Sorry seems to be the hardest word || Damian

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Elle avait pensé à sonner, en arriver au pied de la tour. Enfin, avant ça, elle avait pensé à tout ce qu’elle était censée dire, faisant et défaisant la conversation dans sa tête, testant toutes les possibilités, les éventualités, les rebondissements, juste au cas où. Tout ça pour s’apercevoir qu’elle n’était absolument pas prête à avoir cette discussion, tout comme en vérité il n’y avait pas grand-chose qu’elle pourrait lui dire. Déjà, elle savait qu’il était vivant. Elle n’avait pas eu le courage de lui poser la question directement, mais elle n’avait pas hésité à la poser à Bruce, sans plus s’expliquer sur la bizarrerie de cette interrogation. De toute façon, il se doutait déjà de quelque chose, probablement. Et il saurait bientôt. Son amitié avec Bruce avait connu beaucoup de soubresauts mais pas sûr qu’elle résiste à cette épreuve-là. C’était son fils, qu’elle avait failli tuer. Mais elle n’avait rien à dire à Bruce. Non, c’était à Damian qu’elle devait parler. Même s’il avait su dès le tout début ce qui n’allait pas chez elle. En vérité, que pourrait-elle lui dire de plus qu’il n’avait pas déjà deviné lui-même ? Et donc, elle repartait dans ses mises en scène mentales, lui, elle, lui, elle. Tout ça pour se retrouver au pied de la tour de l’horloge, à se dire qu’elle avait eu l’intention de sonner, de s’annoncer, la moindre des choses. Sauf qu’en vérité, si elle faisait ça, il y avait une chance pour qu’il fasse le mort, sans mauvais jeu de mots. Elle ne pouvait pas se permettre de se faire claquer la porte au nez.

Alors elle s’envola droit vers le ciel, longeant le mur de vieille brique, passant devant plusieurs fenêtres jusqu’à celle d’où émanait de la lumière. Elle savait que Barbara avait un système de surveillance plus qu’au point, mais elle n’était pas certaine que Damian passe son temps le nez collé devant les écrans. Elle se posa délicatement sur le rebord de la fenêtre et approcha son visage du verre. Elle le vit qui était là, s’occupant à elle ne savait quoi. Elle leva la main et la posa à plat sur la vitre, sentant déjà les larmes lui monter aux yeux, mais c’était des larmes de soulagement. C’était vrai qu’il était en vie. Deux bras, deux jambes, une tête, elle n’en demandait pas plus. Elle aurait aussi bien pu repartir maintenant qu’elle avait pu témoigner de ses yeux qu’il avait survécu, non seulement à elle, mais à New Themyscira. Sauf que ça aurait été de la lâcheté. Elle ne serait venue que pour apaiser sa mauvaise conscience avant de rentrer se mettre au chaud chez elle, et ça n’aurait rien réglé, rien arrangé ou, s’il devait en aller ainsi, rien achever. Oh, elle le connaissait quand même un peu. Sa confiance était rare et précieuse, et il ne se trompait pas quand il l’accordait à quelqu’un. En tout cas, rarement. Mais elle l’avait trahi. Et il y avait une chance pour qu’il ne lui laisse pas de seconde chance. Certains membres de la famille Wayne avait la mémoire longue et n’appréciaient pas de se faire avoir.

Elle inspira doucement, plusieurs fois, pour se donner du courage, puis toqua doucement à la fenêtre. Une grande personne rentrant chez un ado par la fenêtre. On avait vu pire, et puis ses intentions étaient bonnes. De toute façon, il savait déjà qu’elle était là, elle en était sûre. Et, toujours décider à en finir d’une façon ou d’une autre, elle ne lui laissa pas l’occasion de lui refuser poliment l’accès à la tour – car alors elle ne serait pas rentrée, évidemment, bien élevée qu’elle était. Elle appuya sur le verre de sa main, qui traversa la fenêtre, suivi de son bras, puis de tout son corps, et elle atterrit doucement à l’intérieur avant de se redresser. Babs n’était nulle part en vu. Parfait. Elle n’avait pas besoin de témoins pour ce qui allait suivre. Elle regarda de nouveau Damian, luttant contre son envie habituelle et bien ancrée de lui sourire, de tendre la main vers lui, de tenter une approche physique qu’il détestait tant. Mais non, il n’y avait pas matière à sourire. Elle écarta les bras en guise de reddition, tout de suite, dès le départ. Elle n’allait pas lui sauter à la gorge comme elle l’avait fait la dernière fois. Elle n’allait pas le frapper, lui lancer des sorts, le faire souffrir encore et encore, essayer de le tuer… Les images du passé jaillirent dans son esprit et lui coupèrent le souffle. Elle aurait pu le tuer. Elle aurait pu le tuer. « C’est moi, Damian. C’est vraiment moi. » Pas le démon. Pas la personne pleine de colère et de désespoir influencée par un démon aux côtés de qui il avait combattu si vaillamment au Kahndaq. Juste elle.

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ft. Zatanna

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En plein milieu de nulle part. Le hasard du retour sur sa Terre, dans sa réalité, l’a amené en plein milieu de nulle part. Et dans le froid… Damian s’est retrouvé au milieu du Svalbard. Îles pour le moins désagréables en cette période de l’année sans y être préparé. Des températures en dessous de 0 et de la neige et de la glace partout à perte de vue. Des cailloux mortels perdus au milieu d’eaux glacées. Heureusement pour lui, l’éveil de Terre-I a suffi à occuper tous les esprits, chacun tentant de rassembler les morceaux et chacun ayant apparemment retrouvé sa planète à des milliers de kilomètres de son point de départ. Il n’a donc pas eu à souffrir d’une quelconque attaque au moment où il était le plus faible.
Heureusement, il n’est pas arrivé nu, ni même désarmé. Encore équipé de plusieurs armes utilisées sur Terre-IV, Damian a pu prélever plusieurs peaux de rennes pour se recouvrir et marcher. Des heures et des heures durant. Longeant les côtes un moment, apercevant au large baleines bleues et nombreux aux cétacés ainsi que divers phoques et autres morses, il a quitté la zone plutôt dangereuse afin de s’enfoncer dans les terres. Quittant une zone habitées par des animaux parfois très agressifs, pour marcher dans l’immensité désertique, son cœur s’enserrant de l’inquiétude de ne jamais trouver personne pour lui permettre de rentrer chez lui. Jusqu’à finalement trouver des habitants. Contrée perdue mais heureusement habitée, Damian a eu après une trop longue agonie s’effondrer devant un feu de cheminé et ingurgiter un vrai repas.

