a kiss with a fist (adopte un mec) | Jason, Diana & Tefé

L'année précédente s'étant parfaitement déroulée, c'est sans hésiter trop longtemps que tu t'es prêté à nouveau au jeu cette année. Bien évidemment exclusivement pour la cause, et non pas pour trouver un amour... que tu possèdes déjà. C'est drôle à quel point les choses peuvent changer en un an, aussi bien pour le pire que pour le meilleur. Le pire, sans surprise, sont ces six mois passés sur New Themyscira, et à ce retour que vous devez à tout un monde sacrifié pour que vous puissiez essayer de faire mieux qu'eux. Le meilleur, en revanche, c'est cette nouvelle main que tu arbores fièrement, entièrement conçue par ton beau-frère. Ta première expérience Adopte était saupoudré d'une aura un peu particulière, celle d'un homme meurtri, blessé et humilié. Une main détruite, une honte d'avoir échoué, et la gêne de te montrer aux yeux des autres amputé d'un membre irrécupérable. C'est en tout cas ainsi que tu le ressentais, comme un horrible échec. Et encore aujourd'hui, tu es profondément reconnaissant envers Diana d'avoir été aussi patiente à ton égard. D'avoir tout fait pour t'aider à remonter la pente quand tu te sentais glisser vers le fond. Elle aura été parfaite, comme toujours. Tefé l'aura été également, réussissant à te faire passer une très agréable journée malgré les mauvais auspices. Une rencontre que tu n'oublieras pas, et un jour, tu le sais, vous retournerez au parc Ophelia. Et c'est précisément en pensant à ces deux femmes que tu pénètres dans un club de Star City pour une initiation au Ju Ji Tsu. Tu sais que tu seras accompagné de deux partenaires ce soir, mais laquelle a un goût prononcé pour les arts martiaux ? Voilà qui devrait déjà vous faire un point commun, toi qui a passé tant d'années à t'entrainer auprès de Batman, au sein de la Ligue des Assassins puis plus récemment chez les Amazones. T'as pas envie de faire le fanfaron, mais tu doutes qu'ils aient beaucoup de choses à t’apprendre sur l'art et la manière de se battre.

Assis à une table, verre de coca bien rempli devant toi, tu observes les combattants se donner en spectacle. Okay, ils se débrouillent plutôt pas mal, et tu serais ravi d'échanger quelques mots avec eux après le combat. Appelons ça une déformation professionnelle. Et alors que tu sens une présence se rapprocher de toi, tu tournes la tête pour découvrir la première arrivée... avant d'exploser de rire toi aussi. « Jy crois pas, c'était toi ? » Très loin d'être déçu, tu adresses un sourire ravi à ton épouse. Tu l'admets sans honte, tu ne t'es pas penché avec minutie sur les candidatures des jeunes femmes, t'as juste essayé de trouver quelques personnalités susceptibles de coller avec la tienne, et t'as fait tes trois choix. Le moins que l'on puisse dire, c'est que t'as eu un bon instinct. « Arrête tu vas nous porter la poisse ! » C'est pas que tu détestes viscéralement Harley Quinn ou Poison Ivy, c'est juste que ce serait quand même vachement bizarre comme ambiance. Tout en sachant pertinemment que tu pourrais très bien tomber sur encore pire. « Tu vas rire, mais l'autre invitée c'est supposé être toi. » Véridique. Tu te souviens de ce profil très particulier – et drôle – qui t'aura assez intrigué pour le mettre de côté. « Une fille a essayé de se faire passer pour toi, attends-toi à rencontrer une fan, je pense. » Mais elle aura quand même eu l’honnêteté de préciser rapidement qu'elle n'était pas la vraie Diana Prince. Pour éviter une déception, sans doute. En toute non-objectivité. « J'ai pas choisi l'endroit, c'est elle. Promis juré, j'ai aucun grabuge de programmé pour ce soir. » Pour la troisième invitée, en revanche, tu ne t'avancerais pas trop. Se faire passer pour Wonder Woman, choisir un club de combat dans une ville pour le moins chaotique, t'es prêt à parier sur un certain goût pour le danger. « Et puis c'est quoi cette façon de dire bonjour ? » Taquin à ton tour, tu te penches vers Diana pour déposer un baiser sur ses lèvres. Au moins, cette année, t'es certain de repartir avec ton rendez-vous.

