Rentre sur notre planète aura été moins agréable qu'on ne l'avait espéré. Que je ne l'avais espéré. Retrouver notre Terre dans cet état de faiblesse m'a surpris. Je dois avouer que je ne m'y attendais pas. Pour le reste... Malheureusement, si. Les pillages, les attaques, la recrudescence de criminalité. Une période normale sur notre planète. L'incroyable grandeur de la race humaine. Cela me pousse souvent à me demander pourquoi Brainiac s'obstine à vouloir nous immortaliser dans sa collection. Parce que franchement, je ne suis pas bien sûr que nous en valions la peine. Même si bien sûr, partout à travers le monde des mouvements d'entraide se sont généralisés. Il n'y a pas que le noir. Non, la vie est composée d'une multitude de couleurs, cela a toujours été comme ça. C'est aussi pour cela que je suis devenue avocate : pour aider ceux qui en avait besoin face à une justice parfois très dure et pas toujours impartiale. C'est aussi pour cela que je suis rentrée chez S.H.A.D.E pour aider les gens comme moi. Pour avoir plus de poids dans la balance du monde. Et même si cela ne plaît pas à certaines personnes de mon entourage, aujourd'hui, c'est ce que je suis. C'est celle que je veux être. Impossible pour moi de dire si S.H.A.D.E est mieux qu'A.R.G.U.S. Je veux croire que c'est le cas, mais je garde les deux yeux ouverts pour ne rien louper par naïveté et excès de confiance. Je ne suis plus si facile à berner.

Pourtant malgré ça, malgré cette situation, j'ai profité d'une accalmie. Pour quelque temps, histoire de souffler. J'ai suivi Luka jusqu'à chez lui, j'ai rencontré le reste de sa famille, officiellement. Un voyage riche en émotion, et en découverte sur lui. Et sur moi, aussi. Même si de ce côté-là, on a vite fait le tour de ma famille, d'autant plus que Steve ne semble pas s'habituer à l'idée que je puisse fréquenter Luka. Je sais très bien ce qu'il lui reproche, mais je n'ai jamais eu peur, et je suis capable de me défendre, même si j'imagine que c'est difficile pour Steve de ne plus me voir comme l'adolescente fragile que j'ai été. La vie nous a rappelé finalement assez vite. Et j'ai retrouvé Ant-farm un peu trop vite à mon goût. Enfin, disons que cela ne m'a pas déplu, mais j'aurais préféré rester avec lui, encore un peu. Juste un peu plus longtemps. Et rien que ça, cela m'a permis de comprendre à quel point je tiens à lui, et à quel point j'ai changé. Parce que pour une fois, j'ai eu envie de faire changer mes priorités. De ne plus faire passer le travail avant le reste.

En peu de temps, j'ai parcouru le monde. Facile à faire depuis la base de S.H.A.D.E. Une mission après l'autre : intervenir sur les zones sensibles, essayer de ramener l'ordre surtout dans les cas où des méta-humains étaient impliqués. Prêter mains fortes dans les camps de fortune pour venir en aide aux plus démunis. Et tâcher de relancer l'activité de la planète dans un seul but : survivre un peu plus longtemps. Jusqu'à ce que Brainiac soit perçu par nos satellites. Que son vaisseau et tous ses sbires s'approchent de notre planète pour un deuxième round. Et les dômes se sont élevés au-dessus plusieurs villes. Il a fallu aider à plusieurs endroits. C'est comme ça que je me retrouve à Coast city après deux semaines et plusieurs villes autours desquelles je me suis retrouvée à aider les survivants. Une fois sur place, mon premier réflexe a été de contacter Layla. Après tout, c'est quelqu'un de confiance que je connais sur place, et je la connais assez pour savoir qu'elle sera déjà impliquée dans l'aide aux survivants à l'intérieur du dôme. Ce qui n'a pas loupé : elle m'a donné rendez-vous près du dôme. Et lorsque j'y arrive, je viens d'Ant-farm, je suis donc équipée d'une arme solidement attachée à son holster et d'un sac dans lequel j'ai quelques affaires qui pourraient peut-être être utile dont un kit de soin. Cela ne gérera pas d'immenses blessures, mais suffisamment pour maintenir un blessé en vie le temps que les secours puissent le prendre en charge.

