✸ squad goals. (diana, jason)

On dit que les miracles sont de l'ordre du divin. Mais quand Diana lance un petit regard amusé à Jason, qui patiente avec elle devant la boutique de mobilier, elle sourit et se dit qu'elle aussi est peut-être parvenue à accomplir un véritable miracle en le convaincant de l'accompagner à ce qui aurait dû être une après-midi entre Kara et elle. Sortir Jason de Gotham, c'est comme essayer de convaincre Bruce qu'il a parfois besoin d'aide ; un défi. Diana a réellement tenté le tout pour le tout lorsqu'elle a, innocemment, proposé à Jason de venir avec elle, arguant que cela pourrait peut-être lui changer les idées, et qu'il pourrait être agréablement surpris. Qui ne tente rien n'a rien. Comme souvent, elle lui a tendu la main, sans avoir l'intention de le forcer à la saisir. Alors quand il la rejoint devant la grande enseigne, elle est ravie, un peu soulagée, et fière de le voir prêt à faire des efforts. Le plus naturellement du monde, elle l'a enlacé, et lui a promis que ça lui ferait le plus grand bien, de quitter la lugubre Gotham pour profiter de l'atmosphère légère de Metropolis. La ville de Superman est à mille lieues de celle de Batman, tant et si bien qu'on peine à imaginer que les villes sont presque jumelles, à peine séparées par une baie. Elles donnent l'impression de ne pas être à la même époque, et ne suivent pas les mêmes codes. Diana a toujours trouvé Gotham malsaine, au contraire de Metropolis ; elle est la représentation même de ce que Hippolyte lui contait à propos du monde des Hommes. Un monde sombre, peuplé de criminels, misogyne et au bord du gouffre. Si Diana n'avait connu que Gotham, elle n'aurait jamais essayé de sauver le monde.

Kara est en retard, et Diana sent que Jason s'impatiente. Du mieux qu'elle le peut, elle lui fait la conversation. Elle lui parle de tout, de rien, elle l'occupe ; elle sait qu'il doit mourir d'envie de retourner chez lui. Mais elle, elle n'a pas envie qu'il parte, elle veut réussir à lui changer les idées. Et comme Diana se sent d'humeur optimiste, elle se dit qu'elle parviendra peut-être à lui arracher un sourire avant la fin de la journée. « Elle ne devrait plus tarder, elle a certainement été retenue... Dans les transports. » Naturellement, Jason ignore que Kara est Supergirl, et elle n'est même pas certaine que Kara soit au courant de ce qui était arrivé au second Robin. Ces histoires d'identité secrète ont le don de l'agacer, elle a toujours peu de commettre un impair, de révéler par accident un nom ou un alias. Et peut-être est-elle un peu jalouse, également. Depuis qu'elle a été appointée émissaire de Themyscira, Diana n'a plus le luxe de l'anonymat. On sait qui elle est, on sait d'où elle vient et on surveille ses moindres faits et gestes. Si lorsqu'elle ne porte pas son armure, elle parvient encore à se fondre dans la masse, les regards surpris qu'on lui lance parfois en disent long. Son identité ne lui appartient plus, elle est devenue un bien publique et ça a le don de l'agacer. Elle ne s'en plaint pas, jamais, mais elle regrette souvent de ne plus pouvoir être juste, et simplement, Diana. Ni Princesse Diana, ni Wonder Woman, juste Diana.

Sans rien laisser paraître de son inquiétude, Diana jette un coup d'œil à sa montre. Ce n'est pas dans les habitudes de Kara d'être en retard ; les Kent sont du genre ponctuels, alors elle doit forcément avoir une excellente raison... Elle entend des bruits de pas pressés et sourit lorsqu'elle aperçoit enfin la silhouette de Supergirl dans la foule de passants. Elle s'excuse pour le retard, et Diana lui sourit en secouant la tête. « Ne t'en fais pas, je me suis doutée que tu avais eu un... Empêchement. » Kara remarque Jason, à la limite d'être prostré dans un coin, et rougit vivement, ce qui amuse Diana – c'est à croire que tous les Kryptoniens ont hérité d'une timidité maladive. « Kara, Jason. Jason, Kara. Je t'ai envoyé un message pour te prévenir que je venais avec un... » Hm. Diana prend le temps de la réflexion. « Ami. Mais je suppose que tu ne l'as pas reçu ? » Ou qu'elle n'avait pas eu le temps de faire attention à son téléphone. Diana hausse les épaules, ce n'est pas important. « Je pense que le mobilier de ce magasin devrait te plaire. Nous ferons livrer ce que tu auras choisi chez toi en début d'après-midi, et je nous ai réservé une table dans un excellent restaurant pour déjeuner. » Diana ne fait pas les choses à moitié. Elle a envie de faire plaisir à Kara, et elle sait bien que Jason ne sort pas souvent. D'un geste, elle invite Kara à entrer en premier dans le magasin, et avant d'entrer à son tour, elle lance un regard qu'elle veut rassurant à Jason. Elle est là pour lui, toujours.

Kara, Diana & Jason

Métropolis et toute sa lumière. Ces gens qui lèvent la tête, qui n'ont pas un air renfrogné quand ils marchent. Ces symboles de Superman. Ces hauts buildings modernes. Toi qui est habitué à la noirceur de Gotham, tu ne t'y sens jamais très à l'aise. C'est un autre monde. Un monde auquel tu n'appartiens pas. Tu marches en tenu de civil, l'apparence d'un homme comme les autres. Les silhouettes que tu croises ignorent toutes qu'un bourreau se cache derrière les prunelles ambrés du jeune adulte qui croise leur chemin. Quand Diana t'a proposé de passer une journée shopping avec elle et Kara, ta première réaction a été de refuser. Catégoriquement. Qu'est-ce que tu irais faire au milieu de deux filles qui font les magasins ? Non. Hors de question. Tu préfères encore les fous d'Arkham. Puis au fil de la conversation, elle est parvenue à te convaincre. Sortir, voir du monde, te changer les idées. Toutes ces choses que tu ne fais presque jamais. Tu ne vois pas l'utilité de faire des rencontres, puisque tu ne te présenterais pas tel que tu es vraiment. Ça serait hypocrite. Mentir sur ton passé, sur ce qui tu es, autant rester chez soi. Mais le pouvoir d'une femme peut être immense. Elle a insisté, et toi t'as cédé. Pour lui faire plaisir, premièrement. Puis pour tenter l’expérience. Une pointe de curiosité. Tu marches vers la boutique de mobiliers, les rayons qui reflètent contre les vitres des magasins et t'aveuglent partiellement te font déjà presque regretter ton choix. Aussi peu convaincu sois-tu de la tournure de la journée, tu esquisses un sourire quand tu aperçois Diana. Elle a l'air heureuse de te retrouver. Comme si elle voyait une victoire en ta présence. Qu'elle se félicitait d'être parvenue à faire sortir de sa grotte Jason – l'ours mal léché – Todd. Tu accueilles son enlacement avec beaucoup de naturel, mais fut un temps où tu aurais été mal à l'aise. Le contact physique a longtemps été une épreuve à surmonter. Où tu ne supportais pas que quelqu'un pose sa main sur toi. Séquelles d'une vie passée.

Adossé contre le mur et les bras croisés, tu commences à t'impatienter. Tu écoutes avec attention chaque mot que prononce la belle amazone, mais dans ton esprit, une seule question t'obsède : qu'est-ce que cette Kara peut bien faire pour avoir une heure de retard ? Tu tentes de cacher ton agacement, pour ne pas faire payer à Diana les erreurs de sa super copine, mais c'est plus compliqué que tu ne le voudrais. Tu as rarement autant consulté la montre à ton poignet. Faut dire que tu n'es pas particulièrement doué pour faire preuve de patience. « Pour avoir autant de retard, elle a plutôt intérêt à débarquer sur un traineau tiré par cinq caniches, dont trois sont mourants. »  Mais c'est bien sur deux jambes qu'elle débarque quelques minutes plus tard. Tu l'observes, dans ton coin, et te rapproches seulement au moment des présentations. Tu fais preuve de bonne volonté en lui adressant un sourire plus ou moins forcé. Pour le moment, tu ne peux pas faire mieux, il te faut un temps d'adaptation. C'est déjà assez dur de te faire à l'idée que les heures qui vont suivre vont consister à choisir quelle étagère va mieux avec la couleur des murs du salon. « Salut. » Derrière sa jovialité très apparente, tu décèles beaucoup de timidité. Elle ne s'attendait pas du tout à ce que Diana vienne accompagnée et ta présence provoque chez elle un léger moment de flottement. Tu peux la comprendre. Elle s'imaginait passer une aprem entre filles. Et toi, t'aurais vraiment aimé qu'elles passent une aprem entre filles.

Tu les suis à l'intérieur du magasin, et pose ton regard sur un peu tout ce qui se trouve à l'intérieur. Il y a beaucoup de mobilier. Vraiment beaucoup. Ça va prendre des heures et des heures avant qu'elle  se décide. Tu les laisses donc commencer leur quête du saint graal – et les laisser discuter du pourquoi du comment de ta présence, probablement –  tandis que tu prends tes aises sur le premier canapé confortable que tu trouves. Mais c'était sans compter sur emmerdeur numéro un de la matinée. Cinq minutes que t'es ici. Cinq minutes. « Monsieur, je vais vous demander de vous lever s'il vous plait. » Tu lèves la tête vers lui, le regard à la fois incompréhensif et dédaigneux. « C'est un canapé, c'est fait pour s'assoir. » « Oui mais vous n'êtes pas dans votre salon, vous êtes dans un magasin mobilier. » Tu hésites subitement entre lui écraser le crane contre le meuble télé ou l'étouffer dans le gros pouf vert d'à côté. « Avant d'acheter un canapé, il faut bien l'essayer, non ? » Qu'il n'essaie pas d'avoir le dernier mot avec toi, il n'y arrivera pas. « Mais vous, monsieur, vous êtes affalé dessus. Et je ne sens aucune intention d'acheter quoi que ce soit. » Ta mâchoire se crispe, tes dents se serrent. Cet homme te teste. Il teste tes limites. « Très bien. » Dans un effort surhumain, tu renonces à cette joute verbale. Promis, tu ne feras pas d'histoire aujourd'hui. Tu vas te comporter comme quelqu'un de normal. Tu ne vas pas frapper cet homme. Tu vas essayer, en tout cas. C'est accompagné d'un long soupire agacé que te lèves. « Voilà. Je vous rends votre canapé où il est interdit de s'assoir. » Quand tu rejoins les deux filles, leur enthousiasme contraste fortement avec le tien. « Je déteste ce magasin. » Voilà, c'est dit.

Quand Diana regarde Jason, elle a presque l'impression de voir un poisson sorti de son bocal. Il est évident qu'il n'est pas dans son élément, cette petite séance de shopping doit s'apparenter à de la torture pour lui. Diana n'a même pas le temps de lui dire de faire un effort – ni même de tenir le coup – que déjà Kara l'attrape par la main pour l'entraîner dans une allée du magasin, et Jason se retrouve livré à lui-même, entre deux canapés design. L'Amazone esquisse un sourire lorsque, inévitablement, la Kryptonienne commence à l'interroger. « C'est... Le fils d'un ami. » Sans doute détesterait-il l'entendre parler de Bruce comme de son père, mais Diana voit mal comment présenter Jason autrement, sans révéler son identité secrète. « J'ai sans doute oublié de te parler de lui, et puis, tu sais bien que je préfère t'écouter. » Elle sourit ; Kara sait être une véritable pipelette, mais Diana ne s'en plaint pas. Au contraire, cela lui évite à devoir parler d'elle-même, ce qu'elle n'aime pas faire. Elle étudie une jolie lampe de chevet, avant de hausser les épaules avec une désinvolture feinte. « Ça a son charme. Et puis, ça ne laisse pas tout le monde indifférent... » Si Jason les entendait, il se dépêcherait de fuir pour retourner à Gotham. Heureusement pour elles, la seule à avoir une super-ouïe est déjà dans la conversation. Kara n'est pas habituée à fréquenter les hommes comme Jason, elle est trop... Trop... Trop comme Clark, à graviter autour des personnes qui transpirent l'optimisme et la joie de vivre. Forcément, c'est comme un choc des cultures. « Tu sais, si certains clichés sont si populaires, c'est pour une bonne raison... » Diana affiche un petit sourire en coin, elle ricane doucement. Les bras croisés sous sa poitrine, elle fronce les sourcils et lance un regard par dessus son épaule pour retrouver Jason. La remarque de Kara la fait soupirer, elle hausse les épaules. « Ne sois pas trop dure avec lui. Ce n'est pas de sa faute. Il a perdu ses parents quand il était très jeune et l'homme qui l'a élevé... Disons qu'il a raté beaucoup de choses. » Loués soient les dieux, Bruce n'est pas là pour l'entendre parler de lui et de ce qu'il faisait avec ses enfants, faute de quoi c'était l'incident diplomatique assuré.

