Past lives couldn't ever come between us || Donna

Past lives couldn't ever come between us

Elle avait fermé les yeux derrière les lunettes de soleil qui lui mangeaient le visage, pour profiter du soleil d’automne sur son visage et de l’air marin. Le goût de sel sur ses lèvres et les bruits ambiants, mélange de cris, de cors des bateaux qui allaient et venaient dans le canal entre le port et le large et du brouhaha des gens qui allaient et venaient sur la marina… Elle savourait ce que ses sens lui offraient, la pâle chaleur sur sa peau, la brise dans ses cheveux, le simple fait d’être en vie. Aussi stupide que ça en ait l’air, ces derniers temps, ça n’avait pas toujours été évident pour elle. Être en vie. Quelques semaines encore auparavant, elle se demandait si elle en avait encore le droit. Et aujourd’hui, elle ne regrettait pas d’en être arrivée à cette conclusion un peu bêta : bien sûr, que ça en valait la peine. Et qu’elle en avait encore le droit… Des petits couinements la ramenèrent sur terre et elle ouvrit les yeux, mais ne bougea pas d’un millimètre : devant elle, une petite fille sur un vélo avec les petites roues la pointait du doigt, une main agrippée au jean de son père. Ce dernier l’encourageait – « oui, c’est elle, vas-y, va la voir… » – et la magicienne esquissa un sourire en coin. Une autre chose qu’elle avait dû réapprendre, comme une seconde et douloureuse naissance. La présence des autres autours d’elle, et plus encore des enfants, sachant ce qu’elle avait fait, ce qu’elle était capable de faire… Elle avait eu peur, pendant longtemps. Cette fois, elle froissa sa serviette en papier, puis souffla dans sa main et un petit lapin en papier en bondit, rejoignant l’enfant qui poussa de hauts cris, jusqu’à ce que le lapin-serviette éclate en bulles de savon. Le père et la fille reprirent leur chemin et Zee, assise à la terrasse d’un minuscule café de la marina, renversa le visage en arrière.

Elle se sentait plutôt bien, malgré le passé, malgré l’avenir également. Dès qu’elle posait les yeux sur le ciel, elle s’attendait à voir débarquer une armée. Ce n’était pas tant un accès de prescience dont elle était parfois gratifiée qu’une certitude, une image inéluctable qui un jour prendrait de la substance, et alors, la magicienne n’était pas du tout certaine de ce qu’elle ferait. Mais en attendant, dans cet entredeux entre le dernier cataclysme en date et celui à venir, il y avait ce moment de félicité, comme l’œil du cyclone, et elle en profitait pour voir Donna. Elle avait l’impression que cela faisait des siècles qu’elle n’avait pas parlé à l’Amazone, des millénaires qu’elle ne l’avait pas eue. Pendant longtemps après son retour de Terre IV, la magicienne s’était repliée sur elle-même et avait refusé de voir qui que ce soit et surtout ses proches, parce qu’elle avait trop honte, était trop peu sûre d’elle, mais à présent, c’était la culpabilité de ne pas avoir pris de leurs nouvelles qui l’habitait. Zee savait simplement que Donna était en vie, mais ce qu’elle avait vécu, comment elle allait, comment elle se sentait, elle n’en avait aucune idée. En prenant son courage à deux mains et en lui envoyant un simple petit SMS, elle s’attendait presque à n’avoir aucune réponse, mais Donna avait bel et bien répondu, et elles s’étaient donné rendez-vous ici, sur le port de Metropolis. Un peu trop excitée à l’idée de la revoir, Zee était arrivée très en avance, et avait déjà avalé deux cafés. Alors qu’un serveur passait à côté d’elle, elle commanda une limonade, puis observa un chalutier passer lentement devant elle, partant vers le large. Comme si la vie continuait et que les gens bossaient… eh bien, c’était le cas. Malgré la menace que faisait peser Brainiac sur la planète, et que nul sur la planète n’ignorait.

Par réflexe, elle dégaina son portable, prit sa limonade joliment présentée sur la petite table ronde en photo, et l’envoya à Solveig, sa manager, qui s’empresserait de nourrir son compte Instagram avec, probablement. Avec une légende que Zee n’aurait pas non plus rédigé, quelque chose de positif et de piquant… Cela dépitait la magicienne, mais elle comprenait que c’était le job de Solveig et que c’était quelque chose d’inévitable en 2020. Mais si son père avait été là, il l’aurait regardée avec des yeux ronds en secouant doucement la tête… Elle jeta un regard à la marina par-dessus ses lunettes et repéra alors la silhouette de Donna, reconnaissable entre mille. Il faut dire qu’elle faisait tourner quelques têtes, sans même en avoir conscience, peut-être. Cela fit sourire Zatanna, qui leva le bras et l’agita, à la fois heureuse et en même temps presque stressée par avance. Donna avait ses deux bras et ses deux jambes, c’était déjà ça. Elle se leva quand son amie la rejoignit et, sans hésiter, la mémoire du corps, la serra dans ses bras, aussi fort que possible, sachant qu’elle ne risquait pas de lui faire de mal. « Tu ne peux pas savoir à quel point ça me fait plaisir de te voir. J’ai l’impression de revivre rien qu’en te serrant contre moi. » Elle ne risquait pas de passer pour une cinglée, les gens qui la connaissaient savaient qu’elle était du genre tactile, que le contact physique était important pour elle. Mais elle savait aussi que les Amazones n’étaient pas forcément habituées à ce genre de débordements, et en plus de ça, chaque Amazone était différente. Zee invita son amie à s’asseoir et à commander ce qu’elle voulait, et la regarda, émerveillée, comme si leur présence ici, à toutes les deux, était un miracle. « Oh, Donna… Pourquoi on a attendu aussi longtemps pour se voir ? » Question purement rhétorique, évidemment. C’était ça, les « super-héros » : en récompense de leurs bons et loyaux services, ils avaient droit à zéro vie sociale, en gros. Mais tout allait bien à présent puisqu’elles étaient là et qu’aucune menace ne se pointait à l’horizon. « Merci d’être venue. J’imagine que tu es pas mal occupée, en ce moment. Comment vas-tu ? » Une question si simplette, au regard de tout ce qui était arrivé ces derniers temps… Mais il fallait bien commencer par quelque chose.

