Depuis les hauteurs de l'Empire State Building, Diana observe l'agitation dans les rues de Manhattan. Depuis là haut, on dirait une fourmilière en effervescence. Elle se souvient de la première fois où elle a mis les pieds à New-York. Cette impression d'être noyée dans la foule, la cacophonie assourdissante de son environnement, les buildings immenses cachant la vue... Elle avait été terrifiée, horrifiée même, et avait demandé à Steve de la sortir de cette ville avant qu'elle ne soit rattrapée par ses angoisses. Des années plus tard, elle parvient à trouver de la beauté dans la ville qui ne dort jamais. Le spectacle des lumières est apaisant, elle n'est pas la proie d'une surcharge sensorielle, et être en hauteur lui permet d'échapper aux mouvements de foule étouffants. C'est encore trop différent de Themyscira à son goût, mais elle ne déteste plus, elle apprécie même davantage que Washington ou Los Angeles. Mais ce n'est pas pour profiter de la vue que Diana a quitté Metropolis pour New-York. Elle y est pour travailler, agir au nom de la Ligue. Crise nationale concernant les héros ou non, des innocents ont toujours besoin d'être sauvés. Cette fois, il s'agit de mettre fin à un trafic d'enfants possédant le gêne méta-humain. L'esprit échauffé après le gala de Luthor, et cette étrange rencontre avec l'homme prétendant être son frère, Diana a ressenti le besoin d'agir en tant que Wonder Woman. Pour se changer les idées, et surtout faire ce qu'elle fait de mieux, protéger l'humanité d'elle-même. Elle n'a pas voulu être accompagnée, malgré les offres de plusieurs membres de la Ligue. Elle est morte. Elle est revenue à la vie. Elle demeure la même, compatissante et attentionnée, mais aussi implacable lorsqu'il faut l'être. Ce soir, c'est seule qu'elle mettra un terme aux manigances de ces mafieux sans cœur. Elle n'a pas besoin de l'assistance de quiconque. Elle sait, cependant, pourquoi certains lui ont proposé leur assistance. Ils craignent qu'elle ne laisse sa colère l'emporter sur sa raison. C'est mal la connaître que de le penser.
« Diana ? » « Je t'écoute, J'onn. » En communication avec le Limier Martien grâce à une oreillette, Diana secoue légèrement la tête pour reprendre ses esprits. « Je suis parvenu à localiser Jonathan Pierce, comme tu me l'as demandé. » « Très bien, où est-il ? » « Un vieux hangar, tout au nord de Harlem. Lui et ses hommes y ont déplacé leur marchandise et – » « Des enfants. Pas de la marchandise, J'onn. Des enfants, pour l'amour des dieux. » Silence. Parfois, le Limier a besoin d'un instant pour remettre de l'ordre dans ses pensées, son esprit fonctionnant différemment du sien, et des autres membres de la Ligue. Il n'en reste pas moins très attachant aux yeux de l'Amazone. « Toutes mes excuses. Ils ont déplacé les enfants dans un vieux hangar, je te transmets l'adresse immédiatement. Es-tu sûre de ne pas vouloir être accompagnée ? John n'est pas en patrouille ce soir, et Karen... » « Je vais bien, J'onn. Merci de t'en soucier, mais je n'ai pas besoin d'être chaperonnée. » « Bien. » Sans faire de commentaire supplémentaire, J'onn lui donna les coordonnées de l'endroit où elle trouverait Pierce, et plus important, ses otages. Ces pauvres enfants qu'il vendait au plus offrant, du proxénète au trafiquant d'organes, en passant par les scientifiques obsédés par l'étude du gêne méta-humain. Des monstres plus que des criminels, aux yeux de l'Amazone. Pierce, elle va se contenter de l'arrêter comme le veut la loi et les règles de la Ligue, et c'est faire preuve de beaucoup plus de clémence qu'il n'en mérite. Il reviendra ensuite aux autorités de démanteler son réseau inhumain.