Enfin, après quelques minutes à théoriser sur la troisième et dernière invitée avec ta femme, tu distingues une silhouette s'approcher de votre table. Une silhouette que tu reconnais très rapidement, et qui te laisse à la fois grandement étonné et grandement heureux. « Putain, Tefé ! » Oups, langage. Mais quelles étaient les chances pour que tu tombes une nouvelle fois sur ta partenaire de l'année dernière ? Elle n'aura vraiment pas apprécié le Blue Lagoon pour choisir un endroit aussi radicalement différent. « J'aurais dû me douter que c'était toi ! » Oui, tu te souviens encore parfaitement de son élan d'enthousiasme à l'arrivée de Diana pour te confier Ophelia. Une fan, tu ne t'étais pas trompé. « Je vous présente pas, vous vous êtes déjà rencontrées l'année dernière. » Et bien, voilà qui devrait boucler la boucle, vous êtes maintenant réunis tous les trois pour une journée qui s'annonce épique.

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Drague à l’humaine, acte II. Cette fois, la cause était belle et elle ne voyait aucun inconvénient à cette levée de fonds. Au-delà de ça il n’y avait pas grand-chose qu’elle puisse faire pour les hôpitaux et les enfants malades. Elle avait vu passer les annonces, elle s’était rappelé qu’elle s’était bien amusée la dernière fois avec Jason et en ce moment, tout était bon pour ne pas s’occuper de ses problèmes. Parce que c’était ça, être une adulte responsable. Fuir. S’inventer une vie qui n’était pas la sienne. Refuser d’aller au-devant de son devoir. Enfin, c’était comme ça qu’elle imaginait les adultes humains, et puis merde, elle n’avait jamais eu de modèle dans la vie. Elle avait envoyé sa candidature en ligne, confiante. Elle n’était pas difficile, et elle ne voyait pas pourquoi en face, l’autre partie aurait dû l’être. C’était pour les enfants malades. Même si depuis sa conversation avec Cain, elle ne pouvait pas s’empêcher de se faire des angoisses du genre « et si je rencontrais ma licorne » ? Et ça, c’était flippant. Si vraiment elle croisait son âme sœur, elle serait forcée de la tuer et de l’enterrer quelque part.

Elle entra dans le club qu’elle avait choisi en ouvrant au hasard dans un vieil annuaire de cabine téléphonique. Elle savait qu’elle ne voulait pas d’un truc romantique où elle casserait forcément la vaisselle et boufferait avec les doigts. Alors, club de ju ji tsu : bruyant, qui sentait la sueur et les larmes, et aussi un peu l’alcool et l’argent.  Elle n’avait aucune idée de ce qu’était le ju ji tsu, en vérité, et elle déambulait en grosses boots de l’armée, jean déchiré et tee-shirt de la tournée 1982 d’Iron Maiden piqué à Mercury des années auparavant. Il y avait un squelette électrifié qui jouait de la guitare dessus et il était tout délavé parce que Mercury s’était vomie dessus un soir de grande biture et qu’elle avait pleuré parce que c’était son préféré et que Tefé l’avait frotté comme une malade dans les toilettes du bar. Ou alors, c’était elle qui avait vomi et pleuré, et Merc qui avait frotté. Bref, il y avait des photos avec des types qui se faisaient des prises, des types qui se tapaient dessus, ça avait l’air violent, ça lui convenait. Si le mec qui se pointait était un con, elle n’aurait même pas besoin d’une excuse pour lui mettre la raclée.

