when there's trouble you know who to call (kory)

À peine Diana met-elle les pieds à l'extérieur du Manoir Wayne qu'un frisson vient la secouer. Elle ressert un peu plus son écharpe autour de son cou, croise les bras pour se réchauffer et entreprend de traverser rapidement la cour pour rejoindre le jet, au bord duquel l'attend J'onn Jonzz. Voilà plusieurs jours qu'il neige abondamment sur Gotham – et probablement partout ailleurs. Les températures sont glaciales, et cet hiver prématuré annonce des conséquences écologiques désastreuses pour l'écosystème de toute la planète. Elle se presse à l'intérieur de l'appareil, et le Limier referme la rampe d'accès derrière elle. « Bonjour, J'onn. » « Diana. » Il lui adresse l'un de ses rares sourires avant d'allumer les moteurs du jet, qui font fondre un peu de la neige accumulée sur la pelouse gelée. Diana active le système de camouflage de l'appareil, qui empêchera quiconque de le localiser ou de capter les communications échangées. Nul besoin d'entrée les coordonnées de leur destination, la Tour des Titans, reconstruite à Star City après le passage de Darkseid, est bien connue des membres de la Ligue de Justice. Le trajet ne sera pas long, et si tous deux auraient pu se contenter de s'y rendre en volant par leurs propres moyens, mais Diana a préféré opter pour la sécurité de ce mode de transport, en plus de sa chaleur. « Quelles sont les dernières nouvelles ? » J'onn répond sur son habituel ton monotone, mais Diana capte un soupçon d'inquiétude dans sa voix. « John a affronté Power Ring en Sibérie, alors qu'il essayait de faire sauter plusieurs forages pétroliers, et est sorti victorieux du combat... » « Bien. » « Mais nos efforts de ravitailler en vivres les populations centre-africaines ont été réduits à néant par Ultraman et Deathstorm. Il semblerait qu'ils ne veuillent pas voir ces gens survivre. » « Ils veulent terroriser le monde. Et ils y arrivent. » Diana soupire longuement et s'enfonce dans son siège en secouant la tête.  « Tout ne va pas si mal, cependant. Les dernières interventions d'Arthur semblent avoir porté leurs fruits, et le dernier affrontement entre Barry et Quick s'est soldé par l'échec de ce dernier. » « Et Superwoman ? Qu'en est-il d'elle ? » « Elle demeure introuvable. Je suppose que c'est dû à son... état. Ultraman la protège. » « Ce n'est pas elle qu'il protège. C'est l'enfant qu'elle porte, son héritier. Il se moque d'elle. Elle n'est pour lui que le moyen d'assurer sa lignée. » « Et c'est exactement pour cette raison que nous finirons par l'emporter sur eux. » « Que veux-tu dire ? » « Nous nous aimons. Nous ne sommes pas une équipe, nous sommes une... famille. Cela nous donne un avantage certain. » « Par les dieux, c'est la première fois que je t'entends faire dans le sentimental... » « Ne t'y habitue pas. »

Durant le reste du trajet, Diana reste silencieuse, le regard rivé à l'extérieur à travers la fenêtre du cockpit, une main caressant distraitement son ventre. Lorsqu'ils arrivent aux abords de Star City, la neige se transforme en une pluie dense accompagnée d'un orage assourdissant – qui cette fois, n'a rien à voir avec Zeus. « Je ne comprendrais jamais. » « Quoi donc ? » « Pourquoi les Titans ont choisi de construire un tel bâtiment. On ne pourrait faire meilleure cible pour nos ennemis. » Diana étouffe un rire. Il est vrai qu'une tour immense en forme de T n'est pas ce qu'il y a de plus subtil. « Oh, eh bien, après tout, les Teen Titans ne font pas réellement dans la discrétion... » Difficile d'y parvenir, avec une équipe de jeunes héros composée d'une princesse extraterrestre, d'un métamorphe animal, d'une fille de démon, d'un atlante, d'un cyborg et d'autres êtres tout autant exceptionnels. Au moins, ils assument parfaitement ce qu'ils sont et ne craignent pas de le montrer au reste du monde. Du moins, c'est la version que Diana choisit de croire. Elle désactive le camouflage de l'appareil pendant que J'onn amorce l'atterrissage sur le toit de la tour, où une paire de Titans les attendent. Les moteurs sont coupés, la rampe d'accès se déploie. « Contacte-moi lorsque vous aurez terminé. Je vais aller patrouiller en ville. » Diana acquiesce. J'onn use de son don d'intangibilité pour traverser la paroi de l'appareil, et disparaît dans la nuit sans fin. Diana resserre les pans de son manteau contre elle pendant qu'elle descend, mais cela ne suffit pas à la protéger de la pluie, alors elle se hâte jusqu'à l'entrée, où elle est accueillie par Cyborg et Beast Boy. « Wow, Wonder Woman ! » « Bonjour, Garfield. » D'éternel bonne humeur, le jeune homme la regarde avec admiration, comme si elle allait lui annoncer la défaite du Syndicat et de tous leurs ennemis réunis. Elle aimerait, mais n'est hélas pas une faiseuse de miracles. Victor se montre plus perspicace et lui résume brièvement la situation de l'équipe en même temps qu'ils l'accompagnent jusqu'à Koriand'r. Elle suppose sans peine que le climat glacial est loin de convenir à la princesse de Tamaran, qui tire ses forces des rayons du soleil, à l'instar de Superman. Comme lui, sans doute a-t-elle usé toutes ses capacités pour lutter contre Ultraman à Metropolis, et se voit depuis réduite à un statut presque humain. De quoi avoir des envies assassines.

Diana attend de se retrouver seul avec Koriand'r pour perdre un peu de son sérieux, difficile à conserver en sa présence. Tout comme il lui semble difficile de pouvoir oublier la façon bien particulière qu'elle a eu d'apprendre le themyscirien. Ne jamais dire "je peux t'apprendre"ou "il faut qu'on parle" à Koriand'r de Tamaran. « Tu as bonne mine, Kory. » Pour quelqu'un privé de sa source de pouvoirs, se retient-elle d'ajouter. « Façon de parler. Pour la mine, je veux dire. Tu es radieuse, c'est ce que je voulais dire. » Avec Koriand'r, mieux vaut toujours expliciter les choses, afin qu'elle évite de se faire des idées. Chose qui, avec elle, peut rapidement devenir plutôt compliqué. Diana lui adresse un sourire avant de retirer son manteau qu'elle dépose sur le dossier d'une chaise, révélant ainsi l'arrondi prononcé de son ventre. Surprise ? Probablement, on ne peut pas dire que la nouvelle ait été généralement annoncée, par souci de sécurité. « Je compte sur toi pour garder le secret. » Koriand'r est une personne de confiance, Diana le sait, sans doute prononce-t-elle les mots pour se rassurer elle-même. Elle se rapproche de son égale venue d'une autre planète, et pose ses mains sur ses épaules, doucement. Sa température corporelle a chuté, la constatation lui arrache une petite grimace, avant qu'elle ne reprenne une expression plus enjouée, ou au moins neutre. Koriand'r, c'est l'une des rares femmes qu'elle connaisse qui soit encore plus grande qu'elle, et d'une beauté clairement venue d'ailleurs. « Maintenant, dis-moi comment vous allez, les Titans et toi ? »