Rentrer à Gotham lorsqu'on s'appelle Damian Wayne est moins difficile qu'il n'y paraît même s'il a vite compris que les choses allaient mal. Et d'ailleurs, Damian a pris le temps d'aider comme il le pouvait les habitants de la ville dans laquelle il avait fini par atterrir une fois sortie des zones désertiques du Svalbard. Rétablissement des structures et réparations des toitures dégradées, clôtures retendues, nettoyages des zones urbaines et dégagement des voies d’accès, entretien mécanique de quelques véhicules pour assurer la liaison entre les villes, et même quelques travaux dans des serres de cultures pour tenter de relancer quelques plantations. Ce qui lui a sans doute le plus plu a été les quelques heures de chasse réalisée pour rentrer de la viande afin de la mettre à sécher. La pêche par contre aura eu raison de sa patience déjà presque inexistante.
Jusqu'à finalement profiter des communications partiellement rétablies pour avertir Alfred de sa localisation. Et c'est avec des ressources et des vivres que Damian a pu remercier ceux qui l’avaient aidé en plus de l'aide physique déjà apportée, laissant ainsi un plutôt bon souvenir aux habitants malgré quelques remarques un peu hautaines.

Et une fois revenue à une civilisation plus dense, Damian a pris conscience de la gravité des choses. Ce qu'il avait découvert au Svalbard était valable partout. Cultures détériorées rendant des productions médiocres et un approvisionnement restreint en diverses ressources alimentaires pourtant indispensables. Economie à l'abandon, système médical surchargé. Et autres joyeusetés liées aux six mois de gèle de la planète, un cadeau signé Brainiac. Un monde à genoux pour venir l'achever. Laissant ainsi planer au-dessus de toute cette pagaille l'ombre d'une arrivée prochaine pour terminer le travail déjà commencé.
Mais plutôt que de s'activer sur ça, Damian a préféré réinvestir les rues de Gotham avec sa tenue de justicier masqué pour empêcher les gens de profiter de la situation instable. Et rien de mieux que les rues de sa propre ville pour ça, n'est-ce pas ? Une ville grouillant de délinquants et super vilains en tous genres, parfaits pour tirer profit d'un pays genoux à terre. Robin n'a pas eu à s'ennuyer depuis son retour. Il a même eu à peine le temps de se remettre des blessures gagnées sur Terre-IV qu'il en gagnait de nouvelles dans sa réalité.
Et bien qu'il soit occupé à tenter de limiter les dégâts dans les rues de Gotham il a tout de même pris le temps d'aller traîner au manoir de temps à autres. Histoire de voir comment allaient les autres membres de la famille. Se retrouver seul dans une autre réalité, avec ses souvenirs et loin des siens lui aura au moins permis de prendre conscience de certaines choses, notamment l'inquiétude de ne pas les savoir en sécurité. Il ne le reconnaîtra probablement jamais. Mais rentrer à Gotham et les découvrir tous sains et saufs aura été un soulagement assez important pour lui.

Mais là, c'est une pause qu'il s'accorde. Une pause dans ses retrouvailles familiales qui lui demandent beaucoup d'énergie à démêler l'ensemble des émotions parfois contradictoires qu'il ressent. Une pause dans ses interventions en ville. Une pause dans tout en réalité. Profitant de la tour de Barbara laissée libre car elle a rejoint le professeur d'université à l'autre bout du pays. Damian ne lui en veut pas tellement, au contraire. Il apprécie d'avoir les lieux pour lui tout seul.
Enfin. Le système de sécurité détecte quelqu'un devant la porte. Il ne prend pas garde au premier signal sonore. Mais le second attire forcément son attention car ce sont les détecteurs qui sont intégrés à la paroi de la tour, ceux en hauteur. Il faut donc escalader la façade pour les activer. Qui tente donc de s'introduire ici ? Peut-être l'un des orphelins, mais comment sauraient-ils qu'il est ici ? Non. Penché sur des chiffres économiques internationaux, il fait glisser sur l'écran d'une tablette tactile l'interface du système de sécurité pour jeter un œil aux vidéos surveillances. Il n'a pas de mal à reconnaître la silhouette filmée devant la porte : Zatanna. Il n'a pas revu la magicienne depuis leur mauvaise rencontre dans l'autre réalité. Rencontre à laquelle il a survécu assez péniblement.