Jason réapparaît à leurs côtés, et c'est tout juste si Diana parvient à se retenir d'éclater de rire. Le contraste entre l'expression exaspérée du jeune homme et celle, à la limite de l'effroi, de la Kryptonienne est somptueux. Elle ne sait pas lequel des deux elle torture le plus, avec cette sortie, mais elle craint la catastrophe avant qu'ils n'arrivent au restaurant. Elle acquiesce doucement quand Kara leur fait savoir qu'elle a besoin de se renseigner pour une armoire, et s'éloigne pour aller retrouver un vendeur. « Donc... Ce canapé... Il était confortable, au moins ? » Diana observe Jason avec un sourire aux lèvres, de toute évidence amusée par la situation. Elle n'a pas l'intention de lui faire une leçon de morale, elle ne veut pas risquer de le faire fuir. « Kara est très... Enjouée, comme personne, mais je te promets qu'on s'y fait vite. » Au moins, le contraste avec les criminels de Gotham est là. Diana se doute que c'est justement ce changement radical d'environnement que Jason a dû mal à avaler, mais il faut bien commencer quelque part. Il ne pourra pas rester éternellement dans les ténèbres de Gotham, elles finiront par l'avaler. « Metropolis n'est pas Gotham. Détends-toi. » Plus facile à dire qu'à faire, elle le sait bien. Kara ne tarde pas à les rejoindre, les joues écarlates, et Diana se demande ce qu'elle a bien pu dire au vendeur pour se mettre dans un tel état. Tout de même, il n'aurait pas essayé de la séduire ? Diana lui lance un regard noir, au cas où. « Hm ? Oh, non, je crois que j'ai tout ce qu'il me faut chez moi. La décoration est récente, tu sais... » Depuis qu'ils sont entrés dans le magasin, elle n'a regardé les articles proposés que d'un œil distrait. Elle est trop occupée à s'assurer que Kara trouve tout ce qu'elle désire... Et à empêcher Jason de tuer quelqu'un avec un pied de lampe. Diana jette un coup d’œil à sa montre – midi pile. « Attendez-moi là, j'en ai pour une minute. » Elle leur adresse un sourire encourageant et se dirige d'un pas assuré jusqu'à la caisse. Le vendeur qui conversait avec Kara a encore l'air blême ; par Héra, qu'a-t-elle bien pu lui dire ?

Un instant plus tard, Diana revient vers Jason et Kara – ils sont encore en vie et entiers, elle soupire de soulagement. « Le tout sera livré chez toi vers 14h30. Ça nous laisse largement le temps d'aller au restaurant. J'espère que vous aimez les sushis ? » Kara, elle en est à peu près certaine. Jason.. Elle se demande encore s'il prend la peine de se nourrir correctement. Diana prend les devants et se dirige vers la sortie du magasin, et ils retrouvent les rues bondées de Metropolis. Elle s'est stratégiquement placée auprès de Jason pour lui éviter les contacts inopportuns avec la foule, et continue à faire la conversation à une Kara plus joviale que jamais – si on lui avait dit qu'acheter un canapé faisait autant d'effet, elle s'y serait prise bien plus tôt. Elle a l'impression que le soleil lui écorche la rétine, alors elle sort une paire de lunettes de soleil de son sac et les enfile, et pendant une seconde, elle a l'impression d'être Clark. Il a raison, quand il lui dit que personne ne fait attention à vous quand vous portez des vêtements normaux, et enfilez une paire de lunettes. Juste une seconde. Parce qu'elle entend des pneus crisser, et des passants s'écrier. Elle se retourne, et comprend très vite qu'un conducteur a perdu le contrôle de son véhicule. Elle soupire, presque lasse. Évidemment, c'était trop beau. Sans se presser, elle retire ses escarpins, ses lunettes, range le tout dans son sac, qu'elle fourre sans ménagement dans les bras de Jason. « Tiens-moi ça. » En un bond, elle est au milieu de la route, et face à une voiture lancée à pleine vitesse, elle se contente de lever le bras. Contre sa paume, le métal se tord, grince et cède. Diana, elle, maîtrise sa force pour ne pas plier complètement le véhicule et recule sur quelques pas avant de l'immobiliser complètement. Derrière le pare-brise, un homme, les yeux écarquillés. L'Amazone se redresse, poings sur les hanches. « Il va falloir songer à changer vos freins. C'est dangereux. » Comme si de rien n'était, elle se frotte les mains de la poussière du capot, et retourne auprès de Kara et Jason. Elle récupère ses chaussures, ses lunettes et son sac, pas le moins du monde perturbée. Elle voit bien une adolescente prendre une photo avec son téléphone, mais peu importe. D'un geste, elle désigne le restaurant, au bout de la rue. « Je meurs de faim, pas vous ? »

Kara, Diana & Jason

Tu vois Kara te sourire, mais tu doutes que ta présence l'enchante. Tes manières encore moins. T'es l'élément perturbateur de leur journée, celui qui n'était pas prévu dans l'équation et qui en plus se permet d'exprimer ouvertement sa mauvaise humeur. Enfin, non, pas mauvaise humeur. Juste une légère irritabilité déclenchée par tous ces idiots qui t'entourent. Si les gens n'étaient pas aussi insupportables, peut être que tu serais plus enclin à t'ouvrir à eux. Là où tu es surpris, c'est que Kara n'entre pas du tout dans cette catégorie. Tu sens qu'elle n'est pas comme eux. Elle dégage une joie de vivre contagieuse. C'est pour ça que tu lui rends inconsciemment son sourire. Le sien était peut être une façon de couvrir l'agacement que tu provoques chez elle, mais toi, tu souris parce que t'apprécie sa présence sans pouvoir l'expliquer. Comme si elle exerçait sur toi une positivité nouvelle. Un peu de lumière dans ton obscurité. Tu l'as jugé trop vite, comme tu le fais souvent, et avant même qu'elle ne s'éclipse pour te laisser seul avec Diana, tu prends la décision de cesser tes mauvaises habitudes. Tu croises les bras contre ton torse et observe ton amie qui n'a pas l'air de t'en vouloir. Elle commence à s'y habituer. Elle sait comment tu es en temps normal, mais loin de ta grise Gotham, c'est d'autant pire. « J'ai pas eu le temps d'apprécier, on est rapidement venu m'emmerder. » Tu grimaces légèrement, conscient que tes propos sont plus que limites. Mais sur le coup, tu n'as pas trouvé mieux. Il t'a profondément agacé. Et si tu n'étais pas accompagné, il aurait été fortement probable que tu lui passes l'envie de te prendre de haut. Tu n'as pas peur de t'attirer des ennuis. Au contraire, t'as cette fâcheuse tendance de les provoquer. Amusé par cette façon qu'a Diana de te parler de Kara, tu relâche ta colère. Comme si c'était important pour elle que vous vous entendiez bien. Et cette simple constatation provoque chez toi un étrange bien être.  « Elle a l'air sympa. » Tu ne sais pas quoi dire de plus sans aller dans le mensonge. T'es pas certain que vous pourriez devenir les meilleurs amis du monde, mais ça pourrait finir par coller. Un jour. Elle semble patiente, et c'est une qualité fondamentale pour prétendre à une place dans tes fréquentations régulières. Il en faut beaucoup pour supporter tes sombres penchants.

Quoi ? Comment ça dans une minute ? Ton visage change aussitôt d'expression, et tu manques presque de la retenir d'un geste quand tu la vois partir. Kara est de retour. C'est beaucoup trop tôt. Pas que sa présence te dérange, mais t'es pas encore prêt à passer un moment seul avec elle. Tu te racles la gorge. T'obliges à lui faire face. Tu ne sais pas quoi lui dire. C'est un peu gênant. Puis soudain, tu te souviens l'avoir vu s'énerver contre le vendeur de tout à l'heure. Tu te rattrapes à ça comme à des branches dans un arbre que tu serais en train de dévaler à toute vitesse. Faire des efforts, tu dois faire des efforts !  « Il t'a embêté  ? Faut me le dire si c'est le cas. J'irai lui casser quelques dents. » C'est une entrée en matière comme une autre, non ? Et c'est tout sourire, presque fier, que tu lui dévoiles au grand jour tes tendances agressives. En vérité, tu ne vois pas le problème. Si tu dis ça, c'est uniquement pour lui rendre service. En tant qu'amie de Diana, ça ne te poserait aucun souci d'aller tabasser quelqu'un pour elle. Mais c'est bizarre, t'as pas l'impression d'avoir détendu l'atmosphère. Les secondes s'écoulent lentement. Et c'est avec un soulagement non feint que tu accueilles le retour de Diana. « Les sushis c'est parfait ! » La vérité, c'est que tu accepterais n'importe quoi pour quitter ce magasin.

Retrouver la foule de Métropolis ne t’enchante pas particulièrement, mais au moins vous êtes à nouveau tous les trois. Tes pas ordinairement très rapides se calent sur le rythme de tes deux partenaires. « C'est toujours autant ensoleillé ici ? » Question qui peut paraître stupide, mais quand on sait que Gotham se trouve à seulement quelques kilomètres d'ici, elle finit par prendre tout son sens. La différence entre les deux métropoles t'étonnera toujours. Tu ne l'avoueras pas, mais c'est finalement pas si mal de changer d'environnement. La seule chose qui reste constant, ici ou à Gotham, c'est le besoin des habitants d'être chaperonné. Tu entends la voiture avant de la voir, et c'est sans surprise que Diana se prépare déjà à régler l'incident avec une efficacité redoutable. C'est à toi que revient la tâche de garder ses affaires. A nouveau seul avec Kara. Mais cette fois, c'est beaucoup moins dérangeant, et tu parviens même à entamer une discussion plus ou moins normale. « Et toi, tu fais quoi dans la vie ? Comment tu as connu Diana ? » Bien sûr, tout ça est loin d'être innocent. Tu la regardes avec attention, cherchant à percer le mystère de leur relation. Elles sont proches, très proches, tu te demandes ce qui peut autant les rapprocher. « J'ai l'impression de t'avoir déjà vu quelque part. » Mais impossible de te rappeler où. Peut être que cela te reviendra plus tard dans la journée.

C'est déroutant, cette façon qu'elle a de gérer les problèmes et de retrouver dans la seconde son identité civil comme si rien ne venait de se passer. « Bien sûr ! Si un autre idiot ne vient pas perturber notre emploi du temps, peut être qu'on va pouvoir aller manger. » Tu lui rends ses affaires avant de reprendre la route. Si tu dois faire en sorte que tout se passe bien, t'apprécierais qu'ils ne débarquent pas tous avec leur lot d'ennuis. Une voiture folle par ci, un chien dans une bouche d'égout par là, que de superficialité dans cette ville. Ce n'est rien comparé à Gotham, où le crime rôde jour et nuit sans le moindre répit. Qu'ils se demmerdent avec leurs ptits bobos du quotidien. Quelques rues plus loin, vous trouvez le restaurant japonais où Diana a réservé, et tu les laisses pénétrer à l'intérieur avant de prendre place à ton tour à la table. « Le montage des meubles est inclus dans le service livraison ? » Redoutant déjà la réponse, tu caches ton visage derrière la carte que la serveuse vient de vous apporter. Diana n'aurait pas osé te tendre un guet-apens, … si ?  

Les problèmes des habitants de Metropolis sont ridicules comparés à ceux de Gotham. Quand Luthor ne fomente pas une catastrophe, et que des extraterrestres ne tentent pas de l'envahir, la ville du futur baigne dans une atmosphère joviale, il y fait bon vivre. Le contraste avec Gotham, pourtant juste de l'autre côté de la baie, est saisissant. Jason n'a pas l'air dans son élément, tout comme Kara ferait tache dans sa ville. Diana, elle, a appris à s'adapter aux deux mondes. Mais c'est à Metropolis qu'elle a choisi de s'installer, elle n'aurait pas supporté la noirceur de Gotham au quotidien. Elle a déjà du mal à se retenir d'intervenir trop souvent, et pourtant... Il suffirait que Clark et elle – ou même Kara – ne décident qu'il en est assez, et Gotham pourrait être nettoyée de ses criminels en quelques jours. Mais c'est la ville de Bruce, et il a été clair avec eux : il n'a pas besoin d'aide. Seulement, quand Diana songe au Joker, à ce qu'il a fait à Jason, à Barbara, et à des centaines d'autres, elle voit rouge. La Ligue a adopté une politique stricte concernant le meurtre... Mais certains ne méritaient aucune pitié. Cette dernière ne profite à personne, sinon aux assassins. On reproche souvent à Diana son point de vue sur la chose ; on l'accuse d'avoir une mentalité dépassée. Elle, estime que c'est eux qui se laissent aveugler par un code moral qui risque de leur coûter beaucoup un jour. Sans être cruelle gratuitement, Diana sait que certaines causes sont perdues d'avance, et qu'il ne sert à rien de donner une seconde, une troisième, une quatrième chance à des êtres qui ne les méritent pas. Elle s'est bien gardée d'inculquer son point de vue à Kara lors de son passage à Themyscira, par respect pour Clark.

Ils arrivent au restaurant sans que Diana n'ait eu à secourir un chat dans un arbre ou quoi que ce soit d'autre, loués soient les dieux. Elle adresse un sourire à Jason qui leur tient la porte – en parfait gentleman, comme le fait si bien remarquer Kara – et donne son nom pour leur réservation. Elle fait mine de ne pas remarquer que le serveur qui les installe l'observe des pieds à la tête, et prend place à la table. Diana est la seule à savoir que Supergirl, Red Hood et Wonder Woman sont assis à la même table d'un restaurant japonais, et c'est tout juste si elle parvient à s'empêcher de rire en imaginant la tête qu'ils feraient tous les deux s'ils savaient. On leur apporte les menus, et Diana commence à observer le sien, avant de relever la tête lorsque Jason les interroge sur le service de livraison des meubles de Kara. Cette dernière lui répond en premier, et Diana préfère enchaîner immédiatement, avant que le visage de Jason ne change de couleur. « Enfin, tu n'es absolument pas obligé de venir nous aider si tu n'en as pas envie. Monter un canapé, ça ne doit pas être si difficile que ça. » Le canapé, et le reste... Diana n'avait jamais lu un manuel d'instructions de toute sa vie, mais elle doutait que ce soit plus compliqué que de monter un temple grec. « Et puis dans le pire des cas, je suis sûre que le voisin de Kara sera ravi de nous donner un coup de main... Comment est-ce qu'il s'appelle, déjà ? John, c'est ça ? » Oh, qu'elle est vile... Elle fait mine de se replonger dans son menu, mais elle observe Kara et Jason du coin de l'œil, curieuse de voir leurs réactions. Ce n'était pas tous les jours que Diana peut se permettre d'être légère et taquine, alors elle en profite, un peu aux dépends de ceux qui l'accompagnent.

