our last name spells trouble (mei ling)

« C’est juste une victoire temporaire, Hex. Tu vas voir. J’ai des contacts hauts placés, tu sais. Des gens qui me sortiront d’ici. Et dès que je serai à nouveau dehors, j’te retrouverai, et… » « Et je te conseille de ne pas faire de promesses que tu ne pourrais pas tenir, Morris. Maintenant, sois sage, on est arrivés. » « J’aurai ta peau, Hex. Et je vendrai tes organes à Black Mask, et… » « C’est ta maman qui t’a appris à parler aux filles comme ça ? » Le dénommé Morris laissa échapper un couinement de douleur alors que Jinny raffermissait sa prise sur son bras, sans que le malheureux ne puisse se débattre alors que, menotté et ne tenant plus très droit sur ses deux jambes, il se retrouvait forcé de suivre docilement son bourreau à travers les portes du commissariat central du GCPD. Pauvre Morris. Lui qui s’était cru malin en se dérobant à ses innombrables rendez-vous avec la cour de justice, avait fini par se faire rattraper par la loi sous la forme d’une gamine avec un chapeau de cowboy et des pistolets. Enfin, il avait eu un peu de chance, dans son malheur. Certes, elle lui avait mis une dérouillée plus sévère que ce à quoi il s’était attendu, vu le gabarit, mais au moins, ça n’était pas Batman. Quant à ses balles, elles n’avaient servi qu’à lui faire tomber un échafaudage sur la tronche, plutôt que de viser ses genoux ou sa tête. Silver lining ? Toujours était-il qu’il l’avait un peu mauvaise, et que Jinny était bien contente d’être enfin arrivée au poste pour se débarrasser une fois pour toutes de son prisonnier qui n’arrêtait pas de lui bougonner dans l’oreille depuis tout à l’heure. Quelle soirée, mes aïeux. Quelle soirée.

Une fois son prisonnier remis entre les bonnes mains du sergent Bullock – et après avoir chapardé un donut dans la réserve de ce dernier – Jinny sortit des bureaux alloués aux inspecteurs et à leurs subalternes pour se diriger vers l’aile administrative ; plus qu’à récupérer sa paie, et elle pourrait en finir avec cette longue journée fastidieuse. Même s’il était bon de reprendre le travail pour oublier ses mésaventures de ces dernières semaines, là, tout de suite, elle ne dirait pas non à la perspective alléchante de s’écrouler dans un lit avec une pizza pour seule compagnie. Sawyer, son nouveau compagnon à quatre pattes, l’attendait sagement dans le pick-up (mal) parqué devant le commissariat, et ils n’auraient plus qu’à trouver un motel où passer la nuit. Petit à petit, les choses commençaient à rentrer dans l’ordre, et à retrouver un cours à peu près normal. Elle avait touché le fond, dans les jours qui avaient suivi son duel avec l’héritier Turnbull – et sans l’intervention providentielle de Jason, peut-être y serait-elle encore, au fond du trou. Mais leurs retrouvailles impromptues quelques semaines plus tard, forcée par une téléportation non-maîtrisée, puis ce rendez-vous des plus bizarres en bord de mer avec ce drôle de personnage qu’était Jeffrey Colt, et son road trip infernal avec Tefé, avaient fini par la remettre en selle comme il se devait. Les pouces accrochés aux passants de sa ceinture, Jinny poussa la porte du bureau administratif, la laissant nonchalamment se refermer derrière elle en prenant le temps d’observer la salle pas plus agitée que ça, dont l’air était chargé de tabac froid et de café réchauffé. Parfois, elle se disait que les bureaux de la GCPD auraient tout à fait leur place dans une série policière un peu ringarde des années 80 – mais hé, quelque part, ça faisait aussi leur charme, à ces pauvres flics qui affrontaient tout ce que le pays avait de pire à offrir. Bon d’accord, les trois quarts d’entre eux étaient véreux et pourris jusqu’à la moelle. Mais quand même.

Après quelques secondes à aviser tout ce beau monde, son regard se posa sur un bureau en particulier, derrière lequel planchait une silhouette familière ; et la bouche de Jinny s’étira en un sourire, heureuse de croiser au moins un visage qu’elle tenait en sympathie. Sans marquer d’hésitation, mais sans se presser non plus, elle avança jusqu’à la table de travail d’une de ses employées préférées du GCPD. Et Dieu savait qu’il n’y en avait pas beaucoup, aussi avenante Jinny puisse-t-elle être quand elle s’en donnait la peine. « Hey Sun. Longue journée ? » l’interpella-t-elle avec un sourire cordial et son accent traînant du sud, avant de se laisser choir dans la chaise en face de son interlocutrice. Elle l’aimait bien, Sun – elle ne la connaissait pas des masses, mais sa contenance réservée et sa discrétion à toute épreuve avaient quelque chose de fascinant dans la ruche infernale qu’était la GCPD. Et puis, Jinny aimait bien les gens calmes ; à force de fréquenter des forces de la nature parfois pleines d’énergie, les forces tranquilles comme Sun avaient quelque chose de particulièrement reposant. « Je viens de coffrer un certain Steve Morris, un braqueur de banque qui avait apparemment quelques affinités avec Black Mask, possiblement aussi avec le Pingouin – une petite frappe de bas étage, mais qui a filé entre les doigts des collègues jusqu’à ce soir. Il y avait une prime sur sa tête, Bullock m’envoie collecter. J’ai laissé Morris dans ses pattes. » expliqua-t-elle en tendant le papier signé par le sergent à son interlocuteur, avant de se laisser retomber contre le dossier de sa chaise. « Je l’ai coursé dans la moitié de l’East End avant de lui mette la main dessus. Tu savais qu’il avait été champion d’athlétisme au collège ? Il a de beaux restes. » Fichu sprinteur. « Et ici alors, toujours autant la folie toute la journée ? »

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On peut dire beaucoup de choses sur le GCPD, ses flics sont en grande partie corrompus, ses locaux sont d'un autre siècle, sont équipement est daté et tient avec des bouts de ficelle, mais on ne peut pas dire que le travail abattue chaque jour par chacun des membres le composant chaque jour n'est pas monumental, si Mei Ling ne l'apprécie pas, c'est un travail plus honnête que sa véritable occupation, mais c'est cette occupation qui lui permet de suivre de prêt Jinny Hex, son arrière-arrière-arrière petite fille, la dernière descendante de la famille Hex, la dernière trace de l'héritage que elle est Jonah ont tenté de donner au monde, à travers le sang de leur fils Jason puis à sa descendance jusqu'à Jinny. Une fille magnifique, courageuse, emplie de bonté et au fort accent, difficile de ne pas voir son défunt mari quand elle posait le regard sur la jeune fille, de ne pas ressentir cet amour familial puissant qu'elle ressentait pour son fils, ses visites étaient sporadiques, sa descendante était un électron libre, une personne fière et libre au tempérament de feu. Elle aimait cela chez elle comme elle aimait ces mêmes traits de caractère chez Jonah et Jason, peu de personnes avaient en elles cette flamme ardente de vie qui rayonnait autour d'eux, sans doute par ce que la flamme se cachait souvent derrière des murs que l'on pensait infranchissables. Mais Mei Ling pouvait le voir, par delà ces murs de papier, le brasier ardent qui l'attirait comme un papillon de nuit. Aucun matin elle ne se levait sans penser à elle, aucun soir elle ne se couchait sans angoisser à ce qui pourrait lui arriver à un âge ou les fusils crachent la mort avec plus d'efficacité que les vieilles gatlings de son temps, les mêmes qui avaient pris la vie de son frère.

Des armes que la jeune fille arborait avec autant de fierté que ses prédécesseurs, un stetson vissé sur la tête telle une image des temps passés, un reflet lointain d'un temps qu'elle ne reverrait jamais. Jinny se démarquait cependant de Jonah sur un point : la létalité. Là ou Jonah n'avait jamais hésité à tuer, elle semblait avoir plus à cœur de conserver ses cibles en vie, une chose qui l'intriguait au plus haut point. Voilà quelques mois qu'elles se croisaient, la rouquine ne pouvait bien évidement pas se douter que sous les traits de Sun Chen, employée banale du service administratif du GCPD du bureau des primes, était son ancêtre, un secret malheureusement nécessaire pour éviter de la mettre en danger elle et ses nouveaux amis. Mei Ling ne sait pas combien de temps il lui faudra pour préparer leur fuite, ni combien d'argent. La cour ne la laissera jamais partir, elle le sait, mais elle compte bien leur filer entre les doigts.

C'est entre deux dossiers poussiéreux, alors que son service touchait à sa fin, qu'un bruit de pas caractéristique la stoppa brièvement dans sa tâche en cours, elle regarda sans lever la tête vers l'entrée et perçu ce qu'elle s'attendait à voir. Un sourire furtif illumina son visage et elle fit mine de continuer ses affaires comme si de rien était jusqu'à ce que Jinny approche et que son accent texan ne l'interpelle, elle leva enfin le visage vers elle, souriant furtivement de manière amicale, elle avait bâti un petit lien avec elle, si elles n'étaient pas meilleures amies, elles s'appréciaient. Ses explications étaient comme d'habitudes d'une grande clarté et ses résultats indiscutables, Steve Morris était un client sérieux, le genre de mec qui défiait la loi sans sourcilier, et elle l'avait ramené en vie. La petite anecdote sur la course étira son sourire et elle se fendit d'un petit rire empli de compassion. Tout en continuant de taper sur l'antiquité qui lui servait d'ordinateur, elle se saisit du chèque chéquier de reversement et y inscrit le montant de la prime.