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Le cataclysme s’est mis en pause, surement en déroute quant à l’élaboration d’une future attaque. Les fracas, les cris et autres noirceurs se sont éclipsés au profit de cette ambiance quasi irréelle que représente la banalité. Le soleil illumine de ses rayons l’ensemble du monde, le réveille comme si jamais il ne s’était endormi. Les sourires rayonnent sur les visages des inconnus, fiers de se retrouver, désireux de partager un instant supplémentaire en compagnie de ceux qui leur ont manqué. La vie renaît de ses cendres, tel le phénix fort de son expérience passé et dégage de cette chaleur qui n’a de cesse d’emplir le cœur fébrile de l’Amazone de cet espoir à peine retrouvé. Ils ont réussi. Malgré les sacrifices, les épreuves, l’intermède lui apporte de cette envie de recommencer, de les sauver tous, parce qu’ils méritent de continuer leurs habitudes. Elle se plaît à s’accrocher aux moindres détails pour enrichir son courage et lui donner la force nécessaire d’aller de l’avant. Nate n’est qu’un exemple supplémentaire à cette évidence. Son rire, son sourire, mais surtout sa timidité quant à cette nouvelle page dans le cours de son existence, ne sont que des raisons supplémentaires pour qu’ils se battent contre l’ennemi. Tous méritent le bonheur quel qu’il soit, tous méritent ce droit quasi divin de se réveiller tous les matins afin de côtoyer un entourage qui leur est cher. Le monde aurait sa revanche sur le fléau, le doute se minimise à mesure que Donna foule les avenues de la grande ville. A mesure que ses pas lui rappellent combien sa mission est riche. Les Amazones ont toujours privilégié l’innocence et voilà qu’elle la retrouve au moment où cette vieille femme reste accrochée au bras de son époux. Si attentionnés, d’une tendresse déroutante aussi bien envers l’un que pour l’autre, leurs habitudes passent, pourtant, inaperçues aux yeux des passants mais pas pour elle. Ses doigts remontent sur l’objectif, éternisent le spectacle au son du clic de l’appareil. Ses onyx s’attardent encore un peu sur les silhouettes qui s’éloignent, son sourire dessiné sur les rebords de ses lèvres. Pour cela, Donna est prête à recommencer encore et encore. Ce qui lui rappelle la rencontre fortuite de cette plage du Mexique, l’alliance en devenir avec ces êtres qui furent jadis des ennemis. Le monde mérite tant de nouvelles opportunités, de connaître des passages comme celui-ci, que l’Amazone ose se convaincre de cette entente à venir. A plusieurs, ils parviendront à prouver aux cœurs les plus corrompus, combien l’espoir est d’or. Elle s’en convainc un peu plus encore alors qu’elle sait qu’elle retrouvera le blond d’ici quelques heures et qu’elle aura l’occasion de lui exposer ce spectacle auquel elle vient tout juste d’assister. Mais en attendant, ce même sourire persiste, annonciateur d’une joie immense qui l’envahie quant aux retrouvailles qu’elle s’apprête de vivre.

L’air marin enivre l’espace et confère un peu de ce souvenir qui lui rappelle son île natale. Bien sûr, le brouhaha qui grouille l’éloigne bien vite de ce cadre idyllique, mais il ne lui enlève en rien la joie qui l’habite. Les amis sont ceux qui nous offrent une chance de demeurer qui nous sommes, nous soutiennent, nous transportent vers ce meilleur de nous que l’on a de cesse que de leur rendre en retour. Cette chaleur imbibe son cœur à mesure que ses pas la mènent vers ces retrouvailles. Vers l’image de cette petite brune aux grands yeux bleus qui apporte un souffle de vie supplémentaire à la vie. Zatanna est et restera à jamais une amie qui lui est chère, très chère. Et bien évidemment, Donna n’envisage pour elle que le meilleur. Celui qui la transportera au sommet, qui lui ouvrira les yeux sur son cœur si pur et si bienveillant. Adorée de toujours, la petite brune lui apprend le vrai sens de l’existence à chaque fois qu’elles se rencontrent : celui d’une détermination sans pareille et d’une tendresse à en couper le souffle. Alors savoir que toutes les deux ont enfin de ce temps pour se retrouver, lui permet d’oublier pour quelques minutes la chappe de plomb qui a autant envahi ses poumons pendant ces épreuves. Elle la sait en vie et rien que cela n’est qu’une aubaine à l’image d’Apollon transportant son char d’un hémisphère à l’autre afin que le jour puisse à nouveau naître. Son torse se bombe naturellement de ce bien être rassurant alors que sa démarche la rapproche du lieu de rendez-vous.

Son sourire grandit dès que ses onyx reconnaissent la silhouette de son amie. Attablée là, sur la petite terrasse de ce café. On aurait pu voir le tableau de l’un des plus grands peintres contemporains tant la sérénité influe sur l’ambiance. Dans ce même état d’esprit, l’Amazone ignore totalement les œillades lancées vers elle, pour tout avouer, elle n’en a jamais réellement prêté attention. Fille de glaise, elle sait que son charisme ne vaut pas grand-chose auprès de la gente masculine et cela ne lui a jamais réellement causé le moindre effet qui soit. Même si, à l’heure actuelle, il lui arrive de se tourner vers cet avenir que tous semblent trouver sauf elle. L’exception. Celle qui n’est qu’invisible et qui n’a eu que ce rôle là depuis sa naissance. Mais cela n’est pas un sujet à aborder aujourd’hui, ou pas encore. Tant l’heure anime son cœur d’une poussée de joie et lui permet de retrouver les bras de cette amie si chère à son cœur. Si dans d’autres temps, la brune aurait trouvé ce geste étrange, aujourd’hui, elle sait l’adonner à ceux qui lui ont appris le sens de l’amitié. « Je suis d’autant plus heureuse de te revoir moi aussi. Laisse-moi te regarder. » Ses bras s’écartent doucement de manière à ce que l’Amazone puisse prendre état de l’attitude générale de son amie, puis rassurée, rapproche à nouveau la distance afin de la serrer une fois encore contre sa poitrine. Les sourires, les rires, toute cette bonté les transporte toutes les deux vers ce temps meilleur. Et cela lui fait énormément de bien. Elle ne tarde pas à s’installer juste face à elle, le serveur suivant un peu les moindres faits et gestes des deux amies. La commande passée, le rire si bienfaisant réchauffe son cœur devant les déclarations sincères entendues. « Surement parce qu’on avait des choses importantes à gérer. » L’humour est au rendez-vous. Sa voix le confirme et profite simplement. Ses onyx percent les deux grands yeux bleus de son amie avant de lui répondre aussi sincèrement que possible. « Tu n’as pas à me remercier, j’aurai aimé te rejoindre plus tôt… Hélas… » Les lames invisibles percent son cœur devant la réalité qui les rattrape toutes les deux. « Je vais bien, disons mieux que certains d’entre-nous. » La culpabilité la ronge parce qu’elle fait partie de ceux qui ont survécu. Non pas qu’elle cherche une quelconque mise à mort de sa personne, mais quelque chose lui insuffle en continue cette vague d’injustice devant laquelle ils ont tous été plongé. « Et toi ? Comment vas-tu ? Comment as-tu géré tout ce que nous avons vécu ? » Sa voix cherche l’assurance d’une vie meilleure pour son amie, même si sa naïveté n’est pas à prendre en compte. Elle sait que tout comme elle Zatanna a été confronté à des expériences douloureuses et traumatisantes. « Dis-moi que tu as pu te mettre en sécurité sur Terre IV et que tu as finis par te réveiller dans ton lit comme si ce n’était qu’un cauchemar. » Parce qu’au moins ainsi, Donna se serait rassurée sur les aventures de son amie et saurait que le mal ne l’avait pas rongé à elle-aussi.