Le serveur revient et ils passent leur commande, et Diana en profite pour prendre une bouteille de vin blanc, puisque cela se marie à merveille avec le poisson. Et puis, Kara et elles sont insensibles aux effets de l'alcool, et elle sait que ce ne sont pas un ou deux verres de vins qui mettront à mal Jason. « Pour en revenir à ton appartement... C'est bon, tu as tout ce qu'il te faut ? Quand je me suis installée ici, j'ai eu l'impression d'oublier un millier de choses, je n'avais pas l'habitude, heureusement que Clark était là pour m'aider... On ne peut pas dire que le mobilier soit très moderne, à Themyscira. » Elle adresse un petit sourire à Kara, qui verra très bien ce qu'elle venir, puisqu'elle a passé six mois en compagnie des Amazones, un privilège offert à peu de personnes. Ses sœurs se sont toutes prises d'affection pour la jeune Kryptonienne, et même Hippolyte. « Enfin, au moins, nos meubles n'ont pas besoin d'être changés régulièrement... Je crois que certains de nos temples ont plus d'une dizaine de millénaires... » Elle réalise qu'elle-même peine à comprendre une telle mesure de temps. « Tout ça pour dire que ce ne sont pas un canapé, un lit et quelques armoires qui viendront à bout de nous. » Tous les trois faisaient face au pire en permanence, il serait idiot qu'ils soient vaincus par quelques vis. Le serveur revient avec leurs assiettes, et Diana doit bien avouer que les plats ont l'air absolument délicieux. Entre ses baguettes, elles attrape un morceau de gingembre, et les mots dépassent la pensée. « Vous croyez que c'est vraiment aphrodisiaque, le gingembre ? » Avec un air faussement innocent, elle regarde Jason droit dans les yeux, et fait mine de se ré-intéresser à ses sushis. « J'en oublie mes bonnes manières. Bon appétit. »

Kara, Diana & Jason

Tu ne t'attendais pas à une réponse passionnante en questionnant Kara sur ce qu'elle fait dans la vie, mais ses études en sociologie et astrophysique vont bien au-delà de ce qui caractérise l'ennui. Une étudiante. Son quotidien ne doit pas être rythmé par des journées trépidantes. Cours, devoirs et dodo, voilà ce à quoi, selon toi, se résume la vie de Kara. Quand tu infiltrais les réseaux criminels pour apprendre des plus grands gangsters, elle planchait sur son examen. Quand tu t'entretenais secrètement avec Talia Al Ghul sur l'avenir du monde, elle organisait la prochaine soirée étudiante. Ou pire, se contentait seulement d'y participer. Tu hausses les épaules, presque involontairement méprisant. Elle est très gentille cette fille, tu ne peux pas dire le contraire, mais vous venez de deux mondes différents. Vous ne pourrez jamais discuter tous les deux autour d'une bière, parce que vous n'aurez tout simplement rien à vous dire. Tu ne peux pas lui dévoiler qui tu es, et très franchement, l'entendre parler de ses cours pendant des heures provoquerait chez toi une violente crise d'angoisse. « Oh, euh, comment on s'est rencontré ? » Sa question te prend un peu au dépourvu, parce qu'il est impossible que tu admettes la vérité. Batman, Robin, rien ne doit être dévoilé. Tu vas devoir concocter quelque chose de très évasif, un juste dosage entre la vérité et ce que tu ne peux pas mentionner. « Je n'ai pas de bons rapports avec l'homme qui m'a recueilli, et Diana a été là. Bien plus qu'il ne l'a jamais été. » Tu grimaces, écoeuré de ne serait-ce que penser à lui. Chaque pensée à son égard te ramène à la douleur qu'il t'a affligé. A ce que tu as ressenti quand Talia t'a montré le journal qui relatait les exploits de Batman et de son nouveau Robin. Quand tu as fait mine de ne pas être atteint, mais qu'à l'intérieur, tout s'est effondré. « On s'est rencontré par son intermédiaire et on est devenu amis. » Un peu plus que des amis, en vérité. Mais ça, elle n'est pas non plus obligée de le savoir.

Il ne te faut pas longtemps pour choisir ce que tu veux manger, puisque tu changes rarement, trop attaché à tes petites habitudes alimentaires, et un peu convaincu par les autres trucs bizarres que proposent les japonais. Pourtant, tu fais mine d'être plongé dans le menu, indécis. Tu veux éviter l'inévitable. Pas naïf, seulement dans le déni. Tu baisses finalement la carte, un sourcil arqué en guise de contestation. Kara semble considérer ton aide comme acquise. Mais elle se trompe. Tes lèvres s'entrouvrent, dans l'idée de faire comprendre aux deux jeunes femmes que tu n'as pas signé pour une journée corvée. T'as fait l'effort de venir, pour faire plaisir à Diana et essayer de te changer les idées, mais monter des meubles ne fait pas pas partie du deal. Hors de question. Tu veux râler, taper du poing sur la table, mais la belle amazone prend la parole avant de t'en donner l'occasion. Parce qu'elle sait ce que tu étais sur le point de dire. « John ? » C'est tout ce que tu parviens à répondre. Qui c'est ce John ? Si elle connait son prénom, c'est qu'elle l'a déjà probablement rencontré et qu'il lui a fait suffisamment bonne impression pour qu'elle se souvienne de lui. Et elle voudrait que ça soit lui qui s'occupe des meubles ? Tu sais pertinemment qu'il n'hésiterait pas une seule seconde à le faire. Parce que soyons honnêtes, qui refuserait quoi que ce soit à deux jolies jeunes filles célibataires dont une est en plus de ça Wonder Woman. Sûrement pas John. « Il est absolument hors de question que ce JOHN vienne monter les meubles. Je peux très bien m'en occuper tout seul. » Touché dans ta fierté, tu ne caches pas bouder un peu. John n'aura pas le plaisir de passer l'après-midi avec vous. « John restera tranquillement chez lui. » Tu marmonnes dans ta barbe de trois jours, ne comptant plus les fois où tu as prononcé son prénom.

C'est pas que tu es d'humeur agressive, mais entre les voisins trop serviables et les serveurs aux regards insistants, on ne te pousse pas à la détente. Tu décroches de leur conversation, bien plus intéressé par le jeune impoli que par les meubles de Kara. Tu ignores s'il ne lâche pas Diana du regard parce qu'elle est Wonder Woman, ou parce qu'il la trouve tout simplement à son goût. Probablement les deux. Et ça commence à t'agacer. Tu gigotes sur ta chaise, avec cette démangeaison intenable de lui passer l'envie de regarder. Quand il arrive avec vos plats, tes iris brûlent de colère et tu ne manques pas de lui lancer le plus menaçant des regards. Il peut s'estimer heureux, parce qu'intérieurement, tu es bien plus violent à son égard. Les sushis sont là, et tu te forces à décrocher de ta nouvelle obsession pour entamer les premières bouchées. En pleine dégustation, la remarque de Diana sur le gingembre manque de peu de t'étouffer. A moins que ça soit ce moment précis où tes yeux ont croisé les siens, lourds de sous entendus. Tu tousses, plusieurs fois, et saisis le verre de vin qui se trouve devant ton assiette pour en boire tout le contenu et faire ainsi passer ta quinte. Faut pas qu'elle te fasse ce genre de trucs, pas devant les gens, tu ne vas pas y survivre. Un peu gêné, tu n'oses regarder aucune des deux femmes. « Pardon, j'ai un grain de riz qui est mal passé ... » Tu sais que Diana ne croira pas en cette excuse. Elle est la seule responsable, et quelque part, tu trouves ça assez excitant, cet interdit, cette crainte d'être pris la main dans le sac. Tu souris, ne manquant pas de rentrer dans le jeu, au détriment de la pauvre Kara qui ne doit pas saisir toutes les subtilités. A moins que ça ne le soit pas du tout, subtil ? « Avec le bon partenaire, pas besoin d'aphrodisiaque ... » Tu portes le verre à tes verres tout en dévisageant la partenaire en question. Puis pour tenter de rapidement noyer le poisson, tu t'adresses à Kara : « T'es pas d'accord ? » C'est réellement innocemment que tu te permets de lui demander confirmation. Après tout, le sexe n'est pas un sujet tabou. Et avec ses soirées étudiantes, elle a probablement connu quelques moments de dépravations sans avoir besoin d'un quelconque aphrodisiaque.  

Ce moment de perdition est sans doute le meilleur moment de ta journée, mais tu n'en oublies pas le serveur du fond qui ne cesse toujours pas ses manigances douteuses. Enfin, douteuses pour toi, mais qui ne le sont pas réellement quand on est un jeune adulte. Tu n'en peux plus, la patience au point de non retour, et c'est sans prévenir tes camarades que tu lui fais signe de venir à votre table. Tout sourire, il s'exécute. « Je peux faire quelque chose pour vous ? » C'est toi qui l'a appelé, mais c'est pourtant elles deux qu'il regarde. Le pauvre n’arrange décidément pas son cas. « Oui, en fait, j'aimerais que vous arrêtiez de dévisager comme vous le faites. Depuis tout à l'heure je vous observe et vous ne détournez le regard qu'en cas de plats à apporter à vos clients. Sinon vous êtes adossé au comptoir et face à nous. Il ne vous manque que la bave aux coins des lèvres. C'est très impoli, et mon amie aimerait manger en paix, sans qu'un homme les hormones en feu ne viennent perturber son repas. J'ai été assez clair ? » « Euh … oui … très clair. » « Bien. Vous pouvez apporter la carte des desserts s'il vous plait. » Tu lui adresses un sourire forcé et le regarde partir avant de reporter ton attention sur Diana et Kara. Tu devines dans leur regard qu'elle ne s'attendait pas à une telle réaction de ta part. « Pardon. »

Le plus grand ennemi de l'homme ? Son ego. Diana se doute bien qu'en parlant innocemment de John, elle va piquer Jason dans sa fierté, et lui donnait envie de monter les meubles de Kara, ne serait-ce que par défi. Ça ne manque pas, le voisin de la jeune femme est vite remis à sa place et Jason embarqué dans un après-midi bricolage. Et Diana est soulagée de savoir qu'il ne restera pas seul chez lui à broyer du noir en attendant que la nuit tombe. Elle se doute que l'exercice sera un peu fastidieux – elle imagine déjà Jason maudire tout le panthéon si par malheur il manque une vis – mais elle est satisfaite, et personnellement ravie de pouvoir passer du temps avec lui et Kara sans qu'aucun de leurs alter-ego ne viennent tout gâcher. Du moins, elle l'espère, sachant qu'ils ne sont pas à l'abri d'une catastrophe qu'il faudrait gérer en urgence. Ce ne serait pas la première fois qu'elle devrait tout abandonner pour revêtir son armure et aller sauver des innocents et se charger de criminels. « De toute façon, s'il te manque quelque chose, nous pourrons toujours y retourner, ce n'est pas très loin. » Le magasin de meubles et décorations est bien plus près que Themyscira. Pourtant, Diana n'a pas hésité à ramener des biens de son île pour personnaliser son appartement, et casser un peu son mal du pays. Une statuette de marbre par ci, une amphore par là... Les touches d'art antique ne manquent pas chez l'Amazone, qui se moque bien d'avoir fait de son appartement une véritable galerie. « Le temple de Perséphone ? Je crois que mes sœurs sont toujours en train de le reconstruire après le... L'incident. » Par Héra, ce que cela peut être agaçant de devoir faire attention à chacune de ses paroles pour ne pas risquer de dévoiler l'identité de l'un ou de l'autre. C'est un jeu dangereux, et Diana craint de finir par commettre un impair gênant pour eux.