Lorsque je repère la personne que je cherche, je la rejoins rapidement : « Layla ». Je lui adresse un sourire chaleureux malgré la situation. Parce qu'il faut rester positif et qu'on est là pour les mêmes raisons. « Comment ça va là-dessous ? Tu as eu des contacts avec ceux qui sont en dessous ? Avec Deadshot ? ». Avoir des infos de S.H.A.D.E ça aide. Et je sais qu'ils sont proches tous les deux, même si cela ne m'a pas enchantée sur le moment, quand je l'ai appris à Metropolis. « Et toi, comment tu vas ? Pas trop secouée ? Les alentours sont calmes ? ». Est-ce qu'il y a des robots-morts-vivants de Brainiac qui tentent d'empêcher ceux de dehors de faire sortir ceux de dedans ? Elle a aussi vu des Feitherans, très impressionnants et sûrement très utiles dans cette lutte contre l'envahisseur.

La monotonie des attaques, le travail abattu et tout le temps passé avec Luka nous a mené si loin dans le temps que notre dernière rencontre remonte déjà à plus d'un an. Et cela ne s'est pas forcément très bien passé, en grande partie par ma faute. Ma volonté de protéger les gens aura raison de la plupart de mes amitiés un jour, il faut bien l'avouer. Mais là, il est simplement question de laisser de côté le personnel pour se concentrer sur ce qui se passe là. Le dôme, l'invasion de Brainiac, les civils coincés sous le dôme sous le feu des soldats envoyés par l'extraterrestre collectionneur. Il gronde. Je la salue donc et d'entrée de jeu, je lui demande ce qui se passe la dessous et si elle est en contact avec quelqu'un. Les infos de S.H.A.D.E me permettent de me douter qu'elle n'est pas là sans être en contact avec lui. Et elle me le confirme, tout en me disant qu'il y a un groupe qui arrive. Elle m'invite à la suivre et je me mets en marche à ses côtés profitant pour lui demander comment elle va. Elle me répond rapidement. Je comprends qu'elle préfère être là. En même temps, elle n'a jamais été de ce genre-là. On ne se connaît pas forcément parfaitement bien mais il y a des choses qui se comprennent rapidement. Je grimace un peu et je dis : « Les gens paniquent trop facilement et quand ils ont peur, ils ne réfléchissent plus forcément de la meilleure façon possible... ». Attendre le plus de gens et partir avec un bateau plein. Nous ferions ça, nous chargerions sans doute même un peu plus que prévu, pour mettre le plus de monde possible en sécurité, mais les gens qui ont peur veulent s'éloigner le plus vite possible, et là, l'altruisme et la bienveillance ne sont plus forcément les priorités. Dommage. Je soupire un peu et je dis : « Au moins maintenant, les choses sont plus organisées ça ne devrait plus arriver ». L’avantage d’une organisation et de personnes qui sont là en soutien est que les gens

Elle rajoute que les hommes-oiseaux aident vraiment beaucoup pour éloigner les robots de Brainiac. Je grimace un peu me contentant d'acquiescer. Cela semble plutôt logique qu'ils suivent les civils pour les massacrer au moment où ils sont rassemblés et où ils sortent pour les empêcher de sortir. Elle poursuit sur l'organisation des prises en charge en m'expliquant qu'entre deux passages, ils rassemblent les blessés et assurent les passages vers le port puis vers les îles. C'est un bon plan. Pour les robots, ils ont visiblement plus à faire sous le dôme qu'en extérieur. Je lui dis : « D'accord. Il y a tout ce qu'il faut sur les îles : matériel et vivre pour s'assurer la survie de tous ? Vous avez des équipes médicales ? ». Je suis seule, mais aussi là pour vérifier qu'ils ne manquent de rien et pour me rendre utile autant que possible.