Prenant son envol, Diana traverse rapidement Manhattan, survolant Central Park et ses autres quartiers sans s'y attarder. Même si elle ne connaît pas parfaitement Harlem, elle trouve le hangar sans difficulté. Malgré le calme apparent des lieux, elle remarque rapidement les signes qui montrent qu'il n'en est rien. Ici et là, un garde armé. Ailleurs, une porte fermée avec une chaîne cadenassée. Une lumière tamisée à l'intérieur. Elle imagine les enfants terrifiés à l'intérieur, et fronce les sourcils. Comment peut-on faire à ce point preuve d'inhumanité ? Les enfants ne sont-ils pas sacrés ? Elle ne comprend pas, et ne comprendra jamais. Un sifflement agacé lui échappe, et elle reprend de la hauteur pour mieux évaluer la situation. Ces gens là, peu habitués à être dérangés dans leurs activités criminelles, et certains d'être intouchables, ils ne lèvent pas les yeux. C'est un jugement divin qui va s'abattre sur eux. Mais pas tout de suite. Diana fronce les sourcils quand elle aperçoit une silhouette qui lui semble familière et ramassée sur un toit voisin. Elle franchit la distance qui les sépare, et atterrit doucement, bras croisés sur son armure. « Deadshot. » Elle reconnaît l'uniforme, les armes, la silhouette, tout. Ce n'est pas la première fois que Diana tombe sur Floyd Lawton. Et la dernière fois, les choses ne se sont pas très bien terminées pour lui. « J'espère que vous êtes ici sous l'ordre d'Amanda Waller. » Non pas qu'elle porte cette femme dans son cœur, mais il faut reconnaître que son Suicide Squad porte ses fruits. Du moins, quand on ne fait pas trop attention aux détails et aux dommages collatéraux. « Quelle que soit votre cible, il va falloir attendre. Je suppose que vous visez quelqu'un dans le hangar. » Une affirmation davantage qu'une question. « Il y a des enfants, dans ce bâtiment. Des enfants innocents, et si je ne doute hélas pas de vos talents de tireur, je doute que les hommes qui les retiennent prisonniers fassent dans la dentelle quand vous aurez abattu votre cible. Soyons clairs, je me moque bien de ces hommes, mais je ne tolérerai pas que ces enfants soient pris entre deux feux. » Elle devrait sans doute l'arrêter, lui aussi. Mais la dernière chose que Diana veut, c'est alimenter les tensions entre ARGUS et la Ligue. « Vous pouvez rester tranquille, et attendre que je libère ces enfants. Ce que vous ferez ensuite ne me regarde pas. » Elle hausse un sourcil. « Ou pour une fois, vous pouvez décider de sauver des vies au lieu d'en prendre, et m'aider à secourir ces enfants. Quoi qu'il en soit, vous seriez bien mal avisé de vous mettre en travers de mon chemin. »
A shot in the dark, A past lost in space w/diana prince
Deux jours plus tôt, j'étais à Star City. J'aidais Zoe à faire ses devoirs, je lui faisais à manger, je la bordais. Je lui promettais que je ne serais pas parti longtemps. J'avais des affaires à régler et je devais partir pour New York mais elle ne serait pas seule. Sa nounou allait pouvoir s'occuper d'elle pendant mon absence. Elle m'avait regardé dans les yeux alors qu'elle venait de se faufiler sous sa couverture. Est-ce que tu vas aller faire du mal à une méchante personne, papa ? Sa question m'avait prise au dépourvu. Zoe connaît mon occupation. Je ne lui mens pas sur ma nature mais je m'assure de la tenir loin de toutes ses histoires. Je ne lui parle jamais de mes contrats. Tout ce qu'elle sait, c'est que son père élimine des gens dangereux. Je l'avais regardé un peu troublé avant de lui sourire et de la rassrer. Ce n'était pas pour le travail que j'allais à New York. J'allais retrouver quelqu'un de mon passé. Et le tuer, mais ce détail, je l'avais gardé pour moi. Puis Zoe s'était endormie, j'avais fermé la lumière de sa chambre puis j'avais fait mes valises. Dès que la nounou était arrivée, je m'étais éclipsé après l'avoir assurée que je ne serais pas absent plus de trois jours.
Un voyage innatendu car j'ai enfin réussi retrouver cette ordure. Jonathan Pierce. Un associé des frères Anselm ; ceux qui ont tué mon fils. Ce n'est que récemment que j'ai découvert que Pierce a aidé à kidnapper Eddie sous leurs ordres. Le désir de lui faire payer me garde réveiller depuis des semaines. Dès que mes pensées s'aventurent sur ce sujet épineux, je sens la rage brûler au fond de mes tripes. J'ai besoin de le voir crever, de lui ficher une balle entre les deux yeux. Dans des moments comme ça, je suis incapable d'échapper au désir de tuer, de tout détruire sur mon passage. Des images du corps sans vie d'Eddie dans mes bras me hantent. Il n'a pas seulement été tué. Il a été violé. Son innocence de gamin de 7 ans piétinée. Je serre les dents, je me retiens de ne pas me jeter tête première dans le hangar que je surveille depuis hier du haut de mon perchoir. C'est insupportable à quel point j'ai du mal à respirer alors qu'un calme total m'entoure, assis sur ce toit. Mon masque repose à mes côtés alors que je tiens mon sniper sur mes genoux. Ça fait deux jours que je n'ai pas dormi mais malgré ça, la colère qui m'habite arrive à me tenir éveiller. C'est la seule chose dont j'ai besoin en ce moment.