Alors elle change de sujet, brusquement, et sans trop réfléchir. Les réactions ne se font pas attendre, Kara recrache son sushi et Jason manque de s'étouffer. Grossière erreur ? Peut-être bien, mais puisqu'elle a déjà mis les deux pieds dans le plat, elle ne lâche pas Jason du regard, elle est curieuse d'entendre sa réponse. Le bon partenaire... Elle sourit, amusée par leur petit jeu, avant de faire la grimace lorsque Jason demande son avis à Kara. Oh. Voilà une question qu'il aurait mieux fait de ne pas poser, Diana voir le rouge lui monter aux joues, et elle se mord la lèvre, navrée d'avoir involontairement mis son amie dans l'embarras. Très vite, Diana se ré-intéresse à son vin et son assiette, dans l'espoir de noyer le poisson, et permettre à Kara de se remettre de ses émotions. Elle ne relève pas tout de suite le regard lorsque Jason interpelle le serveur, jusqu'à ce qu'elle entende ce qu'il a à lui dire. Diana se fige, baguettes entre les doigts ses yeux font des aller-retours entre le serveur et Jason, Jason et le serveur. Elle reste interdite, silencieuse, jusqu'à ce que l'homme disparaisse, les joues en feu. Elle n'a pas le temps d'ouvrir la bouche que déjà Kara s'empresse de défendre le serveur, et quand elle disparaît aux toilettes, Diana repose ses baguettes sur le coin de son assiette. Elle aurait pu être en colère. Elle aurait dû être en colère. Un autre que Jason, elle l'aurait sèchement remis à sa place, arguant qu'elle – l'Amazone – n'avait besoin de personne pour la défendre, et certainement pas un homme. Mais au lieu d'être furieuse, elle est troublée. Peut-être même touchée par la démarche. « Tu n'étais pas... Tu n'étais pas obligé de faire ça. J'ai l'habitude. J'ai appris à ignorer ce genre de regard, sinon je passerais mon temps à remettre les hommes comme lui à leur place. » Elle hausse les épaules. « Ce serait une perte de temps, et leur accorder une attention qu'ils ne méritent pas. » Contrairement à Kara, Diana savait que ça n'avait rien à voir avec de la curiosité innocente, ce que Jason avait bien remarqué. « Merci, je suppose. » Elle espère que Kara est trop occupée à répondre à Billy pour remarquer que son rythme cardiaque s'est légèrement emballé.

Diana se retrouver à observer une carte des desserts qui ne lui dit rien du tout, et finit par se contenter d'un thé à la menthe. Elle ne relève pas le nez de sa tasse lorsque Kara fait ses excuses à Jason, elle se garde bien d'ouvrir la bouche avant que la Kryptonienne ne leur fasse une proposition inattendue. « Oh, tu parles du Midnight Club ? J'en ai entendu parler... » Et par là, elle veut dire qu'elle a déjà refusé une dizaine d'invitations. « Il faudrait que je passe chez moi pour me changer, mais je viendrai avec toi avec plaisir. Ça fait une éternité que je n'ai pas mis les pieds dans ce genre d'établissement, alors pourquoi pas ! » Diana doit bien avouer qu'elle a pris goût à cette habitude purement humaine de faire la fête jusqu'au bout de la nuit, avec de la musique assourdissante et l'alcool qui coule à flot. De toute façon, l'alcool ne lui faisant aucun effet, elle ne risque rien du tout – et Kara non plus. Elle avale une gorgée de thé et interroge Jason du regard. Et lui, alors ? Elle ne serait pas surprise qu'il refuse ; après tout il a déjà des nuits bien remplies, et sans nul doute que ce genre d'activité doit lui paraître n'être qu'une perte de temps. Mais juste au cas où, Diana tente une nouvelle ruse. « Ce serait l'occasion de mettre enfin l'ensemble que j'ai acheté la dernière fois que nous avons fait les magasins. Tu sais, le blanc un peu échancré... Ou peut-être cette petite robe rouge, celle que tu trouvais si jolie... » Un seul mot : cruauté.

Kara, Diana & Jason

Le sexe n'a jamais été un sujet tabou pour toi. Mais tu viens de réaliser que parfois, il peut susciter le malaise. Pour une fois, tout partait d'une bonne intention, tu voulais vraiment intégrer Kara à votre petit jeu tendancieux. Ce que tu as déclenché a eu l'effet d'une avalanche, heurtant la jeune femme d'une façon que tu n'aurais pu imaginer. Deux heures c'est bien trop peu pour connaître une personne. Les erreurs sont fréquentes, autorisées, même. Mais toi c'est au-delà de l'erreur, c'est avoir mis le doigt sur un point sensible. Le dessert qui te faisait envie n'est plus du tout appétissant. T'es gêné, en colère contre toi même. Tu poses ton regard sur Kara, et ce que tu y lis est tout sauf réjouissant. Ce n'est pas son manque d'expérience qui te frappe ou te choque, c'est la solitude qui en découle. Tu ne l'avais pas remarqué jusqu'à présent, mais maintenant ça te saute violemment aux yeux, cette tristesse que tu décèles dans son regard. Il est bien trop tôt pour que tu en deviner l'origine, ou que tu prétendes savoir ce qu'elle ressent, mais tu éprouves de l'empathie pour ce sentiment de vide qui l'anime. Elle s'excuse, tu baisses la tête. Tu ne sais pas quoi dire. En vérité, t'es probablement la dernière personne qu'elle a envie d'entendre. Tu ne réfléchis pas aux conséquences de tes mots ou de tes actes. Ce n'est pas une évidence entre vous, mais pour rien au monde tu ne souhaitais l'atteindre, de près ou de loin. T'as envie de t'excuser, y a rien qui sort de ta gorge. Paralysé par la culpabilité, rongé par ce faux pas que tu regrettes amèrement. Elle voulait simplement passer une journée avec son amie, et au lieu de lui changer les idées, tu ne manques pas d'appuyer là où la cicatrice n'a pas encore fait son œuvre.

Après le départ du serveur que tu viens d'incendier pour apaiser tes nerfs trop à vifs, c'est Kara qui est la première à réagir à ton comportement. Tu la regardes, le visage fermé, dépourvu de toute émotion. Pourtant, à l'intérieur de ton être, c'est un feu d'artifices de sentiments contradictoires et tous terriblement désagréables. L'impression de ne pas être à la hauteur. Tu ne te sens plus à ta place. Tu sens bien que Kara te voit comme une brute sans tact, un homme avec qui elle ne pourra jamais avoir d'affinités. T'es pas celui qu'elle aurait aimé que tu sois. Pas de ceux qu'on affectionne aisément. Et ça te touche, profondément. Parce que dans cette façon qu'elle a de te parler, une image de toi même t'est renvoyée en plein visage. Tu l'aimes pas cette image, t'aimerais qu'elle disparaisse. Mais la lutte contre soi-même est éprouvante et difficile à remporter. A chaque fois qu'elle s'adresse à toi, tu réalises que la bataille est loin d'être gagnée, et que tu ne seras peut-être jamais quelqu'un de stable. Quelqu'un de normal. Elle se lève, tu ne bronches toujours pas. « Je sais. » Tu tentes d'adresser un sourire à Diana, mais tu redoutes trop la suite pour qu'il soit vraiment sincère. Elle va forcément te reprocher quelque chose elle aussi. D'être trop agressif. Trop impulsif. Trop tout. Mais ce n'est pas du tout ce qu'elle fait. Tu t'adoucis, un peu surpris par la tournure de la conversation. « Je sais que tu n'as pas besoin de moi pour quoi que ce soit, mais j'ai pas pu m'en empêcher. C'était un manque de respect, et j'aime pas ça. Surtout quand ça te concerne. » Cette fois ton sourire est véritable. Diana n'est pas le genre de femmes qu'on protège ou qui ont besoin de l'être, ça, tu l'as parfaitement compris. Mais tu n'es pas plus le genre d'homme qui tolèrent les comportements déviants. Le fait qu'elle soit la personne la plus forte que tu connaisses ne justifie aucunement que tu autorises des serveurs incorrects à la regarder de cette façon sans broncher. Ta main saisit doucement celle de Diana dans un geste spontané. Tu lui souris tout en caressant sa peau du bout des doigts. « De rien. » Bref instant d'intimité auquel tu mets fin quand Kara sort des toilettes.

Tu te racles la gorge, ne sachant toujours pas quoi lui dire. T'aimerais te rattraper, mais par où commencer ? Tu commandes deux boules de glaces, une à la fraise et l'autre au chocolat, revigoré par ton échange avec Diana. Puis vient l'inattendu. Elle est désolée … ? Tu manques à nouveau de t'étouffer, et tu finis ton verre avant de poser ton regard sombre sur Kara. T'apprécies, réellement. Tu sais à quel point ces mots peuvent être difficile à dire. « Et je n'aurais pas dû me comporter comme je l'ai fait. Désolé. Ça ne se reproduira pas. » Tu fais une promesse à demi-mot que tu ne pourras peut-être pas tenir, mais tu essaieras, c'est certain. Plus de crises déplacées, plus de moments de malaise. « Une boite ? » Très bien, d'accord, elle veut te tester, pas vrai ? « Une boite. » Tu te parles à toi-même, comme pour être certain que tu as bien saisi ce qu'elle propose, pris complètement au dépourvu par cette suggestion. Pendant quelques secondes, tu t'imagines au milieu d'une salle remplie d'hommes dix fois pire que le serveur et un frisson d'horreur te parcoure l'échine. Tu ne vas pas survivre à ça. Tu ne vois pas par quel miracle tu pourrais en sortir sans en avoir au moins massacré un. Tu regardes Diana qui vient d'accepter la proposition, et attend que tu donnes ta  réponse. Ce n'est pas dans ce genre d'endroits que tu as pour habitude de passer tes nuits. Et tu te sens coupable de le faire. Ton activité est très lucrative une fois la nuit tombée, et tu ne peux pas t'empêcher de penser que quelque part, quelqu'un aura forcément besoin de toi. Quelqu'un pour qui tu ne seras pas là si tu fais le choix d'aller en boite avec Diana et Kara. Tu hésites, tiraillé par la raison et ton envie de retrouver aussi des moments simples du quotidien. « L'ensemble blanc échancré et la petite robe rouge ? Je m'en souviens très bien. C'est ce que tu comptes mettre ce soir ? » Ton souffle se coupe, tu es tiraillé entre l'envie de la voir dans une tenue sexy, et horrifié de partager ce privilège avec d'autres. Mais tu ne peux rien dire. Déjà parce que tu n'en as pas le droit, et parce que Kara devinerait tout de suite la nature de votre relation. Si ce n'est pas déjà fait. Quel choix te reste t-il ? « Je viens, pas de soucis. » Merveilleux. Le repas terminé, tu te lèves et laisse tomber négligemment quelques billets sur la table. Parce que tu refuses que Diana règle elle seule la facture. Tu l'observes aller jusqu'au guichet pour payer le reste, te retrouvant à nouveau seul avec Kara. Cette fois, tu sais ce que t'as envie de lui dire. Mais t'as peur de le faire. Parce que tu ne veux pas que ça fasse trop bizarre. Ou trop déplacé. « Tu sais que tu ne seras jamais vraiment seule, pas vrai ? » C'est un peu trop tard, mais tu n'as pas encore oublié son visage de tout à l'heure. Tes mots sont maladroits, et peut être qu'elle ne comprendra pas pourquoi soudainement tu viens à lui dire ça, mais t'en as eu envie. Parce que c'est terrible, la solitude. Tu l'as bien trop connu. Tu détournes les yeux et souris à Diana quand elle revient. « Alors, il est où cet appartement ? J'ai des meubles qui m'attendent. » T'es enthousiaste, vraiment.

Diana a bien l'intention de profiter sans vergogne de cette journée, et ce jusqu'à la fin. Elle ne prend que trop rarement le temps de penser à elle, de faire autre chose que sauver le monde. Sans doute parce qu'elle sait que où qu'elle aille, on ne la laissera jamais tranquille. Miss Prince par ci, Wonder Woman par là... Elle aimerait pouvoir faire comme Clark, mettre une paire de lunettes et enfiler une chemise trop grande pour elle, et disparaître. Elle ne le pourra jamais, c'est le prix à payer pour vouloir préserver l'humanité. Mais elle ne peut tout simplement pas refuser la proposition de Kara. Elle a besoin de se changer les idées, de se défouler autrement qu'en se servant de ses poings. Et Diana veut que Jason fasse de même, qu'il oublie les criminels de Gotham rien qu'une nuit. Il y en aura encore demain, et le jour d'après. Mais cette occasion ne se représentera peut-être pas de si tôt. Alors elle met son grain de sel, elle le tente délibérément. S'il refuse, elle ne se vexera pas, mais elle se dit que cela vaut la peine d'essayer. Diana fait mine de ne pas remarquer son air troublé, et termine son thé un sourire accrochés aux lèvres. Il vient. Elle se retient difficilement d'afficher une expression victorieuse. « Je suis allée quelques fois en soirée, avec Hawkgirl et la première Wonder Girl. C'était... Intéressant. Et un peu douloureux pour la gent masculine. » Pour sa défense et celle de ses amies, elle détestait qu'on la touche sans son autorisation, ou qu'on la traite comme un objet de consommation, le tout sans se soucier de ce son ressenti émotionnel. Voilà pourquoi Diana a tant de mal à laisser un homme l'approcher ; si elle n'est pas certaine d'être respectée et considérée à sa juste valeur – c'est à dire comme son égale – elle préfère s'abstenir.

Malgré ses protestations, l'addition est partagée. Diana affiche une mine boudeuse lorsqu'elle se lève pour aller régler une partie de la note au comptoir, et elle remarque que le serveur n'ose même plus la regarder. Bien, peut-être aura-t-il retenu la leçon et l'appliquera-t-il aux autres femmes qui croiseront sa route. Quand elle revient, elle voit presque aussitôt le regard  brillant de Kara, et elle fronce les sourcils. Elle n'ose pas lui demander ce qui ne va pas en présence de Jason, mais elle le fera dès que l'occasion se présentera. Elle sait combien il est facile de heurter la sensibilité de Kara, elle même a mis un moment à se faire à la douceur presque naïve de Kara, à croire que les El partageaient tous le même caractère. Quand on voit Clark et Kara, on ne peut pas se douter que ce sont eux les grands héros de Metropolis, les invulnérables Kryptoniens. Et pourtant, Diana sait que Kara est dotée d'une force presque inégalée, qu'elle est capable de soulever des tonnes d'acier et déplacer des montagnes. Si Jason s'en doutait... Ils ne tardent pas à rejoindre l'immeuble dans lequel vit Kara, et les livreurs sont déjà là avec leurs cartons. Il y en a plus que Diana ne l'aurait cru, mais avec un peu de chance l'exercice ne sera pas trop laborieux. « Je suis vraiment ravie que cet appartement te plaise. C'est tellement difficile de trouver un tel endroit à Metropolis, tout le monde se bat pour avoir une telle vue... » Kara a eu de la chance – peut-être parce que Diana a glissé un mot à l'agence immobilière. Elle mérite le meilleur, un endroit où elle pourra se sentir chez elle, et à l'aise. Diana est bien placée pour savoir ce que c'est que d'avoir le mal du pays, même si elle a la chance de pouvoir retourner à Themyscira lorsque le manque se fait trop ressentir.