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Pendant une fraction de seconde, la vieille angoisse afflua de nouveau, cette marée impossible à arrêter qui grignotait toujours un peu plus les fondations de sa propre personne. Zee se laissa regarder, mais elle se demanda aussi si Donna, avec ses yeux d’abysse, verrait autre chose que la réalité. La magicienne, tangible, inchangée, sa peau pâle ne portant aucun stigmate des mois passés si ce n’était sur son flanc, sous ses habits, et son sourire béat de retrouver son amie. Mais celle-ci la distinguerait-elle, incrustée comme un fantôme putride dans chaque centimètre carré de son âme, la présence du démon ? Elle persistait à croire que la présence opaque et mortifère avait laissé quelque chose derrière elle avant d’être renvoyée en enfer, malgré tous ceux qui lui avaient juré le contraire. Son âme, avaient-ils dit, était sans tache, du moins de son vivant car au moment de sa mort, il faudrait bien justifier ses choix et en payer le prix. Mais pour l’heure, nul démon à l’horizon si ce n’était dans ses cauchemars, mais voilà c’était Donna, c’étaient les yeux de Donna et il y eut cette fraction de seconde d’angoisse, puis la vague reflua de nouveau, emportée par la marée, persistante, oui, mais plus aussi violente qu’avant, et Zee se laissa enlacer de nouveau, reconnaissante, si reconnaissante envers l’Amazone de ce contact physique banal mais si précieux, comme une absolution. Pourtant, elle n’était pas certaine d’y avoir droit. Elle savait à quoi faisait allusion Donna, autant de batailles auxquelles elle-même aurait pu, aurait dû participer. Mais elle avait atteint une limite qu’elle ignorait posséder, et une fois que la vie s'était chargée de gifler sa fierté mal placée, elle avait choisi de s’enfuir, de s’isoler partout où nul n’aurait pu la trouver, du Manoir magique de John aux jardins de Shiruta en passant par les sombres forêts d’Écosse. Et pendant qu’elle léchait ses plaies comme un chiot blessé, les autres menaient des batailles qui avaient fini par coûter un prix exorbitant. Zee baissa les yeux, au diapason de son amie, laissant filer quelques secondes de silence. La cruelle vérité, c’était que pendant qu’elle se cachait, Bruce était mort. Et quant à Donna, qu’avait-elle donc vu, qu’avait-elle donc vécu, elle qui avait accepté de se porter au combat, comme elle le faisait toujours ?

D’une certaine façon, elles se ressemblaient, toutes les deux. L’amour qu’elles portaient aux autres était fort et leur servait de moteur dans l’existence. Zatanna n’aurait jamais cru être un jour rattrapée par une fatigue si immense qu’elle l’aurait paralysée et empêchée de protéger les humains, et après avoir longtemps nié ce constat, elle était en voie de faire la paix avec elle-même. C’était pour cela qu’elle avait quitté la Justice League. Pour cela qu’elle avait renié en partie les enseignements de son père et pour cela qu’elle s’était si bien fondue dans les sphères plus intimes et underground de la Justice League Dark. Elle n’était pas celle qu’elle croyait, Miss Piédestal, et elle espérait qu’elle parviendrait à se libérer de sa trouille lénifiante en acceptant cela. D’un geste rapide, elle effleura la main de son amie. La vérité, c’était qu’aucun d’eux, les prétendus héros, n’allait bien, parce que ces dernières années n’avaient été rien d’autre qu’épuisantes et douloureuses et que si beaucoup d’entre eux étaient increvables physiquement, nul n’était mentalement invulnérable. « On souffre à cause de ceux que nous avons perdus. Et on se réjouit de retrouver ceux qui sont encore en vie. Je crois qu’on a le droit de se sentir ainsi déchirées », souffla-t-elle. Parce que, oui, elle était plus que ravie et soulagée que Donna soit en vie, plus encore en sachant que d’autres ne l’était pas, comme le reflet magnifique d’une horrible perte. Un tel antagonisme des sentiments, c’était probablement une constante, chez eux tous. Puis elle retira sa main pour encercler son verre, les yeux perdus sur le port ouvert sur l’horizon et la légère courbure de la terre.

« C’est drôle que tu en parles comme ça, parce que j’ai effectivement eu l’impression de me réveiller d’un cauchemar, un très long et très pénible cauchemar. » D’autres avant Donna lui avaient posé cette question et Zee n’avait cessé de ne pas répondre, mais mentir à son amie lui semblait inconcevable. Elle releva ses lunettes sur son front pour plonger son regard dans celui de l’Amazone. « Tu connais ma philosophie de vie et la façon dont je vois les choses quant à notre rôle dans ce monde. Toi et moi, on partage beaucoup à ce sujet. Le poids des erreurs qu’on commet… maintenant, je comprends… Enfin, je comprenais avant, c’est plutôt que je sais ce qu’on peut faire de pire avec les meilleures intentions du monde. Tu vois ce que je veux dire ? » Vu comme elle tournait autour du pot, ce n’était pas gagné, et elle suivit de yeux les gens qui marchaient sur la promenade, pensive. « Je n’étais pas vraiment moi-même, sur Terre IV, à cause d’une décision stupide qui remonte à plus d’un an et un pacte idiot passé avec un démon. J’aurais pu devenir le genre de personne que toi, tu aurais été forcée d’affronter, parce que c’est comme ça que tu es. » Quelle horreur. Sa stupide, stupide naïveté, et elle était passée à ça de devenir le cataclysme numéro 1245 de la décennie, forçant ses amis les plus chers à la trucider. Elle pouvait entendre son père faire des sauts périlleux dans sa tombe. Mais il en avait découlé du positif, cela dit. De là à penser que pour vivre heureux il fallait en baver d’abord… Non, ce n’était pas son genre. « Il y a eu tellement de morts… Je crois que je suis lassée. Et je ne sais pas si on a le droit de le dire tout haut, ça, mais voilà, je le dis. Tu fais attention à toi, Donna ? La dernière fois qu’on s’est vues, on avait parlé de choses normales, à la fois futiles et super importantes, si tu vois ce que je veux dire. » Elle lui adressa un sourire en coin. « Et voilà qu’entre-temps, l’apocalypse en deux actes se déclenche, et que toi, tu vas au front sans même prendre le temps de souffler. Je sais que tu es forte, mais je croyais l’être aussi, et ce n’est pas une mauvaise chose de s’avouer vaincue des fois. » En tout cas, elle, elle ne jugerait pas son amie pour ça, ni pour rien d’ailleurs. C’était trop facile de la jouer agneau sacrificiel, jusqu’au moment où la pratique n’allait plus avec la théorie. Elle se saisit de nouveau de la main de Donna. « Toi qui t’es battue jusqu’au bout, dis-moi. Comment est-ce que tu vas vraiment ? Est-ce que tu iras… quand le moment sera venu… » Ah, mais bien sûr qu’elle irait au combat, la fière Amazone. Et Zee ne pouvait certes pas s’interposer entre la nature de son amie et le danger qui venait au-devant d’elle. Mais elle avait bien l’intention de lui permettre un petit intermède.