Après un silence, elle me pose une question appuyé d'un petit sourire, tout en poursuivant qu'elle trouvait ça sympa que je vienne la sortir du commissariat. Je ris un peu et je ne réponds pas plus que : « C'est peut-être le moment d'arrêter de te retrouver au commissariat... ».  Je n'y crois pas trop, mais bon, comme on dit l'espoir fait vivre. Je ne peux cependant pas lui répondre. Je n'ai pas de badge, pas d'existence propre, je n'ai qu'une couverture, qui tient de moins en moins bien mais qui pourrait être crédible. Pour le moment je ne dis rien. Je vais devoir lui mentir, et cela m'ennuie un peu. Je sais à quel point c'est compliqué. Elle me dit qu'elle est contente de me voir, et que j'ai l'air d'aller bien. Je souris un peu et dit : « Moi aussi, Layla. Je suis désolée pour cette soirée à Metropolis tu sais... Je devrais vraiment apprendre à me mêler de ce qui me regarde, c'est déjà bien assez pour moi... ». Je souris un peu penaude et gênée. Elle repart sur la question de ma nouvelle profession et je souris un peu en disant : « Tu as le droit de demander, mais moi, le droit de ne pas y répondre ». Un demi sourire amusé se dessine sur mes lèvres alors que je reprends : « Disons que si on te demande, je suis avocate pour une boite qui a des intérêts important à Coast City... ». Une avocate avec une arme parce que venir ici en plein milieu d'une crise ce n’est quand même pas terrible, n'est-ce pas ? Je ne veux pas lui mentir. Mais je ne peux pas lui dire la vérité. Elle devra faire avec ça. Je rajoute : « Pour le moment, je suis seule. J'ai pas mal de collègues autour des autres dômes, pour sécuriser nos installations, mais au besoin, je peux demander du soutien humain et matériel ». Au moins les choses sont claires et posées. Je pourrais interpeller mon backup à Ant-farm pour avoir ce dont on pourrait avoir besoin. Armes, ressources et renforts. Les renforts humains ne seront pas infini, mais une ou deux personnes de plus pourraient aider.

Comme Layla m'explique le fonctionnement de crise qui a été mis en place après des débuts cafouillants, j'en profite pour poser la question du matériel dont ils disposent. C'est souvent le plus compliqué en période de crise : réussir à disposer des ressources nécessaires pour pouvoir mettre en place des plans qui fonctionnent et subvenir aux besoins de tous. Et avec le dôme, les réapprovisionnements de ne plus possible par la ville, il faut donc compter sur les villes aux alentours, et ce n'est sans doute pas le plus simple. Elle évoque donc les cabanes de pêche, et de recherches, ainsi que des couvertures et de la nourriture, mais sans doute en manque-t-il un peu. Ce n'est pas si étonnant, et des infrastructures dignes de ce nom seraient bien pour soigner les blessés et abriter les réfugiés au moins un temps, avant de les envoyer dans de plus grandes villes aux alentours si possible. J'acquiesce un peu et je dis : « Je dois pouvoir faire venir un peu de matériel, peut-être même quelques tentes, histoire de pouvoir avoir plus de place pour que les survivants s'abritent ». Et comme je dis cela, je sors mon téléphone pour envoyer un message à mon contact à la fourmilière. Vivres alimentaires, matériel médical et quelques tentes supplémentaires seraient les bienvenus. Cela pourrait être immédiat, mais sans doute par souci de couverture, quelqu'un arrivera en voiture probablement de l'une des grandes villes aux alentours, peu importe laquelle. La plus proche de préférence. Il sera plutôt facile de justifier des locaux et des entreprises dans ce genre d'endroits. Après un échange de messages rapide, je range mon téléphone et je dis : « J'espère qu'ils pourront trouver quelqu'un disponible rapidement ». Cela devrait être possible, même si tout le monde est un peu sur le pied de guerre. Et puis, une ou deux personnes supplémentaires ici ne seraient pas de refus. Pourquoi pas un médecin, ou une infirmière. Quelqu'un avec des talents de guérisons. Dans tous les cas, un peu de matériel ne fera pas de mal. Et vu les ressources disponibles à la fourmilière, même si tous les dômes avaient besoin de matériels, les agents de S.H.A.D.E devraient pouvoir partager, et même parcourir le monde pour trouver quelques ressources restantes pour permettre aux gens de survivre un peu plus longtemps.