Il le fait disparaître, car il sait qu'elle n'est plus devant la porte. Non. Zatanna s'est sans doute envolée et à voir son fidèle compagnon canin relever la tête en direction d'une fenêtre, il se doute qu'il n'a pas vu un pigeon. Alfred le chat aurait sans doute déjà établi son royal fessier devant la surface vitrée pour évaluer la possibilité d'attraper le volatile. C'est donc un autre genre d'attention qui capte le regard attentif de l'animal qui est loin d'être méchant, et loin d'être un bon chien de garde en dépit de sa taille et de son imposante constitution. Ce chien est presque trop adorable pour lui appartenir. Une anomalie dans la matrice. Bien sûr, il peut grogner à sa guise lorsqu'il sent tout de même une certaine forme de danger. Mais sa limite de détection est assez haute.
Quelques coups sont portés à la fenêtre. Damian ne relève pas les yeux espérant que ça la convaincra de faire demi-tour. Il n'a pas tellement envie de lui parler. Damian n'aime pas trop qu'on tente de le tuer. Bien sûr, il a toujours reconnu à Zatanna sa puissance et bien qu'il soit meilleur combattant qu'elle, il sait qu'elle n'aurait aucun mal à le réduire à néant rien qu'en utilisant la magie. Il n'a donc pas honte de ce qui s'est produit, mais il lui en veut tout de même. Difficile de savoir quoi croire dans le discours de l'entité qui s'est adressée à lui à travers elle. A-t-elle réellement baissé les bras et renoncé à se battre l'abandonnant ainsi à la mort ? Si oui, alors Damian n'est pas sûr de vouloir à nouveau lui parler.
Mais lorsqu'il entend le bruit léger de la magicienne qui atterrit sur le sol, il écarte sa tablette et se lève, batarang entre les doigts, prêt à le lui lancer au moindre geste agressif de sa part. Cette fois, il est bin forcé de la regarder pour être sûr qu'elle ne se jettera pas sur lui. Et elle écarte les bras dans une attitude assez claire de reddition et de paix. Elle lui assure que c’est bien elle. Juste elle. Mais même si Damian n’a pas beaucoup eu affaire à des démons et à des gens possédés, il se doute bien qu’il doit y avoir de bons comédiens dans l’histoire. Il tique et se raidit un peu : « Et tu te figures que je vais te croire ? ». Il pince un peu les lèvres agacé d’avoir été surpris et de voir que visiblement, elle ne s’arrête pas à la notion d’espace privé. Il demande : « Qu’est-ce que tu veux ? ». Peut-être a-t-elle encore envie de tuer quelques personnes et qu’elle vient finir le travail…

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Elle avait de la chance d’avoir affaire à la personne la plus disciplinée qu’elle connaisse. D’autres auraient lancé ce batarang sans plus réfléchir et elle serait tombée raide morte sur place avec ce truc planté entre les deux yeux. Mais elle savait que c’était un réflexe plus que spécifiquement lié à sa présence à elle. Pour le moment. Maintenant qu’il l’avait sous les yeux, chacune de ses réactions serait liée à elle. Et à ce qu’elle avait fait. Et à ce qu’elle était pour lui désormais. Ce qu’elle représentait – ennemie, inconnue. Amie. Elle ne savait déjà plus quoi dire, elle avait oublié en un instant toutes ses belles paroles répétées tant de fois sur le chemin. Pour l’heure, elle se contentait très bien de simplement le regarder en silence, de profiter de l’immense soulagement de le voir en vie, tout simplement. Et lui, bien sûr, ne lui faisait plus confiance, pas en cet instant. Elle baissa doucement les mains, laissant les bras le long de ses flancs, sans avancer d’un pas, cherchant un moyen de lui prouver que c’était bien elle, en vain évidemment. « Tu savais, ce jour-là à Londres… Et même avant ça au Kahndaq. Que ce n’était pas vraiment moi, pas tout à fait en tout cas. Alors je pense que tu sais aujourd’hui que ce n’est que moi. » Belle façon de lui faire endosser cette responsabilité à lui, mais après tout, ce n’était pas avec quelques confidences ou un tour de magie qu’elle lui prouverait qu’elle était libérée de son démon, ni en buvant de l’eau bénite ou en récitant une prière. Les démons étaient plus puissants et plus malins que ça, hélas, et c’était bien pour cela qu’ils étaient si difficiles à repérer. Mais Damian l’avait su, lui. Elle était sûre qu’elle n’aurait pas à se justifier, au moins sur ce sujet-là.

La suite, en revanche… Ce qu’elle voulait ? Elle-même n’en savait rien. Elle n’osait pas penser à quelque chose d’aussi plat, d’aussi banal que : s’excuser. Pourtant, c’était la base, elle lui en devait, des excuses. Elle s’appuya lentement sur le rebord de la fenêtre qu’elle venait de traverser et son regard tomba sur le chien vautré sur le canapé, qui semblait beaucoup moins tendu que les deux humains dans la pièce. Dans d’autres circonstances, elle se serait précipitée sur lui pour le serrer contre elle. « Je veux… Je suis venue voir si tu allais bien. » Si elle ne l’avait pas tué. « Et je suis venue te promettre que je ne referai jamais cette erreur. » Et pour l’heure, elle était sûre de vouloir tenir cette promesse. Plus jamais. Plus jamais ça. Jusqu’au jour où elle aurait l’impression de ne pas avoir le choix ? Non, non, plus jamais, plutôt mourir, c’était un genre d’abandon différent mais qui au moins ne mettrait personne en danger. Quant à lui dire qu’elle était désolée… Elle trouvait ce mot tellement vide de sens au regard de ce qu’elle avait fait, tellement indécent, qu’elle était sûr de ne pas réussir à le prononcer, et pourtant c’était la base. Elle lui devait des excuses, sans attendre de lui qu’il les accepte qui plus est. « Ce jour-là à Londres… Tu t’es battu contre un démon. Si tu le souhaites, je peux t’expliquer. Ça ne justifiera rien, et tu avais déjà à peu près tout compris sur le moment. J’étais là, en quelque sorte. » Pas comme une spectatrice impuissante, en revanche. C’était bien plus honteux. Elle avait venu son âme. Cela ne voulait pas dire prêter son corps à un démon en restant assise au premier rang avec du popcorn.