-Dure journée en effet, mais au moins je n'ai pas transpirée toute l'eau de mon corps.

Elle rit de nouveau, les journées du GCPD étaient chargées, mais le quotidien de Jinny aurait tôt fait d'épuiser moins pugnace que Jinny. Elle extirpa une petite bouteille d'eau de sous le comptoir qu'elle déposa devant elle avec un sourire.

-Ça faisait un moment que tu n'était pas venu collecter de prime, Bullock commençait à penser que la Young Justice payait mieux.

Elle n'avait pas loupé que les deux s'entendaient comme larrons en foire.

-Essayes de bien les dépenser.

Elle déposa le chèque devant Jinny avec un petit clin d’œil.

Codage par Libella sur Graphiorum réarrangé pour usage personnel

Jinny eut un sourire face a la boutade de Sun – avant de comprendre que peut-être elle était visée un peu plus que ça, et par reflexe, elle renifla le col de sa chemise… Ouiiiii bon. Le métier de chasseuse de primes était sportif, ça n’était tout de même pas de sa faute ! Au moins, impossible de s’ennuyer au quotidien. Elle avait appris un peu sur le tas, c’est vrai, elle avait eu de beaux ratés, surtout au début. Mais elle avait appris, assez rapidement. A croire qu’elle avait ça dans le sang, tiens. Job après job, elle avait appris l’art de la planque et de la filature, à cultiver son carnet d’adresses, l’art de la négociation avec des gens qui avaient rarement l’habitude ou l’envie de négocier. Bref, elle avait appris à se fondre dans la masse et à en tirer avantage. Pas assez flic pour éveiller une méfiance démesurée, mais pas assez gangster pour ne provoquer aucune réaction épidermique dès qu’elle entrait quelque part. Et parfois, elle se demandait si Jonah avait ressenti ça, lui aussi. Cette drôle de sensation d’être à la frontière entre deux mondes, entre deux camps, de piocher ce qui l’intéressait dans l’un comme dans l’autre, en espérant ne jamais avoir les yeux plus gros que le ventre. Un fantôme sans attaches ni appartenance. A probablement se faire des ennemis des deux cotes de la barrière et pas beaucoup d’amis au passage, mais hé. Les temps avaient changé, pas vrai ? Enfin, cette maxime-là, elle s’en méfiait un peu maintenant. Elle avait cru pouvoir dire la même chose à propos des Turnbull ; et le destin s’était bien marré à lui prouver le contraire.

Jinny tendit la main et se saisit de la bouteille d’eau avec gratitude, avant de se laisser retomber sur le dossier de sa chaise dans une posture qui aurait bien fait râler sa chère maman – tiens-toi droiiiite patati patata – et de croiser les jambes devant elle, profitant allègrement de ce moment de répit après la bataille. La mention de ce brave sergent Bullock lui arracha un nouveau sourire un peu amuse – elle l’aimait bien, le brave sergent. Un peu barre, mais un des rares flics a peu pres dignes de confiance dans ce commissariat. « La Young Justice, payer mieux ? Figure-toi que c’est du bénévolat, le superhéroïsme. Enfin. Si on oublie le logement gratuit, l’assurance santé, et tout ce qui va avec. » Bon d’accord, c’est vrai que c’était pas si mal, comme deal. « Mais je sais que je vous manquerais trop, alors je fais ce que je peux pour garder un pied dans le monde réel. » Et puis, sans mentir, si elle passait tout son temps libre à frayer avec des menaces intergalactiques, elle allait vraiment perdre la boule. Vraiment, après une apocalypse ou deux, revenir a des problèmes aussi simples que remettre la main sur un fugitif évadé de prison, ça avait quelque chose de réconfortant. Et elle songea que pour en arriver à ce genre de conclusion, elle devait être tombée de sacrement haut, quand même.

Avec un ‘merci’ courtois, Jinny récupéra son cheque et le rangea soigneusement dans la poche de son pantalon – elle l’encaisserait le lendemain, d’abord, elle mourrait d’envie de se détendre un peu, après cette interminable journée. « Thanks, doll. Je sens que je vais finir la soirée dans un bar en compagnie d’une bière et d’une assiette de frites, ça m’a l’air bien comme dépense, ça, non ? » Et, en croisant le regard de Sun, une autre idée lui vint. « Ça te dit de m’accompagner ? T’as presque fini ta journée, il me semble. » proposa-t-elle, obéissant à sa spontanéité toute texane. C’est vrai quoi, quel était l’intérêt d’un bar si on y buvait ou mangeait tout seul. Elle, elle préférait de loin un peu de compagnie. « On se croise tout le temps au poste, mais on n’a jamais pris le temps de se voir en dehors. C’est quand même triste. » Surtout que le courant passait plutôt bien, entre elles. Sun était du genre calme et réservée, mais elle avait toujours un sourire et un mot aimable pour elle, et Jinny, en retour, avait toujours un sourire et un mot aimable pour Sun. Mais, dans l’ensemble, son employée préférée du GCPD restait un vaste mystère, et Jinny aimait bien apprendre à connaitre les gens qui devenaient des points fixes dans son quotidien. Après tout, ils étaient aussi rares que précieux. Et quelque chose en Sun lui donnait envie de passer un peu plus de temps avec elle – une drôle de familiarité, une connivence naturelle. En dehors de ces fichus murs, de préférence. Jinny se leva de sa chaise, soudainement très enthousiasmée par sa propre idée, et rajusta son chapeau sur sa tête. « Alleeeez laisse-toi aller ! Et comme c’est toi la locale, je te laisse même choisir l’endroit et je t’invite. Deal ? »

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Mei Ling rit de bon cœur à son explication sur la Young Justice, avec discrétion et mesure bien sûr, mais de bon cœur tout de même, cette manière qu'avait Jinny de tout ramener à quelque chose de très terre à terre, loin des faux-semblants habituels, cette honnêteté pure et franche, elle voyait là encore Jonah. Et comme son ancêtre en son temps, la gunslinger sut la prendre par surprise en lui proposant de l'accompagner manger un morceau et boire un coup, Mei Ling n'avait jamais vraiment envisagé de se rapprocher plus de sa descendante, mais l'idée était loin de lui déplaire, difficile de satisfaire sa curiosité avec leurs brefs échanges et elle n'avait pas vraiment l'occasion de la traquer H24 avec ses occupations habituelles, ayant pris le rôle d'une personne au professionnalisme complet, elle n'avait pas vraiment eut d'occasion d'initier un tel mouvement, c'était donc une bonne occasion. Le soucis était que cette distance était initialement prévue pour mieux faire passer sa duplicité lorsqu'elle pourrait fuir avec elle et tout lui dire, l'idée d'autant tromper sa confiance n'était pas pour lui plaire, mais elle n'avait pas vraiment le choix, rejeter son offre pourrai être dommageable pour leur relation, après tout elle avait en effet bientôt fini son service et à part rentrer chez elle et continuer de monter son plan, elle n'avait pas grand chose à faire. Elle laissa quelques instants flotter, un air pensif sur le visage à se demander si il n'y avait pas une meilleure course d'action, elle pourrait prétexter être prise, après tout Jinny n'avait pas tant de détails que cela sur cette fausse identité, mais il y avait cette envie irrésistible, comme un appel du sang, malgré son sourire, elle sentait que quelque chose la travailler et il n'était que purement naturel pour elle que de chercher à l'aider. Jonah avait un air plus sinistre que Jinny, ça au moins n'était pas resté coutume, mais elle pouvait voir dans le regard de la jeune fille, comme pour son ancêtre, que quelque chose n'allait pas. Elle se fendit donc d'un sourire amical.

-Pourquoi pas, après tout ça fait longtemps que je ne suis pas sortie.

Sa dernière sortie de ce genre datait en effet de plus d'un siècle, ce qui posait désormais une problématique inattendue, elle n'avait aucune idée d'où aller qui soit considéré comme un lieu acceptable pour deux femme liées par le travail pour aller se restaurer, les restaurants chics seraient clairement too much, mais elle ne comptait pas emmener sa descendante dans un bar miteux, quelque chose de trop original ne serait pas à son gout et ces endroits étaient durs à trouver, elle était face à un épineux problème.

-Je dois juste ramener ces dossiers et j'arrive, tu peux m'attendre devant.