La conversation glisse sur un versant plus personnel. Cela fait un an, un an depuis cette soirée et à l'évidence, ni l'une ni l'autre ne sommes réellement à l'aise avec ce qui s'y est déroulé. Les excuses ne sont pas si difficiles à offrir, même si je n'aime pas spécialement ça. Il y a un an, j'étais persuadée d'être dans mon bon droit, aujourd'hui, avec le recul, je me rends compte que cela ne me concernait pas vraiment. Layla répond et je sais qu'elle a raison, nous n'étions pas dans nos états normaux, alors cela peut en partie expliquer certaines choses. Mais pas forcément tout excuser pour autant. Je suis une fouine, je l'ai toujours été, et j'aime protéger les autres, un peu trop sans doute. Layla assure que ce n'était peut-être pas plus mal. Je ne pose pas de question. Dans le fond, j'ai simplement dévoilé une vérité qui aurait fini par sortir, parce qu'on ne peut pas cacher ce genre de choses éternellement. Je lui offre un sourire appuyé d'un signe de tête affirmatif pour toute réponse. Je n'ai pas besoin d'en savoir plus. Ce que Layla a choisi de faire avec cette information, et la relation qu'elle a décidé de construire avec Floyd ne me concerne pas. À l'évidence, ils sont toujours en contact. Jusqu'à quel point n'est pas mon problème. Layla a l'air d'aller bien et c'est tout ce qui m'importe. Elle me pose une question sur ma profession, et je lui réponds à demi-mot. Je ne veux pas avoir à lui mentir, mais je ne peux pas lui dire la vérité. De toute façon, elle est loin d'être idiote. Je n'ai plus grand chose d'une avocate avec mon équipement.

Une fois à la marine, j'ai l'occasion de voir d'un peu plus près les bateaux dont ils disposent et le nombre de personne qui évolue ici, au milieu du chaos. Des gens prêts à se battre et à résister face à cette invasion. Un léger sourire passe sur mes lèvres de voir des gens qui se donnent à fond malgré les risques et malgré cette période si difficile. Cela me réchauffe un peu le cœur de voir que les Hommes sont prêts à se dresser et à s'unir lorsqu'il le faut. Cela serait encore mieux de pouvoir rester unis après ça. Maintenant que l'on que nous ne sommes pas seuls dans l'univers, maintenant que l'on fait face à des ennemis plus forts que nous, j'aimerais voir l'ensemble des peuples de la Terre s'unir. Mais j'imagine que je suis un peu trop pacifiste et utopiste pour ce monde, malheureusement. Elle m'entraîne vers un chalutier et m'indique que c'est dans ce bâteau que les régufiés monteront pour être évacués et que les monstres de Brainiac essaieront de les suivre pour les en empêcher. C'est donc notre rôle de protéger ceux qui réussissent à sortir de cet enfer. Je suis un peu et j'acquiesce en disant : « D'accord ». Par curiosité, je demande : « Brainiac n'a envoyé que ces robots-zombies ? ». J'aurais probablement dû vérifier avant. Mais après avoir passé les quinze derniers jours çà et là autour des dômes, cela ne m'a pas laissé le temps de faire autre chose. Layla doit être informée de tout ce qui se passe, mais s'il y avait de gros risques, elle m'en aurait sans doute parlé. D'ailleurs, elle précise bien qu'ils ne savent jamais trop à quoi s'attendre quand une brèche s'ouvre. Je renvoie un message à mon contact à la fourmilière pour rajouter des détails sur le fonctionnement des plans ici pendant qu'elle est silencieuse. Quand elle reprend la parole, elle m'indique qu'un groupe arrive d'ici dix minutes de l'autre côté du port. Elle vérifie l'une de ses armes puis croise mon regard. C'est étrange de la voir autrement qu'à moitié aveugle à la suite d'une manifestation qui a mal tourné. Elle me propose d'y aller et bien sûr, j'acquiesce. Je devrais sans doute avoir peur. Mais en réalité, je n'ai jamais vraiment eu peur. Je marche à ses côtés d'un pas rapide, regardant attentivement les lieux pour bien savoir dans quoi je mets les pieds. Hors de question de tomber à l'eau, parce que je pense avoir dix mètres de ponton en plus ou une idiotie du genre. Mes yeux soulignent chaque détail. Avec curiosité, je demande : « Ce sont des robots, comment Brainiac communique-t-il avec eux ? Est-ce qu'ils ont réussi à trouver leur fréquence ? Ou au moins à les gêner ? Avec des brouilleurs de chaque côté des brèches, on pourrait les empêcher d'avancer peut-être ? ». J'arrive, alors je pose sans doute des questions qui ont déjà été soulevées et peut-être qu'ils ont déjà le matériel nécessaire pour ça. Mais on ne sait jamais.