Après deux heures à rester ainsi immobile, je finis par apercevoir Jonathan à travers l'une des grandes baies vitrées. Je m'installe contre le monticule du toit sur lequel je me dissimule depuis tout ce temps et analyse rapidement la distance, la force du vent, la résistance de la vitre au moment du tir. En une fraction de seconde, j'ai le doigt sur la gâchette et il ne me manque plus qu'à tirer. Contrôlant ma respiration, je fais le vide même si c'est incroyablement difficile de ne pas penser à mon fils. C'est à ce moment que je crois entendre un mouvement derrière moi. Un corps porté par le vent, un être tombé du ciel. Et j'ai raison car j'entends aussitôt une voix familière m'interpeller. Wonder Woman, la seule et l'unique qui me fait honneur de sa sainte présence. En vérité, la retrouver ici ne fait que m'agacer davantage. Je n'ai pas besoin qu'elle me fasse la leçon en ce moment. Tout ce que je veux, c'est mettre fin à la vie de ce salaud qui m'a arraché mon fils. Je ne fais même pas attention à ses paroles et je m'apprête à tirer, appuyant faiblement sur la gâchette. Pourtant, je me retiens quand elle mentionne la présence d'enfants dans le hangar. Je ne quitte pas des yeux ma cible, la tentation malsaine de tirer malgré tout qui me fait crisper la mâchoire avec agacement. Encore plus quand Diana propose que pour une fois, j'aide à sauver des vies plutôt que de tuer. Quand j'essaie de sauver des vies, quelqu'un proche de moi finit par payer le prix. Une malédiction qui me colle à la peau. Comme si je n'étais bon qu'à répandre le sang. J'aimerais bien aider à sauver ces enfants car bien que je suis un criminel, j'ai tout de même un certain code. Et puis, il me suffit de penser que l'un de ses enfants est Zoe, ou Eddie. Cependant, je sais que quand je suis dans les parages, ça finit toujours dans le sang, peu importe ce que je fais.
- Je sais pas ce qui vous fais penser que j'peux être le chien de garde de Waller mais j'suis ici de mon propre chef. Je ne travaille plus pour le Task Force X.
Je soupire, puis me redresse pour me retourner vers elle. Je laisse mon sniper en position au cas où je dois rapidement m'en servir. Puis de toute façon, à cette distance, il me servirait à rien si la justicière décidait de m'arrêter. Mais le fait qu'elle n'a pas tout de suite tenté de me plaquer au sol me dit qu'elle n'est pas là pour moi.
- J'ai pas l'intention de mettre en danger ces enfants, mais j'suis pas un sauveur non plus. Et j'ai une affaire personnelle à terminer avec Pierce alors si vous ne vous mettez pas sur ma route également, on aura pas de problème. Qu'est-ce que vous comptez faire pour aider les gamins ?
Plus je passe de temps à me prendre la tête avec Wonder Woman, moins j'ai l'occasion d'envoyer Jonathan six pieds sous terre. La mince ouverture que j'avais jusque-là m'échappe. Je ne pourrais pas supporter qu'il s'enfuit alors la mafieux est ma principale priorité mais ça ne veut pas dire que je me fiche du sort des enfants.
Diana n'a pas de temps à perdre avec un criminel. Chaque minute passée avec Deadshot est une minute perdue, qui réduit ses chances de sauver les enfants sans qu'ils ne soient blessés. Ou du moins, plus qu'ils ne le sont peut-être déjà. C'est un contretemps inacceptable pour Wonder Woman. Mais elle doit s'assurer qu'il ne sera pas une menace, et qu'il ne compromettra pas sa mission. Sa simple présence sur les lieux l'importune, la tâche était censée être aisée et se dérouler sans heurts. Avec un homme comme Floyd Lawton sur place, les choses se compliquent. Oh, elle pourrait se contenter de l'attacher avec son lasso le temps qu'elle mène à bien la mission, mais quelque chose lui dit qu'elle risque d'en avoir besoin. « Vous savez comme moi qu'on n'arrête jamais de travailler pour Amanda Waller. Ne vous fourvoyez pas, si vous êtes libre c'est uniquement parce qu'elle n'a actuellement pas besoin de vos... » Elle avise l'arme derrière lui. « Talents. » Diana n'a jamais aimé les armes à feu. Sur ce point, son avis rejoint celui de Bruce, elles engendrent bien trop de dommages collatéraux. Impossible de blesser quelqu'un, ou pire, accidentellement avec une épée ou un lasso. Ces armes sont celles que Jason utilise le plus, et si elle respecte son choix, elle n'a pas à l'apprécier. Elle reconnaît toutefois leur efficacité, lorsque l'on sait les manier. Et Deadshot est le meilleur dans son domaine si particulier. Raison pour laquelle Waller ne le laissera pas filer aussi facilement. Qu'il se berce d'illusions s'il en a envie, mais on ne quitte le Suicide Squad que de deux façons. Soit on contrarie Waller et boum, soit on meurt en pleine mission. Quoiqu'il en soit, les deux fins de contrat sont... définitives. Mais si Lawton veut se bercer de l'illusion de sa liberté, grand bien lui fasse, Diana n'en a que faire.