Ok, ça lui laissait le temps de trouver quelque chose, elle se retira avec quelques dossiers jusqu'au casier ou elle dégaina le smartphone que lui avait fourni la cour et fit quelques recherches, ses doigts dansant sur l'écran comme si elle avait fait ça toute sa vie, la vérité et qu'elle ne comprenait rien à cette technologie, son usage était cependant imprimé dans son esprit au fer rouge. Elle trouva rapidement un bistrot récent et correctement noté, spécialité burgers, de quoi combler au minimum la faim de frites. Ce n'était pas loin du QG en plus donc ça la ferait passer définitivement pour quelqu'un qui avait au moins l'idée de ce qu'elle proposait. Elle sortit en n'ayant rajouté à son très professionnel et gris tailleur qu'une veste tout aussi sobre, s'effacer pour mieux s'intégrer, elle avait l'air de la parfaite femme sérieuse, un stéréotype assez ancré dans les forces de police et bien pratique. Jinny l'attendait et elle lui fit un sourire confiant.

-Il y a le Benny's à deux rues d'ici. J'imagines que tu voudras accompagner ces frites d'un hamburger? Pas très diététique, mais tu l'éliminera plus facilement que moi.

Un grand sourire vint étirer les lèvres de Jinny sitôt que un accepta de céder à son invitation – un poing triomphant levé dans l’air, et la cowgirl se releva de sa chaise avec la grâce dégingandée de toutes les stars de western qui avaient façonné son enfance et sa façon d’être. Une sortie improvisée avec une autre âme esseulée, mais semblable à la sienne dans sa solitude – voilà qui lui convenait tout à fait, à elle qui ne planifiait rien, et improvisait tout. Et peut-être que si elle avait fait plus attention, peut-être que si elle avait été plus attentive, elle se serait rendue compte de ce qui lui rôdait autour. Des yeux posés sur elle dans l’ombre de Gotham. Des fantômes qui rôdaient autour d’elles. De la familiarité inexplicable entre elle et Sun, à laquelle elle aurait vraiment dû faire plus attention. Mais Jinny n’avait pas encore appris sa leçon, après l’incident Turnbull ; ou peut-être s’était-elle convaincue qu’il n’y avait aucune chance pour que la chose se répète aussi tôt, aucune chance pour que d’autres fantômes de l’héritage des Hex ne se manifeste après tout ce temps. Après tout, Cain l’avait mise en garde contre son frère à lui. Comme Jinny, ou qui que ce soit d’autre, aurait-elle pu prévoir l’impossible revenante qui errait dans son sillage sans se faire remarquer, en se fondant aussi parfaitement dans la masse ? Les loups étaient déjà rentrés dans la bergerie. Et à cet instant, Jinny aurait été bien incapable de remarquer le hibou qui s’était discrètement engouffré à leur suite.

Comme Sun le lui avait demandé, Jinny attendait devant le commissariat, les pouces accrochés aux passants de sa ceinture et ses pistolets sagement rangés dans ses holsters de part et d’autre de ses hanches. Gotham était vraiment une ville bizarre, et qu’elle ne portait pas vraiment dans son cœur ; pourtant, il fallait bien être honnête, il y avait quelque chose dans cette ville qui n’avait de cesse de la fasciner, et de l’attirer à elle. Une noirceur, un air inquiétant, une énergie, aurait-elle dit, si elle avait cru à ces trucs-là, qui lui donnait l’impression de tirer sur une corde qu’elle n’avait pas eu conscience d’avoir en elle. Comme si Gotham jouait avec le verrou d’une porte, quelque part dans son âme, qu’elle gardait d’habitude soigneusement fermée. Le regard perdu dans le vague, elle s’arracha à ses pensées lorsque la voix feutrée de Sun s’éleva à nouveau – et hop, le retour du sourire cordial et du regard assuré, comme si de rien n’était. C’était aussi simple que ça, de porter un masque ; pourquoi se casser la tête à se faire passer pour une chauve-souris, hein ? « Tu m’as eue à hamburger. C’est comme si tu me connaissais par cœur, j’en suis émue. » rétorqua Jinny, de l’humour dans la voix, alors qu’elle emboîtait le pas à sa compagne de la soirée. Un hamburger, des frites, de la bonne compagnie pour tenir à bout de bras les ombres de Gotham City. Elle ne pouvait pas imaginer meilleur plan pour la soirée.

Le Benny’s était un bistrot sans grande prétention, mais infiniment plus agréable que les bars un peu miteux dans lesquels elle traînait plus par nécessité professionnelle que par réel goût. Des banquettes confortables, de la musique pas trop envahissante, et leurs boissons et leurs plats qui arrivèrent assez rapidement, et voilà, Jinny se sentait déjà comme chez elle. Non seulement Sun était très sympathique – elle avait bon goût en matière de restos. Décidément, cette femme avait tout pour elle. « Avoue que ça vaut le coup d’envoyer valser les règles de la diététique, hein. » commenta-t-elle en souriant, avant de mordre dans une première frite – un vrai délice, après cette journée interminable. Et, puisqu’elles avaient enfin l’occasion de parler d’autre chose que du boulot, Jinny décida qu’il était temps de passer à l’offensive, et par là, elle voulait dire laisser libre cours à sa curiosité et voir si Sun accepterait de jouer le jeu, ou si elle préférerait se draper dans un peu de mystère, ce dont Jinny ne lui tiendrait même pas rigueur. Texas style, le droit à l’oubli tenait même à Gotham, quand on s’appelait Hex. « Et donc ? Tu me parles un peu de toi ? » demanda-t-elle après une gorgée de bière. « Je ne sais rigoureusement rien de toi à part ton nom et ton job. » Quelque part, un cowboy défiguré se retourna dans sa tombe. « T’es de Gotham ? Ca m’épate toujours un peu quand les gens disent qu’ils sont nés et ont grandi ici. Cette ville est tellement dingue, je me demande à chaque fois comment des enfants réussissent à grandir ici s’ils n’ont pas la chance de naître dans la bonne société. »

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Mei Ling savait en effet que comme beaucoup de jeunes de cette époque, sa descendante avait un faible pour les hamburgers, difficile de lui en vouloir, ce plat rendu célèbre par les immigrés allemands au milieu du siècle dernier avait tout pour plaire, à son époque déjà c'était un repas d'ouvrier, simple et complet, mais aujourd'hui c'était un des symboles de la cuisine de ce pays il se déclinait sous des centaines de formes, même des restaurants de luxe servaient ce plat. Mais Mei Ling savait aussi que Jinny, tout comme Jonah en son temps, avaient le goût des choses simples, en réalité si on parlait de la connaître, Mei Ling en savait en effet énormément sur elle, et sur ses fréquentations, ou elle allait, ce qu'elle faisait, ses adresses plus ou moins régulières, sa vie à Dipping Spring, ses liens avec le jeune Turnbull... son radar avait déjà capté un grand nombre d'infos, bien évidement elle était loin de se douter de tout, et ça la torturait d'imaginer ce qui pouvait bien combler ces vides dans son emploi du temps. Était-elle avec la Young Justice? En train de traquer un criminel en se faisant discrète? Depuis son réveil elle avait fait au mieux pour veiller au grain, mais parfois elle se sentait dépassée, ce nouveau monde allait vite, très vite, les voitures et les avions couvraient les distances comme si de rien n'était, même les voyages en bateau étaient plus court.

Le Benny's n'avait rien des palaces dans lesquels mangeaient les membres de la cour dont elle était parfois chargée de la protection, des établissements ou les repas pouvaient coûter plusieurs mois de salaires pour un homme normal, de son côté elle avait du mal à s'habituer à l'inflation et les prix sur le menu comme dans les allées des supermarchés était une chose qui la faisait toujours bloquer une petite seconde, ça et les systèmes de taxes et de pourboire, heureusement qu'elle n'avait pas à q'inquiéter de ses dépenses de manière générale, tant qu'elle s'en tenait à des achats classiques la cour lui fournissait assez d'argent pour faire ce qu'elle souhaitait. Mais ces considérations d'argent ne l'empêchait pas de garder l’œil sur les environs, une ville comme Gotham était toujours un risque et si elles étaient dans l'Old Gotham, on était jamais vraiment à l'abri qu'un cinglé vienne se remplir les poches, même si proche du commissariat. Déjà à l'époque la proximité d'un bureau de sheriff n'arrêtait pas les bandes d'attaquer des banques en pleine ville. Elle voyait les pistolets dans les holsters aux hanches de certains clients, elle reconnu quelques collègues, au moins il y avait des gens pour agir si ça dégénérait, mais elle ne l'espérait pas, profiter d'un repas avec sa descendante en échangeant quelques banalités était son seul programme pour ce soir.

Les burgers étaient épais, elle avait du mal à se faire au goût de la cuisine moderne, c'était fou comme les standards avaient changés au fil des années, tout était incroyablement sucré, une ressource qui était considéré comme un luxe aujourd'hui était présent dans la plupart des aliments, Jonah aurait sans doute eut quelques petites choses à dire sur le manque d'authenticité de tout ça, mais elle s'en moquait, elle reconnaissait que ce n'était pas spécialement mauvais et elle répondit à la remarque de Jinny sur la diététique par un grand sourire pendant qu'elle mâchait une bouchée juteuse de son hamburger, ce monde n'était plus le sien, les temps avaient changés, mais tout n'était pas si mal que ça. Jinny fut très vite curieuse, heureusement pour Mei Ling qui n'aimait pas l'idée de mentir à Jinny, toutes ces questions avaient des réponses qu'elle pouvait lui donner, le secret était de donner suffisamment de détails sans être précis, un art subtil qu'elle s'employa immédiatement à manier.