L'arme rangée dans son holster a un côté rassurant, mais en réalité, je n'aurais sans doute même pas besoin de la sortir. Je lui dis : « J'essaierais de les empêcher d'avancer pour que tu puisses avoir des cibles statiques... Pas que tu aies besoin de ça pour les toucher, mais dans la mêlée, cela sera sans doute plus facile ». Je souris amusée. J'imagine que même sans moi elle se débrouillerait bien. Ils se sont bien débrouillés tout ce temps sans vraiment de renfort. Mais vu que je suis là, et que j'ai cette possibilité, autant en profiter, non ? Cela devrait rendre les neutralisations plus rapides et plus faciles. Et qui sait, peut-être même aider aux débordements si certains essaies de s'enfuir. Lorsque l'on arrive dans la zone où la brèche doit s'ouvrir, je regarde autour de nous, pour trouver des positions plus ou moins abritées, mais à l'exception de quelques caisses en bois vides, qui devaient transporter du matériel, il n'y a rien de bien solide. « On pourrait se séparer, cela pourrait les désordonner ? Ils seront contraints de focaliser leur attention sur deux autres endroits en plus des civils qui s'échappent ? ». Diviser pour mieux régner en quelques sortes. Ce n'est pas toujours la meilleure stratégie, mais bon, on ne sait jamais. Je vérifie que mes sangles de sac à dos sont bien ajustées et clipsées. Je ne m'éloignerais pas du sac, au cas où j'ai besoin de mon kit de soin en urgence. Et puis en dernier recours, cela pourra toujours servir de projectile.

Pour le moment. La phrase de Layla en réponse à ma question laisse planer une espèce de sombre doute. Et en même temps, elle a sans doute raison de le dire ainsi. Parce que Brainiac nous a déjà montré qu'il pouvait être ingénieux et sacrément cruel pour obtenir ce qu'il veut. J'acquiesce simplement en réponse, jetant un regard à la ronde. Bien que nous soyons à proximité directe du dôme et de la zone de combat, il n'y a pas de danger immédiat. Il pourrait. Brainiac pourrait choisir de rayer la résistance de la carte, mais il semble bien assez occupé à s'occuper des dômes pour le moment. Il n'y a plus qu'à espérer que cela ne dure ainsi encore un moment. Assez de temps pour mettre le plus de gens possible en sécurité. Et il y en a sûrement encore des tas à protéger et surtout à évacuer.

Elle répond ensuite sur la question du brouillage. Le simple fait que les robots s'adaptent complique grandement la tâche. Évidemment. Je ne peux m'empêcher de grimacer un peu. J'arrive sur cette ville après une autre. Et des questions m'ont déjà pas mal traversé. Mais ici comme ailleurs, les défenses ne tiennent jamais que quelques minutes - au mieux - parce qu'ils sont suffisamment intelligents pour pouvoir changer leurs stratégies. Le mieux serait de pouvoir entrer directement dans leur tête, n'est-ce pas. Mais ce ne sont que des ...« Et la télépathie ? Je veux dire, même si les corps sont morts, ils ont une base organique. Est-ce qu'un télépathe a déjà essayé de les perturber ? ». La question franchit mes lèvres presque aussi naturellement que je ne l'aurais pensé en suivant le fil de ma réflexion. J'ajoute cependant : « C'est sûrement voué à l'échec, ceci dit, ils n'ont probablement pas d'esprit au sens humain du terme. Un technopathe serait presque plus efficace en réalité ». Et peut-être bien que S.H.A.D.E en connaît un. Après tout, je ne sais pas encore tout de la fourmilière, loin de là. Et je ne saurais sans doute jamais tout.

