"Des créatures de Dieu qui s'étaient endormies en pleurant, ouvraient les yeux pour pleurer de nouveau."
- Le Silence Des Agneaux
Victoria Vale, journaliste et une véritable migraine ambulante pour plusieurs. Du moins, j’aime bien le croire ; les migraines étaient choses du passé pour moi. Elle avait pris un intérêt en ma personne qui était des plus troublant. Probablement parce que j'étais un homme étrange. Et pour cette raison, je gardais un œil sur elle. J’avais embauché un détective privé pour surveiller ses gestes ; pour des raisons évidentes, je ne pouvais pas vraiment la surveiller moi-même autant que je ne l’aurais voulu. Je n'avais pas été convaincu qu’elle soit capable de trouver quoi que ce soit à mon sujet ; j'avais veillé à effacer toute trace de mon existence de toutes les archives autant que possible aux fils des ans, pour les remplacer par une ardoise typiquement humaine et banale. Ce n’était pas une tâche facile et, pour ce qui était de l’internet, j’étais dépassé. Mais un peu d’argent pouvait convaincre des gens talentueux dans ce domaine à donner un coup de main indispensable. J'étais plus qu'un peu surpris quand le détective me déclara qu'elle avait trouvé une piste qui la conduisait à Augusta. Il ne savait pas ce que cela pouvait bien signifier, mais j’en étais bien conscient. Contrariant, mais je ne pouvais pas vraiment blâmer les gens que j'avais embauchés pour effacer mon nom ; le Web était vraiment un labyrinthe où tout et rien pouvait se perdre. Ce n'était pas bon du tout. Je ne craignais pas vraiment que des gens apprennent la vérité. Enfin, cela n’était pas exactement la vérité : je l’étais, mais pas parce que j’avais peur que les gens connaissent la vérité à mon sujet. Si c’était le cas, pourquoi avoir été franc avec les justiciers avec qui je combattais le crime ? Une partie de moi avait l'impression que ce n'était qu'une question de temps avant que l'un d'eux révèle mon secret au monde de toute façon. Mais si ce secret était révélé à la populace, je n’avais aucun doute qu'une panique mondiale pourrait se produire. Et ça, c'était si une telle situation avait la chance de se produire ; j'avais surtout peur de ce qui pouvait arriver aux humains qui découvraient notre existence. Si Mary en avait vent ... Elle n'hésiterait pas à éradiquer la menace, et des gens ordinaires, comme Victoria Vale, ne pourrait lui échapper. La journaliste, qui prenait son travail un peu trop cœur à mon goût, était en train de creuser dans des placards qui pourraient la tuer, et comme elle ne semblait pas être se douter de ma condition, elle ne faisait pas preuve de la prudence qui s'imposait. Bon, j’admets que tout journaliste qui ne prend pas son travail trop au sérieux n'en est probablement pas un bon. Cela étant dit, je devais y aller moi-même. Je ne savais pas exactement ce qu'elle pensait y trouver, mais je savais qu’une... de mes erreurs passées y était encore installée. Il y avait de fortes chances pour que la journaliste pour que rien ne se passe, mais je ne pouvais pas risquer sa vie, ou n’importe quelle vie, avec un peut-être douteux. Je devais la trouver et m'assurer qu'elle ne trouverait pas quelqu'un - ou plutôt quelque chose. La nuit était presque tombée et je pourrais bientôt me diriger vers le Maine. J'avais considéré partir plus tôt au volant de ma voiture aux vitres recouvertes d’un revêtement qui bloquait les lumières ultraviolettes du soleil, mais sous ma forme de brume, je pouvais me déplacer beaucoup plus vite que je ne pourrais jamais y arriver en voiture. Je pourrais facilement y arriver en quelques heures. D’ici là, je ne pouvais qu’espérer qu'elle ne trouverait pas les réponses à ses questions avant mon arrivée, car ces réponses ne pouvaient lui être données que par un monstre.