Koriand'r avait 24 ans, si l'on s'en référait à l'équivalence terrienne, mais elle avait traversé bien des épreuves. Cela l'avait marquée, et elle n'en était pas sortie indemne. Et elle ne pourrait jamais oublier. En temps normal, elle n'avait qu'à observer ses mains, ou son regard, pour comprendre qu'elle avait été changée pour toujours et à jamais, comme on dit. Ce dont elle était capable, c'était unique, pour quelqu'un de son peuple. Et si, aujourd'hui, cela lui servait bien, ne serait-ce que parce que cela constituait une force offensive et une dissuasion massive, le prix qu'elle avait payé était tout simplement colossal. Mais elle faisait avec. Sur Tamaran, on ne vous élève ni ne vous éduque dans l'optique de vous laisser à penser que tout est immuable, et que l'existence que vous connaissiez présentement était la même que celle qu'avaient connu vos décuples aïeux, et qu'il en serait de même pour vos descendants. La jeune femme n'était malheureusement pas née en tant de paix, et sa formation de future Reine s'en était faite ressentir. Son apprentissage auprès des Seigneurs de Guerre d'Okaara n'était donc en rien une surprise ou un hasard. Alors, oui, elle savait faire avec, elle savait composer avec les surprises, les aléas, les coups du sort. Elle savait endurer, ne pas baisser les bras, et continuer à aller de l'avant. Elle savait garder en tête son but, elle savait garder le cap, malgré les coups qui pouvaient pleuvoir et les douleurs terribles qui pouvaient l'avoir paralysée de la pointe des cheveux jusqu'à ses orteils. Mais, malgré tout, cela ne signifiait en rien qu'elle ne pouvait pas se montrer déstabilisée. D'autant plus face à la nouveauté, qui malgré ses multiples expériences dans la vie, continuaient encore de survenir. Présentement, elle devait faire sans le Soleil. Comme tout le monde, en fait, sauf que, pour elle, cela revêtait un sens tout autre, et que les conséquences, la concernant, étaient assez cataclysmiques. Pas de quoi la tuer, certes, mais ... Elle ne pouvait pas comparer ce manque gigantesque, pour elle, à une pénurie totale d'oxygène pour les Terriens, mais l'idée était quand même un peu là, non ?

Elle ne pouvait plus décoller du sol sans retomber. Avec grâce et légèreté, certes, mais elle retombait quand même. Voler lui manquait, terriblement. Tout comme de sentir les rayons du soleil sur sa peau, et les UV pénétrer son corps. C'était un sentiment si divin, par X'Hal ... Ses forces et capacités étaient grandement diminuées. Mais elle endurait. Et elle se reposait sur toutes ces autres choses qu'elle avait appris à force d'enseignement, et non pas uniquement par droit de la génétique, de l'instinctif, de l'inné. Elle passait désormais de longues heures à s'entraîner, quand, avant, elle n'en faisait pas autant dans la salle d'entrainement. Mais elle en avait besoin, pour s'occuper l'esprit, pour se sentir utile, aussi. Elle refusait qu'on la regarde avec tristesse, ou regret, ou culpabilité, ou encore pitié. Ce n'était pas de bonnes émotions, ça. Elles n'avaient pas la place dans sa vie, et d'ordinaire, Koriand'r les chassait purement et simplement lorsqu'elles menaçaient d'émaner d'elle-même. Elle était agile, souple, mais aussi robuste et endurante. Et, fort heureusement, elle parvenait encore à rester de très très longues minutes dans la position du poirier, pour réviser ses cours, ou lire la transcription dactylographiée de vieux ouvrages contenant les préceptes de civilisations perdues. Mais elle gardait aussi un œil et une oreille sur ce qui se passait autour, sans cependant entièrement se laisser déconcentrer. Mais, parfois, elle avait beau faire ... Parfois, elle avait beau faire, l'enthousiasme, la jeunesse et l'hyperactivité de certains de ses coéquipiers l'amenait sur la pente raide. Garfield avait déboulé d'elle ne savait trop où sous la forme d'un animal qu'elle n'avait pas eu le temps d'identifier, en plus d'avoir encore quelques difficultés à connaître et reconnaître toute la faune terrestre. Il avait déboulé, comme ça, zigzaguant entre ses deux mains posées au sol, en tant que points d'équilibre, et un instant, Kory avait bien cru qu'elle allait basculé jambes par dessus tête, et fesses claquant au sol ! Heureusement, elle savait encore se tenir en poirier à une seule main, mais il n'en demeurait pas moins qu'elle avait quand même failli tomber ! Mais lorsqu'elle fut rejointe par la personne à la source d'une telle manifestation de joie de la part de Beast Boy, le jeune homme en fut tout pardonné !

« Diana Prince de Themyscira ! » Kory se référait à la tenue de son interlocutrice, et celle-ci ne portait pas sa légendaire jupette ! Ce qui était dommage, elle avait de si jolis jambes ... D'ailleurs, en parlant de jupe, Kory était encore un peu affairée à remettre de l'ordre dans la sienne, de sorte à bien suivre les conseils qu'on lui donnait quant à être humainement décente et présentable. D'ailleurs, sur les conseils de Tim', ou de Dick, elle ne savait plus trop, quand elle faisait du sport, elle prenait soin d'enfiler un boxer plutôt que tout autre sous-vêtement. Il parait que c'était moins affolant et sensible pour la gente masculine, visiblement, de faire comme ça. Mais Diana ne venait pas pour parler vêtements, n'est-ce pas ? « Oh, c'est gentil ! Mais c'est que je porte encore mon collier, là. Il aide beaucoup à me donner une certaine contenance physique. Mais je dois quand même un peu être décoiffée, là ! » Détachant sa longue tresse, Kory s'affairait quelque peu à se recoiffer jusqu'à ce que son attention soit totalement déviée, face à ce ventre arrondi que lui présentait Diana. « Par X'Hal, tu attends un nourrisson ! » Bébé, nourrisson, c'était pareil, non ? En tout cas, le fait de se recoiffer était à présent une entreprise totalement abandonnée, alors qu'elle couvait de grands yeux arrondis, plein de tendresse et de joie, en direction de ce ventre qui pointait sous le tissu. Cependant ... « Je ne dirais rien, tu as mon serment sacré. ... Mais ... »

Sur Tamaran, la nouvelle d'une naissance était célébrée, et d'autant plus quand la future mère était d'un rang social prestigieux et élevé. Cependant, on ne procédait visiblement pas de la même façon ici sur Terre. Ou alors, l'invitation s'était perdue en route ! Mais si, l'invitation à la communion bénie par X'Hal sous la lumière flamboyante du Soleil, tous vêtus comme au premier jour de leur vie ! C'était bien comme ça que font les Terriens, non ? Ils s'envoient des messages par sms, ou par mail, ou sur les réseaux sociaux, ou encore par courrier, mais c'est moins fréquent. Quoi que, il n'y avait plus de Soleil, désormais ... Pas de soleil, pas d'orgie et de libations ! De toute façon, il devait encore s'agir là d'une différence flagrante entre Terre et Tamaran. Parce que, sur Tamaran, il était généralement admis que la concentration de naissances dans la même période, plusieurs mois après l'annonce d'une grossesse, cela indiquait bien le dévouement et l'implication dont un certain nombre de convives avait fait preuve lors de la cérémonie !