Elle croisa les bras, mal à l’aise. Cela ne se passait pas vraiment comme elle l’avait imaginé, évidemment. Et puis, il y avait autre chose qu’elle devait lui dire. Une autre faute impardonnable dont il entendrait forcément parler. Mais encore fallait-il qu’il accepte de l’écouter, ce qui n’était pas gagné. « Et je veux aussi te remercier de ne pas avoir abandonné, vis-à-vis de moi. Et surtout, d’avoir sauvé ta vie. De ne pas m’avoir laissé te t… » Non, elle ne pouvait pas le dire, ça non plus. D’ailleurs elle ne pouvait même plus soutenir son regard. Elle eut soudain envie de disparaître d’un claquement de doigts, et comme elle pouvait très bien le faire, elle dut se faire violence. Voilà bien quelque chose qui n’aurait pas mérité le respect de Damian Wayne. Alors elle se contenta de rester plantée là devant lui, comme au tribunal, attendant de savoir s’il acceptait de l’écouter, s’il voulait entendre ses explication, ou s’il voulait simplement qu’elle s’en aille, et que plus jamais elle ne réapparaisse devant lui.

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ft. Zatanna

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Damian reste silencieux après sa question. Il se contente de la regarder, attendant qu'elle fasse quelque chose. Au début, elle ne fait rien. Elle se contente de rester là à le regarder en retour. Si elle avait été toujours possédée, ils seraient sans doute déjà en train de se battre n'est pas ? Il y a quelque chose de très angoissant dans ce silence immobile. Qui est-elle ? Que va-t-elle faire ? Il est sur son terrain ici, il pourrait sans doute prendre le dessus rien qu'en sortant les quelques armes qui sont là, s'il ne lui laisse pas le temps d'utiliser sa magie. Lorsqu'elle se décide finalement à parler, il raffermit sa prise sur le batarang prêt à le lancer au moindre signe d'agressivité et d'attaque. S'il n'a aucune certitude, il peut au moins reconnaître que cette passivité et retenue lui ressemble bien plus. Et que ce qu'elle dégage est quelque chose d'habituel. La culpabilité qui transpire de tous ses pores aussi. Mais Damian est méfiant... Il n'oublie pas que Zatanna est une prestidigitatrice et qu'à ce titre, elle est surement aussi bonne comédienne que magicienne, même si elle utilise réellement sa magie sur scène. Même s'il a un sens de l'observation aiguisé, d'autant plus lorsqu'il connait bien les gens, il y a des choses qui ne se perçoivent pas toujours si aisément. Et contrairement à ce qu'elle semble pensé, ce n'était pas si difficile de comprendre ce qu'il se passait au Kahndaq et à Londres. Sur leur propre Terre parce que lui-même n'était pas réellement lui-même, même si finalement, ses années d'entraînements à la ligue des assassins et son état colérique naturel par défaut lui avait permis de ne pas totalement dérailler. Et à Londres-IV parce que son discours semblait réellement dissonant avec la Zatanna qui l'empêche de maltraiter trop gravement - voire même de les tuer - des criminels dans Gotham dès qu'elle en a l'occasion.

Il ne dit rien. Il attend de finalement trancher quant à la personne qui lui fait face. Elle reprend finalement la parole après s'être appuyé sur la fenêtre. Son regard quitte finalement le garçon pour regarder le chien. Titus ne semble pas se méfier plus que de raison, pourtant les animaux ont cette sensibilité supérieure à celles des humains. Damian note que son fidèle compagnon ajoute un point au tableau de la Zatanna humaine qu'elle se dit être à demi-mot, lui laissant le soin de prendre cette décision par lui-même. Parce qu'elle se doute probablement qu'il ne sera pas si facile à convaincre. Il relève paresseusement les yeux sur Zatanna quand il la sent la regarder, mais ne bouge pas, respectant l'allure tendue de Damian. Le gamin l'écoute à nouveau lorsqu'elle reprend la parole. Il a du mal à croire cette promesse. Parce qu'il ne comprend pas très bien ce qui s'est passé et surtout comment cela a pu se passer. C'est très déconcertant. Et très inquiétant aussi, il faut bien le dire. Elle croise les bras, mal à l'aise. Il faut sans doute dire que l'attitude toujours aussi fermée et silencieuse du garçon à qui elle s'adresse ne doit pas l'aider à se sentir en confiance. Un ami empathique et compréhensif aurait sans doute été bien plus accueillant. Un thé, un café et peut-être même un cookie. Une installation bien plus confortable et bien moins menaçante que ce qu'il lui offre actuellement. Mais si Damian était un ami empathique et tout coulant de guimauve, alors il ne serait sans doute pas lui et ils n'auraient peut-être même pas cette conversation car il serait sans doute mort en tombant dans se précipice.

Et alors qu'elle reprend encore la parole, elle n'a ni le courage d'affronter son regard, ni le courage de finir sa phrase. Il demande : « Me tuer ? ». Il dit : « Parce qu'il s'agit bien de ça... De ceux que tu as tués, ou tenté de tuer... ». Il la regarde un moment. Silencieux à nouveau. Il la détaille alors qu'elle se trouve bien incapable d'affronter ce qu'elle a fait. Ce qu'elle lui a fait, mais probablement aussi ce qu'elle a fait aux autres. Et s'il n'a aucun problème à tuer des gens qui le méritent, il se trouve que depuis son arrivée à Gotham, Damian commence à éprouver quelques scrupules à tuer des gens innocents, même si cela peut lui permettre d'obtenir ce qu'il veut. « Est-ce que tu étais là ? ». Il la regarde. Puis demande : « Ce démon, comment est-ce qu'il a pu parvenir à te posséder ? ». Il n'utilise probablement pas les bons mots. Mais de ce qu'il en a lu, il n'est pas convaincu que cela soit aussi facile pour un démon de réussir à posséder quelqu'un. Il n'est pas réellement sûr d'avoir compris ses lectures. Il est aussi bien question de marques et de liens, que d'accords et de pactes. Il ne semble donc pas aussi aisé pour un démon de posséder un être humain, probablement encore moins lorsqu'il s'agit d'une sorcière si puissante. Alors maintenant qu'elle est là, il veut savoir. Il se décide enfin à bouger. Il commence par ranger son batarang puis va chercher la cafetière de café encore à moitié pleine et toujours chaude, maintenue à température par la fonction de la cafetière technologique qu'il affectionne tout particulièrement. Il revient de la cuisine avec la cafetière et un mug en plus, le posant sur la table basse. Il remplit le sien - à nouveau, oubliant toute idée de sommeil vu la quantité de café qu'il continu à prendre aujourd'hui - et celui qu'il vient de poser pour Zatanna. Puis, il demande : « A combien d'autres personnes tu t'en es pris ? ». Il a bien essayé de savoir, mais c'était assez difficile, et il a eu bien d'autres choses plus importantes à faire, alors finalement, cette recherche-là est passée aux oubliettes.