-Je ne suis pas née ici non, mais mes parents ont émigrés de notre village quand j'était jeune. J'ai grandi entre deux villes et j'ai finit par atterrir ici. Tu as raison, cette ville est dingue, mais j'ai toute ma vie ici maintenant, je ne peux pas partir... pas comme ça en tout cas.

Elle lui fit un sourire pour lui signifier qu'il n'y avait rien de triste là dedans.

-Mais j'ai prévu quelques changements.

Son sourire devint mystérieux et empli de malice, elle savait que Jinny avait dut affronter beaucoup ces dernières années, depuis que sa mère était morte, qu'elle avait hérité de la malle de Jonah et qu'elle avait quitté sa petite ville natale, elle méritait chaque goutte de sueur qu'elle versait pour son plan.

-Toi tu est par contre un pur produit du Texas.

Elle laissa échapper un petit rire pour soulever l'évidence de ce qu'elle disait.

-Le soleil doit te manquer ici, c'est pour ça que tu ne t'y plait pas, mais pour quelqu'un qui pratique ton métier, c'est un terrain aussi riche que le far west l'était.

Si aujourd'hui l'époque était plus civilisée, la justice avait toujours la possibilité d'attirer ceux désireux de prendre des risques pour quelques billets et rémunérant l'arrestation de criminels, si le terme de "mort ou vif" avait heureusement disparu et que les cadavres ne rapportaient plus rien, c'était une activité toujours aussi organisé qu'à son époque, ça au moins n'avait pas changé.

-C'est quand même un métier dangereux, tu n'a jamais pensé à arrêter?

Si Jinny cherchait ce soir à discuter avec une amie, Mei Ling elle était avant tout préoccupée par des questions d'autres natures, si elle ne pouvait pas dévoiler son jeu, pas tout de suite, elle pouvait toujours y aller en douceur pour en savoir plus sur Jinny et surtout sur comment la protéger de la cour.

Si Jinny ne se considérait pas comme une fille particulièrement intelligente – après tout, elle avait terminé ses études secondaires avec une note dépassant à peine la moyenne, pas vraiment du genre académique – elle estimait au moins mériter l’épithète de futée. D’avoir un sens du jugement relativement solide et des capacités d’observation pas trop mauvaises. Bref, de maîtriser les compétences de base de survie en milieu humain hostile. Et pourtant, sans qu’elle n’en ait encore conscience, les gamelles et les ratés spectaculaires s’accumulaient les uns à la suite des autres. Un voisin qui n’était pas qui il affirmait être. Un type ramassé au bord de la route, devenu un ami, puis révélé un ennemi mortel. Un homme d’affaires de son sud natal qui n’était pas plus ce qu’il avait affirmé être que ce brave Fletcher. Et maintenant, une collègue de travail qui était en réalité bien plus que ça. Les fantômes s’accumulaient autour d’elle à une vitesse alarmante, et Jinny, pauvre Jinny, toute Hex qu’elle fut, ne voyait rien venir. Elle avait loupé le coche, une fois, deux fois, trois fois, quatre fois, et l’une de ces fois avait été si traumatique qu’elle s’était prise à soupçonner tout le monde, tout autour d’elle, de lui cacher quelque chose. Même les copains de la Young Justice. Même le sergent Bullock. Et puis, elle s’était forcée à ne pas céder à la paranoïa que son altercation avec Cain avait instillée en elle ; mais peut-être qu’en contrepartie, elle s’était trop engouffrée dans la voie opposée. Ne plus assez douter, de peur de trop douter et de faire de sa propre vie un enfer. L’équilibre n’existait plus, la balance avait volé en éclats, et elle, elle n’arrivait plus à retrouver pied sur ce fil délicat. Et dire que Cain et les Turnbull n’étaient que le début d’une longue dégringolade – il devait s’en retourner dans sa tombe, ce pauvre Jonah.

En même temps, qui aurait pu la blâmer, la descendante inconsciente de la comédie qui se jouait sous ses yeux ? Sun était tellement convaincante, dans son rôle de madame-tout-le-monde, d’employée de bureau discrète et efficace, tellement convaincante que Jinny y croyait à mille pour cent. Tellement convaincante qu’elle arrivait à feindre cette modestie trompeuse, celle des gens qui font semblant de s’ouvrir aux autres pour finalement n’en dire que le strict minimum, et ce qui aurait pu passer pour de la duplicité, dans sa bouche, devenait l’ineffable sincérité d’une femme réservée, telle que Sun était censée être. Jinny n’y voyait que du feu. Tant et si bien qu’elle lui retourna son sourire malicieux, même après ce suspense terrible qu’elle lui infligeait. « Des changements, hein ? » répéta-t-elle en portant son verre à ses lèvres. « Tu m’inviteras à ton pot de départ si tu pars de Gotham, j’espère. Le GCPD serait bien plus ennuyeux sans toi. » Si Sun ne voulait pas lui en dire plus pour le moment, alors elle ne presserait pas la question. Et d’ici quelques temps, elle songerait, en rétrospective, qu’elle aurait vraiment dû. Et elle aussi laissa échapper un rire face à l’évidence du propos, et elle se laissa aller contre son dossier en relevant son chapeau d’une pichenette. « Je suis sûre que c’est seulement l’accent, qui te fait dire ça. » Quand on se baladait dans un accoutrement pareil, on ne survivait pas sans un peu d’autodérision, alors Jinny en avait à la pelle. Ridicule, peut-être, dans un monde où le Far West avait disparu depuis une bonne centaine d’années, mais qu’était la vie sans un peu de fantaisie pour l’égayer.

La dernière question de Sun lui fit relever les yeux de son burger pour croiser son regard. Arrêter, hein ? Jinny reposa son burger, prenant le temps de finir sa bouchée – sa mère l’avait bien élevée, quand même - et surtout, de la réflexion. Parce que si cette vie lui plaisait, chasseuse de primes n’était pas non plus une vocation à laquelle elle se sentait particulièrement dépendante, merci bien. « Well. Comme tu le dis si bien, on n’est plus au Far West. C’est sûr que c’est pas le métier le plus sécuritaire du monde, mais il y a quand même plus de protocoles qu’avant. Et même si les fugitifs que j’attrape à Gotham sont parfois de vrais cinglés, la majorité restent des idiots qui lèvent les mains l’air ou les passent dans les menottes quand je le leur demande. » répondit-elle, avant de hausser les épaules. « C’est sûr que c’est pas ce que je m’imaginais faire quand j’étais petite. » Mais qui dans ce monde finissait par faire ce qu’ils imaginaient quand ils étaient gosses ? Et puis, avant de quitter Dripping Springs, le seul avenir tangible qu’elle s’était imaginé, c’était de reprendre le garage de sa mère, et suivre son plan de rester planquée dans cette petite bourgade sans histoire. Entre ça, et prendre des risques à Gotham et Metropolis, honnêtement, le choix était vite vu. A croire que chez les Hex, on avait toujours un pied dans la valise, et le goût du risque sur le bout de la langue. Peut-être même qu’en cherchant à les fondre dans la masse, sa mère n’avait fait qu’aiguiser ce goût-là chez sa propre fille. « Peut-être que j’arrêterai un jour. Sans doute, même. Quand je m’ennuierai, que je trouverai autre chose à faire. Je ne prévois pas de faire ça toute ma vie, mais pour le moment, ça me convient. » L’incarnation de la vie au jour le jour. C’était déjà un miracle quand elle pensait à son emploi du temps plus de deux jours en avance, alors le reste de sa vie… A nouveau, Jinny se fendit d’un petit rire. Après tout, pourquoi ne pas en rire, hein ? « Et puis, ma mère me maudirait de parler comme ça, mais… c’est de famille. » Hop, une maman qui se retournait dans sa tombe, elle aussi. Bientôt le bingo complet, songea-t-elle en sondant l’expression de Sun. « Tu trouves que c’est bizarre, comme raisonnement ? » Après tout, elle en aurait bien le droit. Les Hex n’avait pas exactement une réputation de gens sains d’esprit, au final.

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C'était encore plus douloureux de la voir aussi positive en sachant qu'elle devrait l'arracher à tout ce qu'elle connaissait, disparaître avec elle, la priver de ses proches, des gens qu'elle aimait. Mais elle ne pouvait pas prendre le risque, elle ne pouvait pas laisser à la cour une seule chance de s'en prendre à sa famille, leurs menaces n'avaient fait qu'attiser son envie de se sortir de là, comme un animal en cage elle mordrait, grifferait et verserait jusqu'à la dernière goutte de sang, elle serait tel le tigre défendant son territoire.