« C'est une mauvaise nouvelle ? Pourquoi il ne faut rien dire ? Je ne dirais rien, serment sacré, mais ... Jason Todd n'a pas conçu cette vie avec toi ? C'est pour ça qu'il ne faut rien dire ? » C'était assez inquiétant, alors, elle voulait comprendre. Déjà, dans sa tête, elle réfléchissait. Diana avait-elle laissé entrer dans son lit la mauvaise personne ? Dans l'entourage du Clan Wayne, et dans le Clan Wayne lui-même, il y avait beaucoup de mâles, après tout. Cependant, Kory se disait qu'il ne pouvait s'agir d'Alfred. Il devait être asexuel, lui, parce que les fois où elle l'avait vu, elle ne lui avait semble-t-il fait aucun effet ! Et une fraction de seconde, son cœur manqua un battement, et se serra, à la simple perspective que Dick puisse faire partie de la liste des pères potentiels. Mais elle était heureuse, très heureuse. Cela faisait tellement longtemps qu'elle n'avait point vu une femme enceinte d'aussi près, et encore plus longtemps que la dite femme enceinte n'avait pas été si chère à son cœur. Il y avait bien eu ces autres malheureuses, sous la coupe des Psis, mais elle refusait d'y repenser. En tout cas, Diana se souciait d'elle, de son état, et de l'ambiance qui régnait chez les Teen Titans. Et cela lui faisait encore plus grandement plaisir. Ce qui, de fait, décuplait son bonheur de la savoir prochainement devenir mère. « Les Titans vont aussi bien qu'ils peuvent aller, compte tenu des circonstances actuelles. Je veille bien sur eux, comme vous me l'avez demandée, parce que je sais que vous comptez sur moi. Je les oblige à s'entraîner encore plus, et à ne pas perdre le moral. Et puis, je les empêche de dire des gros mots, quand on reparle du Syndicat. Ce n'est pas bien, les injures. Même si, personnellement, des tas d'injures me brûlent les lèvres ! Quant à moi ... » Après un léger soupir, elle passa une main dextre, agile et rapide derrière son cou, pour défaire le fermoir de son collier, se révélant alors telle qu'elle était réellement. Si Tamaraneanne, si peu humaine ... Si grande, si ambrée, avec sa chevelure de feu à rallonge, et ses iris d'un vert si profond, sans pupille. Même si elle semblait plus terne qu'à l'accoutumée. « J'ai déjà été plus en forme, même si j'ai connu pire, bien pire ... Je dis à tous ceux qui me posent la question que j'ai décrété que, pour honorer la Déesse et la rendre fière, je ne retirerais mon collier qu'une fois que nous aurons eu la tête d'Ultraman et de ses sbires. » Et elle ne parlait pas du tout au sens figuré ! Parce que, ça, elle ne savait pas encore trop faire ! « En réalité, l'absence de Soleil me touche beaucoup. Mais comme je ne veux inquiéter personne, j'ai inventé cette histoire. Mais ce n'est pas un mensonge. Je ne sais même pas comment faire, pour mentir. Je raconte juste une autre histoire ... Mais je m'entraîne, parce que, ça, je peux encore le faire. Et je suis aussi toujours capable de me battre comme les Seigneurs de Guerre d'Okaara me l'ont appris ! Je ne peux pas exactement t'en faire une démonstration, puisque tu es enceinte. »

Koriand'r est aussi troublante qu'elle est déconcertante. Diana ne s'est pas attendu à la trouver en train de faire le poirier dans la salle de réunion des Titans, et c'est pourtant dans cette position qu'elle l'a surprise. Et tout naturellement, la jeune princesse ne s'est pas sentie gênée le moins du monde. D'une drôle de façon, Koriand'r, Diana la trouve rafraîchissante. Elle dit ce qu'elle pense, agit spontanément, le mensonge et la dissimulation sont des concepts qui lui sont parfaitement étrangers. Diana en vient même à se demander si son lasso aurait un quelconque effet sur elle, qui dit la vérité sans même y songer. Certes, cela donne parfois naissance à des situations pour le moins compliqué, mais personne ne reprochera jamais à Koriand'r d'avoir caché quoi que ce soit. Évidemment, la Tamaraneanne ne passe pas à côté de son ventre arrondi, devenu impossible à dissimuler, même sous des vêtements amples. Effectivement, elle attend bien un bébé – un nourrisson, comme elle dit – et c'est une nouvelle merveilleuse. Et parce que c'est une nouvelle merveilleuse, Koriand'r ne comprend pas pourquoi elle doit garder le secret. Ce qui est évident pour Diana ne l'est pas pour elle, mais avant qu'elle ne puisse lui expliquer pourquoi elle aimerait que la nouvelle ne se répande pas, elle avance une hypothèse qui la fait sursauter, comme si on venait de la pincer. « Par les déesses ! Non, non, ce n'est pas... Bien sûr que si, Jason est le père ! Qui... » … voudrais-tu que ce soit d'autre ? Diana ne termine pas sa phrase, horrifiée à la simple idée d'entendre Koriand'r émettre des hypothèses toutes plus improbables et glaçantes les unes que les autres. « N'aie aucun doute là dessus, Jason est bien le père de mon enfant. C'est uniquement parce que je ne veux pas le mettre en danger qu'il faut garder le secret. Je ne veux pas devenir une cible privilégiée pour tous nos adversaires, j'en ai déjà bien assez du Syndicat du Crime... Mais c'est une bonne nouvelle, Kory. Je dirais même que c'est une excellente nouvelle. » Qui doit rester secrète le plus longtemps possible pour le bien de son enfant. En temps normal, sans doute l'événement aurait-il été célébré, mais les temps sont hélas tout sauf normaux.

Et puis, même si elle suppose que Koriand'r trouverait le sujet passionnant, ce n'est pas pour parler de sa vie personnelle que Diana s'est rendue jusqu'à Star City. Elle s'inquiète de la situation des Titans, et tout particulièrement de celle de la jeune princesse, qu'elle sait touchée par le manque de soleil, à l'instar de Superman. Pour autant, Diana sait qu'elle fait de son mieux pour prendre soin de son équipe, en avoir la confirmation lui arrache un franc sourire. « Les injures, ce n'est pas très poli, ni même très princier... Mais crois-en mon expérience, parfois, se laisser aller à quelques insultes, c'est soulageant. » Et puis, qui n'a pas maudit ou traité les membres du Syndicat de tous les noms ? C'est probablement un phénomène courant. Par exemple, il suffit que Jason entendre parler d'Ultraman ou de Owlman pour lui faire une démonstration de son registre d'injure, plutôt fourni. Diana ne sourcille pas quand la jeune femme lui révèle sa véritable apparence, bien moins discrète que celle que lui confère son médaillon, mais tout aussi somptueuse. Impressionnante, une beauté venue des confis de l'univers, réfugiée sur Terre après une vie d'horreurs. Diana n'est pas certaine qu'à sa place, elle serait parvenue à faire preuve du même optimiste inébranlable qu'elle, ni même de la même bonne humeur. « Tu ne devrais pas avoir à porter ce collier de toute façon, Kory. Tu n'as rien à cacher. Nous vivons dans un monde où les dieux, les aliens, les êtres mystiques, les métahumains et mille autres espèces encore vivent ensemble. Tu es exceptionnelle, certes, mais tu n'as rien à dissimuler. Personne ne devrait avoir à cacher sa véritable apparence. » Plus facile à dire qu'à faire ? Probablement, la faute à une société de plus en plus xénophobe malgré une population de plus en plus variée. Quand les hommes comprendront-ils que les différences ne sont pas une faiblesse, mais bien au contraire une richesse inestimable ?