Bras croisés sur le plastron de son armure, l'Amazone observe l'homme d'un œil critique, cherchant à déterminer si oui ou non il peut lui être d'une quelconque assistance, puisque de toute évidence ils sont là pour la même chose – ou alors il s'agit d'un bien drôle de hasard. Elle hausse un sourcil à ses paroles. « Une affaire personnelle à régler avec Pierce... ? » Diana ne sait pas si elle doit s'en étonner ou non. Les gens comme lui ont plus d'ennemis que d'amis, c'est un fait. Mais que peut bien avoir fait Pierce pour s'attirer ses foudres au point qu'il veuille l'abattre à la première occasion donnée ? Un petit rire la secoue. « Oh, parce que vous pensez pouvoir faire quoi que ce soit contre moi si je décidais de vous empêcher de le tuer ? Dois-je vous rappeler comment s'est terminée notre dernière rencontre ? » Les hommes et leur ego. Diana lui aurait volontiers rafraîchi la mémoire, mais la situation presse. « Pour ce soir, je ne suis pas votre ennemie. De ce que j'ai pu comprendre, vous suivez un certain... Code d'honneur, n'est-ce pas ? Je peux respecter cela. Je ne suis pas là pour vous, et je suis prête à faire comme si je ne vous avais jamais croisé si vous m'aidez à sauver ces enfants sans que l'un d'entre eux ne soit blessé, ou pire. » Elle entend J'onn protester dans son oreillette, mais ne répond pas. Ce ne sera pas la première fois que la Ligue de Justice devra faire un compromis pour la bonne cause. Et Diana se moque bien du qu'en dira-t-on, elle se soucie uniquement du bien-être des enfants prisonniers. Et puis de toute façon, personne n'est là pour documenter cette alliance hors du commun, n'est-ce pas ? Wonder Woman reste songeuse un instant, puis elle soupire. « Pierce est à la tête d'un trafic d'enfants de plus en plus large. Il kidnappe des enfants vulnérables, le plus souvent orphelins ou issus de milieux défavorisés. Vous savez, le genre d'enfants qu'on ne se précipite pas pour secourir. Il les vend aux plus offrants pour des sommes exorbitantes, sans se soucier de ce qu'ils font d'eux. » Diana grimace de dégoût. « La Ligue traque ses mouvements depuis des semaines. Ce soir nous avons enfin l'occasion de mettre un terme définitif à ses agissements pour le moins abjects. Je suis là pour secourir ces enfants et m'assurer que lui et les membres de son organisation terminent leurs jours derrière les barreaux. Mais... Je suppose que si vous êtes là pour une affaire personnelle, vous attendez une justice un peu plus définitive. » Elle ne lui demande pas de s'expliquer ; pas encore du moins. Il n'est pas sa priorité, pas encore. Elle se tait, écoute avec attention les informations que le Limier lui transmet.
« Il y a une dizaine d'enfants. Ils les gardent enfermés dans des cages, mais ne vont pas tarder à les faire embarquer dans un conteneur apparemment destiné à la Chine. Il sera livrée dans une ville devenue tristement célèbre pour son trafic d'organes. » Diana doit prendre une profonde inspiration avant de poursuivre. Pierce n'est pas en face d'elle, elle sait qu'elle doit l'arrêter, mais elle meurt déjà d'envie de lui ouvrir la boite crânienne d'un simple coup de poing. La Ligue a peut-être raison, en fin de comptes. Ses émotions menacent réellement de prendre le dessus sur sa raison. Elle secoue doucement la tête. « Les enfants seront vulnérables aux balles perdues tant qu'ils n'auront pas été tous déplacés. Je vous propose un marché : nous les laissons les enfermer dans ce conteneur, qui paradoxalement les gardera en sécurité le temps que je mette Pierce et ses hommes hors-jeu. Mais je ne vais pas pouvoir m'occuper de tout son petit personnel en même temps, une fois ma présence sur place découverte, ils vont tenter de mener à bien leur opération en déplaçant les enfants. » Elle pose un regard sévère sur Deadshot, plein de jugement. « Pouvez-vous au moins faire en sorte que ce conteneur ne quitte pas les lieux ? »
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