Le chapeau de Jinny la renvoyait à d'autres mauvais choix qu'elle avait fait, d'autres erreurs qu'elle avait commise et pour lesquelles sans doute aujourd'hui elle était punie, mais elle affronterait l'épreuve avec courage, peu importait l'envie de la prendre dans ses bras, l'envie de tout lui dire et de partir sur le champs, elle devait serrer les dents et garder la tête froide. Ce n'était pas comme si elle cachait le fait d'être issu de la famille de ses ennemis mortels, elle était son ange gardien, quelque chose que le petit plaisantin qui jouait au plus fin avec sa descendante allait devoir finir par expliquer si il tenait à conserver la pleine possession de ses moyens, Mei Ling ne voulait aucun mal à ce jeune garçon, mais elle ne pouvait pas laisser le moindre détail faire foirer son plan. Et le détail était pourtant de taille, car elle ignorait la portée exacte du lien qui unissait Jinny et Cain, la même ironie cruelle qui l'avait liée à Jonah par le passé avait décidé de faire des siennes avec sa descendante, comme si les Hex allaient de pair avec la mort et l'odeur âcre de la poudre à canon. Une pensée qui semblait confirmée par la rouquine, elle semblait si pure dans sa démarche qu'elle n'avait même pas le cœur de vraiment la contredire, la culpabilité rongeait Mei Ling plus que jamais, comme le fait de demander à Jonah de ranger ses armes et de laisser derrière lui la mort l'avait fait souffrir, mais elle avait le devoir de les sauver d'eux-même. Un frisson la parcourait quand elle entendait Jinny dire que c'était de famille.

Sa question lui tira un sourire, il était normal à son âge de douter sur pas mal de choses, elle était jeune quand elle avait connu Jonah, mais malgré ce qui avait fait d'eux des âmes soeurs, malgré les liens qu'ils avaient issés, elle avait parfois et des doutes, avec le temps ces pensées s'effaçaient un peu plus, et pour elle qui avait dépassé le centennaire, son esprit n'était pas souvent en proie à ce sentiment, elle avait appris que toute décision apportait sa part de douleur et qu'elle devait y faire face pour ne pas succomber, Jinny avait tout simplement changé sa résolution, donné un vrai sens à sa non-vie.

-Nous avons grandis dans des mondes différents, et je ne parle pas de région géographique. Ta génération ne peut pas se limiter à une seule chose, le monde est plus vaste qu'à mon époque, donc je ne penses pas que tu sois bizarre.

Elle lui fit un regard malicieux.

-Pas pour ça en tout cas.

Elle avait du mal à conserver entièrement sa façade professionnelle malgré tout, le désir de se rapprocher de Jinny était trop fort, elle voulait tout savoir sur elle, jusqu'au moindre détail, Jinny était un peu la fille qu'elle n'avait jamais eut et elle espérait pouvoir devenir une mère pour elle.

-Ta tenue, ça c'est bizarre.

Elle lui piqua son Stetson d'un geste rapide pour le mettre sur sa propre tête avec un petit rire, elle prit la pose, les doigts sur l'avant et le visage un peu baissé avant de lui rendre d'un autre geste fluide.

-Mais j'avoue que y'a un style, les garçons doivent être dingues.

Elle n'avait jamais vu Jinny avec d'autres garçons ceci dit, mais encore une fois elle ne la surveillait pas en permanence, un petit-ami pouvait être à prendre en compte dans ses plans, les filles de son âge pouvait facilement s'attacher; c'était le temps qui mettait à l'épreuve ces relations, et la faire disparaître ferait voler en éclat un telle relation naissante, elle ne voulait pas passer pour la méchante et se compliquer la tâche en devant la convaincre de laisser derrière elle un beau gosse quelconque.

-Mon ex-mari et moi on voulait aller à Paris un jour, il disait que c'était là-bas qu'ils faisaient les plus belles robes, et il voulait m'offrir la plus belle de toute.

Jonah avait toujours eut de grand rêves et la volonté de la couvrir d'amour et d'attention.

-Et toi, un futur prétendant?

Jinny rendit à Sun son regard malicieux et un sourire en coin – elle ne se serait même pas vexé si elle l’avait trouvée bizarre, avec sa philosophie de vie, mais elle devait bien avouer, il y avait quelque chose de rafraîchissant dans la sagesse détachée de sa compagne du soir. Quel âge elle pouvait bien avoir, Sun – la trentaine tardive ? Peut-être quarante ans, à tout casser. Et quand même, elle donnait à Jinny l’impression d’avoir la sagesse un peu résignée de ceux qui ont vécu une très longue vie, et vu tellement de choses que plus grand-chose ne peut les surprendre. Et pourtant, elle restait parfaitement silencieuse, parfaitement discrète sur sa propre vie privée, comme si elle s’amusait à cultiver un certain mystère. Si Jinny avait été de nature paranoïaque – et au vu des récents événements, elle aurait sans doute dû l’être, et l’avenir s’empresserait bientôt de le lui confirmer – elle aurait pu y voir une volonté de lui cacher quelque chose. Il y avait beaucoup de gens, ces temps-ci, qui avaient envie de lui cacher des choses, à Jinny. Ces temps-ci, et depuis bien longtemps, en fait. A croire que quelqu’un, quelque part, avait décrété qu’elle n’était qu’une pauvre pomme bonne à balader de droite à gauche, et avait fait tourner le message à toutes les personnes qui auraient un jour un rôle significatif à jouer dans la vie de la dernière des Hex. On en frisait la comédie, et Sun, ou Mei Ling, n’était que le dernier acte avant le grand final. Pour le moment.

A sa remarque, Jinny baissa les yeux sur sa tenue, et laissa échapper un rire. « Touché. » admit-elle, volontiers bonne joueuse quand il s’agissait de son accoutrement. Mais hé, elle y tenait, au look de cowgirl. Et puis, mieux valait faire rire ou sourire les gens qu’elle croisait que les faire pleurer, pas vrai ? Elle émit un vaguement grognement de protestation quand Sun lui pique son chapeau – hééééé c’est sacré un chapeau ! – mais la laissa finalement l’arborer fièrement, restant, elle, nue-tête, avec des épis de mèches rousses sortant de sa queue de cheval. « Pft. Avec les garçons, pas tellement non. » confessa-t-elle avec amusement en récupérant son couvre-chef. L’expérience avait plutôt prouvé que le look cowgirl – le sien, pas la version shorts en jean très courts et chemise nouée au-dessus du ventre – tendait plus à les faire fuir. « Avec les filles, par contre… » Et Jinny de laisser sa phrase en suspense avec un air malicieux sur le visage. Quoi ? C’était vrai ! Enfin, c’était la tendance qu’elle avait toujours observée, quoi. Et puis, pour la première fois, Sun lâcha un semblant d’information personnelle. Un ex-mari. Sun avait donc été mariée ? Puis divorcée ? Une lueur d’intérêt s’alluma dans les yeux de Jinny, qui prit néanmoins soin de ne pas commencer d’interrogatoire intrusif. Chaque chose en son temps. Alors à la place, Jinny porta son verre à ses lèvres, et étouffa un rire dans sa bière.

« Moi ? Ouhlàlà. » répondit-elle en riant sous cape. « Nan. On peut pas dire que ce soit une priorité, en ce moment. Et puis, je bouge partout et je travaille avec des aliens et des ninjas surentraînés. Je suis pas vraiment du bon dating material. » Elle haussa les épaules, pas vraiment attristée par ce constat. Elle n’avait rien connu de très sérieux depuis Dripping Springs, et franchement, c’était sans doute pas plus mal. « Disons qu’être seule, ça a du bon aussi. » Sans aller jusqu’à se fermer à la possibilité de retrouver quelqu’un un jour, ça n’était absolument pas dans sa to-do list imminente, merci bien. « Et toi, t’as parlé d’un ex-mari ? » Bon d’accord, elle était incapable de contenir sa curiosité. Mais elle n’avait pas envie de forcer Sun dans une discussion inconfortable, donc elle opta pour une approche qu’elle espérait un peu moins frontale. « C’est marrant, partir à Paris parce qu’ils y font les plus belles robes, c’est le genre de truc que je me serais attendue à lire dans les vieux romans. Genre Jane Austen, tout ça. » commenta-t-elle avec un sourire amusé, mais dénué de toute moquerie. « Il était du genre old school ? » Elle n’arrivait vraiment pas à imaginer quel genre d’homme pouvait bien être le type de Sun. Parce que Sun était encore un canevas vierge sur lequel elle ne pouvait imprimer que très peu d’informations – des points d’interrogations, où qu’elle regarde. « Désolée. J’espère ne pas être trop indiscrète. » ajouta-t-elle, offrant à Sun la porte de sortie de cette conversation si elle le souhaitait. Principe numéro 1 du Texas et du Far West, après tout : le droit à l’oubli. Même ici, à Gotham.