Diana tire une chaise pour s'y asseoir, les bras croisés sur son ventre. « Je te remercie, mais pour la démonstration de tes talents de guerrière, il va effectivement falloir patienter un peu. » Diana mentirait en affirmant que son épée et son bouclier ne lui manquent pas, elle a l'art de la guerre dans les veines, mais rien ne saurait être plus important que l'enfant qu'elle porte. « Kory, assieds-toi avec moi, s'il te plaît. Il y a des choses importantes dont il faut que nous parlions. » Non pas qu'elle ne soit pas capable de sérieux, mais Diana a appris à la connaître. Assise, Koriand'r sera moins tentée de valser un peu partout dans la pièce, et de passer d'un sujet à un autre. « La Ligue de Justice organisera bientôt une rencontre avec ses alliés pour que nous puissions enfin commencer à monter notre plan de contre-attaque. Je ne peux pas en dire davantage pour le moment, car de nombreux détails demeurent imprécis, mais j'aimerais que tu sois présente. Ton équipe et toi, vous êtes de plus en plus performants. Vous avez su résister à Darkseid, et la Ligue de Justice est fière de vos exploits à Metropolis. Grâce à vous, des milliers de personnes supplémentaires ont pu être sauvées. C'est énorme, Kory. » Diana tend les mains, pour prendre celles de la jeune femme. « Et grâce à ton intervention courageuse, j'ai pu sauver Aquaman. Si tu n'avais pas aidé les autres à occuper Ultraman pendant ces précieuses minutes, Arthur serait mort. L'Atlantis aurait perdu un roi et moi, un ami cher à mon cœur. Je n'ai pas eu l'occasion de te remercier auparavant, mais sache que tu as mon éternelle gratitude. » Et venant d'une immortelle, ces mots sont lourds de sens. « Puis-je compter sur ta présence, lorsque nous nous réunirons ? Je suppose que les Titans pourraient t'accompagner. Les compétences de Victor sont exceptionnelles, et Raven... Comme tout Kryptonien, Ultraman est hautement vulnérable à la magie. Il faut que nous nous rassemblions tous, si nous voulons avoir une chance de vaincre le Syndicat du bonne fois pour toutes, et avant qu'il ne soit trop tard. » Avant que la planète ne meure sans son soleil. Avant que des millions de personnes ne meurent de faim et de froid. Avant qu'ils ne soient tous tués, les uns après les autres.

Koriand'r n'avait pas exactement été présentée à Diana si tôt après son crash sur Terre pour que l'Amazone lui fasse la morale et pour qu'elle lui explique en quoi le fait d'être Juge, Jurée et Bourreau, ici, sur Terre, ce n'était pas le genre d'habits à enfiler sans se sentir mal et sans comprendre que cela ne se faisait pas. D'autres avaient pu plus particulièrement se charger de cette partie là, même si Kory ne perdait pas certaines de ses logiques d'appréhension et de réflexion, encore aujourd'hui. En réalité, son statut princier n'ayant rien de mystérieux ou de secret, pour le coup, tout comme son origine tamaraneanne, il avait été jugé opportun, pertinent et approprié qu'elle soit mise en contact avec Diana Prince elle-même. Parce qu'elles avaient certes de nombreuses différences, mais elles possédaient tout de même de grands points communs. Le fait d'avoir été élevées pour de grands titres et de grandes responsabilités, mais aussi et surtout le fait de se sentir si différentes des humains, de leurs habitudes et de leur monde. Et malgré le fait que, pour toutes les deux, désormais, cela faisait plusieurs années qu'elles évoluaient parmi les Terriens, il restait encore toutes ces fois où elles se sentaient comme des poissons hors de l'eau, pas réellement dans leur environnement natal, ce qui devait plutôt être normal, étant donné qu'elles n'étaient effectivement plus au milieu de cet univers qui avait été le leur jusqu'alors. En revanche, elles n'avaient jamais eu besoin de personne pour leur apprendre à se battre, ça non ! Elles n'avaient pas eu les mêmes précepteurs et enseignants, mais elles se débrouillaient très bien, preuve en était donc qu'il n'y avait nulle exclusivité ou privilège réservé d'efficacité, et qu'en cet univers comme par delà bien d'autres, il existait des êtres pour qui la Guerre était tout un art, un mode de vie, et une vraie profession de foi. Ce qui signifiait donc qu'il fallait donc toujours se méfier de ce qui pouvait surgir de l'ombre après y être resté tapis jusque là, tout comme il fallait prendre garde à tout ce qui pouvait débarquer tout droit du ciel ! En tout cas, le courant était très vite et très bien passé entre elles, bien que Kory s'interrogeait encore aujourd'hui sur ce que l'électricité pouvait bien avoir à faire dans l'entente entre deux personnes, mais, bon, les Terriens et leur aversion, semble-t-il, pour les expressions littérales et à prendre au pied de la lettre ... Koriand'r se sentait toujours bien en compagnie de Diana, car elle avait la certitude de ne pas être jugée, et d'être sans doute plus aisément comprise par l'Amazone que par d'autres, même par des plus proches amis. Parce qu'il y a des choses qui ne s'expliquent pas, mais qui se vivent, et qui s'endurent. Et toute existence passée en compagnie d'un être qui ne partageait pas ce genre de passé là, lui aussi, aussi longue et intense puisse être cette existence, et bien ça ne débouchera jamais sur une compréhension par simple regard ou par assimilation de souvenirs personnels et de situation présente. Kory était donc fière de pouvoir se dire proche de Diana. Alors, cela ne la dérangeait pas de l'afficher publiquement, de façon un peu détournée, mais quand même. Ainsi, elle l'aimait beaucoup, son crop "Wonder Woman is Bae" ! Mais ce n'était pas là la question. Non, en réalité, là, toutes deux parlaient nourrisson, ce qui était quand même un peu différent !

« Et bien, je ne sais pas moi ! Cela pourrait très bien êtr... » Kory avait des rituels à suivre, sur conseils de ses amis, quand elle risquait de faire un impair ou de commettre une bévue. D'être trop franche et trop directe, et donc trop peu Terrienne. Alors, elle s'efforçait de mieux observer les personnes qui lui parlaient ou étaient physiquement proches d'elle, sachant très bien qu'on pouvait tirer beaucoup d'informations et de renseignements rien qu'à la posture de quelqu'un, à ses expressions faciales ou à ses paroles. Et ce qui la stoppa, dans sa réponse, ce furent les grands yeux que Diana écarquilla sans doute un peu malgré elle. Et visiblement, la Titan faisait bien de se stopper là, et ne rien rajouter, car l'Amazone reprenait la main et veillait à dissiper tout malentendu ou toute zone de flottement quant au sujet de la paternité de cet enfant qu'elle attendait. « Oh, je vois. Il est vrai que les bassesses de nos ennemis n'ont pas de limite. Et que les Terriens ont de très mauvaises manières. Sur Tamaran, une femme enceinte est intouchable. Même par le père du nourrisson, qui peut être emprisonné s'il lui a mal parlé ou qu'il l'a frappée. Et je ne te parle pas du fait que les règles se verrouillent à mesure que l'on progresse dans l'échelle sociale. » Pas qu'elle puisse se souvenir de sa propre mère enceinte, car entre son petit frère Ryand'r et elle, il y avait trop peu d'années d'écart. Ce qu'elle savait, en revanche, c'est que la faune locale se repaissait de toute personne posant ne serait-ce que les yeux sur la Reine lorsque celle-ci était enceinte. D'un point de vue humain, cela pourrait sans doute être paradoxal compte tenu du fait qu'une femme enceinte ne se recouvre pas de plus de tissus que d'ordinaire quand elle est enceinte. Mais pourquoi brusquement devoir se cacher alors que l'on porte la vie ? Il n'y a rien de honteux à ça ! « Je suis très heureuse pour vous deux alors. Et encore une fois, vois mon serment sacré être renouvelé, je ne dirais rien à ce sujet, à personne. Même pas à Jason. Même si je présume qu'il doit déjà savoir qu'il va être père ... »