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La banalité possède de ce pouvoir d’apaiser les tourments les plus ancrés et enfouis. Elle confère cette quiétude derrière laquelle il est beaucoup plus facile de se terrer pour oublier. Juste quelques secondes, au plus quelques minutes, durant lesquelles la noirceur disparaît pour laisser place à une innocence que l’on désire plus que toute retrouvée. Mais parvient-t-elle à persister ? Les âmes les plus héroïques sont celles qui allient sagesse et protection, qualités qui, font défaut à l’Amazone dans ces moments-là. Parce que comme son amie, elle se trouve lasse de ces combats, de cet enchaînement apocalyptique qui les a tous rongé de l’intérieur pour les changer à jamais. Les enseignements des philosophes anciens l’ont pourtant prévenu de ce cycle infernal et répétitif, mais la brune ose envisager une sorte d’erreur de leur part. A quoi bon ? Pourquoi répéter éternellement des actes qui sommes toutes ne sont que des abominations visant à engendrer la terreur ? Le caractère ambitieux des forcenés se révèle de plus en plus exacerbé et une part d’elle craint de ne pas réussir à les arrêter à temps. Parce que l’égoïsme devient de plus en plus grand, le mensonge oppressant et l’espoir s’étiole. Celui-là même qui a toujours coulé dans ses veines et grâce auquel elle a pu se raccrocher pour sauver l’humanité en compagnie de ses alliés. Comment pourront-t-ils continuer ? Donna sait au fond d’elle qu’ils finiront par recouvrer la force nécessaire pour y parvenir et ainsi s’allier à nouveau pour affronter la menace. Sa foi en leurs équipes demeure intangible, même si une autre part songe à ce cycle répétitif. Est-ce celui-ci qui, d’ailleurs, retient doucement la jovialité de son amie ? Qui l’oblige à détourner ses si beaux yeux bleus rapidement pour la plonger dans une retenue qu’elle tente de dissimulée ? La compassion s’éveille dans le sourire de l’Amazone, qui n’hésite pas une seconde de plus, et serre davantage leurs doigts afin de lui conférer le soutien nécessaire pour oser. Parce qu’elle pense qu’il s’agit de cela : oser accepter. Leurs conditions sont semblables et pourtant si meurtries par ces fantômes qui ne sont pas revenus. La culpabilité laisse un goût amer dans leurs bouches, suscitant des interrogations telles que pourquoi moi et pas un autre ?. Une question, qui pourtant, fait partie intégrante de leurs éducations et leurs conditions, mais qui revient constamment, inlassablement et les hante toujours un peu plus. Oui, elle la comprend Zatanna alors que ses magnifiques océans touchent le bitume, s’écrasent honteusement. Et cela lui rappelle combien l’amitié est d’autant plus chère et véritable. Le mensonge ne les sépare pas, au contraire, il disparaît complètement pour laisser place à cette sincérité, à cet élan qui ne demande qu’à obtenir un soutien.

Le message devient un peu plus clair encore au moment où les révélations tombent. A demi-mots, dans un premier temps, il n’en reste pas moins, qu’ils retracent une vérité qui les accable tous. Pleurer des êtres chers et en même temps se réjouir d’en retrouver d’autres. La teinte reste toujours lumineuse mais pourtant très pâle. « L’histoire de la vie est ainsi faite. » Son sourire demeure intact et pourtant teinté à la fois d’une profonde déchirure, celle de ne pas pouvoir lui donner mieux. La culpabilité la ronge à elle aussi et elle y voit là un caractère humain qui la ramène vers cet espoir lumineux d’un jour meilleur. Honorer les morts, se rappeler de ceux qui sont tombés pour mieux agir afin de leur rendre justice, afin de protéger les autres. Voilà ce pourquoi il faut se battre aujourd’hui. Même si la difficulté demeure et en devient insoutenable, même si la solitude guette les moindres détails pour isoler un peu plus leurs âmes, la volonté, elle doit persister pour justement permettre à toutes ces âmes perdues d’exister dans les mémoires. Parler de cauchemar est une sorte de dénouement duquel le cœur de son amie pourra peut-être se soulager. L’Amazone accompagne toujours les dires de son amie, prête à la soutenir dès le moindre signe. Et voilà que les révélations tombent à nouveau et les plongent toutes les deux dans cette sincérité qu’elles ont besoin. A peine la réflexion entamée que déjà Donna comprend l’envergure de la peine qui accable Zee. Son cœur se tord doucement devant ses premiers geste, graves, enclins à la meilleure réflexion. Elle espère que les confidences amèneront un semblant de paix dans le cœur de la magicienne. Et c’est là que tombe la sentence. Celle des responsabilités qui découlent de leurs choix, celle qui entraîne n’importe quelle âme altruiste dans un typhon sans fin : et si…. La culpabilité donne l’impression de ronger l’humanité de son amie, de l’enchaîner dans les travers de suppositions qu’elle aurait voulu éviter. Personne ne peut se targuer d’agir sans se poser ces mêmes questionnements, du moins pas une personne dont les volontés visent à sauver le reste. « Mais tu ne l’es pas devenue. Parce que malgré tes doutes et tes actes dans cette autre réalité, la part de toi qui croit en l’avenir et en quelque chose de meilleur a réussi à combattre le reste. » Elle attend que le serveur dépose la commande qu’elle vient tout juste de lui demander et continue à l’instant même où elle sait que personne ne laisse traîner d’oreilles. « Nous étions tous différents dans ce monde… Nous avons été confrontés à nos pires démons et nous avons eu à les affronter pour apprendre. » Son sourire s’accorde à celui de son amie, témoin de cette vérité, mais surtout enclin à entendre tout ce qu’elle voudra bien lui donner.

