En attendant que la Lexcorp Tower soit reconstruite, Lex Luthor avait envahit l'hôtel Statler de Metropolis. Il occupait les lieux. La direction se flattait de loger le citoyen le plus riche de la ville en pleine reconstruction après le carnage du Syndicat du Crime.
L'employé de l'hôtel lui tendit une clé plaquée or. Lex Luthor la prit et se dirigea vers l'ascenseur. Il passa devant une douzaine de délégués du parti républicain qui lui firent signe pour attirer son attention. Luthor monta dans l'ascenseur et se rendit au dernier étage. Sa suite : la présidentielle, doubles portes, scellée d'or, meublée d'antiquités. Il en fit le tour et contempla la vue du balcon. Sa Lexcorp Tower était un chantier entouré de grue. Déjà 30 étages de reconstruits. Lex retourna au salon. Du champagne offert par la direction dans un seau à glace en étain qui avait été marqué du sceau de la Lexcorp juste pour lui faire plaisir. Luthor alluma la télé du salon et retira sa perruque de son crâne chauve. Des commentaires sur la campagne électorale envahirent l'écran. Le Wyoming semblait prêt à lui accorder son vote. Une publicité apparut sur l'écran : la nouvelle gamme Chrysler, le choix de l'électeur ! Luthor apparut sur l'écran, en train de cracher ses « votez pour moi ! ». Nouvelles images, le dernier discours d'Amelia Carter fut noyé sous les applaudissements. Lex serra les poings.
Il se sentait affaibli, il se sentait miné, il se sentait vidé. Sa convalescence suite au combat contre Ultraman continuait. Il avait encore des pansements qui couvraient tout son torse sous sa chemise, il avait encore un bandage sur son cou, bien visible au dessus du col de sa veste. Les séquelles de son affrontement contre le leader du Syndicat du crime. Les coups d'Ultraman avaient endommagés son armure, au point que même l'impact des coups avait finis par blesser Lex. Il marchait à tout petit pas à présent. Il respirait à petites bouffées. Il marchait avec une canne. Il mesurait ses pas. Le soir il s'en tenait à un régime juste-un-verre-et-pas-plus de son bourbon seagram crown royal. Il allait avoir 51 ans, mais il en paraissait 10 de plus. Ces temps-ci il avait le droit de la part des employés de la Lexcorp à beaucoup plus de : « Vous avez besoin d'aide ? » pour ouvrir les portes ou monter les escaliers. Il avait le droit de plus en plus de la part des membres du Parti républicain à des tapes amicales sur les épaules et à des « Vous êtes sûr que ça va ? Vous n'avez pas l'air bien. » Il ne le supportait pas. Il détestait inspirer la compassion. Il aimait intimider les gens du commun par sa préstence, maintenant il leur inspirait une sorte de pitié. Dans une foule, les gens le voyaient marcher avec sa canne et s'écartaient aussitôt sur son passage, comme ils l'auraient fait pour laisser passer un handicapé. Cela faisait rager encore plus Lex. Son médecin lui avait promis que bientôt il n'aurait plus besoin de sa canne. Quand les meetings et les allocutions publics duraient trop longtemps, Lex finissait par s'appuyer sur le bras d'un de ses molosses de gardes du corps.
Mais même son état n'arrivait pas à diminuer son hostilité pour Amelia Carter. A chaque fois qu'il observait la télé c'était : Amelia ! Amelia ! Amelia ! La foule scandait son nom. Ses fans bousillaient leurs cordes vocales pour elle. Les démocrates l'aimaient sincèrement. Les républicains aimaient Lex uniquement parce que c'était le candidat de leur parti. Oh certes la moitié du pays adhérait au discours de Lex sur fond de bannière étoilée brandit et de main posé sur la bible. Mais c'était plus un mariage de raison que d'amour.
Lex perçut quelque chose. Il se tourna lentement vers le balcon de sa suite et aperçut Superboy qui s'était posé là. Luthor en laissa tomber sa canne par terre. Voir son kryptonien créé en éprouvette avec toute la ville de Metropolis en arrière plan ne manquait pas d'attrait. Lex balbutia :
« Ce n'est pas ce que tu penses, il y a une explication à tout ça… je veux dire à ton existence. »
Luthor, le souffle angoissé, à contempler le visage de sa création. Les pensées du milliardaire se brouillèrent. Il évalua la hauteur de la chute. Il voulut lever ses mains vers le jeune Kent et les laissa retomber. Les veines du cou de Luthor palpitaient à tout rompre.