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Elle n'eut pas vraiment de réaction quand Jinny mentionna que son look plaisait aux demoiselles, Mei Ling avait compris depuis longtemps que le monde actuel était trop différent du sien pour que de vieilles valeurs ne vienne troubler sa vision des choses, peu lui importait sur quelle rive Jinny pratiquait le tango horizontal tant qu'elle y trouvait son bonheur. C'était bien la seule chose qu'elle pouvait se permettre de vouloir en sachant ce qu'elle comptait bientôt lui faire subir. Comment réagirait-elle à sa duplicité? L'appréhension de ses multiples réactions possibles la pétrifiait au plus profond de son être parfois, au point que le fait qu'elle pense que son amie Sun était une folle bonne pour Arkham lors de la révélation lui semblait presque une bonne chose. Mais ce dont elle avait peur c'était du rejet, de perdre sa connexion avec Jinny et qu'elle prenne de mauvaise décision à cause de ça. Ce n'était pas tout les jours qu'un ancêtre censé être enterré et oublié revenait en chaire et en os pour vous dire qu'il vous embarquait loin afin de vous protéger, elle ne pouvait qu'espérer que Jinny serait compréhensive, mais au final c'était à elle que revenait le choix de la croire ou non le moment venu. Était-elle une mauvaise personne? Seul le temps répondrait à la question. Malgré ça, Mei Ling espérait que sa descendante aussi puisse trouver quelqu'un de spécial, une personne qui changerait sa vie pour le mieux et révélerait la meilleure partie d'elle-même comme Jonah et elle, elle se reconnaissait en elle quand elle disait que son train de vie faisait fuir les dates potentiels, le père de Mei Ling lui avait souvent  dit que pour qu'un homme s'intéresse à elle, elle devait être tel le chaton et laisser le tigre en cage, que son fort caractère ferait fuir les hommes, elle savait depuis qu'il suffisait de tomber sur la bonne personne.

Elle n'eut pas vraiment le temps d'en profiter que Jinny rebondissait avec maîtrise sur l'information qu'elle avait laissé échapper juste avant, elle qui ne voulait pas mentir à Jinny redoutait une seul et unique question, celle concernant le nom de ce mystérieux ex-mari. Mais fort heureusement pour elle la curiosité de Jinny se portait sur le type d'homme qu'il était, une question bien plus facile à répondre, même si trop en dire pourrait totalement exploser sa couverture, elle devait donc se méfier à ne pas sombrer dans la nostalgie, Jonah et elle avait partagé quelque chose que peu de gens ont la chance de connaître au cours de leur existence. Si aujourd'hui ce temps avec lui pouvait sembler peu au regard de sa longue vie, elle conservait farouchement ses souvenirs de cette époque, s'en séparer voudrait dire que cela n'avait pas eut d'importance, et en voyant la rouquine devant elle avec son grand sourire et son stetson, elle était persuadée que ce n'était pas le cas et que les sacrifices qu'elle ferait dans le futur en valaient aussi le coup.

-Plutôt en avance sur son temps en fait, à l'époque les hommes et les femmes avaient des rapports un peu différents, je n'ai jamais été un trophée même si il était protecteur, il m'encourageait du mieux qu'il pouvait. Mais la vie as quand même fini par nous séparer, son travail était dangereux et lui as attiré de nombreux ennemis, j'était la femme de sa vie, mais il était incapable d'arrêter.

Combien de disputes? Combien de fois avaient-ils discuté de la nécessité de s'éloigner de la trainée de morts que Jonah laissait dans son sillage? C'était le mal qui habite le cœur des Hex qui l'avait arraché à elle, puis qui avait réclamé leur fils.

-Il était chasseur de prime aussi, et j'ai finit par le perdre. Le jour ou tu trouvera la personne qu'il te faut, j'espère que tu fera le bon choix.

Elle n'avait pas l'air spécialement triste, le temps et la cour avaient finit par effacer toute peine concernant le destin funeste de Jonah, elle ne l'oubliait pas, mais son deuil était fait, l'homme de sa vie n'était plus et elle vivait avec, et puis ce n'était pas comme si elle était vraiment seule, Jinny était là, bien vivante, c'était elle désormais la priorité.

-Mais ne t'inquiète pas, quand tu trouvera la bonne paire de chaussure, tu le saura. Tu est encore jeune, tu as la vie devant toi. Essayes de profiter.

Elle s'efforçait de ne pas trop croiser son regard en disant tout ça, comme si elle avait peur que sa supercherie soit démasquée. Elle dévisageait le somptueux burger entre ses mains. Elle finit par relever la tête avec un sourire.

-Comme devait te le dire ta mère : ""tu comprendra plus tard".

Une phrase d'adulte assez typique.

-Mais pour être moins cryptique : "La seule bonne réponse est celle que tu trouvera". Mon vécu et le tiens seront sans doute très différents.

Elle comptait bien s'en assurer.

-Tu devra trouver ta propre voie. Avec tes amis de la Young Justice pourquoi pas, tout ces costumes moulants, l'ambiance doit être spéciale.

Elle laissa s'échapper un nouveau rire léger avant de mordre dans son burger.

Codage par Libella sur Graphiorum réarrangé pour usage personnel

Un autre chasseur de primes ? Ca c’était de la coïncidence. Jinny accueillit la confession en arquant les sourcils, surprise que Sun ne le lui ait jamais dit auparavant, surprise aussi de constater à quel point le monde était petit. La profession n’était plus exactement courante, de nos jours. Mais justement, c’était bien ça qui l’étonnait dans le secret de Sun à ce sujet : est-ce que ça n’était pas pile le genre de situation dans laquelle, lors d’une première rencontre, elle aurait pu lui dire ‘oh, ça alors, mon mari aussi était chausseur de primes !’. Malgré elle, par réflexe, un réflexe un peu honteux, à vrai dire, Jinny sentit une minuscule alarme pointer le bout de son nez dans sa tête, cette impression fugace que quelque chose d’important venait d’être dit, sans qu’elle ne puisse expliquer quoi exactement. Alors que, finalement, se raisonna-t-elle, il n’y avait probablement rien de suspicieux là-dessous. Peut-être que leur séparation, ou leur divorce, avait été douloureux. Peut-être que Sun n’avait pas eu envie d’étaler sa vie privée si vite avec une parfaite inconnue. Peut-être était-elle simplement vraiment très réservée et avait préféré attendre avant de lui révéler cette curieuse anecdote. Voilà, c’était sûrement ça. Rien de louche là-dessous. Arrête de voir le mal partout, Jinny, se sermonna-t-elle. Ce n’était pas parce qu’une personne lui avait planté un couteau dans le dos – ou presque une balle dans le flanc – que tout le monde, subitement, jouait double-jeu. Mais quand même, et si… ? Non. Sun était une collègue de travail. Sun ne lui voulait aucun mal. Tout ça n’était qu’une coïncidence rigolote et il y avait plein de raisons valables pour ne pas le lui avoir dit avant.

Bon sang, qu’il était difficile, depuis que les Turnbull s’était crashés avec pertes et fracas dans sa vie, de ne pas céder à cet instinct paranoïaque que sa mère avait si subtilement implanté dans son crâne, et qu’elle avait si bien ignoré pendant vingt-quatre ans. Et dire qu’elle avait assuré à Conner qu’il était possible de se détacher des parts d’ombre de leurs histoires de famille. Visiblement, c’était à elle de se le prouver, maintenant. Elle le disait bien elle-même, Sun. T’es encore jeune, t’as la vie devant toi. Bon d’accord, elle le disait en parlant d’un hypothétique amour de sa vie, pas d’une guerre historique entre deux familles, mais quand même, l’idée était là, et Jinny sourit face à ce petit moment de réconfort. « Ouais, elle me le disait… presque tous les jours. Même quand j’ai eu dix-huit ans. » ricana-t-elle en faisant semblant de se concentrer sur sa bière. C’est marrant, elle ne s’était jamais attendue à ce que Sun soit du genre aussi optimiste, ni rassurante. Au quotidien, elle présentait un visage plutôt stoïque, presque austère – mais Jinny était plus que ravie de lui découvrir ce petit côté plus mature et chaleureux. Un peu comme une grande sœur qui donnerait des conseils de vie à sa cadette. Marrant, comme constat. « M’en parle pas, j’en ai toujours pas trouvé un seul pour m’expliquer à quoi ça servait, tout ce spandex. On m’enlèvera pas de l’idée qu’un bon vieux jean, c’est tout aussi valable. » rétorqua-t-elle avec le même humour. Ca aussi, le sens de l’humour et de la pique, elle ne s’y était pas attendue, de la part de Sun, mais maintenant qu’elle le lui montrait dans toute sa splendeur, elle trouvait que ça lui allait bien, Jinny. Décidément, elle avait bien fait de suggérer cette petite sortie imprévue. Elle ne se sentait pas nécessairement seule, la cowgirl, mais elle aimait bien ça, les nouvelles rencontres, et cultiver ces rencontres hasardeuses que la vie mettait sur son chemin. Et Sun avait l’air bien partie pour rejoindre ce joyeux album mental de visages marquants de ses tribulations de voyageuse.