Il s’attriste toutefois en entendant le reste de ses confidences. La lassitude quant aux pertes qu’ils ont à traverser, l’échec quant à ces vies qu’ils n’ont pas pu sauver. Le Styx s’engorge néanmoins, le Passeur se soulagera des apprentissages que cela entraîne chez eux. Rapidement, les bonnes intentions de son amie ne tardent à percer par-delà l’amertume. Ravivant, par ce biais, ce sourire si compatissant qu’elle ne tarde plus de lui partager. Elle l’attendrie énormément, lui rappelle pourquoi sa dévotion demeure intacte malgré les épreuves. Parce qu’elle voit en Zatanna cet espoir si délicat et innocent, duquel, elle peut se réfugier pour recouvrer ses forces. Oui, son amie est une force pour elle, un pilier sur lequel elle peut se reposer. « Ma chère Zatanna, si tu savais comme le monde a besoin de toi. » débute-t-elle dans ce sourire qu’elle préserve alors que ses mains cherchent à récupérer celles de son amie. « Je comprends tes peines et les soutiens à mon tour. Nous sommes enfermées dans cette culpabilité, des ces remords, qui nous affublent des peines les plus interdites. Tu as le droit d’exprimer ta lassitude, tout comme tu as tous les droits d’être en colère devant cette injustice. Je le suis également. » Elle espère lui prouver de la véracité de ses dires, les mêmes émotions qui la rongent elle aussi dans des moments de solitude. Hélas, nul ne peut revenir en arrière. Ils ne peuvent qu’avancer et recueillir les mémoires. « Tu es aussi forte que moi, Zee. Et tu le sais très bien. Ce n’est pas une éducation et les entraînements qui donnent le courage, il est en toi et tu es prête toi aussi à sauver n’importe qui du mal, si d’aventure tu rencontres l’épreuve. » Ses yeux cherchent à capter l’attention de ses iris afin d’y inclure cette vérité plus que sûre selon elle. Avant de se détourner au moment où la pareille se retourne vers elle. Comment allait-t-elle réellement ? Si pour beaucoup l’Amazone feint la bonne humeur, joue la carte de l’espoir, elle sait qu’avec son amie, elle se doit d’être sincère à son tour. « Je me sens… déçue. De constater que l’éveil n’a rien changé, que les injustices reprennent de l’affluence, que les plus faibles sont encore plus soumis… Je crois au meilleur de l’humanité et j’ai simplement l’impression que nos efforts sont vains… » Voilà la malédiction dans laquelle elle s’isole, celle qu’elle n’ose pas partager par crainte de s’éveiller dans ce cauchemar constant. Pourtant elle ose y croire un peu, se raccroche dans les petites choses qui font la différence. « Mais comme me l’a souvent répété la Reine Hyppolite, le monde des Hommes est jeune, sa sagesse viendra. » Ce rajout marque son désir de se réconforter, de puiser les ressources nécessaires pour parvenir à recouvrer ses forces. « Bien entendu j’irai dès que le moment sera venu. Diana m’a demandé de défendre Metropolis et c’est un devoir qui m’anime d’un espoir nouveau. » Ses yeux s’accordent à nouveau à ceux de son amie, son sourire devient attentionné. « Et toi ? Participeras-tu à cette bataille ? » Elle craint d’essuyer un refus et elle ne s’en vexerait pas. Pas après les confidences qu’elle vient tout juste d’entendre. Au contraire, Donna serait prête à la défendre, la recueillir afin de lui permettre ne serait-ce qu’une once de ce repos dont elle a tant besoin.

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Past lives couldn't ever come between us

Il y avait des choses qu'elle disait à certaines personnes, et pas à d'autres, sans qu'il y ait de raison particulière à cela. C'était ce qu'elle ressentait en la présence des uns et des autres plus qu'une histoire de confiance ou d'attente. Elle n'attendait rien de Donna, sa démarche n'était pas si égoïste qu'elle avait besoin de se faire absoudre par son amie. En revanche, elle savait d'instinct, une émotion pure, que l'Amazone pouvait entendre ce que Zee lui avouait, quand d'autres ne l'auraient pas supporté. Elle savait que Donna ne la détesterait pas, ne serait pas déçue, ne serait pas en colère et surtout, n'aurait pas peur. Dans le pire, ou peut-être le meilleur des cas, elle serait attristée pour elle, mais surtout, surtout, elle comprendrait. Peut-être était-ce parce que Donna avait vu tant et tant de choses dans sa vie et qu'il était difficile d'imaginer qu'elle n'ait pas assisté au pire dont étaient capables gens, alors, une de plus ou une de moins... Bien sûr, la magicienne se voilait un peu la face en essayant de se convaincre que sa démarche était délestée de toute attente. Quand on racontait ses malheurs à quelqu'un, c'était pour essayer d'en alléger le poids, c'était bien qu'on se servait de l'autre comme une boîte dans laquelle on se déchargeait d'un peu de sa souffrance avant de l'y enfermer à double-tour et de compter sur la personne pour la garder avec soi. Malgré tout, elle tourna le regard vers son amie, sans un mot, mais avec un léger sourire. Elle savait que Donna savait. Elle savait que ses mots en apparence simples étaient lourds du sens qu'elle leur donnait. Que l'Amazone pensait sincèrement, sans une once d'hypocrisie, ce qu'elle disait. Et en la regardant, la magicienne sentit à nouveau un poids peser sur ses épaules, mais pas pour elle. Diana, Donna, Teth, tous ceux qui pouvaient se prétendre immortels, étaient en quelque sorte maudits à ses yeux. La vie était parfois trop lourde pour qu'on ne se dise pas, parfois, qu'elle était trop longue, et qu'au moins, un jour, elle prendrait fin. Si Zatanna pouvait parfois se consoler ainsi, de manière rationnelle, son amie n'avait pas cette chance toute relative. Combien de morts encore ces yeux abyssaux auraient l'honneur douteux de contempler ? Mais peut-être que l'immortalité, justement, donnait un autre point de vue sur ces questions. Zee en doutait cependant. Elle connaissait des immortels qui souffraient depuis des milliers d'années.