À l'ébauche de plan que je propose, ralentir les robots - voir les arrêter si possible - et nous séparer pour couvrir plus de terrain sur la brèche et diviser l'attention des robots de Brainiac semble lui convenir. Elle acquiesce et ajoute les hommes-oiseaux dans l'équation qui seront au-dessus de nous. C'est à mon tour d'acquiescer : « Faisons ça ». Elle expose le plan à un homme armé d'une carabine et portant un uniforme que je ne connais pas. Ainsi, une douzaine d'homme s'ajoute à leur plan, de chaque côté de la brèche en soutien à la petite opération d'extraction, en plus des gens qui à l'intérieur seront là pour couvrir les civils. Je récupère la radio que l'on m'offre ainsi que l'oreillette que je loge dans mon oreille et je souris un peu alors qu'il ne reste plus que cinq minutes. Par habitude, je détache quand même la sécurité en cuir du holster qui contient mon arme, juste au cas où j'aurais besoin de l'attraper en urgence, et juste avant de nous séparer, Layla s'adresse à nouveau à moi. Je la regarde simplement et je lui dis : « Pour ce qui est de la prudence... je ne te promets rien. Pour le reste, je ne voudrais être nul part ailleurs ». Oh ça... J'attire les ennuis aussi vite qu'une accroc à la mode parcourt les boutiques un black friday. Probablement un truc de famille ceci dit.

Je lui adresse un dernier sourire et retient mon geste d'étreinte juste parce qu'il y a d'autres gens autour de nous. Je crois me douter que contrairement à moi, Layla n'est probablement pas du genre tactile. Alors pour le moment, on dira que ça va comme ça. Une fois positionnée, à l'abri relatif d'un petit groupe de caisse de bois, j'avise les hommes qui se sont joints à moi et leur adresse un sourire confiant, alors que dans le fond, je suis loin d'être confiante. Et je repose mon attention sur le dôme avec la détermination qui est la mienne lors de telles situations : protéger les gens, quoi qu'il en coûte. Le décompte retenti dans mon oreillette. Une minute. Trente secondes. Les silhouettes se dessinent et d'un coup, la paroi du dôme s'ouvre. « Les robots, on descend seulement les robots ». Ca paraît si évident, mais pourtant, je sais que dans le chaos, les premiers survivants qui sortent précipitamment vont représenter des cibles idéales pour toutes les balles perdues et les mauvaises trajectoires. Je me redresse et tâche de diriger tous les civils qui passent près de nous sans vraiment me préoccuper des gens de l'intérieur qui sont là pour les protéger. Et le calme qui était présent pour le moment jusqu'à ce que Layla les préviennent. Ils arrivent. Dès que le premier robot passe, Layla tire. Et les hommes qui sont embusqués avec nous eux aussi commencent à tirer. Quant à moi, loin de sortir mon arme, je me décale pour avoir un meilleur angle et viser un à un les robots que j'aperçois. Si j'ai du mal à ralentir les molécules métalliques, je peux au moins ralentir les molécules mortes de leurs chairs putréfiées. Ce qui les amènent presque à l'immobilité totale, pour certains. Plus la quantité de chair est importante, plus je parviens à les ralentir. Un premier s'arrête, semblant furieux, tirant sur ce corps mort qui représente un boulet. Un second ralentit à l'extrême, tentant d'accélérer sans y parvenir, un troisième lui, semble à peine perturbé. À peine, mais assez pour que plusieurs balles le fauchent en vol. J'en aperçois un autre, non loin d'un petit groupe de survivant. Mais avant même qu'il n'ait pu les attaquer, sa chair explose, modifiant sa trajectoire, le poussant à s'écraser en partie contre le dôme non loin de nous, le rendant bien plus facile à cibler et à abattre.