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Le tuer. Oui, le tuer. Le mot franchit les lèvres de Damian, fila vers Zee et se planta dans son cœur comme une lame. Elle se revoyait, elle le revoyait, et elle se souvenait très bien qu’elle n’avait rien fait pour empêcher Nebiros de faire ce qu’il avait fait. Elle se souvenait que si Damian lui-même n’avait pas sauvé sa vie, s’il n’avait pas été aussi prodigieux, oui, elle l’aurait tué. Elle ne se rappelait rien venant d’elle qui aurait pu empêcher cela. Et lui, bien sûr, pouvait le prononcer, ce mot hideux. Il en avait le droit. Elle sentait son regard sur elle, et elle savait qu’elle aurait dû au moins le soutenir. Elle renversa le visage en arrière en inspirant à fond, fixa le plafond pour gagner encore quelques secondes, puis posa les yeux sur lui, avec un frisson. Il était là. Il était vivant. Mais ça ne suffisait pas, pour l’heure. Et il avait des questions, évidemment. Là encore, c’était normal. Mais elle était venue pour ça. Elle ne pouvait pas prétendre être surprise, parce qu’elle était venue pour s’expliquer. Il y avait peu de personnes à qui elle devait cela, mais à lui, comme à Rosie, elle devait des explications claires, sans rien cacher. « J’étais là. Mais je n’étais plus moi-même. Je savais qui tu étais, mais il n’y avait plus rien en moi qui te rendait... plus important… que le démon, à ce moment-là. » Elle aurait pu lui dire qu’elle était possédée, point barre. Qu’elle n’avait plus le contrôle de rien, qu’elle était assise au premier rang d’une très mauvaise tragi-comédie sur laquelle elle n’avait plus la main, mais c’était plus compliqué que ça. Et plus honteux, aussi. « Je n’ai pas accepté de me laisser posséder par lui, mais j’ai accepté de le laisser se servir de moi. J’ai cru sur le moment que le résultat serait peut-être différent, mais j’avais tort. Les démons gagnent toujours, pour ces choses-là, et au final il a bel et bien pris possession de moi. Et en le laissant me marquer, je l’ai laissé effacer certaines choses en moi qui l’empêchaient d’atteindre son but. La compassion, l’empathie, la conscience du bien et du mal, le remords, la culpabilité, la retenue, une grande partie de moi, en somme. Alors j’étais là, oui, mais… je n’éprouvais rien qui aurait pu me donner envie de lutter contre lui pour l’empêcher de s’en prendre à toi. » Même pour elle, c’était difficile à expliquer. Mais ce dont elle se souvenait, c’était à quel point, pendant un temps, elle avait apprécié d’être soulagée de cette impuissance perpétuelle qu’elle ressentait en permanence. De ces hésitations qui l’empêchaient de se servir de ses pouvoirs à fond et qui si souvent l’avaient empêchée de sauver les gens qu’elle aimait. Il n’y avait plus de moyens, seul comptait le but. Et cela simplifiait tout.

Elle le suivit des yeux alors qu’il semblait se détendre, et le vit leur servir du café. Petit homme miniature, en fait, elle avait l’impression de voir Bruce, et elle fut envahie d’une tendresse infinie pour lui – quelque chose que Nebiros lui avait volé, mais pas pour toujours. Elle s’assit prudemment devant la table basse, entoura sa tasse de ses mains et se concentra sur la chaleur, la douleur sur sa peau. « Combien, je ne sais pas. Beaucoup trop. Des dizaines. Et des dizaines. » Les larmes lui montèrent aux yeux. Et c’était probablement une image ridicule, une adulte pleurant dans son café face à un enfant telle une statue de marbre, mais ce n’était pas quelque chose contre elle pouvait lutter. En se libérant de Nebiros, elle était redevenue la personne un peu trop chiffe-molle qu’elle avait toujours été. Celle n’avait pas pu sauver John. Et qui sermonnait Damian sur à peu près tous ses choix de vie. Eh bien, elle ne pourrait plus vraiment se le permettre, maintenant, hein ? Elle essuya ses joues avec ses mains et renifla. « Quant au pourquoi… Le pourquoi est facile. Ce jour-là, quand j’ai fait ce choix, j’ai nié tout ce que j’étais, tout ce que j’avais appris, tout ce que je savais. Se mettre des limites, ne pas franchir de frontières, même si cela veut dire ne pas pouvoir sauver quelqu’un, ce qui revient en fait à ne pas vouloir la sauver… » Ce débat-là, Damian le connaissait par cœur. La façon dont il avait été élevé s’était fracassée sur la doctrine de Bruce, et des gens qui petit à petit avaient fait sa connaissance, dont elle. Cent fois, ils en avaient discuté. Jusqu’où pouvait-on aller pour atteindre son but ? Ne pas tuer, ne pas blesser, ne pas devenir l’ennemi. Mais ce faisant, voir le type qu’on a simplement livré à la police ressortir le lendemain soir et tuer quelqu’un. Voir son père brûler vif. Voir ses alliés mourir, alors qu’on aurait pu faire quelque chose, mais qu’on ne pouvait pas, parce que tous les moyens n’étaient pas bons. Eh bien, elle avait atteint cette limite-là.