Elle s’approcha des tables et essaya d’aplatir sa tignasse pâle un peu emmêlée et surtout, hérissée de brindilles et de fleurs ici et là. Depuis son retour de Terre IV, elle n’arrivait pas à s’en débarrasser. Elle y voyait le signe qu’elle s’était éloignée de son humanité et rapprochée du Green. Elle se demanda si quelque part, Jason rejoignait une autre timbrée, et s’il allait mieux, et s’il avait une nouvelle main et un nouveau bébé – elle savait de source sûre (wonderwoman/fanaddiction.org) qu’il n’avait pas de nouvelle femme. Elle croisa les bras, puis joignit les mains dans le dos, puis s’appuya sur une jambe dans une attitude un peu agressive, puis se contenta de se planter là comme un poteau, les épaules voûtées et les manches de son tee-shirt trop grand lui tombant sur les coudes. Et là, à la table, l’attendaient

DIANA PRINCE-TODD et « Jason ! » ET DIANA PRINCE-TODD. « Jason ! » ET DIANA « PRINCE-TODD ! »

Elle claquait presque des dents en s’approchant. Elle se cogna dans la table et renversa le verre de Jason. « C’est comme si le destin s’en était mêlé ! Je vais finir par croire que tu es vraiment ma licorne. » Elle se tourna vers Diana, observa ses habits, sa coiffure, son maquillage, son physique, et passa nerveusement les mains sur sa poitrine à la recherche inconsciente de ses melons inexistants. « Bonjour Diana. Vous êtes très en beauté. Euh… Ah, j’ai compris, c’est une erreur, c’est ça ? Tu as choisi ta femme, et moi on m’a pas prévenue ! Je suis une vraie cucurbitacée. » Parce que oui, pour briller en rencard, elle avait appris quelques mots savants. Mais ça n’allait pas lui servir à grand-chose. Elle était sûre qu’elle était de trop.

Ce qui ne la fit pas bouger pour autant. Oooooh, non. Erreur ou pas erreur, elle s’assit telle l’ultime ventouse et les regarda tous les deux, l’un, puis l’autre. Elle aplatit de nouveau une mèche qui se hérissa aussitôt comme une glorieuse insulte. « Du coup puisque je suis là, je vais rester un peu. Ophelia n’est pas là ? » Tout doux, Tefé tout doux. Tu t’en sors bien. La conversation est normale. Puis elle avisa la main de Jason. « T’as récupéré ta main ! Satanerie ! Vous avez échangé Ophelia contre une nouvelle main ? » Elle regardait son héroïne sans y croire. Mais elle savait, cette fois de source plus ou moins sûre, que c’était comme ça que fonctionnait la magie noire. Elle trouvait ça un peu cavalier, quand même. Et juste comme ça, la conversation avait cessé d’être normale, évidemment.

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La rencontre slash retrouvailles commence sur les chapeaux de roue. Un verre renversé que tu tentes toi aussi d'éponger rapidement avant que votre table ne colle de partout, et un enthousiasme exacerbé bien propre à Tefé. Ni plus ni moins ce que tu attendais de ta partenaire officielle d'événements à but lucratifs. Sa licorne ? Soit t'as raté un épisode, soit ta mémoire te fait défaut. Qu'importe, quand il s'agit d'elle, t'a appris à laisser couler quand le sens de ses phrases devient un peu trop compliqué pour ton esprit de simple humain. « J'ai la chance d'avoir deux partenaires. » Mais c'est que tu serais presque vexé, t'as l'impression qu'elle est plus heureuse de voir Diana que toi. Ce que tu peux parfaitement comprendre, en fait. N'importe qui serait plus heureux de voir Wonder Woman. Surtout dans le contexte d'un rendez-vous galant. Et c'est d'un œil très amusé que tu observes la rencontre. Une fan face à son idole. Et toi, et bien, peut-être que tu seras celui qui tiendra la chandelle. A l'image de ta seconde partenaire, la discussion enchaine à une vitesse folle, sans que tu ne parviennes à suivre chaque sujet lancé. Heureusement que Diana est là pour te seconder. Et Ophelia aurait sans doute été ravie de passer la passer avec vous, mais effectivement, l'endroit choisi est à mille lieux du parc de la dernière fois. « Et toi, t'as pas pris monsieur Palmier ? » Jolie petite histoire que tu as confié à ton retour à Diana. Non, vraiment, tu gardes un excellent souvenir de la première édition de l'événement, toi qui partais défaitiste et ronchon avant même d'avoir fait la connaissance de ton rendez-vous. T'as eu de la chance de tomber sur quelqu'un comme toi, aussi peu en phase avec les normes imposées par la société. Vous prélasser au bord de la piscine pour bronzer, très peu pour vous. En revanche, faire de la moto sur un parking et renommer un parc de la ville au nom de ta fille, absolument. En espérant qu'aujourd'hui soit à la hauteur de la première fois. Sans en douter. Avec une telle entrée, tout s'annonce on ne peut plus prometteur.