✸ Sept heures plus tard ✸
La musique qui résonnait dans le corps de toutes les personnes présentes et les lumières émises par les diodes électroluminescentes constituaient déjà limite l’équivalent d’une surcharge sensorielle pour les humains, mais pour moi et les miens, elles étaient tout à fait autre chose. Elles stimulaient mes sens au point où ils en devenaient… engourdis. Tout me paraissait au ralenti, comme si j’avais pris des dépresseurs très puissants. Et il va sans dire que la façon dont je venais d'abattre plus d'une douzaine de ces créatures nauséabondes quelques instants auparavant avait laissé mon corps plus agité qu’il ne l’était d'ordinaire. Mais malgré tous les signaux sensoriels écrasants que mon cerveau recevait de mon corps - la sensation que tout mon être était en feu me collant à la peau – je n’étais si facilement importuner par ce qui m’entourait. Malgré tout, je pouvais encore sentir le sang couler le long des pores de ma peau. J'en étais littéralement recouvert et il en était de même pour la plupart des personnes qui se trouvaient dans l’environnement immédiat du massacre dont j’étais responsable. Très peu de celui-ci était le mien ; ils avaient à peine réussi à faire quelques entailles dans ma chair, qui s’étaient renfermées presque immédiatement. Tuer les miens a toujours été… remarquablement salissant. C’était loin d’être comme au cinéma : nous ne tombions pas en poussière à la mort et n’étions certainement pas proies à une combustion spontanée lorsqu’on se retrouvait avec un pieu dans le cœur. Inutile de préciser qu’arracher le cœur ou la tête d’une personne n'a jamais été - et ne sera jamais - une affaire propre. Je regardais la jeune humaine devant qui je me dressais. Elle était pratiquement aussi revêtue que lui par ce nectar andrinople, bien que les rayons de lumières rougeâtres firent un respectable travail de le dissimuler aux yeux la personne moyenne qui ne serait pas assez proche pour le remarquer. Mais ils n’en restaient plus de ces paires de yeux à tromper, car il était impensable que tous ceux qui étaient encore présent sur place, bien que peu nombreux, n’eurent pas vu le combat sanglant qui s’était produit. La petite foule était composée en majorité de quelques humains, probablement trop bouleversé pour bouger, tout comme la femme qui se trouvait devant moi ; Victoria Vale. Mais il y en avait encore quelques-uns des miens qui faisaient acte de présence. Je ne puis dire s’ils avaient décidé de rester à l'écart du conflit parce qu’ils m’avaient reconnu ou si leur instinct de survie était simplement plus développé que celui de ceux que j'avais réduits en pièces. De toute façon, ils ne bougeaient pas du tout, craignant sans doute que je considère le moindre mouvement de leur part comme une menace. J’admirais leur sang-froid ; malgré toute la pollution sensorielle qui délutait mes sens, les battements de cœur affolés des humains présent sur place resonnait dans mon crane aussi clairement qu’un requin pouvait percevoir du sang dans un bassin d’eau. Ça ne devait pas être facile pour eux de se tenir ainsi immobile. D’une certaine façon, ils n’étaient pas si différents des humains auxquels ils s’en prenaient ;
La peur de la mort était un outil de persuasion oh si puissant.
Je ne baissais cependant point ma garde, car je savais à quel point ces quelques prédateurs au repos devaient être torturés par l’envie pour se de ruer et d’essayer de plonger leurs dents acérées dans la tendre chair frémissante qui renfermait du sang agrémenté par la même panique qui les maintenait figés sur place. Il m’était franchement inutile d'essayer de parler. La musique était toujours aussi forte et personne ne pourrait m'entendre même si je prenais là peine de crier à moins qu'ils ne se trouvent à portée de main. Avec cette cacophonie que certains appelaient de la musique, elle n'entendrait même pas mon autre voix. Après ce qui sembla être une éternité, bien que ça ne fut que quelques minutes, l'une des humaines commença à se déplacer lentement vers l’entrée, pas convaincue que je la laisse passer. Je lui jeta un regard qui se voulait rassurant et une hochement de tête pour l’encouragé, puis en fit de même avec les autres qui n’avaient pas encore osés bouger le petit doigt. Je plaça cependant le paume de ma main devant Victoria pour lui signaler de ne pas bouger ; je n'étais pas prêt à partir. Maintenant que j'avais vu ce qui se passait dans cet endroit, je me devais d’intervenir et de mettre fin aux activités de la propriétaire et la journaliste devrait m’attendre car une très longue discussion entre elle et moi était devenue plus que nécessaire. J'ai alors jeté un coup d'œil calme mais glacial à l'un des vampires qui avait commencé à bouger, sans doute qu’il avait supposé qu'il fût lui aussi autorisé à partir, lui indiquant clairement de rester sur place.