La vérité sur Lex Luthor, un sujet bien vaste. Clark n'en n'avait fait aucune éloge à son clone, pour dire vrai. Aucune personne soi disant dans le bon camp n'en n'avait faite. Contribuant sans le vouloir, a créer cette image fragmentée qu'il voyait en lui ? S'acharnant à suivre les pas de Superman, terrifié de devenir un jour comme le cruel Luthor. Il avait pu affronter Doomsday sans une onde de crainte, étant incapable à contrario de simplement penser à son autre géniteur. Une partie de son origine était donc monstrueuse pour le reste du monde, justifiant donc cette méfiance au début de son existence. Encore un vilain plan de Luthor pour détruire le monde hein ? Une version crédible pour sûr, une version occultant la possible mais faible idée d'une dose d'amour dans le cœur froid de cet homme. Clark le respectait, peut être même qu'il l'appréciait aussi. Lui acceptant le titre de Superboy, tout en lui niant le droit de mourir en tant que tel. Ultraman et sa petite équipe avaient survolés son monde.
Conner aurait dû être de la partie, prendre enfin son envol. Au placard une fois de plus, voilà l'endroit ou il avait été placé par Kal et les autres. Attendre son tour pour lutter contre les ténèbres, étant à moitié Kal et à moitié Lex, attendre n'était en rien dans sa nature. Conner savait ou trouver Luthor, le monde entier le savait après tout. Il l'avait décidé, plus jamais il n'attendrait. Aucun avis ne lui était nécessaire, il comptait bien rendre visite à Lex. Le temps des réponses était arrivé. Ils avaient tous peur de cette rencontre, Lex ne ferait sûrement pas de mal à sa seule création réussie. Alors pourquoi avoir peur de ce face à face ?
Les questions tournaient dans son esprit alors que Superboy planait dans le ciel, mais au moins pour une fois il aurait des réponses. Son passage au dessus de la ville fut bref, tout comme son atterrissage sur le balcon de la chambre de Lex. Voilà une chose à laquelle il ne s'attendait pas à trouver une personne aussi faible, l'homme menaçant Superman depuis si longtemps. Conner s'avança lentement, évitant d'avoir un geste pour être mal interprété par son père. D'un geste il prit la canne tombée au sol, pour la remettre dans la main de Luthor: Pourquoi adulte ? Pourquoi me priver d'une mère, d'un père ?"
Ce n'était vraiment pas le même monde que chez les Kent, tout ici inspirait le pouvoir. Du moins la forme la plus grandiose de pouvoir chez un humain, fébrile mais pourtant sur un simple mot toujours capable de détruire des villes entières. Lex possédait une aura indéniable autour de lui, de quoi provoquer la crainte mais surtout l'admiration chez son jeune clone. Il n'avait pas à faire au premier idiot du coin, il se devait de mesurer ses paroles, après tout il était pour des réponses et non pour exposer Kal et compagnie. Son attitude devint plus agressive alors: Vous n'avez personne, votre famille est une vaste liste de morts. Une chance de créer la vie vous est offerte ! Vous donner la vie à une arme ? L'héritage d'un homme seul et détesté, une arme pour détruire Superman ?
Luthor s'interrogea. Pourquoi Superboy était-il venu à lui ? Tempête sous un crâne chauve : venu pour intimider ou menacer au nom des méta-humains? Improbable, ils sortaient tous d'une situation de crise dans laquelle super-héros et super-criminels avaient lutté côte à côte contre le Syndicat du Crime pour sauver le monde. Ça devait être personnel alors. Vengeance ? Sa création venait l'abattre pour l'empêcher de nuire à Superman et ses autres alliés à l'avenir ? Dans tous les cas, Luthor n'avait pas parié sur une visite amicale en voyant apparaître le clone du Kryptonien et de sa propre personne. Aussi on comprendra la surprise de Luthor lorsque le nouveau venu récupéra sa canne tombé par terre pour la lui rendre. Lex resta interdit en écoutant les questions de l'être qu'il avait créé. Ainsi donc il venait le voir dans une démarche de crise existentielle ? Peut-être une situation dont il pourrait tirer partie pour se l'associer pour de bon. Lex retira sa perruque et la posa sur un meuble, dévoilant son crâne chauve.
« Tout d'abord je n'ai pas voulu te priver de parents. Tu as été créé artificiellement, tu es unique en ton genre. La Lexcorp aurait pu être un foyer pour toi. Mais après ta création, les choses n'ont pas tourné comme prévue et tu t'es enfuit. »
La télé continuait à faire défiler des images de meetings électoraux. Lex fouina à la recherche de la télécommande pour la couper.
« Mon équipe de scientifiques avait tout prévu pour t'humaniser. Te confier des animaux de compagnie, te faire jouer avec d'autres enfants, malgré ton corps d'adulte. Tout ça. »
Lex trouva la télécommande et éteignit l'écran au moment même où une foule en délire scandait le nom d'Amelia Carter en agitant des drapeaux américains.