« John était mort. Je n’avais rien pu faire. J’aurais pu probablement, et si tu avais été là tu ne serais pas resté planté là à le regarder faire, mais je n’ai rien fait parce que c’était… mon devoir… pour sauver le monde… parce que la mort d’une seule personne pour en sauver des milliards est censée être justifiée… encore une fois, encore et toujours. Mais cette fois-là, ça a été la fois de trop. Tu penses probablement que l’amour est la dernière raison qui devrait servir de motivation à quelqu’un, parce qu’aucune décision intelligente ne peut en sortir, et peut-être que tu as raison. Je souffrais beaucoup. Depuis très longtemps. Et ce jour-là, je me suis permise de penser que le mal que j’allais causer serait toujours moins pire que la douleur que je ressentais, j'ai pensé que ça irait vite et que... » Et que seule elle en paierait le prix. Finalement, cela la fit sourire, tristement. Ils avaient aussi parlé d’amour, et Damian aurait peut-être dû être la dernière personne à qui elle aurait dû parler de ça, et pourtant, pour le moment, il était le seul à qui elle en parlait. « Tu disais que l’amour était une faiblesse. Et je t’ai dit qu’aimer, c’était être égoïste. Il faut croire qu’on avait tous les deux raison. » Elle n’était toujours pas certaine de la raison qui avait poussé John à sacrifier sa vie. Abnégation, comme elle l’avait dit ? Par amour ? Pour le monde ? Et quand elle regardait Damian, quand elle se souvenait de lui qui avait fait face au démon… « Toi qui as toujours su jusqu'où tu étais prêt à aller, tu trouves peut-être tout ça incompréhensible. » Pourtant, n'était-il pas différent lui aussi ? Elle avait déjà décidé de répondre sans détour à toutes ses questions s'il en avait. Si Nebiros et elle l'avaient tué ce jour-là à Londres, il aurait rejoint la grande cohorte des âmes destinées à l'enfer. « Comment est-ce que tu... as survécu, ensuite ? » Elle espérait qu'il avait trouvé des alliés. Qu'il avait trouvé Batman. Qu'il n'avait surtout pas croisé son double - ou le sien, pour ce que ça valait.

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Finalement, après avoir basculé sa tête en arrière et soupire longuement, elle réussit enfin à le regarder. Et bien sûr, lui la regarde toujours. Il attend des réponses. Il sait. Il sait à quel point c'est difficile. Parce que depuis qu'il est ici, il a appris à ses dépens qu'il n'y avait pas de quoi être fier de tuer. Enfin... selon Bruce. Et ainsi tout ce qu'il est, était, est toujours en partie ne pourra jamais faire la fierté de ce père qu'il continuera probablement à décevoir, inlassablement. Parce que même s'il évolue, qu'il change, il ne sera probablement jamais comme Bruce. Alors il sait à quel point c'est difficile de parler. Enfin... Disons qu'il ne sait peut-être pas à quel point c'est difficile pour elle qui a toujours eu plus de morale que lui, mais vu comme c'est difficile d'être ce qu'il est dans cette famille qui est la sienne, et de pouvoir parler librement, il imagine.

Alors il la laisse parler. Et il écoute silencieusement. Effectivement, c'est difficile. Difficile de dire à haute voix ce qui s'est passé, de raconter son histoire. De mettre des mots sur ses choix, qu'ils soient mauvais ou non, justifiés ou non. Evidemment, Damian est méfiant, mais il n'est peut-être pas celui envers qui se raconter est le plus difficile. Parce que Damian est un monstre et que lui il ne peut se cacher derrière aucun démon. Initialement, ce qu'elle dit lui laisse penser que malgré le choix qu'elle a fait consciemment de le laisser se servir d'elle, elle n'était pas là. Si le démon avait réellement effacé une partie d'elle, ce n'était plus elle, puisque cette empathie et cette conscience est justement ce qui la rend elle-même. Il ne sait pas trop quoi penser de tout ça. Elle était là, elle se souvient, mais elle ne pouvait pas agir. Ou peut-être était-ce qu'elle ne le voulait pas ? Et était-elle réellement là ou n'était-elle plus elle-même ? Il reste silencieux, songeur. Sourcils légèrement froncés, il continue à la regarder avant de finalement aller chercher du café.

Dans ce genre de situation, rien de tel que le café. Un grand café bien noir, avec ou sans sucre selon les goûts. Elle s'installe, et lui prend place de l'autre côté de la table basse, là où il se tenait initialement. Elle répond ensuite à sa question sur le nombre de personnes qu'elle a tuées. Puis, elle s'explique encore. Pour la première fois depuis qu'il la connait, Zatanna remet en cause toutes ses leçons de morales et de bonnes conduites. Tout ce que lui a remis en cause dès son arrivée ici. Ce pourquoi il sera toujours différent de son père. Il la laisse parler. Il l'entend parler de John. Il lit au travers des lignes la douleur et la frustration. La colère sans doute. Le débat sur l'amour... il se souvient de l'avoir eu avec elle. Sur le toit d'une église à Gotham. Difficile à oublier. Elle lui pose une question. Il se redresse un peu et finalement boit quelques gorgées de café avant de reposer sa tasse. Il commence par dire : « Je me suis raccroché à ce qui me tombait sous la main pour ne pas tomber dans le gouffre ». Il hausse les épaules avant d'ajouter : « Après ça le reste n'a été qu'une routine de survie. J'ai croisé Jason, ça m'a rapproché des résistants. Et des combats ». Encore une fois et malgré son jeune âge, Damian s'est retrouvé à combattre pour sauver le monde. Le sien, et un autre monde. Aux côtés de Black Adam. Damian se rend compte qu'ils se ressemblent beaucoup tous les deux, et cela le trouble parfois.