Elle s'accrocha malgré tout aux mains de Donna alors que celle-ci lui donnait sa version d'une Zatanna que celle-ci avait du mal à reconnaître ces temps-ci. C'était un peu de la triche, Donna étant la personne qu'elle était, il en fallait beaucoup pour que l'Amazone juge et condamne quelqu'un. Le monde avait besoin d'elle, oui, c'était vrai, tout comme il avait besoin de tous ceux qui étaient assez sympas pour se préoccuper de lui, mais ces derniers temps, elle avait eu tendance à tourner le dos au monde, justement. Elle pouvait cependant retourner ses paroles à Donna, même si alors il n'aurait même plus été question de métaphore, dans le cas des Amazones. Et pendant quelques secondes, elle eut peur que Donna refuse de se confier à elle en retour, et elle se sentit plus puérile que jamais, plus injuste que jamais, à porter sur un piédestal sa précieuse Amazone quand elle-même, justement, en avait chuté sans grâce et dans la violence. Mais alors, les paroles de son amie résonnèrent exactement comme ses pensées les plus profondes à elle, et elle ressentit un soulagement quelque peu déplacé, mais bien réel. Elle avait appris, dans la douleur, que les figures divines qu'on se construisait pour se rassurer étaient friables et surtout, que c'était faire du mal à ces personnes. Nul n'était infaillible, et prétendre le contraire était un genre de violence insidieux et injuste. « C'est vrai que nous sommes jeunes. Et que le changement sera si lent et si discret qu'il faudra se trouver à la fin de la route pour le constater. C'est un peu désespérant de ne pas pouvoir assister de ses yeux à cela et de devoir se contenter de n'être qu'un rouage parmi les autres. Toi, tu verras peut-être un jour un monde différent. » Mais en attendant, en revenant de Terre IV, les humains s'étaient tapés dessus, avaient repoussé à coups de flammes et de métal la nature qui avaient repris un peu de ses droits et avait fait montre d'un individualisme certes prévisible, mais toujours aussi déprimant. Cela dit, il n'y avait que dans les pires moments qu'on assistait aussi à des scènes qui rendaient un peu d'espoir en l'humanité. C'est sûr que du point de vue de Donna, qui patientait depuis déjà plusieurs millénaires, le changement devait quand même se faire vachement attendre. Cette pensée fit rire la magicienne. « Je ne sais pas comment vous faites pour avoir autant de patience avec les humains, tu sais. Si j'avais une île cachée quelque part dans le monde, je n'en partirais plus. C'est ce que j'ai fait en quelque sorte, ces derniers temps. » Mais bon, elle était revenue, et Donna ne s'était pas terrée sur Themyscira, et en vérité, aucune d'elles probablement n'était capable de ne pas aider l'humanité, alors tout ça n'était qu'une plaisanterie. Encore que pour les vacances, une île privée...

Elle aurait voulu pouvoir dire à Donna des mots d'espoir, lui dire que ça valait le coup de se battre, mais ça lui semblait cliché, même si c'était vrai, après tout. « Je me demande combien de fois tu t'es demandé si ça valait le coup de se battre pour nous, Donna. Mais je te suis reconnaissante de ne pas avoir encore abandonné, en tout cas. » Oui, voilà, elle ne pouvait pas lui promettre que tout irait bien, mais merci de rester, tout de même. La question de Donna, cependant, la fit réfléchir un peu plus longtemps qu'elle n'aurait voulu. Elle se l'était elle-même posée des centaines de fois ces dernières semaines et si elle en connaissait la réponse depuis le début, elle n'avait pas encore osé la prononcer tout haut. « Je ne sais pas. Je ne me fais pas encore assez confiance pour ça. Je me connais assez bien, et j'y ai longtemps réfléchi. Je pourrais faire plus de mal que de bien. J'ai encore besoin de temps mais Braniac ne va pas attendre, lui. Mais je vais rester avec la Justice League Dark, et tu nous connais... On ne va pas rester planqués, et ce qu'on fera, on le fera dans l'ombre, et personne ne verra jamais le résultat de nos efforts. » Elle accompagna ses paroles d'un clin d’œil parce que bien sûr, elle n'était pas sérieuse, elle se fichait de la gloire, ils s'en fichaient tous. Elle était même soulagée que ce soit des personnes comme Wonder Woman et Superman qui endurent la notoriété, en bien ou en mal. Quand Zee avait quitté la Justice League, elle l'avait vécu comme un échec et elle avait passé beaucoup de temps seule à se demander si elle était vraiment capable d'être celle que son père attendait qu'elle soit. Puis elle avait trouvé sa famille, sa vraie famille, tous ces idiots de l'Oblivion Bar. Et si elle devait se battre, ce serait avec eux désormais. C'était un peu douloureux de se dire que sa trajectoire l'avait un eu éloignée des champs de bataille de ses chers amis, mais avec quelqu'un comme Brainiac, de toute façon, la planète entière serait un champ de bataille. « Alors toi, tu seras à Metropolis... » Est-ce que cela servait à quelque chose de lui dire d'être prudente ? Non, mais Zee le dit quand même. « Tu feras attention, n'est-ce pas ? Toi comme moi, on a la chance d'être bien entourées, heureusement. Et si on sort vainqueurs de tout ça, peut-être qu'on pourra recommencer à vivre normalement. » Les amis, le travail, les amours... Toutes ces choses qui paraissaient stupides, en ce moment, au regard de la menace qui pesait sur eux. Elle remua sa tasse pensivement puis jeta un regard un peu plus animé à Donna. « Tu sais que je ne sais même pas ce qu'est une vie normale, pour toi ? Si je te dis que quand tout sera fini, je t'emmènerai pour un barathon monumental qui s'achèvera par une rave party sous un pont de Gotham, tu trouves ça normal, ou c'est un peu trop ? Tu pourras amener qui tu voudras, je connais le type qui organise ces fêtes. » L'expérience humaine. Bon okay, dans le genre, ça n'était pas la plus ragoutante ni même la plus intéressante. Mais Zee savait de Donna qu'elle avait longtemps cherché à comprendre l'humanité - vaste projet qui aux yeux de la magicienne était on ne peut plus compliqué, mais qui devait l'être plus encore pour une Amazone, après tout.

Codage par Libella sur Graphiorum

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Et puis le monde se suspend. Il entame doucement son arrêt afin d’accorder une once de sérénité accompagné d’une confiance mutuelle. Ces espaces là sont rares, bien trop aux yeux de l’Amazone, pour les laisser s’échapper. Ils regorgent de cet espoir duquel elle s’abreuve afin d’y puiser son courage. Grâce à l’amitié, par l’amitié. La banalité regorge de ces petits détails desquels il est aisé de s’en trouver à son aise, parce que malgré tout, la vie est faite ainsi. Elle s’améliore dès l’instant où l’on retrouve ses amis, devient un peu moins difficile parce qu’elle s’octroie de ce droit impérieux : vivre l’instant présent. L’Amazone l’a appris aux détours de ses expériences humaines. Elle sait aujourd’hui qu’ils ne peuvent avancer qu’en s’écoutant, qu’en se soutenant, qu’en croyant les uns aux autres. Parce que nul rival n’a de sens devant cette réalité et qu’il n’en aura jamais. Pas devant cet état de fait duquel naît l’honnêteté et l’accompagnement qui en résulte. Alors oui, le monde se suspend durant cet instant. Il lui apporte un peu de cette sérénité à laquelle elle aspire afin d’en offrir les dédales au reste de l’humanité et ce grâce à Zatanna. Leurs regards se confondent, se comprennent sans même qu’un seul mot ne s’extirpe de leurs lèvres. Le poids des responsabilités leur incombe à toutes les deux, mais elles savent, du moins la brune le sait de son côté, que la solitude ne la prendra pas. La gravité n’en devient que pesante, qu’un élément supplémentaire quant à cette bataille qu’ils se doivent tous d’affronter, mais quel meilleur allié que l’amitié ? La sureté d’une telle pensée puise dans le cœur de la jeune femme des élans généreux, courageux, prêts à raccrocher un peu plus l’emprise de ses mains sur celles de son amie afin de la rassurer. Elle ne veut pas l’accabler, ni même l’inquiéter, elle désire simplement pouvoir avoir droit, à son tour, à laisser son honnêteté s’exprimer sans craindre quoi que ce soit. Et elle trouve refuge dans ses grands yeux bleus, dans cet océan bienveillant qui l’accueille sans crainte et qui lui offre l’occasion de percevoir les pourtours d’une oasis. L’eau y est limpide, le cadre chaleureux, lui offrant l’opportunité de se révéler telle qu’elle est : aussi forte que fragile. L’Espoir infime lui paraît s’étioler et elle se raccroche à l’idée que Zee sera celle qui lui confiera la vérité. D’ailleurs, elle pense voir l’ombre de cette optique dans les gestes si mimines de son amie. Et puis, les enseignements lui reviennent naturellement en mémoire, les quelques recommandations aussi.