« Et oui ne mâchons pas nos mots, tu as été créé pour l'anéantir lui. Oh bien entendu tu es sûr et certains que tu ne feras jamais ça. Tu fais partie de sa cabale j'ai cru comprendre, même si tu ne portes pas un costume d'hercule de foire clinquant comme lui. »
Luthor s'approcha lentement vers Conner et lui parla doucement, à mi-chemin entre la confidence et le secret d’alcôve.
« Mais dis moi, quand l'alien comprendra que s'il peut encaisser une bombe nucléaire, ou nager à travers le soleil, il a mieux à faire que de sauver le monde pour la 200ème foutue fois, s'il décide d'instaurer un régime dictatorial ou d'imposer sa loi au monde. Qu'est-ce que tu feras ? Parce que tu seras l'un des seuls à pouvoir le contrer. »
Sourire venimeux.
« Mais je ne t'ai pas créé que pour ça. J'aurais pu te façonner uniquement à partir de l'ADN du kryptonien, mais je t'ai aussi donné mes propres gênes humains. »
Lex, qui pose une main hésitante sur l'épaule de Kent.
« Tu connais Krypton ? J'ai traduit des archives de Jor-El, le plus éminent savant de leur civilisation. Ils avaient finis par confier leur cycle de vie à des machines. Tous leurs enfants sortaient de matrices stériles. Jor-El transgressa leurs règles pour engendrer Superman. Il le conçut naturellement. C'est la seule exception. Pour te concevoir, je n'ai pas eut d'autres choix que d'imiter leurs procédés. Je t'ai fait naître dans une matrice d'incubation. Mais contrairement à Kal-El tu n'es pas le dernier vestige d'une civilisation morte. Tu es tout autre chose. Tu appartiens à la civilisation humaine. Et tu as été conçut pour la défendre des aberrations aliens. »
Pour une fois Conner n'avait à faire usage d'aucun pouvoir pour cerner une personne, Lex sentait la peur à plein nez. Pas étonnant le jour ou une arme crée par vos soins revient faire une petite visite, l'ancien avait probablement du croire que Superboy venait en finir avec lui une fois pour toute. Accomplir ce que l'homme d'acier semblait incapable de faire, en finir une fois pour toute avec la dynastie des Luthor. Une gangrène aussi immorale que patriotique à souhait, une sorte de mal nécessaire utile pour la planète bleue. Un parallèle troublant avec le garçon produit en labo, la plupart des gens ayant adopté la même conduite envers lui, le conservant dans le coin comme une arme aussi utile que volatile. Luthor ou non, Conner avait déjà pu tester un semblant de jugement et de mépris à peine dissimulé. Conner avait semblait quelque peu décontenancé en observant son géniteur déposer une perruque sur un présentoir. Avant d'estimer qu'une paire de lunettes aussi, pouvait être vu comme déguisement ridicule. " Car cela en a été une pour vous ? Le grand homme qui domine le monde... Est-ce que tout prévoir pour moi, pour vous. Est-ce que cela a vraiment apporter quelque chose de vrai à votre vie ? "
Il n'était pas de taille dans une joute verbale avec un orateur comme lui, Luthor pourrait sans mal le faire changer d'avis durant un débat politique. L'homme savait mêler de la flatterie, aux critiques visant à déstabiliser. Superboy agissait comme un enfant idiot, mais un enfant ne voulant que ce qui était juste. Rien n'était en mesure de lui sortir du crâne que non, sa naissance, sa vie rien de tout cela n'avait été juste. " Quelle ironie dans le fond, un fils serait prêt à abattre un dieu, conquérir le monde, pour un simple sourire de son père. Vous auriez pu élever un homme de bien, capable de vous succéder un jour. Né pour anéantir quelle terrible déception que votre but... J'aurais pu être tellement plus."
Comment ne pas en vouloir au monde entier, chaque personne autour de lui ne trouvant que justification sur justification plutôt que d'admettre des tords. Bien entendu Superboy n'était pas complètement stupide, qui mieux que lui pour savoir le risque représenté par l'homme d'acier ? Après tout Kal ne l'avait t-il pas écarté du combat face au syndicat, recevant ainsi toute la gloire pour lui seul ? Conner était le futur, une version améliorer de lui en un sens. "non" pensa Conner en secouant doucement la tête, Superman était un homme bien. Si jamais il perdait un jour la tête, il entendrait raison car très entourés par ses proches. " Et moi que pourrais-je bien faire ? Des guerres, des meurtres, pas un jour sans que ce monde ne s'entête à se suicider à petit feu. Qui m'arrêtera moi si je décide que repartir de zéro est plus bénéfique que de le sauver ?"