Bien évidemment, si par le plus grand des hasards et au sein d'une improbabilité conséquente, le futur père venait à la confronter directement, en utilisant les bons mots pour ne lui laisser aucune échappatoire, Kory ne pourrait nier savoir. Elle ne mentait pas, car elle ne savait pas le faire. Mais dans tout autre cas, elle ne dirait rien, et ne rentrerait pas dans le jeu des paroles codées et des messages subliminaux, même pas avec Jason. S'il voulait jouer à ça, il jouerait seul ! En tout cas, Diana s'enquérait de l'état actuel des Teen Titans ainsi que du propre état de Kory, qui ne manquait pas, alors, de lui répondre. L'équipe était sous tutelle, en partie, même si on leur faisait quand même confiance. Et Diana était de ceux qui veillaient au grain, comme on dit. Il était donc normal qu'elle se sente préoccupée et concernée par tout ça. Et la jeune femme ne voyait pas pourquoi elle garderait le silence sur tout ça. Encore une fois, elle accordait sa confiance à l'Amazone, et savait pouvoir trouver en elle une source de soutien et de conseils. Après tout, même si elle était plus proche de Cassandra, cela ne changeait rien au fait que Diana restait une figure de sécurité et de confiance pour Koriand'r. En tout cas, son interlocutrice semblait la rejoindre sur le fait qu'en règle générale, les insultes étaient à bannir. Même si ça faisait parfois un bien fou de se lâcher un peu !

« Je suis censée donner l'exemple, tu sais ... Mais, honnêtement, des fois, je veux juste hurler, tu sais. Oublier mon éducation, oublier tout, et juste hurler, et mettre à profit toutes ces langues que je connais. Tu n'imagines pas à quel point les idiomes humains peuvent être inventifs quand il s'agit d'insulter ! Et je prie X'Hal que le jour où nous aurons leur tête viendra au plus vite. Je demanderais cependant à la Ligue de pouvoir avoir une photo de la tête sous cloche d'Ultraman. » Son regard se durcit et sa posture se gaina, avant qu'elle ne reprenne souplesse et calme. Et qu'elle ôte donc son collier, pour se présenter telle qu'au premier jour face à Diana. Bien que là, contrairement à sa naissance, elle portait des vêtements. « Je n'ai pas honte de mon apparence, ni même d'être celle que je suis. En dépit des cicatrices physiques réellement visibles, et du fait que cette nuit perpétuelle m'impacte quand même un peu physiquement. C'est juste que ... Les humains sont très xénophobes, je trouve, même si je pense surtout qu'ils ont une peur panique de tout ce qui leur est inconnu, étranger. Les Américains doivent ainsi avoir au moins autant peur des Aliens que des Communistes ! » Elle secoua la tête, en esquissant un petit sourire un peu triste. « Au début, c'est Dick, avec d'autres, qui m'a conseillée de dissimuler un peu mes caractéristiques hors normes humaines, histoire de ne pas attirer de mauvaises intentions sur ma personne. Et de m'éviter de commettre des impairs, quand, à l'époque, je n'étais pas encore dans ma retenue d'aujourd'hui concernant le fait d'être dans mon droit de rayer des humains de la surface de cette planète d'un simple regard ... Mais maintenant ... On m'a torturée parce que j'étais Tamaraneanne. On m'a utilisée comme un cobaye humain, sans m'anesthésier ou me sédater. Les humains ont fait pareil avec les internés des camps, pendant la Seconde Guerre mondiale, par exemple, au nom du progrès scientifique et génétiques. Sans vergogne ni demi-mesure. Avec moi, ils n'auraient pas à se défendre de crime contre l'humanité, ou contre leurs pairs, étant donné que je ne suis pas humaine. »

Kory savait pouvoir parler en toute franchise et en toute confiance. Encore une fois, Diana ne la jugerait pas. Et pour être l'un des membres fondateurs de la Ligue, l'Amazone avait accès à toutes les infos que les siens pouvaient posséder au sujet de la Tamaraneanne. Koriand'r n'aurait donc sans doute pas à expliquer plus en amont, il suffirait de se référer au contenu du dossier la concernant. La jeune femme n'avait pas honte de son passé, parce qu'elle n'avait rien fait de mal, et n'était en rien responsable. Souvent, on blâme les victimes pour qu'elles renoncent, rebroussent chemin et laissent en paix leurs bourreaux. Mais c'était là une habitude qui n'aurait jamais d'emprise sur Koriand'r, qui ne comprenait ni ne tolérait une telle attitude. Bon, bien évidemment, la jeune femme ne revendiquait pas non plus tout ceci à corps et à cris, à tords et à travers. Parce qu'elle ne pourrait sans doute pas toujours éviter le genre de réactions qui ne lui serait en rien positive : se faire prendre en pitié ou rendre désolé quelqu'un, ce n'était pas son but. Son orgueil existait, après tout, c'était juste que le sien n'était pas aussi mal placé que celui des Humains ! En tout cas, Kory s'installa à la suite de Diana, sans pour autant remettre son collier. Ce n'était pas qu'elle avait franchi le pas, mais face à la future mère, elle n'avait rien à cacher, ni de pincettes à prendre. L'Amazone n'avait pas besoin d'être ménagée. Pas que Kory ne la respecte pas ou ne fasse pas cas de ses émotions, mais elle la savait endurcie et loin de se laisser submergée par les émotions. Bien qu'avec un nourrisson en elle, les choses pouvaient peut-être changer ? Alors, face aux paroles de son interlocutrice, la jeune femme est sérieuse, très attentive, et loin de se poser mille questions. Tout ceci est très concret, très terre à terre, et cela ne laisse donc aucun doute dans l'esprit de Kory, pas plus que cela n'en fait naître ou ne laisse la porte à l'existence de quelque incompréhension ou confusion. Alors, en parallèle, ses doigts se referment autour des mains de Diana, qu'elle fixe droit dans les yeux. L'Amazone ne s'effaroucherait pas, après tout, de n'y voir, la concernent, qu'une pupille d'un vert puissant, sans iris ...

« J'ai ... Je n'ai pas réfléchi. Peut-être que j'aurais dû, ne serait-ce qu'un peu, parce que j'ai réagi instinctivement, et que j'ai fini inconsciente. Mais ... J'ai agis selon ce que mon instinct me dictait de faire, selon ce que je sentais être la chose à faire, au plus profond de moi. On ne laisse pas un allié périr quand on peut faire quelque chose. Tu sais ... » Elle marque un temps d'arrêt, avant de reprendre. Malgré sa fierté et sa propension à être solaire, lumineuse, souvent légère vue de l'extérieur, que ce soit dans le ton de ses paroles enjouées ou dans ses tenues vestimentaires trop peu couvrantes aux yeux de beaucoup, Kory n'en demeurait pas moins sensible, et touchée, encore aujourd'hui, par certains pans de sa vie. « Tu sais, j'ai simplement fait ce que personne n'a fait pour moi autrefois. Personne, pas même ma famille. J'ai attendu, pourtant. Espéré, beaucoup. Mais personne n'est venu. Pas pour moi, en tout cas. » Mais pour Komand'r, pourtant traîtresse à son peuple et à sa planète, si. Kory n'avait jamais parlé de la façon dont elle avait recouvré la liberté. Mais cela avait été un vrai bain de sang. Quand elle s'était libérée et que, par amour pour son aînée, malgré tout, elle avait aussi libérée Komand'r, et quand elle avait dû fuir les partisans de sa soeur après que celle-ci se soit montrée bien ingrate et qu'elle ne la condamne à mort. En traçant sa voie de sortie, chez les Psis, elle avait laissé derrière elle tant de compagnons d'infortune. En tout cas, elle ne voulait pas que l'atmosphère se dégrade, alors, elle se reprit, se redressa, et sa prise, au creux des mains de Diana, se raffermit. « Bien entendu, je serais là. J'en serais même honorée. Nous serons là. Qu'il ne soit pas dit que la Jeunesse laisse le destin du monde aux mains de leurs aînés ! On voit bien à quoi une telle logique débouche, chez les humains : le réchauffement climatique, l'épuisement des énergies fossiles, tout ça ... » Une petite pointe d'humour, pour rehausser le tout ! « Nous devons leur faire la peau. Et ce même si sur Terre, on n'en fait pas des descentes de lit ou des tapis. Il n'est pas question de les laisser imposer leur règne de terreur plus longtemps. Et je ne dis pas ça seulement parce que je veux retrouver toute l'étendue de mes capacités. Je suis vraiment franche et honnête. Ton nourrisson doit naître dans un monde en paix. » Et ça, c'était très important. Kory était bien placée pour parler de ce qu'il advenait quand la guerre s'étendait, au-dessus de votre berceau, alors que vous veniez à peine de voir le jour ...