« Tu sais que je m’y suis retrouvée complètement par accident, à la Young Justice ? » renchérit Jinny en piochant dans ses frites. « Je leur suis tombée dessus en arrivant à Metropolis pour la première fois, en pleine attaque du Syndicat du Crime. Ils étaient là quand j’ai tiré sur des trucs envoyés par Ultraman, Owlman et leur clique, et bim. Avant que je ne réalise ce qui se passe, on me dit que je peux faire partie de la bande. » Elle n’en revenait toujours pas, d’ailleurs. Et elle savait très bien ce que sa mère en penserait, si elle était encore là pour en penser quelque chose. Blasée de la voir se jeter la tête la première dans les feux de la rampe de la sorte. Et un peu fière, elle l’espérait, de voir sa fille montrer les crocs face à des gros machins qui font peur. Comme ce petit sourire qu’elle lui avait vu, juste au coin des lèvres, quelques heures avant de rendre son dernier souffle, quand sa fille était rentrée après avoir arrêté seule un hold-up au bowling du coin. Oui, bon, y avait un monde, entre un hold-up et le Syndicat du Crime, mais quand même. « Je me moque, mais c’est une chouette bande. Enfin, je m’y sens un peu comme une intruse, parfois. Ils ont tous des mentors super célèbres, presque, et moi… » Hop, nouvelle frite engouffrée. « Le type célèbre à cause duquel j’ai fini par les rejoindre est dans la tombe depuis un bon siècle. Ca rend la conversation et le côté maître Yoda – Padawan un peu compliqué. » Qu’elle dit en se marrant. Heureusement, elle avait trouvé un autre maître Yoda, à peu près aussi recommandable que Jonah d’ailleurs. « J’imagine que toi, rejoindre la GCPD, c’était un processus un peu normal et moins hasardeux que ça. » supposa-t-elle en dissimulant une interrogation dans son hypothèse.

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Difficile de ne pas rire de bon coeur au tableau de la Young Justice dépeint par Jinny, on semblait plus proche d'une fraternité universitaire que d'une organisation sérieuse comme ils semblaient en avoir l'air. C'est que les supers devaient composer avec leur image et elle espérait que les manières Texannes de Jinny et son héritages n'était pas une ombre au tableau si parfait de cette bande de jeunes en costumes flashys. Elle savait tout le mal que pouvait causer le fait d'être mis au ban d'un groupe, sa propre famille ayant très mal vécu son union avec un blanc. Mais c'était une époque bien différente, plus tolérante même si tout n'était pas encore fait quand elle entendait certaines plaisanteries au poste.

C'était une époque vraiment unique en son genre, entachée par les erreurs du passé comme le soulignait si Justement sa descendante qui semblait presque regretter son lignage moins prestigieux en apparence, Jonah avait pourtant fait lui aussi partie d'un groupe de redresseurs de tort, même si son aide était très périodique, et le métier de chasseur de rpime n'avait que peu de différence avec celui de justicier, ou d'assassin. Elle sentit un bref instant une grande honte d'ainsi profiter d'un instant privilégié malgré tout ses crimes, car dans son plan pour fuir la cour, elle ne savait pas encore si Jinny la pardonnerait, elle ne savait pas si elle pourrait accepter le poids de tout ces morts, la pensée la paralysa un bref instant, manquant presque sa plaisanterie sur la mort de Jonah. Elle n'avait pas oublié le visage de cet homme, il était difficile à oublier, elle n'avait pas oublié l'amour qui les unissait, elle sembla un peu pensive quand Jinny arriva à son entrée dans le GCPD.

-He bien j'ai pas mal bougé quand j'était plus jeune, donc j'ai passé un concours administratif dès que j'ai posé mes valises, je l'ai passé haut la main et j'ai été recrutée au service de comptabilité, puis de paye et enfin les primes, j'était dans le Diamond District jusqu'à l'affaire de corruption du Pingouin qui faisait régler ses comptes par le biais du service, et après la purge j'ai été mutée au QG.

Elle avala une pauvre fritte sans défense en fixant Jinny, c'était une histoire connue qui avait impliqué un bon quart du poste, les effectifs avaient été "rajeunis" en conséquence, une preuve supplémentaire de l'influence du personnage tristement célèbre.

-Et tu as débarqué à mon bureau.

Une rencontre préparée avec soin, les ressources de la cour lui ayant permis de bien se renseigner au sujet de Jinny, elle savait pour sa petite escapade à Metropolis contre le syndicat.

-Depuis je ne m'ennuie pas.

Elle lui offrit un sourire prononcé, ça non elle n'avait pas vraiment le temps de se reposer, la cour occupait une grande partie de son temps aussi après tout.

-Et Jonah, tu sait quoi de lui? Elle te disait quoi ta mère?

Si elle n'avait jamais dit le moindre mal de lui à leur fils Jason, elle savait qu'il avait une profonde rancœur envers lui, elle espérait que cela n'avait pas perduré Jonah n'était certainement pas parfait, mais elle espérait que sa descendance ne portait aucune rancune particulière à son égard. La vérité est une chose complexe.

-J'ai vu un reportage une fois, il avait l'air doué.

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Elle gobait tout, Jinny – toutes les couleuvres servies par sa prétendue collègue, brûlée par une trahison déjà, mais pas assez fine observatrice, semblait-il, pour voir la suivante arriver. Pauvre gamine plus si gamine que ça, mais à qui il restait tout à apprendre alors qu’au-dessus de leurs têtes à toutes les deux, rôdaient les ombres menaçantes des hiboux. En attendant, elle y croyait, à Sun, à son histoire, à ses concours pas franchement folichons mais cohérents, à l’histoire d’une bureaucrate sans histoire dans les bureaux gris des commissariats de police de Gotham City. Un fait divers lâché exactement au bon moment, pour noyer un peu plus le poisson sans qu’elle ne se rendre compte de rien, et Jinny hochait la tête, pensant avoir devant les yeux un récit parfaitement cohérent et réaliste. Pire que réaliste, réel. Et Jinny de sourire, persuadée d’être dans la confidence de cette collègue discrète et austère, mais sympathique et attachant sitôt qu’on prenait la peine de s’attarder un peu à ses côtés. « Je suis ravie d’égayer tes journées de compta’, alors. » conclut la rouquine en faisant tinter son verre contre le sien. Passer ses journées derrière un bureau – brr, quelle horreur. Jamais Jinny ne pourrait s’imaginer faire ça. Comment Sun ou qui que ce soit d’autre y arrivait sans avoir envie de se taper la tête contre un mur, ça lui échapperait toujours.

Et Jonah ? Jinny arqua un sourcil, un peu surprise par la question – bon d’accord, elle avait amené le sujet sur la table, mais c’était pas tous les jours que quiconque prenait la peine de s’attarder sur ses vieilles histoires familiales. Sauf pour tenter de lui coller du plomb entre les deux yeux. Haha, qu’elle était drôle. Jinny prit le temps de réfléchir en mastiquant sa dernière bouchée de burger et sa dernière frite ; Jonah, Jonah, vaste sujet, le vieux Jonah. « Hm, doué, c’est une façon de le dire, j’imagine. » songea-t-elle à voix haute en haussant les épaules, avant de caler ses bras sur l’arrière de la banquette. « Pour être honnête, j’en sais pas tant que ça que lui. Ma mère non plus d’ailleurs. Tout ce qu’on sait vraiment de lui, c’est ce que les historiens ont bien voulu en dire dans les quelques bouquins qu’on a entreposés à la maison, et quelques papiers qui nous sont revenus en héritage. » Autrement dit, Jonah Hex était un véritable puzzle. Même pour ses descendantes directes.

« Y en a qui disent que c’était un héros, d’autres que c’était un psychopathe digne d’Arkham Asylum. Moi je pense qu’il y a sûrement un peu de vrai dans les deux. Ou pas du tout. » Ca remontait à trop loin, tout ça – et en même temps, pas tant que ça, mais à part un coffre rempli de babioles capables d’anéantir le monde, Jonah ne leur avait pas laissé grand-chose en mesure de reconstituer de lui un portrait fidèle. « On n’a pas beaucoup d’éléments pour nous dire quel genre de type était Jonah, à part qu’il a tué beaucoup de gens. Du coup, moi je pense que c’était le genre d’homme à n’en avoir pas grand-chose à faire, de sa réputation. Ou de la postérité. Et qu’on ne saura probablement jamais exactement qui il était, ni pourquoi il a fait tout ce qu’il a fait. » déclara Jinny avec toute la nonchalance de son Texas natal. Et si elle n’avait guère de difficulté à partager ses pensées au sujet de Jonah avec Sun, en revanche, elle garda bien soigneusement pour elle l’existence de sa fameuse malle. Ce truc-là lui avait attiré assez d’ennuis comme ça pour qu’elle prenne le risque de divulguer quoi que ce soit d’autre à son sujet. « C’est une légende, aujourd’hui, ce brave Jonah. Chacun en fait ce qu’il veut, comme ça l’arrange. » Un héros, ou un monstre. L’histoire n’était qu’une question de perspective, après tout. « C’est pas comme s’il pouvait revenir d’entre les morts pour nous corriger, de toute façon. » Pas vrai ?