Diana retire sa veste et ses escarpins, et commence à s'intéresser aux différents cartons posés un peu partout dans le salon, le plus grand étant évidemment celui du canapé. Elle sourit à Kara quand elle lui tend une bouteille de soda, et acquiesce à ses paroles. Évidemment, cela irait beaucoup plus vite sans Jason, mais il n'était pas obligé de le savoir. C'est plus fort qu'elle, Diana manque de s'étouffer avec sa gorgée de coca et éclate de rire quand elle entend le terme "super mâle". Elle en a les larmes aux yeux, celle là, elle ne s'y était pas attendue. « Oh, par Héra, Kara je vais te voler cette expression et la ressortir à Superman, juste pour voir sa tête. » Elle voyait déjà Clark s'empourprer jusqu'aux oreilles, et cette vision était hilarante pour l'Amazone. Diana s'éclaircit la gorge et attrape le manuel que les livreurs ont laissé et l'étudie un instant, sourcils haussés. Peut-être la tâche serait-elle un peu plus ardue que prévue... Elle est redoutable avec une épée, les armes à feu n'ont pas de secret pour Jason et Kara peut faire le tour du monde en quelques secondes, mais... Monter des meubles ? C'est une activité tellement banale qu'elle se demande si, finalement, ils seront à la hauteur. « Si on perd une seule vis, c'est fichu. » Elle tend le manuel à Jason, et s'approche du carton pour l'ouvrir. « Bon, la bonne nouvelle, c'est que tous les éléments sont dans des sachets séparés. » La mauvaise, c'est qu'il va falloir trouver comment les assembler sans se tromper, faute de quoi il faudrait recommencer. Elle lance un regard à Jason, amusée. « Bon courage... Super mâle. » Leur petit jeu est de moins en moins discret, il faudrait que Kara soit aveugle – comme Clark, en fin de compte – pour ne rien saisir du tout.

Le regard de l'Amazone s'attarde sur tous les cartons qui demeurent à ouvrir et en choisit un au hasard. La table basse. Bien, rien qui de trop compliqué... Du moins, elle l'espère. Elle s'assoit en tailleur sur le carrelage et ouvre le carton, et s'attaque aussitôt à la lecture des instructions. « Tout bien réfléchi, je crois que je préférerais encore affronter Doomsday. Au moins, je saurais à quoi m'attendre. Ou bien Cheetah. Ça fait un moment qu'elle n'a pas cherché à m'étriper, c'est louche. »  Diana hausse les épaules et s'attaque à la table basse, très concentrée sur sa tâche. Elle suit les instructions à la lettre, et s'efforce de ne pas grogner de frustration lorsqu'elle ne comprend pas le sens d'un schéma. Elle qui pensait que ce serait plus aisé que de construire un temple à Themyscira, elle est surprise. Elle manque de sursauter lorsque son téléphone sonne, elle se relève et va récupérer son sac en évitant de marcher au milieu des pièces éparpillées du canapé et autres meubles, et décroche. Son expression désenchante radicalement lorsqu'elle entend la voix au bout du fil. « Non, je n'ai pas vu les informations. Je ne suis pas chez moi aujourd'hui. » Elle s'assoit à côté de Jason, son corps tendu par un agacement tu. « Je suppose que ces manifestations anti méta-humains étaient à prévoir, est-ce vraiment la peine de réunir la Ligue pour en discuter ? Je... Nous en reparlerons plus tard, je suis vraiment occupée. Demande donc aux autres fondateurs ce qu'ils en pensent. Personnellement, je pense que nous avons plus urgent à régler. » Elle lève les yeux au ciel. « Oui, à plus tard. » Diana raccroche et jette négligemment le téléphone dans son sac. « Désolée. Je pensais que les chauve-souris dormaient le jour, de toute évidence je me suis trompée... Peu importe. La Ligue devra se passer de moi aujourd'hui. »

Kara, Diana & Jason

Quand tu entres dans l'appartement, tu es surpris par sa clarté. Les grandes vitres laissent pénétrer les rayons du soleil et rendent très agréable l'intérieur de la pièce. On ne se sent pas étouffé ou pris au piège, comme c'est souvent le cas quand tu te pénètres pour la première fois chez les autres. Chez Diana aussi tu te sens bien. Peut être est-ce l'architecture de Métropolis, ces baies vitrées qui donnent sur une vue incroyable de la ville. Ce n'est pas confiné et gris comme à Gotham. De la chaleur se dégage de cet appartement, malgré le vide qui l'y habite. En vérité, tu trouves qu'il correspond bien à Kara. Il est à son image. Lumineux et chaleureux. Les bras croisés, tu inspectes du regard les moindres recoins. Pas par curiosité, mais parce que ça t'intéresse vraiment de connaître son lieu de vie. « C'est très sympa ici. » C'est peu, mais sincère. Venant de toi c'est déjà énorme. Tu n'as pas pour habitude de complimenter les intérieurs des gens. Tu n'as pas pour habitude de compliment quoi ou qui que ce soit. Tu la remercies d'un sourire quand elle te tend la canette de Coca, que tu ne tardes pas à porter à tes lèvres, assoiffé rien qu'en pensant à l'après-midi qui t'attend. Les meubles sont là. Le champ de bataille est immense et les adversaires nombreux. Trois ne sera pas de trop pour en venir à bout. Tu n'as pas réalisé tout à l'heure dans le magasin qu'elle avait acheté autant. Mais la tâche n'est pas insurmontable. Intense et ardue, ça oui, mais tu comptes bien y venir à bout. Et sans l'aide de John. Tu ôtes ta veste en cuir, que tu poses sur le plan de travail, retrousses tes manches, et commence à déballer le carton du canapé. Super mâle … ? Tu relèves aussitôt la tête, happé par cette appellation inattendue. La surprise se lit aisément sur les traits de ton visage. Tu ne sais comment réagir, partagé entre la fierté et la gêne. Tu n'as pas pour habitude d'être qualifié dans des termes aussi plaisants. Ton quotidien est plutôt rythmé par des 'je vais te trouer la peau fils de pute' ou des 'espèce de sale merdeux, tu sais pas à qui tu t'en prends'. Mots doux proférés par toute la racaille de Gotham. Mais tu ne te voiles pas la face, si elle avait le moindre doute sur ta double identité, c'est plutôt d'un coup de pied dans le derrière qu'elle t'aurait gratifié. Ce qui est certain, c'est que Kara possède un don particulier pour motiver ses troupes. Ton regard alterne entre les deux femmes, souriant à la jolie blonde tout en bombant exagérément le torse. « Hé ! Pourquoi tu rigoles ?! » C'est presque vexant, mais ayant trouvé un semblant de bonne humeur, tu te contentes de lui adresser un regard lubrique. Puis l'air faussement menaçant, tu la montres du doigt : « Ne t'avise même pas de l'appeler comme ça. C'est moi super mâle. Il ne peut pas y en avoir deux. » Tu attrapes le manuel qu'elle te tend et tente d'y déchiffrer les schémas dans un haussement de sourcils peu convaincu. Bon, très bien, va falloir s'y mettre. Tu places les premières pièces à tes pieds avant de t'assoir sur le sol. On dirait un puzzle, en plus compliqué. Tu ne sais pas trop par où commencer, alors tu suis les instructions à la lettre. Tout devrait bien se passer si tu t'en tiens au manuel. Tu romps ta concentration qu'à la voix de Diana qui s'amuse de ton nouveau surnom, le regard lourd de sous entendus. Tu te mords doucement la lèvre inférieure, pour contenir ce que tu retiens depuis tout à l'heure, une envie de plus en plus irrépressible de l'embrasser.

Tu es complètement dévoué à la tâche. T'autorisant seulement quelques gorgées de ton Coca. Le canapé avance bien, même vite. Une fois que tu as compris le mécanisme, tu reproduis tout machinalement sans avoir à zieuter toutes les cinq secondes le manuel d'instructions. Bruce a toujours apprécié ça chez toi, cette faculté à apprendre rapidement et à reproduire facilement tout ce qu'il t'inculquait. Tu n'as peut être pas de super pouvoirs, mais tu compenses avec d'autres talents qui font de toi un être à part malgré tout. Tu ne pourrais pas t'opposer à Doomsday et Cheetah sans mordre la poussière comme Diana, mais ce canapé tout neuf ne te résiste pas. La sonnerie du téléphone vient troubler ton rythme, et c'est d'un froncement de sourcils sévère que tu accueilles son interlocuteur. Interlocuteur qui t'est familier. Tu es au courant de toutes ces manifestations, mais tu ne t'en es jamais préoccupé. Parce que ce n'est pas ton combat. Tu perçois l'agacement de Diana, son envie de couper court à une conversation qui semble durer trop longtemps, et ces sentiments elle te les transmet sans même le vouloir. T'aimerais que cette journée se déroule normalement, sans conflit à régler ou fuite impromptue. Tu t'impatientes mais tu attends qu'elle ait raccroché pour intervenir. « La Ligue peut attendre, pas cette table basse. » Tu rigoles à moitié, sans cacher ton mépris envers ton ancien mentor. Tu n'as pas compris l'intérêt de la convier à leur petite réunion au sommet. Encore moins pour un cas que tu trouves presque sans intérêt. Ces gens finiront par se lasser. Probablement une fois qu'il faudra sauver leur peau une énième fois. « C'est coriace ces bestioles, de jour comme de nuit elles viennent t'emmerder. » Tu réalises soudain que tu n'es pas seul avec elle, et que Kara ignore tout de ton passé avec Batman. Tu grimaces un peu, espérant que tes remarques passeront pour une énième crise de nerfs. Après tout, il n'y aurait rien d'étonnant à ça. Un peu perturbé par l'intervention de Bruce, tu préfères t'éclipser subtilement une fois le canapé complètement terminé. « Voilà pour celui-ci. Je vais monter le lit directement dans la chambre. » Tu te lèves et emporte le carton avec toi jusque dans la nouvelle pièce. T'espères que ton échappée ne soulèvera pas des questions. De toute façon, tu te doutes qu'elles doivent avoir bien d'autres sujets de conversations que ta petite personne et ses états d'âmes bizarres.

Il sait que tu es en vie. Tu as joué au chat et à la souris avec lui. Tu l'as regardé tomber, échouer. Tu l'as vu désemparé. Ta mort l'a perturbé. Ton retour l'a brisé. Tu ne lui as pas encore dit tout ce que tu ressentais. Tu préfères prendre ton temps et concocter une confrontation dont il se souviendra longtemps. A la hauteur de son abandon. Plongé dans tes sombres pensées, tu en oublies presque la présence des filles dans la pièce d'à côté. Tes mains s'agitent à une vitesse folle. Tu ne te rends pas  compte à quel point monter le lit exorcise ta colère. Tes doigts sont rougis à force de visser, frapper, assembler toutes ces planches. Mais ça te fait du bien. Et quand enfin tu en viens à bout, que tu poses le matelas pour finir ton œuvre, tu laisses au fond du carton tes idées tourmentées. Bruce n'a pas sa place dans cette journée. Tu te presses de retrouver Diana et Kara, fier d'avoir terminé. « Les filles, le lit est monté, je propose qu'on aille directement le tester ! » Sourire aux lèvres, tu les invites à te rejoindre dans la chambre, avant de t'allonger de tout ton long sur le lit. « Il est cool ce matelas. » Tu gigotes un peu, teste sa dureté et sa faculté à épouser tes formes. Comme un expert en literie que tu n'es absolument pas. Voyant qu'elles se contentent de t'observer, tu les invites à faire de même. « Venez essayer ! Y a de la place pour tout le monde ! Faut quand même qu'on profite un peu de ce qu'on monte. »

Pour une fois, rien qu'une fois, Diana ne veut pas se soucier de la Ligue, des méta-humains ou de quoi que ce soit d'autre. Elle ne veut pas être Wonder Woman, elle ne veut pas être la Princesse de Themyscira, elle veut juste être Diana. Elle a besoin de ce moment de détente, besoin d'échapper à ses responsabilités pour une poignée d'heures. Diana n'a pas le luxe d'une identité secrète, alors elle fait ce qu'elle peut pour s'accorder quelques moments de répit, bien trop rares à ses yeux. Ce ne sont pas quelques manifestations qui la feront prendre les armes aujourd'hui, et si la situation dégénère, elle laissera le soin à Superman de gérer les débordements. De toute façon, Metropolis est sa ville, et Clark est toujours le premier au front. Elle aurait préféré que Bruce se garde de venir perturber leur après-midi, d'autant plus qu'elle capte immédiatement l'agacement dans le regard et les paroles de Jason. Le sujet n'est pas tabou, mais il est délicat. Elle grimace, navrée de le sentir troublé, et soupire longuement lorsqu'il disparaît dans la chambre de Kara avec le carton du lit. Elle ne va pas le rejoindre, elle va le laisser exorciser sa colère sur le meuble, pendant qu'elles s'occupent du reste. « Non, les gens protestent encore dans le calme. C'est Metropolis, je doute que les choses dégénèrent... Ils ont trop peur de voir Clark débarquer. C'était à prévoir, je ne vois pas de quoi Bruce se soucie. Depuis l'assassinat du Président, c'est la panique. Il y eu d'autres marches à Central City, une importante à Washington... Je ne m'en fais pas, les choses vont vite retomber. Sans doute quand les gens réaliseront qu'ils ont encore besoin d'être sauvés. » Diana hausse les épaules. Contrairement à certains, elle ne fait pas attention à ce genre de choses. Elle sait très bien que la peur engendre la colère, et ne blâme pas ceux qui manifestent. À leur place, sans doute craindrait-elle pour sa vie, elle aussi. « Pour le moment, je pense que nous ferions mieux de nous abstenir de mettre notre grain de sel dans ces histoires... Tous autant que nous sommes. Laissons les autorités gérer les civils, effaçons-nous pour le moment. On aura besoin de nous bien assez tôt, je n'en doute pas une seule seconde. » Il y a toujours pire, toujours plus grande menace. La victoire de la Ligue sur Darkseid avait marqué les esprits et calmé certains criminels, mais ça n'a hélas pas duré. C'est un éternel recommencement, un cercle vicieux.