Rapidement, Tefé remarque ta nouvelle main, et c'est sourire aux lèvres que tu lui montres d'un peu plus près. « J'ai un excellent beau-frère. » Précieux et inestimable cadeau. Il t'aura fallu un an pour accepter et surmonter ton handicape. Quand tu l'as rencontrée, t'étais encore sous l'influence d'une profonde colère envers le responsable et envers toi-même. Une bagarre contre Bane sous l'effet des péchés, et plusieurs mois de souffrance et de rééducation pour réapprendre à vivre normalement. C'est grâce à Diana et à ta fille que tu t'en es finalement tiré sans trop de casse, mais Tefé peut quand même se vanter d'avoir réussi à effacer ton air grognon pendant toute une journée. Ce qui était, à l'époque, un véritable exploit. « Si tu veux voir Ophelia tu pourras passer à la maison la prochaine fois. » Ce serait dommage d'attendre à chaque fois l'événement estivale pour pouvoir vous revoir. Et tu sais que votre fille serait heureuse en sa présence. Encore plus si Monsieur Palmier l'accompagne. Les bras croisés, tu espères cependant qu'elle ne t'en voudra pas d'avoir confié les détails de son profil à Diana. Si il y a bien quelqu'un avec qui il ne faut surtout pas être mal à l'aise, c'est bien elle. Et c'est avec grand plaisir que tu acceptes d'aller vous chercher à boire, un hochement de tête en guise d'approbation, pour laisser les deux femmes discuter un peu entre elles. « Bien sûr, je m'en occupe. » Toi qui pour une fois voulais être raisonnable. Mais au diable les bonnes résolutions, vous êtes là pour vous amuser.

Au bar, en attendant que le barman prépare ta commande, tu jettes quelques regards aux deux filles, curieux de savoir ce qu'elles peuvent bien se raconter. Tu devines Tefé extrêmement extravertie face à son idole, et Diana très touchée de telles marques d'affection, un tableau qui t'arrache un franc sourire. Après quelques minutes d'absence où elles ont pu faire un peu connaissance, tu reviens avec un plateau chargé de verres. « Attention, je savais pas quoi prendre alors du coup j'ai pris un peu de tout. » Trois cocktails et une réglette avec plusieurs shooters de vodka et de tequila au sirop. « Par contre Tefé, Diana ne peut pas ressentir l'alcool, y a que nous qui aurons l'air minable après sur le ring. » Comme si vous aviez besoin d'être alcoolisé pour paraître minable face à Wonder Woman. Vous n'avez jamais eu la moindre chance. « Pourquoi avoir fait un tel choix, d'ailleurs ? Je savais pas que c'était ton truc. » Mais c'est ce qui a aussi attiré ton attention sur son profil, ce choix atypique qui finalement te correspondait bien. Sans surprise, encore une fois, vous êtes sur la même longueur d'onde.

