L’immense manoir était vide. Jadis, les rires l’emplissaient. Ceux d’un gamin malin qui avait peur des chauves souris. Et puis la faucheuse est passée, elle a emporté les parents du gamin et les rires se sont tus. Le gamin a grandit, la haine en lui aussi. Sa peur des chauve souris l’a poussé à en adopter la forme. D’orphelin il est devenu justicier. Mais l’immense manoir restait triste et silencieux jusqu’à ce qu’un autre gamin y fasse résonner ses rires. Puis le gamin a grandit. Le justicier a recueilli un autre gamin, mais celui-là ne riait pas. Il était triste et sombre comme lui-même l’avait été. Et puis la faucheuse est passée à nouveau. Et le cœur du justicier s’est resserré plus encore. Un gamin aussi malin que lui n’a réussit à lui redonner le sourire, pas plus que les femmes n’y étaient parvenues. Deux seulement avaient réussit à percer son secret, son armure, à atteindre son cœur, mais aucune des deux n’avaient réussit à lui faire abandonner le masque et sa quête, aucune n’était prête à quitter le milieu auquel elles appartenaient. Et le justicier est resté seul. Jusqu’à ce qu’un soir, sur son seuil se tienne un autre gamin. Il ne riait pas, il était d’humeur sombre, mais c’était le sien, c’était son fils.
Damian ne dormait pas. Comme son père, il avait adopté un rythme de vie nocturne. Quand ils n’étaient pas sur le terrain, Damian s’entraînait. Bruce veillait à ce que son fils ne perde pas la main. Il savait que l’entrainement des Al Ghul avait été particulièrement rude, mais il ne prendrait jamais le risque de perdre Damian. La mort de Jason l’avait particulièrement frappé. Même si ce dernier lui était revenu. Cela aussi c’était un étrange cadeau. Talia en était à l’origine, il ne l’ignorait point. Qui d’autre aurait pu ramener d’entre les morts ce jeune Robin ? Qui d’autre avait à se faire pardonner quelque chose d’aussi grave qu’avoir masqué l’existence de son fils ? Elle lui avait laissé Damian, puis lui avait rendu Jason. Il savait que dans son esprit tordu, c’était une sorte de calumet de la paix. Talia ne lui aurait pas confié Damian à moins de vouloir qu’elle fasse de leur fils plus qu’un simple héritier de la ligue des assassins. Mais peut-être qu’il était juste en danger de mort. Peut-être qu’elle lui avait ramené Jason uniquement pour qu’il ne râle pas trop quand elle viendrait reprendre Damian. Un fils contre un autre fils. Bruce ne la laisserait pas faire. Il ne laisserait pas la ligue reprendre Damian. Jamais.
Quand Alfred l’eut averti, il prétexta une mission assez simple pour éloigner Damian, sachant que s’il se contentait de l’exiler dans sa chambre, son hardi fils trouverait un moyen pour ne rien rater de la conversation qu’il allait avoir avec sa mère. Damian était très mature pour son âge et surtout très désobéissant. Il ronchonna, soupçonna quelque chose, mais parti. Bruce libéré à l’idée que Damian n’était plus sous le toit, vint à la rencontre de Talia non sans craindre qu’elle soit venue récupérer son fils. Il l’accueillit comme il se doit malgré tout, dans son peignoir couvrant un costume souple, confortable mais élégant. Elle aussi l’était. « Bonsoir Talia. » Quel couple splendide ils formaient. Splendide et redoutable. S’ils avaient pu s’accorder, ils auraient pu régner en maître, sur Gotham ou sur la ligue. Mais Bruce préférait les imaginer en famille, chacun ayant prit respectivement sa retraite. C’était l’unique moyen pour élever Damian loin de toute cette noirceur. Pas sûr que Damian accepte, mais il s’y ferait. Quel gamin refuserait de voir ses parents unis et heureux ? Si renoncer à bastonner des gens était le prix, Damian l’accepterait. Du moins, Bruce l’espérait. « Comment vas-tu ? » Rester poli pour ne pas céder à la colère, rester poli pour ne pas laisser les émotions vous submerger. Le vernis de la haute société bourgeoise américaine ne lui avait jamais été aussi utile.