Il la regarde et dit : « Tu sais.. Je suis peut-être celui qui peut le mieux comprendre tout ça ». Damian grandit. Il y a encore peu de temps, il aurait sans doute affirmé être celui qui pouvait le mieux comprendre. Mais des gens comme lui aux valeurs floues, il y en a d'autres. John le premier. Il la regarde simplement et dit : « Peut-être que ça l'est vraiment, justifié. La mort d'une personne pour sauver le monde... si cette personne sait et accepte, alors cela l'est sans doute ». Il reste songeur. Il ne sait pas. Mais les gens font leur choix. « Surtout s'il faut le faire pour sauver quelqu'un en particulier, pour mourir à sa place ? ». Est-ce que John se soucie du monde ? A peu près autant que lui sans doute. Ou peut-être plus ? Est-ce que Damian se soucie du monde ? Il reprend sa tasse. Il boit une gorgée et soupire un peu. Il la regarde. Tout ça c'est si compliqué. Il termine sa tasse. Il se relève et va la remplir à nouveau, et cette fois, il revient avec la cafetière. Jamais assez de café. Surtout s'il est confronté à tout ça.

Il fait craquer sa nuque et s'assoit à nouveau dans le canapé. Il y a un moment pendant lequel il ne sait pas quoi dire, ou quoi penser. Il soupire et dit : « Quand on fait ça, qu'on accepte de protéger le monde... On sait aussi ce qu'on risque de perdre. La vie de nos proches et notre propre vie ». Il la regarde. Il demande : « Est-ce que tu pensais que tu pourrais le ramener ? En le laissant t'utiliser, tu pensais apaiser tes souffrances, mais est-ce que tu pensais que tu pourrais ramener John ? ». Il la regarde toujours. Quelque part, cela expliquerait bien des choses. Cela serait sans doute plus acceptable aussi. Egoïste, dangereux, mais compréhensible. Cela serait moins honteux aussi. Cela signifierait qu'elle n'avait pas totalement baissé les bras.

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Elle ne savait pas ce qu’elle attendait de lui en venant ici. Elle savait ce qu’elle lui devait : des explications, des excuses. Mais de sa part, elle n’attendait rien, en vérité. Bien sûr, s’il la comprenait, s’il lui pardonnait, cela apaiserait son cœur quelques minutes, mais en vérité il n’y avait rien ni personne dans cet univers qui pourrait l’absoudre de ce qu’elle avait fait. Et pour l’heure, les quelques personnes qu’elle était allée trouver ou auprès de qui elle se réfugiait étaient des gens dotés eux-mêmes d’une morale élastique. John, Teth, Damian. Comme si elle choisissait la facilité. Parce que bien sûr, même pas en rêve elle ne pourrait faire face à Bruce, à Diana ou à Clark, en cette seconde. Elle se sentait passée de l’autre côté d’une frontière contre laquelle elle avait lutté toute sa vie. Et à présent, puisque rien ni personne ne semblait exiger de châtiment pour elle, ce serait elle-même qui se punirait chaque seconde de chaque minute de sa vie. Alors oui, elle voulait qu’il sache ce qui était arrivé. Mais elle n’exigerait pas de lui une marque de compréhension, un geste d’excuse. De toute façon, il n’y avait pas grand-chose à dire, après-coup. Il se l’écoutait, hiératique, si sérieux avec son café et ses sourcils froncés… Au moins, il n’était pas resté seul, après leur combat. Elle se demanda si Lyov l’avait trouvé, ou si Damian avait trouvé Lyov. Quel miracle cela avait été que Nebiros n’ait pas tué l’adolescent… Elle savait qu’avoir blessé Damian presque à mort pourrait pourtant ne pas suffire à ce qu’il la déteste, mais si elle avait tué son meilleur ami…

Quand enfin il parla, elle baissa les yeux pour observer ses mains. « Je sais. Tu comprenais déjà avant, dès le début. » Quant au reste… Bien sûr, que ça l’était. Quand bien même il s’agissait d’une pensée inconcevable, insupportable, puisque la vie était sacrée, au regard de milliards de personnes, une seule vie était un maigre prix à payer. Et que Damian énonce lui-même, sous la forme incertaine d’une éventualité, ce qui était l’évidence pour elle depuis toujours – du moins l’avait-elle cru –, l’aurait fait sourire, en d’autres circonstances. Si ce n’était que, depuis toute petite, puisqu’elle était née et avait grandi dans cet univers de lutte perpétuelle entre les gens, elle avait vu des proches faire ce fameux sacrifices. Elle-même l’aurait fait sans hésiter. Mais il faut croire que même elle pouvait perdre la tête, à force de perdre des êtres aimés. Parce que, aussi justifié, que ce soit, c’était toujours injuste. Toujours. Et cette injustice avait de quoi rendre fou. « Tu as raison. Et c’est en pensant ça que je suis souvent restée à ne rien faire en regardant des amis mourir. Mais on est humains. Arrive un moment où la rationalisation ne fait plus le poids face à l’instinct ou aux émotions. En tout cas, ça a fini par ne plus suffire, pour moi. » Elle avait juste voulu être un peu égoïste. Mais quand on jouait dans sa partie, « un peu », c’était déjà trop. Elle releva les yeux, et répondit sans hésitation à sa question. « Oui. Et c’est ce que j’ai fait, avec Rosalie. On l’a ramené, et le démon a rempli sa part du contrat. Mais ce serait trop simple si je m’arrêtais là. Parce qu’à quoi est-ce que ça aurait servi que je ramène John si ensuite, le démon avait détruit l’humanité ? Et j’avais parfaitement conscience de ça quand j’ai accepté le deal. » Même si en vérité, Nebiros n’aurait jamais massacré tous les humains. Mais, un, dix ou cent millions, c’était la même chose, si c’était de sa faute à elle. Cela pesait de la même façon sur son âme.