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Jason n’avait expressément pas choisi sa femme, et elle était quand même au rendez-vous. C’était soit le pouvoir de l’amour, soit le pouvoir de la malchance. Dans les deux cas, ça arrangeait Tefé, qui s’apprêtait à passer une soirée avec le seul homme décent qu’elle avait rencontré en quasiment toute sa vie en dehors de son père et son idole, dont elle buvait les paroles, surtout qu’elle parlait de sa famille. Et Diana avait un frère. Cela méritait enquête. Tefé fixa Jason avec intensité, l’imaginant avec son beau-frère en train de manger des Ferrero Rocher sur des divans en nuage au sommet du mont Olympe… Oui, ça devait ressembler à ça. En attendant, Tefé sentait bien que l'opération adoption n’allait pas être simple. Elle ne pourrait pas adopter Jason en présence de Diana, ni Diana en présence de Jason. Si elle avait bien retenu un truc du grand amour humain, c’était qu’il se voulait exclusif. Tefé trouvait ça dommage, mais bon, pas d’amour de sa vie, pas d’avis. Elle suivit des yeux les mouvements de main de Jason, admirative. Du bel ouvrage. Elle n’aurait pas fait mieux. Elle fut arrachée de ce spectacle quand il l’invita tout simplement à « passer à la maison », et elle sentit ses joues verdir un peu sous le coup de l’émotion.

Elle savait parfaitement comment réagir à cette proposition. La politesse voulait qu’elle accepte l’invitation – ce qu’elle fit – mais sans avoir l’air aussi morte de faim qu’elle se sentait à l’intérieur, pour ne pas qu’il regrette ses paroles – « … un jour, oui, ça serait cool… ». Un grand écart mental qu’elle effectua à la perfection, sans claquage. Ils ne devaient pas savoir qu’elle était du genre à se glisser la nuit sous leurs fenêtres pour les espionner, à se planter au fond du jardin pour roupiller, à y faire pousser des trucs sans leur autorisation et à déposer d’autres trucs sur le pas de la porte tel un chat psychopathe ramenant des cadeaux à ses maîtres. Et ils ne devraient jamais savoir. Puis Diana lui parla de son profil. Tefé jeta un coup d’œil à Jason comme s’il était un genre d’échelle de valeur des réactions de sa femme, mais lui aussi avait l’air tranquille. Elle remua sur sa chaise, se gratta le cou et tira sur le col de son tee-shirt. « Je me disais que j’aurais plus de touches comme ça, mais je ne crois pas que j’ai bien réussi à rendre la réalité… D'ailleurs, Jason, tu as de drôles de goûts. » Elle essayait désespérément de se rappeler ce qu’elle avait écrit dans son profil, en vain. Mais elle trouvait vraiment louche que Jason ait choisi un profil louche comme le sien. Puis se rappela qu'il avait quand même épousé Diana, donc niveau goûts, il se posait là, en fait. Ce qui flatta son ego. Oui oui.

Quand il partit leur chercher à boire, Tefé se sentit abandonnée. Et puisqu’il fallait bien dire quelque chose, elle se lança, sans filet : « Je vous adore, Diana. Et ma mère vous adore aussi. Si vous distribuiez plus de baffes à plus de gens, je pourrais vous épouser. Enfin, et si vous n’étiez pas déjà mariée. Enfin, ça c’est du détail, chez les humains. Non pas que je veux qu’on se marie. Je ne crois pas au mariage, c’est ridicule. Enfin, pas pour vous deux, pour vous deux c’est très bien. Mais bon, ces boulets de l’existence, le mariage, les enfants… Enfin, pas votre fille, la vôtre est géniale. » Tout en creusant sa tombe au bulldozer, elle regardait Jason qui, depuis le bar, les regardait, et si elle avait eu des lasers à la place des yeux, elle lui aurait gravé en lettre sanglantes et fumantes « REVIENS BORDEL REVIENS » dans le fond du crâne. La tête qu’elle faisait était plus claire qu'un batsignal en termes de message. Toddsignal. Heureusement, il revint. Et en plus, avec un nouveau sujet de conversation. Elle regarda Diana avec horreur. « Je me demande comment vous faites quand vous avez eu une journée de merde au boulot... » Elle ne savait pas comment on était censé fuir les responsabilités sans l’aide de l’alcool et/ou de la violence, nom de Dieu. Jason, une fois encore, la sauva d’un moment gênant en lui demandant pourquoi elle avait choisi cet endroit. « Apparemment… » – yeux au ciel, attitude limite préadolescente – « … il faut une excuse pour avoir recours à la violence. Ici, l'excuse, c’est le “sport”. Mais un sage dans Matrix a dit qu’on ne pouvait connaître quelqu’un qu’en se battant avec lui, et le principe, c’est qu’on apprenne à se connaître, non ? » Elle avait bien aimé cette scène, Tefé.