Son île natale lui semble si éloignée, si inatteignable aujourd’hui, que l’Amazone ne sait si son destin l’y mènera à nouveau un jour. Un jour après cette bataille, si les Dieux décident d’accorder une chance supplémentaire à l’humanité. Zeus, dans sa clémence, sera probablement le plus enclin à poursuivre sur cette voie, mais quid de ses frères ? de ses enfants ? Si beaucoup s’allient à sa toute-puissance, certains rechignent, élaborent des stratégies diverses et variées visant à mettre à mal les Favoris de leur Père. Troie en était un exemple et pourtant… La brune revient à l’instant présent, entend les commentaires de son amie, les chérit silencieusement. « La richesse des Hommes se trouve justement dans cette générosité que vous détenez tous. Et c’est pour cela que je choisirai toujours de me battre pour vous. » Son commentaire ne reprend pas l’idée même engagée par la jeune fille à ses côtés, mais Donna espère que de ses paroles naîtrait une sorte de quiétude. Sa survie quant à l’avenir proche ou lointain lui importe peu tant que cela est à même d’apporter un rouage supplémentaire, comme tout juste dit, à un monde qui ne peut que s’améliorer encore et encore. Ainsi va la vie, mais surtout l’évolution qu’elle quelle puisse être. La vision de son île devant la remarque de son amie l’entraîne à nouveau vers ses pensées précédentes. L’amusement la guette à son tour, lui permettant d’offrir un sourire en coin ainsi qu’une œillade complice à celle qui lui apprend énormément. « N’importe quel oiseau ressent le besoin de sortir de son nid. Et de par son choix, il est amené à apprendre encore et encore jusqu’à la fin de son existence. Pour rien au monde, je ne changerai mes choix. » lui confie-t-elle avec un regain d’espoir qu’elle recouvre doucement par les paroles si encourageantes de Zatanna. « Tu as vécu cachée ? » soulève-t-elle toutefois en reprenant le fil des révélations qu’elle vient tout juste d’entendre. Donna pouvait en comprendre le besoin , le repli permet une meilleure vision de soi ainsi qu’une meilleure remise en question pour mieux appréhender la suite. Le breuvage à peine porté à ses lèvres, l’Amazone se délecte du liquide avant de répondre présente devant la menace à venir. A vrai dire, la question, malgré ses doutes, ne s’était jamais réellement posée. Elle, qui, cherche avant tout à protéger les autres, les faire passer bien avant elle. Et puis Diana lui a donné cette mission dont elle espère tenir du mieux possible pour ne surtout pas la décevoir.

Un nouveau sourire étire ses lèvres devant les remerciements partagés. Donna ne ressent pas le besoin ni même le mérite de les recevoir, mais sait que cela tient énormément à cœur de son amie. « Et je te suis d’autant reconnaissante de rester celle que tu es. » ne tarde-t-elle pas à lui partager, sincère, honnête. Parce que c’est grâce à elle qu’elle continue d’avancer, grâce à cette générosité et bienveillance, grâce à cet espoir qu’elle lit dans ses yeux. Et puis la pareille ne tarde pas à s’échanger, curieuse d’apprendre la position de Zee devant cette menace en cours. Elle remarque presqu’aussitôt la gêne que cela occasionne et s’interroge sur les raisons de cette dernière. Mais elle patiente, comme à son habitude, laisse le cheminement suivre son cours afin de se montrer présente au moment où la décision serait prise. Son sourire se teinte d’une tristesse au moment où le verdict tombe. Le manque de confiance en elle lui serre le cœur, alors qu’elle n’est qu’une lumière dans l’obscurité. Elle comprend ses craintes, son désir de ne vouloir du mal à personne, mais elle la connaît assez pour savoir qu’elle n’agissait jamais sur un coup de tête. « Qu’importent les figures mises en avant, chacun des efforts participe à l’élaboration d’un meilleur ou d’un changement. La notoriété a toujours eu cet impact injuste, néanmoins, beaucoup reconnaissent les labeurs d’un groupe que d’une seule personne. Et je sais que malgré tes craintes, tes intentions ne seront jamais mauvaises à l’égard des Hommes. N’oublie jamais que les limites ne sont celles que tu t’imposes et que les erreurs peuvent être rectifiées par tes convictions internes. Pas celles d’une autre personne ou d’un groupe, les tiennes et uniquement les tiennes. Et crois-moi Zatanna, s’il y a bien une personne qui ne désire faire de mal à personne, je sais qu’il s’agit de toi. » Elle lui offre un nouveau sourire encourageant, empli de ce soutien qu’elle lui donnera toujours. « Quoi que tu décides, sache, que tu me trouveras toujours derrière toi. » appuie-t-elle afin de lui assurer de sa présence et de ses intentions de préserver leur amitié. Parce qu’il s’agit là d’une réalité pour laquelle il faut se battre. Sa tête affirme sa position par un acquiescement certain au moment où la conversation se poursuit. Oui, la ville de l’Espoir, celle qui a déjà tant souffert sera celle qu’elle a promis de défendre. Son sourire amusé lui revient sans retenue devant les inquiétudes de la jeune fille. Son cœur est si généreux, qu’elle ne peut que trouver l’attention adorable. « Ne t’en fais pas pour moi. Effectivement notre entourage est unique et veille à notre sureté. » Même si la concernant, elle sait que Diana ne sera pas avec elle. « Je n’en attends pas moins. » renchérit-t-elle avec ce même amusement, soucieuse d’y attacher un peu de légèreté malgré la gravité en devenir. Mais que pouvaient-t-elles faire de plus ? Rien, si ce n’était d’attendre que la bataille ne gronde et que tout s’organise. Le rire finit par poursuivre l’enchaînement logique dû aux bonnes intentions de son amie. « Dois-je te rappeler que vos alcools n’ont aucun effet sur moi ? » Un clin d’œil teinta l’amusement de la situation avant qu’elle ne se décide à lui répondre avec la plus grande des honnêtetés. « Mais ce serait un plaisir que de t’accompagner jusqu’à une rave party dans Gotham, je ne sais encore qui sera mon plus un, mais je sais que je trouverai bien quelqu’un. » commente -t-elle en sachant pertinemment que Zatanna attendait de connaître le nom de cette personne. « J’en conclue que tu as des entrées partout ? Tes spectacles continuent à aller bon train ? » demande-t-elle curieuse mais surtout désireuse de pouvoir tenir une conversation lambda avec son amie. Parce que malgré la gravité, le quotidien l’intéresse et l’amène à lui rappeler que c’est tout ceci qui l’a amené à apprécier l’ensemble de l’humanité.