Il ne leur faut pas longtemps pour réparer les points à cibler et les premiers tirs filent dans notre direction. Heureusement, pour le moment, c'est assez facile à esquiver. Et surtout, les robots qui tirent sont faciles à repérer. Ils ne tardent pas à se voir handicaper à leurs tours par leurs molécules humaines. Les cadavres sont plus difficiles à ralentir que les matières vivantes, mais ce sont des molécules organiques que je connais, et même si leur densité diffère un peu, elle reste facilement modifiable surtout qu'elles sont en mouvement, accélérées par le mouvement robotique du reste de leur carcasse. Finalement, j'arrive à trouver un peu plus facilement le truc sur les molécules qui composent les métaux et surtout sur leurs vibrations pour créer le mouvement. Ou sur les mouvements de molécules qui composent les propulseurs. Ce qui me permet de les ralentir un peu plus facilement, de façon plus ou moins efficace, assez pour être ciblé souvent, et assez surtout pour leur rendre la tâche bien plus difficile. Un part un, chaque robot qui passe dans mon champ d'action est ralenti. Jusqu'à ce qu'un tir touche une de nos caisses la faisant voler en éclats. Je me protège avec les bras, encaissant un peu durement les morceaux de bois qui sont projetés sur moi, et je regarde derrière pour aviser l'état de nos hommes. « Tout le monde est entier ? ». Le sifflement attire mon attention. Il est proche, trop pour que je me serve de mes pouvoirs alors c'est mon arme que je sors et plusieurs balles viennent s'enfoncer dans le robot qui voulait finir le travail bien commencé sur notre abri de fortune et surtout sur notre petit groupe. Il s'écrase un peu plus loin, pendant que les hommes repousser les caisses pour les resserrer et se protéger à nouveau derrière elles. « On a été un peu secoué ici, mais tout va bien pour le moment ! ». Oh bien sûr, ça va sans doute changer, cela serait beaucoup trop facile, n'est-ce pas ? C'est un peu ça qui fait le piment de ce genre de moment : on ne tente pas d'aider à sauver le monde, sans prendre quelques risques.

Nous n'avons pas vraiment le temps de nous reposer. Et malheureusement, la caisse de protection en moins, il est très vite moins facile de pouvoir se protéger. Ils grouillent tel un essaim de guêpes, furieux, agressif. Et peu importe le nombre de robots qu'ils arrivent à tomber de l'extérieur ou de l'intérieur, il en arrive toujours plus. Encore plus. Partout. Inlassable, je continue à tenter de faciliter le travail. À l'intérieur, je ne doute pas qu'ils fassent des merveilles, sûrement plus habitués à tirer que les garde-côtes qui sont avec nous. Mais cela ne semble pas suffire. Et le matériel d'Ant-farm pour nous prêter main forte ne sera pas là avant ce qui me semble être une éternité maintenant, en plein milieu d'un combat. Je peste intérieurement sur le côté secret de tout ça. N'importe quoi. Peut-être que je m'impose trop de limites à moi-même. La question mériterait d'être soulevée. Elle continue à les ralentir. Nul doute que ses collègues de la fourmilière savent à quel point c'est pressant ici, pas besoin de le leur rappeler.