Évidemment que Diana aurait préféré ne pas avoir à dissimuler sa grossesse. Elle aurait préféré pouvoir le hurler au monde entier, partager son bonheur, le faire savoir à quiconque croiserait sa route. Mais elle ne le peut pas, et peu importe la situation, elle n'aurait jamais pu. Être Wonder Woman n'a hélas pas que des avantages, et en fin de compte elle n'aurait sans doute pas agi différemment même si le Syndicat du Crime ne menaçait pas la Terre. Si l'enthousiasme de Koriand'r fait plaisir à voir, il ne pourra malheureusement pas être largement partagé. « Sur Terre, personne n'est intouchable. » Pas même les plus faibles, les plus vulnérables. Les enfants ne sont pas plus épargnés que les aînés, et parfois les femmes enceintes n'ont parfois droit à aucune forme de compassion. Ce n'est pas un monde où la justice remporte toutes les batailles, bien loin de là. Elle aimerait que les règles de la Terre soient aussi strictes que celles de Tamaran concernant les femmes enceintes, mais c'est bien loin d'être le cas. Elle écoute Koriand'r parler de sa planète avec attention et émotion, toujours désolée de la savoir dans l'impossibilité de retourner un jour chez elle. « Ne t'en fais pas, tu peux parler du bébé à Jason autant que tu le souhaiteras. Il est au courant. » Elle sourit, amusée par la candeur de la princesse, qui contraste tant avec ses capacités explosives – littéralement. Koriand'r est sans l'ombre d'un doute l'une des personnes les plus intéressantes que Diana connaisse, à l'attitude parfois un peu déroutante, mais paradoxalement plus humaine que beaucoup. Alors évidemment, elle s'inquiète pour elle, s'inquiète de savoir si les responsabilités qui pèsent sur elle ne sont pas trop lourdes, si elle parvient à garder la tête hors de l'eau. Diana est sans doute la mieux placée pour la comprendre, elle sait à quel point diriger une équipe en temps de crise peut être éreintant. Bruce mort, et Clark entre la vie et la mort, c'est à elle que revient la direction de la Ligue de Justice – et le moment n'aurait pas pu être plus mal choisi. Koriand'r doit elle gérer une équipe de jeunes héros encore novices et peu sûrs d'eux.

« Tu as parfaitement le droit d'être en colère, Kory. C'est même parfaitement normal... Je suis furieuse, moi aussi. Constamment furieuse, comme si c'était pour moi la seule façon d'exprimer ma douleur tout en restant forte. Tu as le droit... de craquer. Ce n'est pas interdit. Garder des émotions bouillonnantes enfouies en toi tu feras plus de mal que de bien, crois-en mon expérience. » Diana soupire, longuement. Puis elle sourit lorsque la jeune femme retire le collier qui lui permet de dissimuler sa véritable apparence au commun des mortels. « Je te préfère ainsi. » Pas d'illusion, pas de masque. Juste elle, Koriand'r de Tamaran. Puis elle fronce les sourcils, et adopte une expression sévère. « L'Homme est capable de commettre les pires atrocités, simplement parce qu'il le peut. C'est... C'est dans sa nature, je l'ai moi-même découvert lorsque j'ai mis les pieds dans le monde moderne. » Sur Themyscira, rien de tout cela. Pas de querelles stupides entre les Amazones, pas de crimes odieux, pas de rivalités insensées... « Lorsque j'ai réalisé que les êtres humains possédaient une si grande part d'ombre, j'ai eu envie de les abandonner à leur sort. Envie de m'en retourner sur mon île paradisiaque, loin d'eux et de leurs atrocités. J'ai failli perdre espoir. » Elle secoue doucement la tête. « Mais la lumière est toujours là pour contrer les ténèbres. Tout n'est pas aussi terrible que je le pensais. Ils sont aussi capables de faire le bien, capables de produire de véritables miracles. Il m'a simplement fallu du temps pour réaliser que tout n'est pas aussi manichéen que je le pensais. » Quitter Themyscira pour le monde des hommes lui avait valu de perdre son innocence. Mais pas sa détermination à faire le bien et à aider l'Homme à devenir meilleur. « Personne ne te fera jamais le moindre mal, Kory. Je t'en donne ma parole. Le premier qui songera seulement à te torturer verra une horde de héros furieux lui tomber dessus. » Diana s'efforce d'afficher un sourire rassurant. Elle sait ce que Koriand'r a traversé, l'enfer, alors il est parfaitement hors de question qu'elle endure une nouvelle fois ce genre de sévices. S'il y a bien une chose que Diana ne tolère pas, c'est que l'on s'en prenne à ses proches.

Les doigts de la princesse Tamaraneanne se referment autour des siens, et malgré sa relative faiblesse, son contact reste chaleureux, agréable, avec un petit quelque chose d'unique. « Tu as agi en véritable héroïne, Kory. Sans ton aide, je n'aurais pas pu sauver Arthur. Sans toi, je n'aurais pas pu sauver un homme que je considère comme mon frère. » Parfois, écouter son instinct est la meilleure chose à faire. Koriand'r a fait preuve de courage et d'altruisme – les qualités premières que se doit de posséder un bon héros. Des valeurs qu'elle inculque très certainement aux membres de son équipe. Ce n'est pas une chose que Diana a déjà exprimé à voix haute, mais elle est persuadée que Koriand'r est une meilleure chef d'équipe que ne l'ont été Dick et Robin – déjà parce qu'elle n'a pas abandonné les Titans pour leur préférer une autre équipe. « La menace que représente le Syndicat sera éradiquée. Aucune autre fin n'est envisageable. » Et c'est parce que les choses ne peuvent être autrement qu'ils vont devoir mettre de côté leurs différends avec leurs ennemis, afin d'avoir une véritable chance de sauver la Terre. Si Diana n'est guère enchantée par l'idée de devoir faire alliance avec les pires criminels de la planète, elle sait pourtant qu'ils n'auront pas le choix. « Un monde en paix... » Diana secoue doucement la tête avant de retirer ses mains de celles de Koriand'r, pour les poser sur son ventre. « Je ne suis pas certaine que ce soit réellement possible. C'est ce que je souhaite plus que n'importe quoi pour mon enfant, mais... C'est utopique. Il y aura toujours des conflits, des guerres, des personnes armées de mauvaises intentions... C'est la nature humaine, simplement. Mais évidemment, une période de calme, même relatif, sera préférable à... Eh bien, cette situation. » Ce ne sera jamais parfait, mais cela peut toujours être mieux. « Et puis de toute façon, quoi qu'il arrive, j'ai l'intention de mettre mon bébé au monde sur Themyscira, là où je sais que nous serons en sécurité. Peut-être est-ce l'unique endroit sur Terre où la paix règne réellement. » Ou du moins, où elle règne de nouveau après une période de trouble initiée par les dieux eux-mêmes. « Chez moi, la naissance d'une Amazone est célébrée. Nous n'avons pas beaucoup d'enfants sur l'île, chacune d'entre elle est considérée comme un véritable miracle. » Elles, seulement. Si l'enfant qui naît est un garçon, alors il est confié à Héphaïstos, qui prendra soin de lui tout au long de son existence. Une tradition cruelle selon Diana, mais bien moins que l'alternative antique. « Mais parle-moi de Tamaran, si tu le veux bien. Puisqu'une femme enceinte est intouchable, je suppose que chaque naissance est un événement digne d'être fêté ? »