there is no man your equal therefore, you are the only man I can love. (bruce & talia)
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La brume habillait le manoir d'un air lugubre, comme éteint, alors qu'elle pouvait aisément deviner qu'il a jadis été resplendissant, vivant. Talia y trouvait un certain charme dans l'obscurité, une chaleur dissimulée entre des murs de glace et des fenêtres opaques. Un coeur battant sous un masque de chauve-souris. La tueuse succomba pour celui qui refusait de tuer ; quelle ironie, quand on y pense, et quelle tragédie. L'amour lui est contraire, le coeur forgée dans la pierre, les mains baignées dans le sang. Pourtant il est indubitable. Il dépasse ces trente dernières années à éradiquer le bien de son mécanisme et à en remplacer les rouages. Personne ne s'est jamais excusé pour avoir fait d'elle un monstre. Personne ne l'a jamais sauvé, elle. Il exécutait la même démarche avec le jeune garçon, si cher à sa mère, qui n'a néanmoins jamais été battit pour en être une. Talia n'est pas une l'héroïne que l'enfant prend en modèle, ni l'épouse aimante, mais elle ne pouvait guère de contenter d'observer Ra's faire de Damian ce que la fille du démon est aujourd'hui. Il n'y a pas milles et unes raison à ce choix. Il n'y a rien d'autre de dissimulé sous l'amour d'une mère qui tente à protéger son fils. Il n'y a pas de meilleurs choix, selon elle, que de laisser entre les mains du chevalier noir. Peut-être arrivera-t-il à le sauver, lui, avant que cela ne soit trop tard.
Son retour à Gotham ne pouvait se faire sans savoir Damian en sécurité, mais Talia ne doutait que peu de la férocité de son père à vouloir le préserver des dangers extérieurs. Il ne pouvait non plus se faire sans quelques mots échangés, sans la sensation inlassable qu'il empoigne d'une main son coeur. Mais le savait-il ? Savait-il qu'il l'avait à sa merci, ou pense-t-il comme n'importe qui craindrait le nom de Talia al Ghul ? Ne voit-il que l'assassin, le monstre, l'insensibilité dessinée dans le charme de ses traits ? Elle joignit néanmoins le manoir confiante, affublée d'une élégante robe rouge. Elle ne fut pas surprise d'être accueillie par le majordome, Alfred, avant qu'il ne l'accompagne dans une des nombreuses pièces du manoir Wayne où elle n'eut qu'à attendre son hôte. Talia laissa une de ses mains se promener sur un sofa, ses doigts caressant le tissu, avant de s'aventurer sur le bois ciré d'une commode. Tout ici reflétait la superbe fortune des Wayne, mais l'argent n'a jamais été dans ses intérêts, ni dans celui de son père ; a vrai dire il n'a que lui-même, ses ambitions, sa vie. Sa précieuse fille, elle, n'a de préciosité que pour ce peut lui apporter. Son bonheur n'a que peu d'importance, tant que Ra's peut user d'elle afin de trouver un héritier à son empire. Jason, Bruce, Damian... Si Talia devenait un obstacle à ses idées, il n'hésiterait certainement pas à l'évincer comme Nyssa et Dusan, si ce n'est à la tuer. La famille est une notion bien étrange à ses yeux, mais pourtant si concrète depuis la naissance de Damian.
La silhouette singulière du chevalier noir s'esquissa à l'autre bout de la pièce, et un sourire, aussitôt, illumina le visage sombre et pensif de la jeune femme. « Bonsoir Talia. » Le sentiment qu'elle attendait si impatiemment prit aisément le temps de s'immiscer. Elle songeait à ces femmes que la chauve-souris avait du charmer, sans même s'en rendre compte. L'aimaient-elles autant que Talia l'aimait ? C'est à en douter, mais qu'en sait-elle ? « Bonsoir, my love. » C'était cette habitude maladive de le croire sien qui revenait, ou au contraire, cet espoir immortel qu'il peut encore l'être. Ra's a un jour offert la main de sa fille à Batman, et cette main, il avait encore l'opportunité de la prendre et de ne plus jamais la lâcher, au prix de sacrifice que la tueuse se surprendrait à être capable de faire. « Comment vas-tu ? » Elle laissa vagabonder ses yeux sur la silhouette de Bruce, envisageant la plus conventionnel des réponses, prenant ceci presque que comme un jeu. Elle haussa légèrement les sourcils, un sourire amusée étirant ses traits. « Je suis éreintée. Pourquoi Gotham ne vit-elle que la nuit ? Il me faudra des jours pour m'habituer à ce rythme nocturne. » Damian s'adaptait-il, lui ? Où était-il d'ailleurs ? Elle espérait que s'il avait eu vent de la venue de sa mère, il aurait été