« Mais nous deux on se connaît déjà. En tout cas, ce sera assez inégal. » Elle fit un arc de cercle avec ses yeux pour désigner Diana sans vraiment la regarder. Et puis d’abord, jamais elle n’oserait mettre son poing dans la figure de Diana Prince-Todd. Ni dans celle de Jason. Sauf si deux sur trois étaient bourrés, effectivement. « En plus, on n’a pas le droit de parier. Mais vous battre, vous devez avoir l’habitude, tous les deux. Enfin, pas l’un contre l’autre, mais ensemble. Façon Justice League, tout ça… La justice à deux ! Protéger et servir en couple… Encore qu’il paraît que ce n’est pas bon d’être vingt-quatre heures sur vingt-quatre ensemble, au boulot et à la maison. » Et là, en guise d'auto-censure, elle se saisit d'un shooter et le goba d'un coup, puis d'un autre, puis d'un autre. Boire ou parler, elle avait choisi – trop tard.

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Bien sûr que si elle te portera à la maison, comme si elle était capable de te laisser dans la misère. N'est-ce d'ailleurs pas d'ailleurs l'image idéale pour décrire votre relation ? Toi au sol, rampant, uniquement animé par la vengeance. Qu'est-ce qu'elle aurait pensé de l'ancien Jason, Tefé ? Celui qui était agressif, impulsif, en colère contre le monde entier. Loin de celui qui apprend chaque jour à s'ouvrir un peu plus aux autres, et à ne pas blâmer les autres pour ses propres souffrances. Le chemin pour en arriver à ce que vous êtes aujourd'hui a été long, et un jour peut-être tu lui raconteras ce long périple, où Diana a fait preuve de patience et de beaucoup d'amour pour parvenir à te sortir du trou. Plus de trois ans plus tard, c'est toujours avec la même admiration que tu regardes ton épouse, même quand elle te menace de te laisser ici si tu abuses un peu trop sur la boisson. « Oui, c'est un film, et celui-là aussi tu dois impérativement le voir. » C'est vrai, t'es soucieux de lui inculquer une bonne connaissance cinématographique, mais c'est aussi une bonne raison pour te prélasser sur le canapé avec elle. Et grâce à Tefé, vous avez maintenant votre programme de demain soir. Et le plus merveilleux dans tout ça, c'est que bientôt, tu recommenceras tout le processus avec Ophelia. Une normalité grisante qui ne te lasse pas, et à laquelle tu as pris goût avec les deux femmes de ta vie. C'est quand même plus sympa que de rester percher sur des immeubles à haïr le monde entier. Bon, t'as toujours un petit côté impétueux, mais disons que ça fait partie de ton charme. « Diana a quelques lacunes côté cinéma, mais y remédier est un plaisir. » Sauf quand elle te fait comprendre qu'elle n'a pas apprécié le film que tu lui as montré. Là, par contre, tu boudes pendant quelques minutes, aussi vexé que le créateur que tu n'es pas.

