle se rappelle du faux-espoir qui s'était dressé chez june, lorsqu'elle n'entendait plus la succube lui murmurer ses atrocités. et, surtout, de la manière dont elle s'est manifestée de nouveau. si amanda waller possède encore le cœur de l'entité, june, de son côté, a décidé de tout quitter. midway city, ses amis, rick, son travail. elle aimerait reprendre le cours d'une vie normale. mais june est consciente que ça ne se fera pas si elle n'arrive pas à contrôler la sorcière. l'autre. il faut qu’elles ne fassent plus qu’un. le grognement, mêlé de colère, de frustration, de rage ; le grognement d'un enfant blessé, brisé par l'existence, s'élève dans une pièce à l'intention de quelqu'un, de quelqu'un qui n'est physiquement pas là, de quelqu'un qui la tourmente sans cesse, jours et nuits, alors que son corps demeure pourtant seul. sors de ma tête !