là, dissimulé derrière Bruce, trépignant. Or il n'y avait personne d'autres qu'eux deux. Talia se risqua à s'approcher de Bruce, posant ses deux mains sur son torse, recouvert d'un somptueux peignoir. « N'es-tu pas heureux de me revoir ? Je suis désolée de t'avoir quitté si vite la dernière fois, je devais régler quelques petites choses à la ligue. » Elle pencha la tête sur le côté droit, arborant un sourire charmeur. Talia se doutait que ces retrouvailles ne seraient pas aussi simple, depuis qu'elle a laissé un fils, dont il ne connaissait pas l'existence, entre ses bras. Elle laissa lentement remonter ses mains sur ses épaules et son visage, lui, prit un air plus sérieux. « Comment va-t-il ? » Elle n'avait pas besoin de prononcer son nom, de qui d'autre pourrait-elle s'inquiéter ? Ce sont seulement trois noms qui s'acharnent à sauver le peu d'humanité préservé, mais elle surveille chaque faits et gestes de l'un et un autre se tient devant elle. Le troisième n'a jamais été aussi longtemps séparé d'elle, mais peut-être est-ce pour le mieux. « Je suppose qu'il n'est pas ici. » demanda-t-elle, un regard quelque peu accusateur. Quelle famille ils formaient là.
Talia, amour de jeunesse, amour perdu, amour maudis. La contempler était douloureux. Songer à la vie de famille qu’ils ne partageraient probablement jamais l’était plus encore. Pourtant, aussi cynique soit-il, Bruce ne pouvait s’empêcher de les imaginer ensemble, tous les trois. On disait que les enfants avaient ce pouvoir, de rassembler, d’unir, les âmes esseulées mais il n’y avait jamais vraiment cru. Certes, sa famille était composée d’enfants abandonnés qu’il avait recueilli mais Talia n’avait rien d’une orpheline, rien d’une super héroïne non plus. Dans ses veines coulait le sang des Al Ghul, un sang maudis, à l’héritage sanglant qu’elle assumait depuis des années, depuis toujours. Il ne l’avait jamais vu s’opposer à son père d’une quelconque manière. Ce dernier l’aimait, à sa manière et aurait vu leur union sous un angle favorable si Bruce avait accepté l’héritage des Al Ghul et renoncé sa quête. Mais il ne pouvait faire une chose pareille. Longtemps, il avait cru que Talia l’acceptait, le comprenait, mais lui aurait-elle caché l’existence de Damian toutes ces années si elle comprenait ?
Son aimée n’avait pris une ride mais comment l’inverse aurait-il été possible quand on avait un accès à une véritable fontaine de jouvence ? Il aurait aimé croire qu’elle restait jeune uniquement parce qu’elle prenait soin d’elle mais il avait un sérieux doute. L’ennuis c’est que le puit de Lazare vous préservait de la vieillesse et de la mort mais qu’il finissait par vous rendre fou. Elle paraissait divine comme toujours, mais il restait méfiant. Talia ressemblait plus à son père qu’elle ne voulait bien l’admettre. Probablement était-elle là pour reprendre Damian mais peut-être voulait-elle également qu’ils aient une chance d’avoir une véritable vie de famille. Pas certain cependant qu’elle choisisse le manoir Wayne comme foyer pour cette famille. Il tiqua à l’évocation de la ligue qui démontrait bien qu’elle n’avait rien abandonné de l’héritage familial. En avait-il douté ? Sans doute l’ombre d’une seconde, un bref instant de faiblesse où l’espoir était né mais qu’il avait aussitôt relégué aux ombres.
« Notre fils est sorti patrouiller. Il n’arrivait pas à dormir et avait besoin de se dégourdir les jambes. » répondit aimablement Bruce. « Il va bien, compte tenu des circonstances. » ajouta-t-il. Damian avait plutôt bien réagit à l’apparition d’un père jusqu’alors inconnu dans sa vie, comme il s’était plutôt rapidement adapté à la vie au manoir Wayne. S’il a été difficile de rompre avec les habitudes de la ligue des assassins, à présent, il était un Robin redoutable avec la nette tendance à faire la morale aux anciens Robins. Une manie qui amusait son père autant qu’elle agaçait ses frères aînés. « Je suis étonné de la vitesse à laquelle il s’adapte. Quand on le regarde, on dirait qu’il a toujours fait parti de cette famille. » Il insista sur ce dernier mot. Que valait-il pour elle, ce mot ? Famille. Etait-ce pour elle la ligue ou son fils ou lui-même ? Il ne lui jetait aucun reproche au visage mais ils étaient sous entendus. Il ne cherchait pas encore la querelle sachant qu’avec Talia c’était inutile d’en débattre. Elle avait son avis souvent arrêté et une volonté de fer.