Conner fronça les sourcils en sentant le contact de la mais de son père sur son épaule, une drôle de sensation pour lui n'appréciant que peu les rapprochements physiques. " Votre ADN est une tare, une faiblesse Luthor, trop faible pour l'arrêter lui ou d'autres menaces." Superboy en fin de compte ne pensait que comme un soldat, trouver un moyen de devenir plus fort, s'entraîner toujours plus dur. Mais Conner ne pouvait que constater avec rage que son corps ne progressait que trop doucement, il n'était pas l'égal de Clark, tout au plus une ombre utile. Conner préféra s'écarter de Lex, marchant de quelques pas dans la pièce pour se rendre vers le balcon. Prenant le temps de sentir la brise glisser sur son visage, les paroles de son créateur raisonnait dans l'esprit du clone. Son bras se tendant vers le vide, saisir le monde pour en devenir le maître. " Je sais tout du clonage sur Krypton, chaque individu construit dans un but précis. Votre technique est une vague imitation, Krypton donnait vie à des leaders, des guerriers, des scientifiques en tout genre. Sur le papier je suis une arme contre Superman, mais si je décidais de vous balancer dans le vide à la place ? Ou d'être un Mégas Alexandros, conquérir ce monde ?" Il lança un regard en coin à son créateur, il n'aimait pas tellement que l'on parle de lui avec cette arrogante certitude. Au moins à Luthor pouvait il appuyer son propos avec des menaces, il n'avait pas toujours la compassion de Kal un de ses nombreux défauts à n'en pas douter.
Luthor jaugea avec prudence les propos de sa création. Il n'était pas venu pour le tuer, ce qui le rassurait, mais Conner était quand même habité par l'amertume et la désillusion. Visiblement il avait envie de se venger sur quelqu'un ou quelque chose et Lex cogitait sur le moyen de détourner le ressentiment que le clone éprouvait pour sa personne. Il avait rejeté les arguments de Lex et ne percevait pas Superman comme un ennemi. Le milliardaire adopta une autre approche pour que l'être qu'il avait conçut, se méfie quand même des autres méta-humains.
«Je ne pense pas que tu deviendras un destructeur. Tu possèdes une sensibilité que bien des méta-humains n'ont pas. Je peux déjà avoir toutes les armes militaires et technologies d'armements que je veux. Je n'avais pas besoin de te créer. Et pourtant je l'ai fait. Car regarde ce qu'ils sont capables de faire, tout ces surhommes divins. »
Il tendit son bras et pointa du doigt la vue depuis le balcon de sa suite d’hôtel. Il désigna sa Lexcorp Tower en pleine reconstruction.
« Il m'avait fallut toute une vie pour bâtir ceci. Des milliers de gens travaillaient dans cet endroit. La richesse engrangée par ce lieu permettait de financer quantités d'institutions caritatives. Et mon building a été anéantit comme plein d'autres dans cette cité par des méta-humains. Et tu me reproches d'avoir créer une arme comme toi pour les combattre et protéger le genre humain de ces démons ? »
Luthor toucha maladroitement l'épaule de Conner.
« Mon ADN humain te rend moins fort que Superman, mais il fallait te donner une part d'humanité, pour que tu ne sois pas comme ces abominations. »
Luthor posa sa canne contre un meuble. Il prit le risque de saisir le visage de son hybride dans ses deux mains comme l'aurait fait un père avec son fils et lui dit avec insistance :
« J'aurai pu te programmer comme une machine pour que tu m'obéisse docilement. J'aurai pu te faire un lavage de cerveau avant même que tu ne te développe dans la cuve d'incubation, pour que tu n'ais pas d'âme et suive sans discuter le moindre de mes ordres. Mais je ne l'ai pas fait. Je t'ai donné le libre arbitre. Le choix de quel genre d'individu tu serais. N'est-ce pas la preuve que je te considère comme un être à part entière, bien plus qu'une arme ? »
Luthor lâcha le visage du clone et se dirigea vers le balcon à petit pas traînant. Il observa Metropolis. Combien de bâtiments avait-il édifié dans cette ville alors qu'il n'était qu'un simple humain ? Combien avaient été détruits ? Et combien allait-il en reconstruire ? Luthor s'était toujours vu comme l'architecte de la ville, celui qui lui avait donné son visage.
« Tous ces cataclysmes qui se sont abattus sur notre monde depuis quelques années. Les Atlantes, Darkseid, le Syndicat du Crime et que sais-je encore. Superman n'a jamais été à la hauteur. Il est temps que le monde ait un autre protecteur, qui sera plus à même de comprendre les humains ordinnaires. »
Lex se retourna en fixant Conner du regard. Le milliardaire lâcha au plus fort de ses résolutions :
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