Tefé a une personnalité atypique, et c'est précisément pour cette raison que tu la trouves attachante. T'as toujours eu un faible pour les marginaux et les laissés pour compte. Et à voir Diana, t'es prêt à parier que malgré cette spontanéité désarmante, elle aussi la trouve attachante. « Disons que Diana et moi ne jouons pas dans la même catégorie. » Quand ta femme gère des menaces planétaires avec la Ligue de Justice, toi tu t'occupes seulement de la criminalité de Gotham de temps à autre accompagné d'une autre Amazone. Enfin, toi aussi tu participes au bordel ambiant quand les situations deviennent ingérables, bien évidemment, mais jamais tu ne compareras ton efficacité et ton implication à celle de Diana et de son équipe. Oui, il t'arrive de temps en temps d'être modeste. « Oh mon dieu, la première qu'on s'est rencontrés c'était sur un toit de Gotham. J'ai été fidèle à moi-même et elle m'a soulevé par le col comme un minuscule chaton pour me calmer. » Voilà pour les précisions, sourire aux lèvres en te remémorant ce souvenir qui t'aura à la fois touché l'égo et émoustillé. Vous avez fait tellement de chemin depuis. En tant que couple, oui, mais aussi en tant qu'individu. Une rencontre qui aura tout changé à jamais. Et c'est toujours avec une belle nostalgie que cette fois tu te remémores vos entrainements ensemble, à chaque fois avec un soupçon de flirt pour rendre l'exercice d'autant plus agréable. Un détail que tu gardes cette fois pour toi, pudique comme il le faut sur ta relation avec Diana, mais assez généreux pour offrir à Tefé quelques anecdotes inédites malgré tout.

« Tu quoi ? » Elle embrassera le gagnant ? C'est un regard médusé que tu portes à ton épouse, avant de te tourner vers Tefé, curieux de voir sa réaction. Va t-elle saisir cette occasion unique pour qui des milliers se damneraient ? Elle a pas intérêt. « Dans ces circonstances, il est impossible que je perde. » Comme si tu allais laisser qui que ce soit embrasser Diana à ta place. Quoi ? Comment ça tu t'emballes ? Elle a pas précisé où elle embrasserait le gagnant, mais hors de question de prendre le risque. Alors hop, il est temps d'en finir. Après un dernier shot, tu te diriges vers le ring, prêt à en découdre – gentiment – avec ton adversaire. Et en attendant qu'elle te rejoignes, tu enroules tes poings d'un bandage. Quelques coups échangés pour commencer, rien de bien compliqué et d'accessible à tout le monde. Pour Matrix, vous verrez plus tard. « Okay, alors j'utilise pas ma main super cheatée, et toi t'utilises pas ton pouvoir non plus. On se bat à la loyale. » Mais sait-elle seulement se battre, Tefé ? C'est d'un premier coup maitrisé et savamment pesé que tu entames le combat. Juste pour donner le rythme. Et pour jauger un peu sur quel pied il va te falloir danser sur ce terrain avec elle.  

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Elle buvait les paroles de Diana, surtout quand celle-ci évoqua son île natale. « Ça a l’air bien… Themyscira… Si j'étais toi, je n'en serais jamais partie... » Bien sûr, elle s’en faisait une idée probablement fausse, une idée fantasmée qui correspondait à son utopie personnelle et pas à la réalité, mais n’empêche, Diana elle-même l’avait dit : c’était un endroit qui échappait aux stupides carcans humains. Et elle était sûre que là-bas, il n’y avait pas de centrales nucléaires et de décharges à ciel ouvert. Son regard allait de l’un à l’autre comme pendant un match de ping-pong. En fait… elle avait l’impression de voir ses parents. Une pensée un peu glaciale, du coup, qui ne coïncidait plus vraiment avec ses propres fantasmes envers ces deux-là, même si elle savait bien que tout ça, c’était pour s’amuser, et d’ailleurs, c’était ce qu’elle cherchait, plus que n’importe quoi d’autre. Mais enfin merde, avec ses parents, justement, elle ne s’amusait jamais. Mais voilà, ce qu’il y avait entre Jason et Diana, elle le reconnaissait. Incapable de le définir, de le ressentir elle-même pour quelqu’un d’autre, elle avait grandi malgré tout avec ça sous les yeux : l’amour, le vrai, celui qui passe tout au bulldozer. Celui qui faisait qu’Abby était amoureuse d’une foutue plante et vivait dans un marais et lui avait donné la vie, à elle. Alors sans savoir réellement ce qu’avaient vécu Jason et Diana, Tefé savait déjà que leur couple était fait d’épreuves, comme celui que formaient ses parents.