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Un sillage étroit se dessinait entre les coeurs, les sourires déchirés, et une politesse aggravante. Il arborait ce même air, la même peine au visage, le reflet d'un coeur assombri, celui qu'elle n'a jamais réussi à complètement voler, si tant est qu'on n'ait pas remplacé l'organe vital de la jeune femme par un trou béant. L'anomalie n'est pas de naissance, Talia a travaillé à son altération, si ce n'est à sa destruction. L'éclat d'humanité dans sa pupille ne doit sa présence qu'à l'amour indélébile qu'elle porte à Damian, Bruce et Jason, mais rien qui ne trace au préalable un chemin vers le bonheur. Il y avait toujours cette voix qui s'y refusait, qui interdisait. Le visage de son père et l'ombre de sa mère, en constante confrontation. Elle, qui, ne voulait pas une telle chose pour Damian, ne voyait pas d'autres choix que de confier son enfants aux mains de son géniteur. Ce père, il a toujours espéré le rencontrer, attentif à toutes les histoires, toutes les mentions de son nom. Derrière l'orgueil, l'enfant dissimulait une certaine fascination pour son père, admiration construite à l'image de celle de sa mère.
Talia ne fut pas surprise de l'absence de Damian, bien que quelque peu attristée. Néanmoins entendre qu'il se porte bien rassura la jeune femme. Elle connait son fils mieux que personne ; elle connait son caractère, son attitude, ses humeurs. Elle devinait aisément le cauchemar qu'il faisait vivre aux anciens Robins, mais Talia endure davantage celui de ne jamais savoir où il peut se trouver ; il y a des dangers bien plus conséquents à Gotham qu'entre les murs de la ligue. Doutait-elle de ses capacités ? Certainement pas. Il porte après tout le nom des Al Ghul, et héritera un jour du démon, mais pareillement, le sang des Wayne ruissèle dans ses veines. Elle ne doutait pas de lui, ni de Bruce, mais elle ressentait enfin le fardeau maternel, l'inquiétude perpétuelle de laisser l'obscurité de Gotham l'emporter. Elle imagina un moment le voir zigzaguer entre les meubles, parcourir les pièces du manoir, ces mêmes pièces qu'il avait sans doutes passé des heures à en dessiner l'architecture, comme il tentait de tracer les traits du chevalier noir à travers les paroles de sa mère.
« Je suis étonné de la vitesse à laquelle il s’adapte. Quand on le regarde, on dirait qu’il a toujours fait parti de cette famille. » Cela fit doucement sourire Talia, qui elle, n'était guère surprise de la rapidité à laquelle son fils s'adaptait. Il ne souhaitera certainement pas revenir de si tôt au QG de la ligue, mais ceci, la fille du démon pouvait le comprendre. Elle a elle aussi cherché à s'en éloigner de bien des manières, devenue source de solitude et de faiblesse. « Je ne suis pas surprise. Damian est aussi un Wayne, après tout.. » Un Wayne, bien plus qu'il ne pouvait songer l'être, au delà des espérances. Il a plus que tout besoin de ce nom et de ce qu'il en coûte. Il n'en est pas moins un Al Ghul pour autant, néanmoins elle ne le laissera pas grandir à l'image folle de son grand-père. « Il a toujours fait partie de cette famille. » ajouta-t-elle d'une voix plus douce. Talia retira lentement ses mains de son visage, et se retourna, parcourant la pièce de quelques pas pour venir poser son regard sur une photographie soigneusement cadrée. Aucune photographie décorait les murs de la ligue, pas un visage, pas un souvenir. Elle peinait même à se rappeler les traits de sa mère, son regard ou son sourire. Il n'y a rien d'autre qu'une ombre brumeuse et des échos. « Il ne l'avouera certainement pas, mais Damian a toujours espéré te rencontrer. Il t'admire plus qu'il n'a jamais admiré Ra's, plus qu'il ne m'a jamais admiré moi. » Tout s'échappe entre ses doigts, tout s'effile, tout se tord. Qui peut-elle blâmer ? Personne, à part elle-même. Elle aurait du fuir il y a bien longtemps, si on ne lui avait pas apprit à ne jamais reculer. Damian ne méritait pas cela. « Je ne suis pas ici pour le récupérer. Ce serait la pire décision à faire, et ne penses-tu pas que j'en ai assez fait ? »