Lorsque les derniers survivants passent, c'est un certain soulagement. Même si maintenant, il va falloir couvrir leur fuite, au moins, ils sont tous passés sans drame. Sans explosion d'un missile au milieu de la foule ou quelque chose du genre. Il s'agit alors de les empêcher de passer. Je bouge un peu pour couvrir un plus large champ, et j'essaie d'agrandir un peu mes cibles. Maintenant, qu'il n'y a plus de civils au milieu, c'est plus facile, il y a moins de risques. Je continue à les ralentir, essayant de le faire plusieurs par plusieurs, ce qui ne marche que partiellement, car la gêne est moins importante. Cela semble quand même marcher, puisque l'écart se creuse un peu entre les survivants et les créatures, dont certaines restent aussi concentrées à essayer de descendre les résistants, qui tombent petit à petit. C'est triste, mais il semblerait que cela soit le lot de chaque guerre, non ? Je n'ai pas vraiment le temps d'y penser. Le cri me glace. Mais Layla est plus rapide à réagir, malheureusement, je ne peux pas couvrir sa retraite. Un tir alien me force à sauter sur le côté. La roulade est sans doute plus raide qu'elle ne le devrait, mais en me redressant, je sors mon arme et je tire plusieurs fois jusqu'à ce que l'alien qui vient de m'attaquer s'écroule. Je me tourne. Je ne vois plus de Layla. Mais le robot lui est toujours là sur le ponton. Avant d'avoir le temps d'avancer, Layla jaillit de l'eau et le neutralise. Nos regards se croisent. Troublée, je ne suis pas bien sûr de ce que je viens de voir, mais ce n'est certainement pas le moment non plus. Elle tire, et je me tourne pour voir un robot s'écrouler. Je lui dis : « Ils ne devraient plus tarder ! ». Je retiens le juron qui me monte parce que tout de même, ils pourraient faire vite.

Les robots cherchent toujours à atteindre le bateau. Et sur la route entre eux et les survivants, il y a plusieurs autres caisses. Beaucoup de caisses sur un quai qui a dû voir beaucoup de matériel être transporté. Espérant de tout cœur qu'elles soient vides, je zigzague entre les robots pour arriver à leur portée et je les fais exploser. L'explosion - encore mal contrôlée - est violente et me pousse à me ramasser sur moi-même pour me protéger. Ce qui ne m'empêche pas d'être touchée au flanc par un débris de bois. Je grimace et relève les yeux. Il est temps de dégager, et plutôt que de courir vers l'eau, je tente d'aller m'abriter vers le dôme, entraînant plusieurs de ces créatures avec moi. Cette technique n'est pas encore très au point, mais cela a eu le mérite de fonctionner. « J'ai une idée ! ». Ca a peut-être déjà été fait, mais cela pourrait marcher progressivement. « Et si au lieu de tenter de dérégler leur signal, on les saturait ? Ils seront peut-être tout aussi affectés que par le brouillage ? ». C'est peut-être une forme de brouillage. Pas besoin de répéter deux fois, plusieurs informaticiens de génie de la fourmilière tentent déjà de s'aligner au signal des robots en alliance avec les gens sous le dôme. Sans vraiment se présenter ou même communiquer, ils viennent simplement en renfort pour booster les signaux, d'autres agents sont peut-être déjà là, embusqués autour du dôme avec du matériel pour relayer les signaux, je m'en fiche de savoir comment, pendant quelques secondes, les robots semblent perdus. Cela nous laisse le temps d'en descendre encore, et surtout, cela laisse le temps aux survivants d'embarquer sur le bateau.

Plus songeuse que constructive, je dis à mi-voix : « Alors ça, ça risque de beaucoup les énerver ». Et malheureusement, il n'y a plus grand monde ici. Les gens sont tombés comme des mouches. Même nous, nous avons subi quelques blessures. Difficile de faire autrement, pas vrai ? Je ne me décourage pas, profitant autant que possible de la gêne occasionnée. Malheureusement, les voilà à nouveau en marche, à l'évidence, les robots ont ajustés leur fréquence. Mais maintenant que le truc est trouvé, peut-être qu'ils pourront recommencer, une fois la nouvelle fréquence trouvée et piratée. Il me semble que le temps passé à nouveau les ralentir, changeant régulièrement de position en coordination avec Layla pour mieux les faire tomber est long. Mais finalement, plusieurs tirs viennent d'un côté du quai et plusieurs agents de SHADE arrivent en renfort pour nous aider. « Quel plaisir ! ». Une nouvelle bonne nouvelle n'est jamais malvenue. Bien au contraire. Ils ne sont pas nombreux, mais suffisamment pour nous aider à contenir l'attaque vu qu'ils sont tous expérimentés, et surtout, ils ne sont pas venus les mains vides.