Quand elle croisait des gens comme ça, elle voulait tout savoir, histoire d’essayer de les imiter, puisque c’était par pur mimétisme qu’elle fonctionnait. Mais alors Jason balança que Diana l’avait soulevée par le col lors de leur première rencontre et la plante éclata de rire en imaginant cette image. Et après, alors ? Comment, pourquoi ? Y avait quoi entre ce moment et ces deux-là aujourd’hui, ensemble, et parents, en plus ? Là résidait la magie noire, pour Tefé. Qui se redressa d’un coup soudain. Il était question d’embrasser le gagnant. Elle regarda pour voir la réaction de Jason et capta le message. « Challenge accepted ! » Elle se leva en gratifiant son futur adversaire d’un sourire radieux – complètement à côté de la plaque, quoique bien consciente qu’il ne pouvait pas être totalement ravi de ce deal merveilleux. Et en fait, une autre force motivait l’élémentaire : la fierté. Elle avait autant envie d’avoir d’un bisou de Diana que de montrer à Jason de quoi elle était capable. Vu qu’elle ne l’avait probablement pas convaincue avec ses talents de pilote. Alors, elle pouvait bien faire l’impasse sur un si elle obtenait l’autre, non ? Sinon, c’était trop demandé, et la vie se chargeait de vous rappeler qu’elle n’était pas aussi belle. Elle regarda Jason rejoindre le ring. « C’est fou les choses qu’on fait par amour… » Elle parlait de lui, pour Diana. Elle s’inclina devant l’Amazone comme un chevalier du Moyen Âge juste avant un duel et alla retrouver Jason. Il émettait des conditions, et ça allait parfaitement à Tefé. Même si elle n’était pas sûre de réussir à se retenir. Ses pouvoirs, c’était plus que des pouvoirs, c’était sa nature même… Mais heureusement, ici, les fleurs et le gazon ne se battaient pas en duel.

« Allez, amène-toi ! Je te laisse porter le premier coup ! » Dit-elle sans réfléchir. Avant de sauter sur Jason comme chat sauvage, toujours sans réfléchir. Sincèrement. Elle avait appris à se battre en se battant, dans les rues des villes, avec les gens louches qui avaient toujours vu en elle une proie facile – ses jambes maigrichonnes, ses petits bras, son visage pointu. Et c’était tout. Pas de discipline, pas de bushido, pas d’unagi, rien que la certitude qu’il fallait qu’elle gagne, absolument, sinon, si c’était l’autre qui gagnait, et alors elle aurait mal, ou pire. Tous ses réflexes étaient mauvais, elle n’avait aucune posture, n’observait pas l’adversaire et bien sûr, la notion de combat loyal lui était inconnue. Elle avait eu beau l’inviter à attaquer en premier, c’était par pure habitude qu’elle avait aussitôt brisé sa parole. Et sans ses pouvoirs, elle n’était pas beaucoup plus forte qu’un humain lambda. « Toi, tu es un pro de la bagarre, c'est ça ? Je vais t'impressionner ! » Elle lança son poing vers le visage de Jason, tout en sachant qu’il n’aurait aucun mal à esquiver, alors elle plongea dans un même élan sur le côté pour se jeter dans ses jambes – le but de cette manœuvre ? Aucune idée. Il fallait juste avoir de la chance.

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