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Our last name spells trouble

C'était vraiment déchirant de découvrir à quel point la mémoire de Jonah ne lui avait pas survécu, à quel point la colère de Jason avait écarté toute possibilité pour ses descendants de découvrir la vérité, un autre feu qu'elle n'avait sut éteindre, un autre échec. Mais Jiny semblait déjà bien plus facile à ce niveau, Mei Ling était heureuse de voir qu'elle semblait avoir la tête sur les épaules, qu'elle réfléchissait par elle-même et ne se contentait pas de suivre aveuglément des on-dit et des récits subjectifs. Elle apprendrait la vérité en temps voulu de toute façon, mais ça lui faisait plaisir de constater que la rouquine avait un tel état d'esprit, c'était une chose qui caractérisait sans mal les membres de la famille, celle de juger les choses telles qu'elles venaient, ne pas se presser sans en savoir plus. Jonah avait conservé la vie un nombre incroyable de fois en faisant preuve de cette même mesure, de cette prudence naturelle presque flegmatique. Il devait être fier le cow boy en voyant ce qu'elle était devenue, elle aussi ressentait de la fierté, l'un dans l'autre, ça n'avait pas tourné si mal que ça, ou que ça aurait put. Malgré tout elle voyait clair sur certains points, pendant une grande partie de sa vie, son ancêtre avait été un homme pour qui peu de choses avaient de l'importance, ou du moins qui faisait tout pour que ça en ais l'air, il avait été abandonné et rejeté tellement de fois, mais ça n'avait jamais effacé l'homme bon qu'il était, l'homme qui aurait donné sa vie sans hésiter pour les autres si il tenait un tant soit peu à eux. Elle s'interrompit dans la dégustation du plat qui disparaissait pendant que la discussion avançait.

-Dommage, j'avoue qu'il a l'air fascinant, mais le reportage parlait surtout de son statut de tireur le plus rapide, apparemment c'était quelque chose d'énorme à l'époque.

Le chasseur de prime avait en effet une dextérité impressionnante, une coordination sans faille et une connaissance des armes à feu et de leur maniement qui dépassait l'entendement humain, il était même allé jusqu'à customiser toutes les armes qu'il avait possédé afin de maximiser leur maniabilité au combat, le nombre de stratagèmes et de techniques qu'il avait mises au point poussait au respect. De son côté sa haine des armes à feu, son mépris pour ces engins de mort et l'absolue brutalité qu'elles incarnaient lui en interdisait l'usage, mais elle pouvait au moins reconnaître à Jonah qu'il était un homme intelligent et rusé en plus d'être exceptionnellement entraîné, au moins aussi dur qu'elle l'avait été au cirque, juste dans d'autres domaines. Elle avait aussi aimé cela en lui, sa discipline.

-Mais tu as bien raison, peu de chance qu'il vienne te dire la vérité lui-même, même si par les temps qui courent, tout semble possible.

De toute façon il n'était pas du genre à imposer des choses aux autres tant qu'ils ne lui marchaient pas sur les pieds, Jonah avait le sang chaud, mais pas un naturel belliqueux, comme le percevait au final Jinny, il était bien plus complexe que cela.

-Brainiac as au moins eut la gentillesse de nous prévenir tu me dira, il met encore plus la panique que Darkseid celui-là. J'ai entendu dire que la mairie mettait un plan d'évacuation en place en cas d'attaque sur la ville, j'ai reçu un memo ce matin, j'imagines que toi et tes amis flashys vous allez être répartis un peu partout.

La plus grosse épine dans le flanc de son plan, Brainiac était le genre d'imprévu qu'elle aurait préféré ne pas avoir, non pas qu'il précipitait les choses, mais elle serait impuissante si il arrivait à ses fins, les Hiboux avaient sans doute leurs plans de secours, mais elle et Jinny seraient sacrifiées sans une once d'hésitation. Elle ne voulait pas mourir avec ses chaînes, mais c'était peut-être ce qui arriverait et ça la rendait un peu triste, mais elle bénissait ses ancêtres de pouvoir au moins partager ce moment avec sa descendante.

-Tu sait Jinny, perdre l'homme de ma vie m'a appris une chose, c'est qu'on as jamais assez de temps pour profiter de ceux qu'on aime ici bas, tu devrait vraiment profiter de ce répit avec quelqu'un qui t'es cher. On est des animaux sociaux, on as besoin des autres, même si c'est juste des amis, vu que tu souhaite prendre ton temps pour la suite.

Codage par Libella sur Graphiorum réarrangé pour usage personnel

Tout semblait possible par les temps qui courent, en effet – et Jinny se fendit d’un rire au-dessus de son assiette vide. « Parle pas de malheur. » soupira-t-elle en imaginant quel désastre ça pourrait être, ça, un Jonah Hex ramené d’entre les morts pour venir faire la morale à sa descendante. Qu’est-ce qu’il aurait à lui dire, Jonah, de toute façon ? Du peu qu’elle savait de lui, elle était à peu près sûre qu’elle n’aurait droit au mieux qu’à une rebuffade dédaigneuse. Alors qu’elle, elle mourrait sans doute d’envie de lui poser mille et une questions au sujet de cette foutue malle, de son contenu, le supplierait de la reprendre avec lui au Far West ou dans l’au-delà, lui hurlerait dessus pour lui avoir imposé cette responsabilité quelques générations plus tard… bon, d’accord. Peut-être qu’au fond, elle aimerait bien le rencontrer. Parce que de tous les jeunes de la Young Justice, elle était peut-être la seule à n’avoir jamais même eu l’occasion de rencontrer celui dont l’héritage pesait sur ses épaules. Et comme elle était la dernière Hex en vie, le fardeau était particulièrement solitaire à porter. Des grands-parents assassinés par les Turnbull. Une mère terrassée par la maladie. Un père aux abonnés absents qui de toute façon avait toujours tout fait pour se tenir le plus éloigné possible de toutes ces histoires. Même pas un cousin ou une cousine pour rattraper le coup. Tout ce qu’il restait de cette époque, c’était elle, et une famille de zinzins qui avaient juré sa perte. Donc oui. Peut-être que le retour de Jonah, ce ne serait peut-être pas si mal.

Un demi-sourire aux lèvres, Jinny hocha affirmativement la tête à la question de Sun. « Probablement. Dure dure, la vie de superhéros. » commenta-t-elle avec toute la nonchalance qu’on pouvait attendre d’une texane de sa trempe. A vrai dire, depuis quelques temps, elle n’attendait que ça, l’appel de Robin, bien consciente qu’ils allaient avoir besoin de tout le monde, et que même elle, la cowgirl équipée de pistolets laser et d’un paquet de trucs bizarres, allait probablement être mise à contribution. « La mairie et la GCPD travaillent là-dessus ensemble, normalement. Garde l’œil ouvert, tu devrais être au courant de tout avant tout le monde. » Parce qu’elle, elle commençait à avoir l’habitude, de se retrouver au milieu de la fournaise. Elle n’en avait pas particulièrement envie – elle avait même franchement les jetons – mais elle savait ce qu’elle avait à faire. Elle avait signé pour cette drôle d’équipe, et elle se battrait à leurs côtés, avec les moyens du bord. Pour les même raisons que celles que Sun énonçait. S’ils devaient tous mourir demain, avec qui elle voudrait passer ses dernières heures, Jinny ? Elle n’avait plus de mère. Elle n’avait pas de petit ami – ni de petite amie. Elle avait Tefé, et elle chassa l’image de Cain de son esprit, alors qu’il s’y incrusta brièvement. Et elle avait ses copains superhéros. « Toi aussi tu devrais faire ça. Je sais que t’as l’air du genre plutôt solitaire, mais si t’as qui que ce soit… » ajouta-t-elle, en espérant sincèrement que Sun aurait quelqu’un à retrouver, avant que Brainiac, ne viennent tout chambouler.

Jetant un œil à la pendule murale, Jinny remarqua l’heure tardive, et fit signe à la serveuse de leur amener l’addition. « Il se fait tard. Je voudrais pas te faire rentrer à une heure indue, et moi, je me lève tôt demain pour aller retrouver mes copains flashy, justement. C’est moi qui invite. » Comme promis. Et bientôt, toutes les deux se retrouvèrent à nouveau dans la rue nocturne de Gotham City. Jinny, les pouces accrochés aux passants de sa ceinture, inspira l’air frais – et pollué – de la ville, et tourna la tête vers Sun. « Hé. Pas droit au pessimisme, d’accord ? On fera ce qu’il faut pour lui botter le train, à Brainiac. Un alien dérangé ou un autre, quelle différence. We got this. » assura-t-elle, plus confiante en son équipe qu’en elle-même – mais l’idée y était. « Tiens, passe-moi ton téléphone. » Et dès que Sun obtempéra, Jinny s’en empara, accéda à son répertoire, et y entra son nom, et son numéro de portable. « Je sais que tu peux sûrement le trouver facilement dans mon dossier, mais c’est plus personnel comme ça. Et ça t’évite de chercher. » Avec un sourire taquin, Jinny lui rendit l’appareil. « Si t’as besoin de quoi que ce soit, si t’as des ennuis, tu m’appelles. Ou si t’as juste envie qu’on aille manger un autre burger ensemble avant que tout ne parte en cacahuète. » Parce que ça faisait un bien fou, de temps en temps, d’avoir l’impression d’un quotidien un tout petit peu normal. Et parce que ce soir, Jinny s’était découverte, peut-être, quelqu’un qu’elle aimerait bien appeler amie, un jour. Si l’avenir le leur permettait. « C’était cool d’apprendre à te connaître. En dehors du bureau, je veux dire. On remettra ça ? » Avant Brainiac, ou, encore mieux, après. Parce qu’après, le monde serait toujours là. Obligé.

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