Diana sourit et se lève quand Kara lui tend les bras. L'Amazone enlace la Kryptonienne étroitement, glisse une main dans ses cheveux avec une tendresse sororelle. Diana s'était prise d'affection pour l'orpheline presque à la seconde où elle avait posé les yeux sur elle. Elle avait été touchée par la douceur qui se dégageait d'elle, mais aussi par la tristesse refoulée qu'elle traînait derrière elle comme un boulet. En l'accueillant chez elle, sur Themyscira, Diana avait espéré lui offrir une famille davantage qu'un entraînement digne de ce nom. Elle avait insisté auprès de ses sœurs pour qu'elles traitent Kara comme leur égale, au point qu'Hippolyte elle même avait fini par succomber au charme de la jeune femme. Diana ne s'était jamais fait d'illusions, jamais elle ne pourrait remplacer ce que Kara avait perdu, mais elle pouvait faire en sorte qu'elle se sente à l'aise sur Terre, dans sa nouvelle vie. Elle est devenue comme une sœur pour la jolie blonde, une aînée ayant tendance à la surprotéger et à montrer les crocs à quiconque aurait l'audace de s'en prendre à elle. Diana manque de retenue lorsqu'il s'agit de protéger les siens, mais peu lui importe. « Je t'en prie, tu n'as pas à me remercier. Rien ne me fait plus plaisir que te voir heureuse. Tu mérites le meilleur Kara. Et je suis là pour m'assurer que tu l'obtiennes. » Elle pose ses mains sur les épaules de Kara et les presse avec affection. Elle est fière, l'Amazone. Fière de la femme que devient Kara, fière de sa capacité à voir le bon en chacun et chaque chose – une qualité qui lui fait cruellement défaut. « Tu es ma sœur, Kara. Je t'aime plus que tu ne peux l'imaginer. » Elle voit bien les larmes qui font briller ses yeux, mais ne le lui fait pas remarquer. La sensibilité de Kara est attachante, presque déroutante. Elle acquiesce à ses paroles en jetant un regard en direction de sa chambre. Pendant que Jason termine de monter le lit, elles peuvent se permettre d'accélérer le rythme pour s'occuper du salon et de la cuisine. Du moins, Kara le peut. Diana, s'occupe du mobilier de la cuisine, mais elle laissera à Kara le soin de la décoration. L'appartement prend forme, et ressemble de plus en plus à un chez-soi pour la jeune femme.

Un petit rire secoue l'Amazone quand Jason leur propose d'aller essayer le lit qu'il vient de terminer, et laisse Kara l'entraîner à sa suite. Elle se demande s'il fait exprès de s'exprimer avec des phrases pleines de sous-entendus, et remercie les cieux que les Kryptoniens ne soient pas capables de télépathie, faute de quoi Kara ne les aurait même pas laissés passer la porte de son appartement. Elle se laisse tomber sur le matelas en souriant, ravie de partager un moment de joie si simple avec Kara et Jason. Elle se retient difficilement de glisser un bras autour du jeune homme pour l'attirer contre elle et l'embrasser ; heureusement pour elle, Kara détourne son attention avec une photo. Diana se souvient du jour où elle a découvert l'art de la photo. Elle était émerveillée, plus qu'elle ne l'avait jamais été avec n'importe quel sortilège. Steve avait beaucoup ri, ce jour là. « Ne l'écoute pas, il est très bien ton sourire. » Elle donne un petit coup de coude à Jason, avant de se redresser sur le lit et de jeter un coup d'œil à sa montre. « Oh, déjà dix-sept heures. Le Midnight Club ouvre à dix-neuf heures... Je vais repasser chez moi pour me changer, et on se retrouve devant l'entrée ? » Elle se relève et réajuste son chemisier, et d'un regard elle invite Jason à faire de même – elle n'a pas l'intention de le laisser seul avec Kara, elle craint que ce soit un peu trop d'un coup pour eux. « Tu devrais mettre la jolie robe que tu as acheté la dernière fois que nous avons fait les boutiques, elle te sied à merveille. » Diana adresse un sourire encourageant à la jeune femme avant de s'éclipser en emportant Jason avec elle. Elle se doute que Kara sera prête en un clin d’œil, mais peut-être souhaitera-t-elle prendre un peu de temps pour parfaire sa nouvelle décoration.

Diana referme la porte de son appartement derrière Jason, et se débarrasse de sa veste et de ses escarpins dans le salon. « Super mâle... Si elle savait... » Elle ricane, et après une seconde d'hésitation s'autorise à faire ce qui la démange depuis un moment. Elle l'attire contre elle et l'embrasse, un sourire aux lèvres. « Robin. Red Hood. Super mâle... Oui, je crois que c'est mon préféré. » Et il risque de lui coller à la peau. « Bon, il faut que j'aille me changer. L'ensemble, ou la robe ? Je crois que je vais me contenter de la robe... » Diana réfléchit d'un point de vue purement pratique. Elle se dit simplement qu'en cas de problème, elle ne sera pas gênée par des vêtements trop longs qui l'empêcheront de se mouvoir correctement. La robe à laquelle elle songe est à peu près aussi longue – ou courte – que son armure, elle ne la dérangera pas. Autant dire que d'un point de vue masculin, son raisonnement ne se tient pas vraiment. Elle n'a plus rien à cacher à Jason, alors elle abandonne son jean et son chemisier sur un coin de son lit avant d'enfiler la fameuse robe. Diana n'est pas du genre à passer des heures à s'apprêter, elle se contente de ramener ses cheveux en une longue tresse sur le côté, et d'une touche de rouge sur les lèvres. Dans le reflet du miroir de sa chambre, elle capte le regard de Jason, et sourit. « N'y pense même pas... Enfin, pas maintenant. » Ils doivent aller retrouver Kara, et Diana s'en voudrait de ma faire attendre. D'autant plus qu'elle sait qu'il y aura beaucoup d'hommes aux hormones affolées, et que Kara est bien trop jolie pour passer inaperçue.

Il y a déjà foule devant le Midnight Club, et Diana se hausse sur la pointe de ses escarpins pour repérer Kara. « Ah ! Je l'ai trouvée. » Elle attrape la main de Jason et se faufile à travers les jeunes – et moins jeunes – gens qui patientent devant l'entrée. Elle le lâche quand ils arrivent près de Kara, et regarde Kara de la tête au pied. « Tu es parfaite. Peut-être un peu trop, je vais devoir garder un œil sur toi... Ou les deux, plutôt. » Elle lui sourit, rassurante. « On entre ? » Diana voit bien qu'il y a une file d'attente interminable. Mais elle a aussi tout de suite remarqué le regard que lui ont lancé les vigiles postés devant l'entrée. Le même regard que celui du serveur plus tôt, celui, un mélange de reconnaissance et d'envie. « Ne dites pas à Superman que j'ai fait ça... » Elle déteste ce servir de son statut pour obtenir quoi que ce soit, ce n'est pas la femme qu'elle est. Mais pour une fois, elle va faire une exception. Bien droite, fière dans sa robe écarlate et ses escarpins noirs, elle se plante devant les vigiles, et leur offre un charmant sourire. Le genre de sourire irrésistible, qui fait rougir et réveille des papillons dans les entrailles. C'est presque cruel. « Bonsoir... Je ne voudrais pas m'imposer, mais... Il y a peut-être de la place, pour mes amis et moi ? » Ils ne se concertent même pas avant de libérer le passage, comme si elle les avait hypnotisés. Une fois à l'intérieur, Diana hausse les épaules et affiche un air faussement innocent. « Il faut bien que je me serves des enseignements d'Aphrodite de temps en temps. J'espère qu'ils s'en remettront. »

Kara, Diana & Jason

Leur compagnie fait ressortir chez toi quelque chose de plus enfantin, de plus innocent. Des lointains souvenirs de qui tu étais auparavant viennent encombrer ton esprit. Ces jours où tu souriais pour un rien, où tout dans la vie t'apportait satisfaction et amusement. Un gamin qui ne connaissait pas la peur, qui ne souciait de rien d'autres que de profiter de la chance qui lui était donnée. Aujourd'hui tout ça te paraît bien loin. Tu ne te souviens plus de la dernière fois où tu as profité d'un moment comme celui-ci. Terriblement simple mais emprunt de bonheur et de joie. Tu as passé tellement de temps à fréquenter des criminels, des professionnels du meurtre et de l'argent facile, que tu as presque oublié ce qu'on ressent entouré de gens qui comptent vraiment. Pas ceux qui vous apportent quelque chose, ceux qui sont à vos côtés parce qu'ils ont envie de l'être. Quand Diana s'allonge près de toi, c'est ce que tu ressens. Un violent mais grisant sentiment de bien être. Sentir le corps d'une femme qui te plait contre le tien, entendre le rire d'une amie, partager un moment de complicité avec elles, voilà ce qui rend cette journée précieuse. Tu retrouves enfin des morceaux de toi-même que la mort t'avait enlevé, et que le puits n'était pas parvenu à restaurer. Et même si tu continues de jouer au mec arrogant et ronchon, tu vas la faire de gaité de cœur cette photo. « Je sais qu'il est très bien mon sourire, c'est Kara qui manque de goûts. » L'instant est immortalisé à jamais. Et quoi qu'il arrive, il restera ce moment suspendu dans le temps, où pendant une petite seconde, vous avez dévoilé votre vraie visage. Pas de Wonder Woman, pas de Red Hood, juste Diana, Kara et toi, trois jeunes gens normaux qui sourient à ce reflet d'amitié. Tu prends le téléphone de Diana et observe la photo un instant. T'es un peu perturbé, parce que tu ne te reconnais pas là-dessus. C'est toi, mais un toi moins sinistre, presque heureux. Tu ne t'étais même pas rendu compte que tu l'étais à ce point. Et rien que pour ça, tu remercies l'Amazone de t'avoir forcé à l'accompagner.

Tu descends du matelas après l'invitation de Diana à te rejoindre sans cacher ton enthousiasme. Pas de quitter cet appartement, où tu te sens d'ailleurs plutôt à ta place, mais parce que vous allez pouvoir retrouver un peu d'intimité. C'est difficile de contrer des gestes qui se veulent naturels. Ne pas poser une main sur elle, ne pas être trop affectif, ne surtout pas l'embrasser. Compliqué, surtout quand c'est une relation fraiche de la veille et avide de proximité. Tu récupères la veste que tu avais laissé sur plan de travaille, et constate avec plus ou moins de surprise l'état de la pièce. Tout est en place. Les tapis, les meubles, les rideaux, tout. Tu ne fais aucun commentaire. Kara l'ignore peut être, mais tu as été élevé par le plus grand détective du monde, alors ce genre d'indices, tu sais parfaitement les interpréter. Et ce depuis votre rencontre ce matin. Des petits détails que tu as analysé, des phrases déviées au dernier moment, et maintenant ceci. Tu mettrais ta main à couper que le secret de Kara est tout aussi gros que le tien, mais tu t'abstiens de le faire remarquer. Tu ne veux pas provoquer le malaise. Le jour où elle voudra mentionner son autre identité, elle le fera d'elle-même. « La déco rend super bien. Tu vas te plaire ici. » Tu lui souris une dernière fois et quitte l'appartement accompagné de Diana.

Enfin seuls. Et tout ce que t'as envie de faire c'est l'embrasser. Parce que c'était beaucoup trop frustrant tout à l'heure. Cette histoire de gingembre, sur ce lit, tout a été une torture. « Tu sais, je pense qu'elle s'en doute. » Tu as vu ses regards interrogateurs, cette façon qu'elle a eu d'inviter Diana contre toi sur le matelas. C'est presque aussi évident que les pouvoirs qu'elle te cache. Mais là tout de suite, c'est la dernière de tes préoccupations. Tu te rapproches, le sourire aux lèvres, mais elle te devance, n'y tenant vraisemblablement plus non plus. Tu poses tes mains sur sa taille pour la maintenir contre toi, tout en échangeant avec elle ce baiser libérateur. Enfin presque libérateur. T'es gourmand, alors tu te raccroches à ses lèvres à chaque fois qu'elle cherche à s'échapper. Encore un peu. Juste un dernier. Jusqu'à ce que le temps vous presse. Tu te retires à regret, mais le sourire aux lèvres de l'avoir retrouvé. « La robe c'est parfait. » Tu la suis dans sa chambre, ne quittant pas une seule seconde du regard ce qu'elle dévoile en retirant ses vêtements. Ce corps que tu as étreint cette nuit. L'épaule contre la porte, tu peines à seulement te contenter de regarder. Tu jettes alors un rapide coup d'oeil à ta monte, pour évaluer à quel point vous êtes pressés. Parce qu'il serait mentir de prétendre que l'idée de partager un moment intime – et rapide – avec elle dans cette chambre t'a traversé l'esprit. Plusieurs fois. Et c'est vrai que cette robe est magnifique, mais elle serait aussi très belle sans. Diana semble avoir perçu ton envie puisqu'elle ne manque de stopper court à ton petit jeu. Amusé, tu te raccroches à ce qu'elle sous entend pour plus tard. « Je vais prendre mon mal en patience. » La patience est une vertu. Que tu n'as pas.