Bruce sourit, mais son sourire demeurait chargé d’une certaine rancune que les belles paroles de Talia ne pouvait effacer en si peu de temps. Elle lui avait menti, elle lui avait caché le fils qu’ils avaient eu, et une partie de lui savait qu’elle lui avait confié Damian afin de parfaire son éducation et non pour qu’il rencontre son père. Cela n’était que le bonus. Talia était capable de sentiments tel que l’amour mais elle pouvait aussi enfermer ses sentiments quand elle le voulait, quand son ambition l’exigeait. Il savait que les Al Ghul passerait avant tout, que la ligue des assassins passerait avant tout, qu’elle serait toujours fidèle et loyale à son père. Jamais elle ne romprait le lien les unissant, jamais elle ne briserait ses chaînes qui n’en étaient pas à ses yeux. Ce qui le surprenait, c’est qu’elle l’ai aimé, qu’elle lui ai confié son fils, qu’elle laisse Damian porter les couleurs des Robin. Peut-être était-ce plus cruel ainsi. Parce qu’il avait toujours et encore l’espoir qu’elle change de camp, chose qui n’arrivera jamais.
« Il ne l’est que depuis peu. » répliqua-t-il, mesquin, rancunier. Le chevalier noir n’oubliait rien, ne pardonnait pas, mais il pouvait octroyer une seconde chance. Il pensait cela possible quand elle lui a amené Damian, il le pense encore alors que des doigts agiles parcourent sa joue marquée par le temps et les coups durs. Etait-ce des mensonges pour le rouler, le berner ? Une partie de lui avait envie de croire, qu’ils puissent être ensemble, qu’ils puissent former une famille. Même s’il était la dernière personne à croire en la famille. Il avait perdu la sienne trop tôt, il avait construit une autre famille, de justicier, mais c’était une famille née dans la noirceur, dans l’anxiété et le désir de vengeance, pas envers une personne, envers le monde. « Pour le moment, c’est un enfant qui essaie de se construire une identité. Il est perdu, et son seul repère c’est moi, c’est cette vie nocturne et Alfred. J’aurais aimé lui offrir plus que ça. » finit-il par dire, voulant la rassurer. « C’est un garçon intelligent, il finira par comprendre. Laisse lui le temps. »
C’était bizarre, de lui parler ainsi, alors qu’elle était responsable de tout ces bouleversements que devait affronter Damian et qui faisait de lui un jeune garçon en colère. L’adolescence le frappait au moment même où il découvrait qui il était. C’était difficile pour lui. Bruce le savait. Même s’il ne lui laissait guère l’occasion de le montrer. L’autorité qu’il lui imposait avait pour seul but d’éviter qu’il n’applique les enseignements de la ligue durant les phases où la colère prenait le dessus. Damian tuait aisément et sans trop de remord. Pour le moment, mais cela pourrait changer un jour. Bruce l’espérait.
Finalement, elle lui avoua ne pas vouloir récupérer Damian. Bruce en fut autant soulagé que surpris. Il se demanda ce qu’elle faisait ici et eut peur qu’elle ne se vexe et s’en aille aussitôt. Le contact de sa main sur sa joue avait ravivé l’amour qu’il avait pour elle, cet amour préservé dans un souvenir aussi doux que douloureux. « Tu n’as peut-être pas toujours fait les bon choix, mais tu as prit la bonne décision en l’amenant ici. Damian avait besoin de savoir qui il était, qui est son père. J’aimerais que tu me laisses l’opportunité de faire de lui quelqu’un de bien. » souffla-t-il en s’approchant d’elle. Suffisamment proche pour sentir son parfum, et la chaleur de son souffle. La tension sexuelle naissait ravivant les souvenirs, ravivant également la douleur. Elle était la mère de son enfant, elle avait été son amante, mais elle ne serait jamais son épouse. Il le savait, au fond, il l’avait toujours su. Il n’était plus ce jeune homme qui croyait pouvoir soulever des montagnes et faire s’effondrer la ligue. Il ne croyait plus en la force de l’amour. Il se demanda s’il n’y avait jamais cru. Et puis, il y avait quelqu’un d’autre dans sa vie. Il s’éloigna, d’un pas, baissant les yeux.
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