La musique s'arrêta brusquement. Mes yeux furent aussitôt attirés par la partie nord-ouest du balcon qui entourait la partie supérieure de la pièce. Et la voilà, cette créature qui n’était que l'ombre de la femme que j'avais connue. Elle n'avait jamais été assez forte pour combattre la Bête et elle en était devenue la proie dès qu'elle avait été transformé par Mary. Tout cela était de ma faute bien sûr. Elle ne méritait pas un tel destin. Je savais pertinemment qu'il valait mieux que j’évite de me rapprocher d’une femme de cette façon, mais nous avions plus de quatre siècles ; il n'était pas toujours facile de garder les gens à distance. Encore aujourd’hui, je désirais ardemment une compagne, et puisque que Mary et moi étions si... dysfonctionnels. Il n’était guère surprenant que j’eu essayé plusieurs fois dans ma vie de trouver une personne de spéciale. Malheureusement, j'avais déjà trouvé cette personne qui m’était destinée et elle n'aimait vraiment pas me voir tenter ma chance ailleurs. Eh bien, pour être honnête, je n’aimais pas la voir essayer non plus, mais elle avait cette mauvaise habitude de démembrer ou de transformer celles dont je me rapprochais trop. Pour me punir. Pour m'apprendre une leçon. Et la femme qui se tenait sur ce balcon, flanquée de sbires, était l'une de ces leçons. Non, plus une femme : elle n'était plus qu'une créature haineuse, avide et assoiffée de sang. Autant que j’en voulais à Mary pour ses choix, elle n'était jamais devenue proie à la Bête comme Danna. Je l'aurais bien appelée par son nom si je savais que cela comptait pour quoi que ce soit, mais ce n'était plus le cas. Ce n'était pas vraiment elle de toute façon. Danna Lancaster n’était plus. Ce qui avait pris sa place se tenait là, applaudissant lentement et sarcastiquement la scène en me gratifiant d’un sourire qui ressemblait à celui d’un requin : je pouvais déceler une dentition redoutable et acérée grâce à son sourire de l’ange. De quoi effrayer un humain des plus braves. « Eh bien, si ce n’est pas grand-papa ! Mais qu’est-ce qui nous vaut cette belle surprise ? » Sa voix était provocante. Méprisante. Je dû me faire violence pour ravaler un grognement ; je détestais particulièrement me faire appeler ainsi. Un surnom des plus déplaisants que Mary m’avait attitré pour me narguer. « Descends ici et nous pouvons discuter. » Ma voix était calme, assuré, mais surtout autoritaire ; ce n’était pas une demande, mais un ordre et aucune menace ne fut nécessaire. Danna grimaça et ordonna d’un brusque geste de main à ses deux serviteurs de la suivre. Alors qu'elle fit le tour du balcon de sa démarche souple et désintéressée pour ensuite descendre les escaliers, mon regard se posa sur la journaliste trempée de sang. Maintenant que la musique n’était plus un fâchant problème, elle n'aurait aucun problème à entendre ma voix. Mes yeux creusant lourdement dans les siens, je murmurai doucement à son oreille, sans jamais bouger la moindre lèvre, des mots qu’elle seule puisse entendre. « Ne bougez surtout pas Victoria. Il n'y a pas d'endroit plus sûr qu’à mes côtés en ce moment. » Cela étant fait, je lui tournai le dos et m'assura de me dresser tel un rempart entre elle et Donna. Elle était peut-être plus rapide que ceux que j’avais tué plus tôt, dont les restants jonchaient encore dans la pièce, mais je restais plus rapide qu'elle ne le serait jamais. Un mauvais mouvement un peu trop brusque à mon goût dirigé vers Vale et je lui prendrais la tête.