Quand vous quittez l'appartement pour rejoindre Kara au Midnight Club, tu redoutes un peu la suite des événements. T'es jovial à l'idée de passer cette soirée avec eux, mais tu crains d'avoir du mal à retenir tes coups de colère. La société et toi vous n'êtes pas franchement copains. Encore moins avec les crevards qui trainent en boite. La main de Diana dans la tienne est rassurante, mais tu ne peux pas t'empêcher de dévisager les gens aux alentours, en guise de premier avertissement. Même sans sa double identité, Diana est le genre de femmes qui attirent les regards. Et tu ne peux pas les blâmer pour ça. Mais doublé au fait qu'elle soit Wonder Woman, t'as peur que ça devienne ingérable. Quand vous retrouvez Kara, tu lui souris, presque content de la revoir. « C'est vrai que t'es jolie. » Tu n'oses pas aller plus loin dans le compliment, sachant pertinemment qu'entre celui de Diana et le tien, il y a déjà de fortes chances pour que son teint rougisse expressément. Ce qui ne tarde d'ailleurs pas à se remarquer sur son visage. « Et cette teinte rosée qui tire sur le rouge va bien avec ta robe. » Tu souris de toutes tes dents, en sale gamin impertinent que tu es. C'est vrai que jusqu'à ce que la belle Amazone prenne les choses en mains, tu ne t'étais pas inquiété de la foule et du temps d'attente. Faut dire que tu ne traines pas trop dans ce genre d'endroits. Tu suis machinalement tes deux partenaires jusqu'au videur, observant Diana jouer de ses charmes avec lui. C'est fourbe, mais ça fonctionne. « J'me demande ce qu'Aphrodite t'as appris d'autres. » Tu lui adresses un regard lourd de sens, avant de t’engouffrer à l'intérieur. La chaleur est intense, la musique beaucoup trop forte, tu ne te sens pas très à l'aise au milieu de toute cette foule et tous ces corps qui te bousculent. Ta taille et ta force ne te font pas bouger d'un pouce, mais en revanche, ton sang froid prend de sacrés coups. Le bar, où est le bar ? Il te faut de l'alcool, très vite. Ils commencent à réaliser la présence de l'invitée de marque de ce soir, de plus en plus de regards se faisant insistants. Pris d'une bouffée de chaleur qui annonce une prochaine explosion, tu tires sur le col de ton haut pour te ventiler et prendre des profondes inspirations. « Un verre de whisky, pur s'il vous plait. » La serveuse te ramène rapidement ton verre, accompagné d'un sourire que tu interprètes comme étant une tentative de séduction. Tu t'es tellement préoccupé du regard des hommes sur Diana et Kara, que tu n'as pas fait attention à ceux qu'ont te lancé. Flatté, tu bois ton verre d'une traite avant de rapidement porter ton attention sur les deux femmes. « Du coup, on est censé faire quoi ? Aller danser ? » Tu vois pas trop ce que vous pouvez faire d'autres. Boire ou danser. Tu leurs tends tes deux mains, et les emmène toutes les deux sur la piste. Après ça, elles ne pourront pas dire que tu ne fais pas d'efforts. Tu vas essayer de passer une bonne soirée. Essayer. Mais c'était sans compter sur crevard numéro un. « Les deux sont à toi ou on peut t'en piquer une ? » T'entends son rire, et celui de sa bande de blaireaux juste derrière. Tu pourrais les faire crier avant même qu'ils réalisent que c'est leur bras que t'es en train de briser. Ou en chopper un pour lui fracasser le crane contre un autre. T'hésites longuement, tu les regardes un à un, mais tu ne fais rien. Parce que tu refuses de te faire virer de ce club. Ou pire, de décevoir Kara ou Diana. « C'est à ces demoiselles de décider. » Tout sourire, tu lâches leur main pour les laisser faire face à leurs prétendants. « Alors les filles ? Ça vous dirait de passer la soirée avec gras du bide, monsieur strabisme, blond platine et … et toi celui du fond j'ai même pas de mots. » Ils ignorent sur qui ils sont tombés. Et pour une fois, tu ne seras peut être pas celui qui donnera le premier coup.

À quoi bon sauver le monde si on ne peut pas en profiter ? Peut-être est-ce arrogant de sa part, mais Diana pense qu'elle peut bien user de son statut de temps à autre pour se faciliter la vie, comme par exemple pour éviter une file d'attente interminable. Et puis, elle n'aurait pas supporté être un objet de curiosité très longtemps. Elle déteste sentir le regards s'éterniser sur elle, comme si elle n'était rien de plus qu'une bête curieuse ou un numéro de cirque. Aussi loin qu'elle s'en souvienne, Diana a toujours été au centre de toutes les attentions, et elle n'a jamais aimé ça. Fille d'Hippolyte, princesse de Themyscira, Wonder Woman... Les regards se posent sur elle, l'étudient comme une curiosité. Cette chosification, elle ne la supporte pas plus aujourd'hui qu'il y a mille ans. Elle voudrait pouvoir changer de peau, se laver de toutes ces attentes qu'on lui lance au visage et se débarrasser des poids qu'elle porte sur les épaules. N'être que Diana, c'est plus compliqué qu'elle ne le voudrait, car personne ne lui laisse oublier ses alter-ego. « Hm ? » Kara la tire de ses pensées, Diana bat des cils et voit Jason se diriger vers le bar. « Oh, merci. Ta robe est vraiment parfaite, Kara, tu es magnifique. » Elle lui sourit, puis hausse les épaules. « Ne t'en fais pas pour moi, j'ai appris à ne plus y prêter attention. Ignore-les, ils ne nous empêcheront pas de passer une bonne soirée. » Du moins, Diana l'espère. Avec un peu de chance, on finira par l'oublier complètement. Après tout, l'alcool ne tardera pas à couler à flots, elle détournera les esprits de sa présence. Quant à ceux qui se montreront trop curieux ou entreprenants, elle pourra toujours les remettre à leur place sèchement, comme elle sait si bien le faire. Et c'est sans compter sur Jason, elle plaint d'avance le pauvre imbécile qui aura le malheur d'être désagréable avec Kara et elle. Non pas qu'elles aient besoin d'être surveillées, elles sont plus que capables de se défendre – plus qu'il ne l'imagine en ce qui concerne Kara. Elle se demande quelle tête il ferait, s'il savait que la douce Kara n'était autre que l'invulnérable Supergirl, entraînée par ses soins. Toutes les deux, elles forment un duo redoutable, auquel se sont frottés quelques malheureux qui ne s'en sont toujours pas remis.

Diana saisit bien volontiers la main que Jason lui tend, elle est heureuse de constater qu'il n'a pas l'intention de passer la soirée au bar à broyer du noir. Et puis, danser, c'est une chose que Diana apprécie, qui lui permet de se vider l'esprit. Ou plutôt, ça l'aurait été si un quatuor des plus déplaisants ne les avait pas abordés. Diana est tout de suite piquée au vif par leurs mots. Ils s'adressent à Jason comme si elles lui appartenaient, et que c'était à lui de décider si elles devaient ou non danser avec eux. Mais pour qui et quoi se prennent-ils ? De parfaits exemples de la société patriarcale américaine. Diana serre les poings et fronce les sourcils, elle s'apprête à les envoyer paître quand Jason les remet à leur place et c'est plus fort qu'elle, elle éclate de rire. Les descriptions sont aussi justes qu'humiliantes, parfaites pour toucher leur ego de mâles en rut. Lorsqu'elle sent les doigts de Kara se refermer autour de son bras, l'Amazone soupire longuement. Évidemment, il serait malvenu de leur donner une leçon en plein milieu de la boite, elle en a conscience, quand bien même cela la démange. « Un jeu... ? » Elle croise les bras sous sa poitrine et arque un sourcil. Elle ne voit pas tout de suite où Kara veut en venir, mais quand elle comprend, un sourire malicieux étire ses lèvres. Oh, les malheureux... Comme les affamés qu'ils sont, ils tombent droit dans le piège de la jeune femme, sans se douter que ni l'une, ni l'autre ne ressentiront les effets de l'alcool. Ce sera comme boire de l'eau, elles seront rafraîchies mais pas le moins du monde ivres. Impatiente de les voir perdre leurs moyens, Diana s'assoit au comptoir, entre Jason et le type à la chevelure platine.

Diana avale sa tequila cul-sec, comme elle l'aurait fait avec un verre de jus de fruit, et récupère sa vodka-caramel sans sourciller. C'est presque trop facile, elle aurait presque pitié d'eux. Presque. Elle échange un regard complice avec Kara, trinque avec Jason et la vodka disparaît aussi vite que la tequila. « Si vous voulez nous impressionner, il va falloir faire mieux que ça... » Elle joue volontairement la carte de la provocation, elle veut mettre à mal leur orgueil, les pousser à se ridiculiser. Peut-être que la leçon leur servira à l'avenir, et qu'ils éviteront d'aborder des demoiselles sans aucun respect ni civisme. Les verres s'enchaînent, et les expressions commencent à s'assombrir – commencent-ils à réaliser qu'ils n'ont aucune chance de l'emporter sur les deux jeunes femmes ? Diana s'amuse de les voir avaler l'alcool de moins en moins rapidement, mais ils refusent d'abandonner, probablement motivés par la perspective de passer le reste de la soirée avec elles. Espoir ou bêtise, il y a matière à débat. L'Amazone lance un regard agacé à son voisin platine quand elle sent sa main glisser sur la peau nue de son bras. C'est une mise en garde silencieuse, et il n'y en aura qu'une. Elle se détourne, peu intéressée par sa personne et écœurée par les relents d'alcool et de sueur qui émanent de lui. Mais de toute évidence, le message n'est pas passé. Un frisson de dégoût la traverse lorsqu'il se permet de poser une main sur sa cuisse, comme si sa peau découverte était une invitation. Le réflexe est violent, la colère réelle. Diana se relève et d'un coup et claque le visage de l'homme contre le comptoir du bar tant et si bien qu'il chute de son siège et s'étale au sol, dans une position tout à fait lamentable. « Messieurs, que ce soit bien clair : personne, et je dis bien personne, ne me touche sans mon autorisation. Et cela vaut pour toutes les femmes qui ont le malheur de faire partie de vos petites vies minables. La prochaine fois, je ne serai pas aussi clémente. » L'imbécile est sans doute trop sonné pour le réaliser, mais si Diana l'avait voulu, elle aurait pu lui fracasser le crâne et répandre ce qui lui servait de cervelle sur les dalles de la boite. « Le blondinet est hors-jeu, mais Kara et moi sommes encore parfaitement lucides, peut-être préféreriez-vous abandonner avant de perdre le peu de dignité qu'il vous reste ? » Forcément, il y a un idiot pour secouer la tête. L'Amazone hausse les épaules et reprend place sur le tabouret, et interpelle la serveuse, dont elle remarque le petit sourire. « Whisky pur, s'il vous plaît. »

Amusée, Diana fait tourner son dernier verre entre ses doigts. Il y en a deux par terre, un affalé sur le comptoir, et le dernier s'était précipité aux toilettes. Elles n'avaient même pas eu besoin de leur mettre une raclée, ils s'étaient ridiculisés sans leur aide. « Eh bien, ce fut d'une facilité déconcertante... Leur ego n'est pas prêt de s'en remettre, je crois. J'espère. » Diana rit doucement et pousse le vice jusqu'à commander un dernier cocktail. Elle voit le regard que lui lance le type qui s'accroche au comptoir comme un naufragé à son rocher et lui sourit, moqueuse. Ce qui la fait bien moins rire, en revanche, c'est l'état dans lequel s'est retrouvé Jason. Oh, il s'en sort nettement mieux que les quatre abrutis, mais elle doute qu'il soit en mesure de quitter le club dans un petit coup de main. Diana fait la moue, sincèrement désolée. « C'était peut-être un peu cruel pour lui... », fait-elle remarquer à Kara en quittant son siège. « Je ferais sans doute mieux de le ramener chez m... Lui, il va avoir besoin d'une bonne nuit de sommeil. Et probablement d'un peu d'aspirine. » Diana glisse son bras autour des épaules de Jason, et lui retire des mains le verre auquel il s'accroche. « On rentre... ? »