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Donna avait beau vivre depuis très longtemps, elle ne donnait pas cette impression de distance, voire de désintérêt, que certains autres immortels de la connaissance de Zee. Elle n’était pas une statue dénuée d’émotions humaines, elle ne semblait pas imperméable aux aléas de l’existence. La magicienne se disait que si elle avait immortelle, elle aussi, elle aurait été probablement comme ça. Pire, même, à tous les coups. Elle était certaine qu’elle aurait continué à faire les mêmes erreurs infantiles à l’âge canonique de dix-sept mille ans. Elle aurait pu voir défiler les siècles, les générations se succéder les unes après les autres comme les vagues pendant la marée, engranger des millénaires d’expérience de la vie, elle aurait continué à se poser les mêmes questions, et à souffrir des mêmes problèmes. Jason Blood était son modèle et ce qui se rapprochait le plus d’un père parfois pour elle, mais elle voyait souvent dans son regard le désintérêt total qui le prenait des fois en présence de ses semblables, comme si plus rien ne pouvait le surprendre, et qu’il n’avait même plus envie d’être surpris. Le Spectre était tellement coupé de l’humanité qu’il l’aurait probablement regardée partir en cendres s’il avait décidé que c’était là son destin, sans être touché. Mais Donna ne lui avait jamais donné cette impression. Elle était résolument ancrée dans le présent et semblait elle aussi souvent souffrir de tourments somme toute bien humains. Non pas que Zee s’en réjouissait, mais cela donnait à Donna une dimension bien différente. Si même après toutes ces années elle doutait encore, alors cela voulait bien dire qu’à ses yeux, l’humanité comptait encore, et surtout, qu’elle considérait sa propre existence comme toujours solidement liée à celle de l’humanité. Elle se sentit d’autant plus honteuse quand son amie lui demanda si elle s’était cachée. « Un peu, à mon retour de Terre IV. Tu sais, j’ai vraiment commis une erreur effroyable, et j’avais juste trop honte pour montrer ma tête à qui que ce soit, et je me disais que le monde n’avait pas besoin de moi dans cet état. Je savais que c’était un peu égoïste, mais même maintenant… je crois que j’ai fait la paix avec cette petite partie égoïste de moi-même. » Elle sourit à Donna. « Tu devrais essayer l’égoïsme, toi aussi. Ne penser qu’à nous juste pour quelque temps, pour nous rappeler que notre vie nous appartient et qu’on est plus que le devoir qu’on s’impose de remplir. » Même si ça voulait dire avoir parfaitement conscience que quelque part dans le monde, quelqu’un avait forcément besoin d’aide, mais ne rien faire parce qu’on était trop occupée à ne penser qu’à soi. Bon, et espérer un peu qu’un copain super-héros prendra le relai…

Malgré tout, elle avait beau prôner un peu d’égocentrisme, elle était également sensible aux paroles de Donna. Bien sûr, que Zee voulait toujours aider les autres, et bien sûr, qu’elle détester faire du mal aux autres. Pendant toute la période où elle avait été possédée par un démon, elle avait pu voir la tête des gens qu’elle avait croisés, et elle n’y avait lu que de la terreur et de la haine. Des gens qui ne la connaissaient pas, qui ne pouvaient pas savoir qui elle était et à quel point cela lui brisait le cœur. Elle ne pouvait pas lui en vouloir. Mais elle mesurait la chance qu’elle avait d’avoir des gens comme Donna dans sa vie, des gens qui la connaissaient si bien qu’ils pouvaient lui accorder une seconde chance et passer outre ses terribles erreurs. « Je comprends ce que tu veux dire. Je sais qu’on peut faire du mal aux gens même avec les meilleures intentions du monde. Et que ça ne devrait pas nous arrêter… » Elle coula un regard en coin à son amie. « Tu ne doutes jamais, malgré tout ? Tu n’as jamais eu l’impression des fois de faire fausse route ? » Elle retint un soupir, s’en voulant un peu de forcer Donna à avoir cette conversation un peu déprimante, et surtout à lui rappeler peut-être de mauvais souvenirs. En quoi est-ce que ça l’avancerait de savoir qu’elle n’était pas la seule à se planter ? Le malheur aimait la compagnie, certes, mais quand même.

Parler alcool était forcément beaucoup plus fun, enfin, ça l’était pour Zee, mais Donna était sous le coup de la terrible malédiction des Amazones : rien ne pouvait les rendre soules. Enfin, presque rien si elle se rappelait des propos de Diana. Le pintage en règle n’étant rien d’autre qu’un énième moyen de fuir ses problèmes et ses responsabilités, Zee était un peu une experte, mais du coup, elle était un peu triste pour Donna. « Mais comment tu fais quand tu as vraiment envie de t’anesthésier des pieds à la tête après une journée vraiment pourrie, si tu ne peux pas te murger ? » Elle parlait sur le ton de la plaisanterie, mais à peine, excusez du peu. Elle nota aussi que son amie resta très vague sur le sujet d’un éventuel pote de beuverie et plus si affinité. Là encore, c’était forcément un sujet difficile pour quiconque vivait plusieurs milliers d’années. N’importe qui qui voyait ses amours mourir de vieillesse les uns après les autres méritaient beaucoup de câlins. Elle balaya le sujet d’un geste de la main. « J’ai donné un ou deux spectacles, mais je n’ai pas vraiment repris. Je suis trop mal à l’aise en face du public, mais ça va passer. J’aime trop ça. » Elle esquissa un sourire lumineux. C’était vrai qu’elle aimait trop ça. Elle adorait son métier. « Et toi, comment ça se passe niveau travail ? Tu as eu le temps de reprendre ? J’imagine que c’est difficile de se projeter dans l’avenir sachant ce qui nous attend. » Cela dit, les gens, à l’approche d’une menace galactique, étaient plus du genre à vivre chaque jour comme le dernier qu’à se rouler en boule dans un coin en mode à-quoi-bon.

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