Il y avait plus qu'un monde entre la Terre et Tamaran, dans bien des domaines, et par bien des aspects. Et c'était même plus qu'un monde qui séparait les deux planètes, mais plusieurs galaxies. Alors ... Alors tant de choses étaient différentes, tant de concepts de base, intrinsèques et viscéraux, aussi. On ne change pas du tout au tout en un claquement de doigt. Et Koriand'r avait beau essayer, y mettre du sien, elle refusait de devenir quelqu'un d'autre que celle qu'elle était. Alors, chercher à comprendre toutes ces expressions imagées, d'accord, mais devenir une jeune femme lambda, sans aspérité, qui sait toujours faire ce qu'il faut en temps et en heure, qui ne provoque aucun remous et qui refuse d'aller à contre-courant des exigences qui reposaient sur elle, ou plutôt que l'on faisait reposer sur elle, et bien, c'était non. Ce serait sans elle, en tout cas, mais si cela plaisait et convenait à d'autres, et bien tant mieux pour ces jeunes femmes là ! En attendant, Koriand'r, elle, elle continuait de tracer sa route : et là, pour le coup, elle comprenait entièrement ce que signifiait cette expression, pas besoin de lui expliquer ! Elle estimait être entourée de bonnes personnes, de toute façon, ou en tout cas de personnes qui ne la jugeaient pas, ou pas trop, et qui se doutaient bien que ce n'était pas évident pour elle. Alors, la petite précision de Diana concernant la réalité des choses, sur Terre, concernant l'absence d'intouchabilité totale pour qui que ce soit, Kory ne put évidemment pas la prendre comme une attaque, ou l'expression du blase de son interlocutrice. Il s'agissait d'une discussion, entre deux femmes, et non entre un professeur et son élève de primaire.

« C'est dommage ... Cela donne la légitimité, selon certains Terriens, de faire n'importe quoi, dans l'irrespect le plus total. » Lorsque, pour la première fois, la jeune femme s'était faite peloter les fesses, ici, sur Terre, sous prétexte que quand c'était si beau, c'était fait pour être touché, et bien ... Et bien le nez du malheureux devait encore s'en souvenir, tout comme l'une de ses pommettes, d'ailleurs ! Lorsqu'elle avait raconté l'incident à l'un de ses tous nouveaux amis terriens, elle avait eu le droit à une explication du pourquoi du comment elle devait doser sa force, même si elle avait bien perçu un petit sourire amusé, réflexe, dans la première seconde ayant suivi sa confession : elle disait ça, elle ne disait rien ... Tiens, d'ailleurs, concernant le fait de dire et de parler de choses et d'autres ... « Cela fait longtemps que je n'ai pas parlé en face à face à Jason ... Mais, au moins, comme ça, ça me donnera une bonne excuse pour l'approcher ! C'est juste que, des fois, j'ai l'impression qu'il se prépare à tout quand il me voit arriver : dans son regard, c'est comme s'il y avait un signal d'alarme qui se déclenche, et qu'il devait être vif et réceptif ! »

Bon, en même temps ... En même temps, quand Kory avait rencontré Jason pour la vraie première fois, cela avait été particulier, même pour une Tamaraneanne comme elle ! Il était là, dans une très mauvaise forme, et il était clairement à la peine. Bien sûr, elle ne l'avait pas laissé dans le caniveau, comme on dit, parce que ce n'est pas gentil, et que ça ne se fait pas. Mais à son réveil, Jason n'avait pas été très reconnaissant, sans doute parce que Kory n'avait pas fait montre des techniques habituels de réanimation ou de soin ... Mais, bon, ils étaient dans le même camp, non, et puis ... Et puis Koriand'r ne pouvait rien changer aux circonstances et au contenu de leur première rencontre ! En parlant d'être dans son plein droit quant à être en colère, Jason l'avait été, à cette époque là, et maintenant, c'était au tour de Kory, de l'avis même de Diana. Même si c'était sans doute tout différent, et bien plus compliqué que ça n'en avait l'air au premier abord. Peut-être que le fait que la jeune femme ne soit pas du genre à étaler ses introspections personnelles n'aidait pas à ce que ceux qui l'entouraient puissent détecter les prémices des signaux d'alarme. Les Tamaraneans ne taisaient pas leurs émotions, bien au contraire. Si les sociologues et ethnologues humains s'intéressaient à ce peuple, sans doute en déduiraient-ils qu'ils étaient bien plus en connexion et en symbiose avec leurs sentiments et leurs émotions que ne l'étaient les Humains. Ils s'en nourrissaient, même. Pas que pour esquiver les embûches dans la société, mais aussi et sans doute surtout pour faire montre de ces spécificités qui étaient les leurs.

« Craquer ... Je crois que j'ai peur de le faire. » Reconnaître ses tords, ses failles et ses faiblesses n'étaient en rien quelque chose qui pouvait réellement coûter à Koriand'r. Pour elle, c'était normal, et il n'y avait aucune honte à ça. « J'ai presque tout pulvérisé, la dernière fois, sur un rayon d'un kilomètre. Je ne pense pas que vous seriez enchantés que je renouvelle l'expérience, même si, présentement ... Même si, présentement, ma physiologie tamaraneanne est réduite à mon simple physique. » Simple, simple ... Elle ne ressemblait quand même à personne ! En tout cas, à personne vivant sur cette planète. Peut-être était-ce justement ça qui plaisait à Diana, ou peut-être s'agissait-il de toute autre chose. Le narcissisme n'était jamais à chercher auprès de Kory. Elle connaissait ce terme, avait compris sa signification, mais cela ne pouvait tout simplement pas s'appliquer à elle. Si et seulement si l'on se plaçait du point de vue tamaranean, ou si on faisait l'effort d'essayer de voir les choses sous un autre angle, en allant plus loin que les modes de raisonnement habituels. Kory se savait donc attirante et très jolie, et elle ne faisait rien pour contrer tout ça. Tout comme elle ne faisait rien pour y mettre encore plus d'emphase. Du moins, pas de façon consciente ou délibérée en tout cas. Cela l'amenait donc à sourire à Diana, en retour, appréciant plus qu'on ne pourrait le penser la réaction de l'Amazone. Mais la tonalité de leur conversation exigeait du sérieux, et le sourire de la Tamaraneanne ne pouvait donc que finir par s'estomper. Certains préfèrent rire de leurs douleurs plutôt que d'en pleurer. Pour Kory ... Pour Kory, rire et pleurer étaient deux émotions qu'elle ne voyait pas bien cadrer avec tout ceci. Alors ... Alors, elle écoutait attentivement Diana, non sans sentir une pointe au cœur, douloureuse, cinglante et constrictive. « Me concernant, en arrivant sur Terre, je venais de réchapper à ... à ce que tu sais, et à qui tu sais, histoire de ne pas être vulgaire, il y a des oreilles innocentes par ici, dans ton ventre. ... A côté d'eux, les Humains m'ont paru bien moins monstrueux, ce qui ne signifie pas que j'ai été aveugle à leurs défauts. Et ... Et je n'avais plus réellement de chez moi où m'en retourner. Quant à perdre espoir ... J'ai tenu bon en refusant de baisser les bras, en refusant de me résigner, ou de devenir ce qu'ils voulaient que je sois. Mais si un jour j'en viens à perdre espoir, ou à perdre pieds, je t'en supplie, remets moi les idées en place, avec force et véhémence s'il le faut. »