Kara, Diana & Jason

Ton cœur manque un battement face à la désinvolture de Kara. T'es même plutôt impressionné. Bien qu'un peu inquiet. Elle pense réellement qu'avec son gabarit elle va parvenir à tenir le choc contre ces quatre brutes ? A moins que ça ne soit lié à son mystérieux secret. Qu'importe, tu lui fais suffisamment confiance, tu te doutes bien qu'elle ne risquerait pas de passer une nuit avec eux si elle n'était pas certaine de gagner. Pour Diana, tu ne t'en fais pas. Et même s'ils venaient à l'emporter contre elle – chose qui n'arrivera évidemment pas – tu leur casserais les jambes avant qu'ils puissent poser un seul doigt sur sa peau. Ou les dents. Comme le suggère Kara à qui tu rends son sourire. Il y a une belle coalition entre vous, et des regards suffisent à vous faire comprendre. T'es partant pour le jeu. Quand tu prends place au comptoir, ça t'embête de laisser Diana à côté du blond patine. Dans l'idéal, t'aurais préféré te positionner entre eux et les deux filles. Tant pis, tu te places de sorte d'avoir Diana à ta droite, et Kara à ta gauche. Pour garder un œil sur ce qui se passe autour, au cas où l'un d'eux voudrait jouer au con. Les premiers shots arrivent et tu tiens le bon rythme. Passer tes nuits dans les bars, c'est quelque chose de familier pour toi. Après la mort de tes parents et avant que Bruce ne rentre dans ta vie, t'as écumé les rues de Gotham sans but précis. T'as erré de bars en bars, cherchant la bagarre avec les barmen qui refusaient de te servir de l'alcool. Non, en fait, tu cherchais à te battre avec tout le monde. Parfois ils riaient de toi et passaient leur chemin, parfois tu obtenais ce que tu voulais et te prenais une bonne dérouillée. Dans les deux cas, tu en tirais satisfaction. Les coups, c'est ce qui te faisaient te sortir vivant. Tu te détruisais pour continuer à exister. Tu avais cette horrible sensation de ne plus rien sentir du tout, d'être complètement anesthésié des sentiments. Alors pour te prouver le contraire, tu allais chercher la douleur. La seule chose que tu pouvais encore ressentir. Ce soir, tu n'es plus dans cet état d'esprit, tu bois pour jouer. La vie est un jeu que tu réapprends à apprécier. L'alcool te brûle la gorge, chaque verre t'irrite un peu plus, mais tu continues, parce que ton endurance est bonne, mais surtout parce que ton égo ne te laissera jamais arrêter. Tes pensées commencent à se brouiller, pas assez pour que la main du blond sur le corps de Diana t'échappe. Tu ne dis rien la première fois, mais la seconde te fait perdre le contrôle. Tu te lèves d'un bond, renversant le shooter devant toi, prêt à cogner sans ménagement le pervers écoeurant. « Toi je vais te cass ... » Tu n'as pas le temps de terminer ta phrase, Diana vient tout juste de prendre les choses en mains en lui éclatant le nez contre le comptoir. Bim. Le voir tomber au sol comme un pantin défiguré et désarticulé t'arrache un grand sourire de satisfaction. Heureux, tu te rassois, non sans lui adresser un regard plein de fierté. Comme si elle n'était déjà pas assez sexy.

Un verre. Encore un verre. Beaucoup trop de verres. Tu faiblis dangereusement, mais moins que tes adversaires. Il n'en reste plus qu'un et le défi sera relevé. Whisky, rhum, vodka, tu ne sais même plus ce que t'es en train de boire. Tu portes machinalement chaque shot à tes lèvres pour les ingurgiter cul sec pendant encore une bonne demi-heure. Ils n'ont même plus de goût. Tout commence à tourner autour de toi. Le mur de bouteilles dans le fond dansent sous tes yeux, la voix des filles te paraît bien lointaine. Mais tu continues. Tu ne réalises pas qu'ils sont désormais tous K.O. Il n'y a plus qu'elles et toi. Tu fixes le verre que tu tiens encore entre tes mains, mais sans avoir le courage de le boire. Juste cinq minutes, tu prends juste cinq minutes de pause. Le bras de Diana autour de ton épaule sonne comme une libération. Ça y est, c'est gagné. Vous avez forcément gagné. Épuisé, tu poses ta tête contre elle, enserrant sa taille avec le peu de force qu'il te reste. « Je me sens pas au top de ma forme, mais j-jsuis encore debout ! » Tu peines à articuler, les mots semblent si difficile à prononcer. Tu ne te débats pas quand elle te retire le dernier verre, et tente de te lever sans basculer d'un côté ou de l'autre. Ton regard s'attarde sur les corps presque inanimés des gros lourdeaux, puis sur Kara. Comment est-ce possible ? Elle est toujours debout, aussi fraiche qu'à votre arrivée, comme si l'alcool n'avait absolument aucun effet sur elle. « Kara, c'est quoi ton super-pouvoir ? Je sais que t'en as un. » Tu lui souris, en mec bourré sans filtre que tu es devenu. C'est l'heure de rentrer, mais de rentrer où ? T'espères qu'elle ne va pas te ramener chez toi. C'est quelque chose que t'as vaguement entendu tout à l'heure. Ça et une histoire d'aspirine. Une fois debout avec l'aide précieuse de Diana, tu la regardes le plus sérieusement du monde. « J'ai gagné, donc tu dois passer la nuit avec moi. Mais avec Kara je peux pas. Parce que c'est pas comme ça entre nous. » Tu hausses des épaules, plein de compassion envers ton amie que tu te sens obligé de laisser sur la touche cette fois-ci. Tu parles trop, beaucoup trop, mais tu ne t'en rends pas compte. L'alcool est à son apogée, tu soupçonnes même de n'avoir plus que ça dans le sang. Sur le départ, tu quittes les bras de Diana pour plonger dans ceux de Kara. Tu la serres fort contre toi, en guise d'au-revoir et de remerciement pour cette journée que tu as contre toute attente beaucoup aimé. « Je t'aime bien, c'était cool. » C'est vrai que tu l'aimes bien. C'était plutôt mal partie entre vous, mais finalement, vous êtes parvenus à accepter la présence de l'autre pour aller jusqu'à l'apprécier. T'aimerais bien la revoir, bientôt, pour apprendre à la connaître un peu plus. Tu desserres ton étreinte et lui souris une dernière fois. Tu laisses les deux filles se saluer à leur tour, puis tu te diriges vers la sortie, non sans écraser violemment la main du blond platine encore au sol. Malgré son état végétatif, tu parviens à lui tirer un cri de douleur. « C'est pour avoir osé la toucher tout à l'heure. » Il est bon pour passer une radio demain, t'es certain de lui avoir brisé les os en marchant dessus. Tant mieux, comme ça il y réfléchira à deux fois la prochaine fois avant de toucher une femme qui ne lui en a pas donné le droit.

Tu ignores comment vous êtes arrivés jusqu'à l'appartement de Diana, mais vous y êtes. Pendant qu'elle ouvre la porte, tu poses ton front contre le mur du couloir pour ne pas tomber. Tes vertiges sont insupportables, et tu vas même jusqu'à maudire Kara d'avoir proposé ce jeu idiot. « Je me sens bien, je me sens très bien. Je peux encore tenir le restant de la nuit. » C'est pas elle que tu veux convaincre, c'est toi-même. Tu peux pas passer à côté d'un moment avec elle. T'en as envie depuis ce matin. Tu t'en voudrais terriblement de ne pas réussir à assurer ce soir, mais tu te dois quand même d'essayer. Tu rentres à l'intérieur et commence déjà à retirer ta veste et ton haut pour te retrouver torse nu. Première étape, c'est bon. Tu te rapproches d'elle, ne lui laissant pas d'autres choix, la soulève dans tes bras, et l'embrasse tout en l'amenant sur le canapé. Canapé sur lequel tu l'allonges assez facilement, mais où tu as du mal à faire de même. Ta main s'écrase par terre tandis que tu essayes de retrouver ton équilibre. « Y a ton appartement qui tourne beaucoup trop. Vérifie par la fenêtre si y a pas un monstre géant entre train de te faire une mauvaise blague dehors. » C'est dur, beaucoup trop dur. Tu la laisses se remettre assise, et tu viens aussitôt poser ta tête sur ses genoux, les jambes allongées sur le reste du canapé. « Je prends juste cinq minutes et je suis à toi. » Les cinq minutes tu les prends, mais tu prends aussi les heures qui suivent. C'est avec Morphée que tu vas finir la nuit.

Ce n'était pas de cette façon que Diana avait envisagé leur soirée. Quand elle voit Jason peiner tenir sur ses pieds, elle se sent un peu coupable. Si ce petit jeu s'est avéré très drôle pour remettre à leur place les quatre imbéciles, pour Jason, ça a été comme une punition. Oh, il s'est bien battu, mais elle le soupçonne d'avoir à présent plus d'alcool que de sang dans les veines. Ses effets sur le corps humain sont dévastateurs, elle se félicite une fois de plus d'y être parfaitement insensible et de ne pas avoir à souffrir de la migraine qui suit bien souvent le lendemain. Elle grimace quand il demande à Kara de lui révéler son super-pouvoir. Hm. Elle aurait dû se douter qu'il remarquerait quelque chose, sans doute avait-il été en mesure de tenir sa langue jusqu'à ce que la vodka et sa grande amie tequila ne s'en mêlent. Elle lance un regard navré à la jeune femme, qui heureusement sait comment lui répondre. Encore que, elle aurait pu tout lui avouer, il n'en aurait peut-être aucun souvenir au réveil. Tenant fermement Jason par le bras au cas où ses jambes le trahiraient, elle l'aide à se relever et rit nerveusement quand il lui rappelle les termes du jeu, et surtout le prix remporté, à savoir une nuit en sa compagnie. Au cas où Kara douterait encore de la réelle nature de leur relation, il venait de la lui révéler, bien aidé par l'alcool. « Oui, oui, d'accord... Nous allons déjà commencer par rentrer... » Il est plein d'espoir, mais elle doute qu'il parvienne à assouvir ses envies, tout plein de bonne volonté qu'il puisse être. Jason lui échappe, vacille et échoue dans les bras de Kara. L'image est touchante et arrache un franc sourire à l'Amazone, ravie d'être parvenue à les faire sortir tous les deux de leur zone de confort. Elle enlace étroitement son amie, non sans garder un œil sur Jason, qui ne semble plus tenir debout que par miracle. « Tu es vraiment trop généreuse avec ces imbéciles, Kara... Ta bonté te perdra. » Elle lui sourit, presque déçue de devoir lui dire au revoir. Cette journée a été une parenthèse plus que bienvenue dans son quotidien, et elle espère pouvoir reconduire l'expérience au plus vite.

Diana affiche sourire un peu trop satisfait lorsque Jason écrase la main de l'homme qui a osé la toucher sans son consentement. Le voilà bon pour une belle migraine et une main dans le plâtre... Et l'Amazone n'éprouve pas la moindre compassion à son égard, voilà qui lui apprendrait à traiter les femmes comme de simples objets. Diana passe un bras autour de Jason pour le maintenir debout, c'est tout juste si elle se retient de simplement le porter, comme elle aurait pu le faire sans la moindre difficulté. Mais elle préfère lui épargner ce qu'il percevrait sans doute comme une humiliation, et le laisse croire qu'il arrive seul jusqu'à son appartement. Appuyé contre le mur du couloir pendant qu'elle cherche ses clés dans son sac, Jason tente de se persuader qu'il sera en mesure de rester éveillé tout le reste de la nuit, et Diana se pince les lèvres avant de lui avouer qu'elle en doute fortement. À peine sont-ils entrés qu'il entreprend de retirer ses vêtements, et si l'Amazone salue sa détermination, elle reconnaît un combat perdu d'avance quand elle en voit un. Amusée, elle le laisse pourtant la prendre dans ses bras et l'entraîner jusqu'au canapé en l'embrassant. Impossible ensuite de se retenir de rire quand il rate ce même canapé et se rattrape de justesse en envoyant la main au sol avant de s'y étaler lamentablement. Il faut l'avouer, le tableau est comique. « Désolée, aucun monstre à l'horizon... Je crois que c'est toi, qui tourne. » Dommage. Le pauvre avait l'air si motivé... Amusée et attendrie, Diana se rassoit sur le canapé, et glisse une main dans ses cheveux quand il vient poser sa tête sur ses genoux. Cinq minutes ? Elle fait la moue. « Mhm... » Cinq minutes... Diana table plutôt sur cinq bonnes heures, au minimum. Et tant mieux, il a besoin de repos, et avec un peu de chance son sommeil ne sera pour une fois pas peuplé d'horribles cauchemars.

Le canapé a beau être confortable, Diana se voit très mal y rester assise toute la nuit. L'alcool aidant, Jason dort d'un sommeil lourd, qui lui permet d'échapper à son étreinte sans risquer de le réveiller. Elle va rapidement préparer le lit, et y installe Jason le plus confortablement possible. Elle le débarrasse de ses vêtements qui pourraient l'empêcher de passer une bonne nuit, puis remonte les draps et les couvertures sur lui. Assise à côté de lui, elle l'observe un instant, la paume de sa main contre sa joue. Elle y dépose un baiser avant de se relever, puis elle va rapidement se changer avant de le rejoindre sous les draps. Diana profite du calme retrouvé avant de se blottir contre Jason, son visage contre son épaule et son bras passé autour de sa taille. Un peu trop tard, elle se souvient qu'elle a oublié d'envoyer un message à Kara pour lui dire qu'ils sont bien rentrés, alors elle se promet de le faire dès son réveil, trop bien installée pour avoir envie de bouger. Elle redécouvre la joie d'avoir quelqu'un à ses côtés, pour une poignée d'heures, la solitude s'envole. Diana trouve le sommeil rapidement, apaisée par la présence de Jason à ses côtés.