Ils étaient sa famille, désormais, tous autant qu'ils étaient. Ou plutôt, c'était le cas pour tous ceux qu'elle comptait au nombre de ses amis et de ses proches. Bien sûr, ils n'étaient pas tous parfaits, et l'entente n'était pas toujours cordiale, mais cela ressemblait en tout cas suffisamment aux familles terriennes typiques pour que Koriand'r ne s'en inquiète pas trop. Les réunions de famille, comme on les voit à la télévision, elles tournent parfois mal. Et cela en vient même parfois à finir dans la rubrique "Faits divers" de certains journaux, télévisuels ou issus de la presse papier ! C'était sans doute un peu comme dans cette caricature qu'elle avait pu étudié en cours, celle parue le 14 février 1898, en France, au sujet de l'Affaire Dreyfus. Tout va bien, tant qu'on ne parle pas des sujets qui fâchent. Mais, après tout ... Après tout, cela donne un regain de vie et de vitalité, sans doute. Et tant qu'on parvient encore à aplanir les choses, ou bien, en allant plus loin, à la mettre en sourdine, à les laisser de côté, pour faire front contre un assaillant commun, et bien c'est que le fruit n'est pas encore trop pourri jusqu'à la moelle, sans doute. Alors, si tous suivaient le même raisonnement que Diana, concernant le fait de faire mordre la poussière à quiconque tenterait de s'en prendre à elle, à Koriand'r, pour de nouveau la torturer, et bien la principale concernée se disait qu'elle pouvait encore se sentir protégée pendant un bout de temps. Et sans avoir chercher à renvoyer l'ascenseur, quoi qu'il existe des mécanismes capables de le faire seuls, mais, bon, passons, Koriand'r avait tout de même agis par pure affection. Bien qu'elle ne connaisse finalement pas plus que cela Aquaman, elle le savait dans le même camp qu'elle, au nombre de ses alliés, donc. Et elle le savait aimé et apprécié. De Diana, de son épouse, mais aussi de Garth, par exemple. D'eux, et de tant d'autres sans doute. Quoi qu'il en était, bien qu'elle n'en disait rien, la jeune femme était très touchée, et quelque peu revitalisée, aussi, par les paroles de la splendide Amazone assise face à elle. Sans doute que, sur le moment, elle avait pu créer quelques frayeurs dans le cœur de ses proches, en ressortant dans l'état dans lequel elle était ressortie de son altercation avec Ultraman. Mais, finalement, personne n'était venu lui reprocher quoi que ce soit, et Diana confirmait qu'elle n'avait pas mal agis. Juste avant de prononcer quelques nouvelles paroles qui trouvaient un écho non négligeable à son oreille. Les Seigneurs de Guerre d'Okaara lui avaient toujours dit qu'il n'y avait que deux issus respectables et acceptables à une Guerre : vaincre ou périr en tentant d'y parvenir.

« La reddition n'était donc pas une option, nous sommes d'accord. » Par la suite, durant plusieurs secondes, trop longues pour ceux qui n'aimaient pas le silence, sans doute, Koriand'r resta muette. Elle écoutait les propos de Diana, qu'elle observait, mais elle était également très songeuse, et en pleine phase de réflexion. Pas qu'elle ne sache pas trouver les mots, ou qu'elle soit en panne sèche de réactions, mais plutôt parce que tout ceci n'avait rien à gagner à être estimer et juger dans la précipitation, bien au contraire. Koriand'r appuyait donc sur le frein, pour contrer les tendances impulsives que pouvait lui dicter sa nature tamaraneanne. « Je n'ai jamais connu autre chose que la Guerre. Je suis moins âgée que toi, bien sûr, mais vivre en paix, dans le calme complet, sans nuage noir au-dessus de ma tête, dans le fond, je ne sais pas quel goût cela a. Je viens d'essayer de trouver un instant de paix totale dans mon existence, mais, non, en fait, non. Tu as raison, c'est sans doute utopique. » C'était ... triste ? Sans doute. Mais pas pour elle. Cela la peinait un peu, certes, mais ... Mais ce n'était pas comme si elle pouvait regretter ce qu'elle n'avait jamais connu. Refaire le monde était entièrement impossible. Et passer son temps à regarder en arrière en se disant que, si on changeait ça, et puis ça, ça aurait été mieux, et bien ... Ce n'est pas vivre. Le temps fuyait, sans cesse, inexorablement, comme lorsqu'on tentait de ne laisser échapper aucune goutte d'eau au milieu de son poing fermé. « Themyscira a l'air d'être un endroit magnifique. Et un peu loin du repaire de féministes avides de sens et de bataille que certains auteurs antiques ont voulu dépeindre ... » Un mince sourire amusé naquit dans un coin de la bouche de Koriand'r. Elle faisait ses études là-dedans, et, franchement, des fois, qu'est-ce qu'il ne fallait pas lire concernant les civilisations anciennes ! Mais, finalement, ce qui fit s'épanouir un peu plus son sourire, ce fut la question de Diana. Une question à laquelle la principale concernée prit le temps de réfléchir, avant de répondre quoi que ce soit. « En effet, une naissance est toujours une joie immense, car cela célèbre la fertilité, et la capacité de la vie à se frayer un chemin, toujours, au milieu du magma de contradictions, d'improbabilités ou de contretemps. Qu'au milieu du chaos, la vie triomphe toujours, c'est ... C'est l'une des plus grandes joies qui puissent exister pour un Tamaran. Ma naissance était tant attendue, par tous, parce qu'il fallait un héritier au trône, et que, quelques années seulement avant ma naissance, ma Lignée avait payé un si lourd tribu que les Hautes Instances auraient dû se réunir pour désigner une nouvelle Lignée régnante si mon père avait lui aussi péri. Quand une naissance s'annonce dans une famille noble, on remercie X'Hal en lui offrant libations et orgies. Il paraît que l'on n'avait plus vu de pareilles depuis des décennies, quand je suis venue au monde. Je crois qu'il a aussi s'agit d'un instant hors du temps, pour tous. Nous étions toujours en pleine guerre, et, à cet instant précis, tout mon peuple a dû voir la flamme de l'espoir se raviver. Les présages étaient bons, ma mère ayant accouchée comme une vraie Tamaraneanne, alors que je ne me suis vraisemblablement pas laissée impressionnée par tout ce monde réunit pour moi. » Elle marqua une pause, avant de reprendre. « Beaucoup de naissances se sont annoncées au même moment, quelques semaines après la grande fête de ma naissance ... Je crois que pour beaucoup, cela a été une façon d'adresser ce qui s'apparenterait le plus à votre fameux magistral doigt d'honneur, en direction de ces dégénérés de Citadelians. »