Et quand elle regardait Damian, quand elle se souvenait de lui qui avait fait face au démon… « Est-ce que tu sais, toi, jusqu’où tu serais prêt à aller ? Tuer, tu l’as fait plus d’une fois. Mais ce n’est plus aussi évident, maintenant. Mourir… Je sais que tu le ferais. » Elle frissonna. « J’ai pensé que ma mort serait la seule conséquence de mes actes. Et à la place, ça a été la mort des autres. Typique des démons… mais je ne prétendrai pas être surprise. Damian, je suis désolée de t’avoir blessé. Et dans le chaos que j’étais devenue, je veux que tu saches que plus d’une fois, tes paroles m’ont ramenée à la raison. Je ne peux pas défaire ce que j’ai fait, et je ne sais pas quoi faire pour justifier le fait que j’ai survécu à cette histoire. Mais si tu penses que je suis impardonnable alors je l’accepterai parce que de toute façon, je ne me pardonnerai jamais. J’aimerais juste que… Enfin, aussi bizarre que ça paraisse, j’aimerais que tout ce dont on a pu discuter par le passé ne perde pas de sa valeur à tes yeux. » Gonflée, la magicienne, dans le mode « faites ce que je dis, pas ce que je fais ».

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ft. Zatanna

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Il pose des questions. Immobile, avec son café, il écoute la magicienne et parle quand c'est à lui de dire quelque chose. Il cherche à comprendre, il cherche à savoir ce qui l'animait. Ce qui la motivait. Damian aime comprendre les choses. C'est plus facile pour juger. Pour prendre une décision. Et même s'il constate bien que c'est la Zatanna qu'il connaît qui lui fait face, il reste une légère tension qui marque son corps. Cette tension, c'est celle du couteau planté dans le dos, l'anticipation de l'étape suivante. Il a la même lorsque sa mère s'approche de lui. Il reprend la parole pour demander : « S'il s'agit d'un choix fait par les personnes qu'on aime, a-t-on le droit d'être égoïste en leur privant de leur liberté de choisir ? ». C'est une question rhétorique plus qu'autre chose. En matière d'égoïsme, il est sûrement le champion toute catégorie. Il a déjà une réponse toute faite à cette question. En trois lettres, sans argumentation. Oui. Mais parce que Damian a été élevé pour prendre ce qu'il voulait. Et qu'il est habitué à avoir ce qu'il veut. Bien qu'ici, les choses soient plus complexes et qu'au final, il obtient rarement ce qu'il veut ces dernières années. Il la regarde simplement. Évidemment, il a aussi du mal à se projeter dans ses chaussures, parce qu'il a du mal à reconnaître qu'il tient aux gens qui l'entourent. C'est sans doute plus facile comme ça. Enfin, c'est ce qu'il pense. « La mort fait partie de la vie ». Bien sûr, lui est bien mal placé pour parler de tout ça. Qu'est-ce qu'il en sait ? Il n'a jamais eu à connaître la douleur de perdre quelqu'un. Il n'a jamais eu à devoir vivre sans un être cher. Déjà parce qu'il a fallu 10 ans avant que quelqu'un semble être un minimum affectueux envers lui. Et ensuite parce que pour lui, le petit assassin, une vie ne vaut pas tant que cela, n'est-ce pas ?

Damian ne sait pas tellement quoi en dire. Il est traversé par plusieurs évidences. L'amour qu'elle semble avoir pour John, même s'il n'est pas forcément si évident de savoir si cela est un simple amour amical, bien que très fort, ou un amour qui pourrait l'unir à un compagnon. Le fait que Zatanna a eu une longue vie et que ce n'est pas la première fois qu'elle se pose ce genre de questions. Il se souvient de cette discussion sur le bord du toit, sur le fait que la magicienne aurait été bien incapable de s'accorder une pause se sentant responsable du monde vu les pouvoirs dont elle est investie. Pourtant, Damian ne peut que comprendre. Et d'ailleurs, il ne peut pas accepter que ses pouvoirs la rendent responsable du monde. Après tout, c'est à chacun de choisir ce qu'il souhaite faire de sa vie. Zatanna ne devrait pas avoir à se sentir responsable du sort du monde. C'est un choix. Un choix que l'on fait par soi-même et parce que l'on peut le faire. Après tout, Bruce est devenu le batman. Il a fait le choix de le devenir, parce qu'il le pouvait. Sans super pouvoir, simplement investi de la volonté de faire de Gotham un endroit plus sûr et plus juste.

Elle lui pose une question. Puis, elle continue à parler. Elle continue à s'excuser, elle essaie de mettre du sens sur quelque chose qui n'en a sûrement pas. Après tout, Zatanna a défié toutes les lois de la nature en ramenant John. Cela devait forcément avoir un prix, n'est-ce pas ? Et Damian, s'en fiche pas mal de ce prix. Cela ne lui ressemble pas. Mais en même temps, n'est-e pas lui qui lui a recommandé plus d'une fois d'être égoïste de temps en temps ? Alors, il serait sans doute bien malvenu de sa part de lui en tenir rigueur, même si, il n'apprécie pas tellement qu'on essaie de le tuer, dans le fond, il est habitué. Ce n'est pas la première fois, et sans doute pas la dernière. C'est aussi pour ça qu'il a du mal à accorder sa confiance et qu'il a du mal à s'attacher au gens. Parce que ce sont toujours ses proches qui finissent par le trahir. « Bien sûr que ça l'est toujours. Si demain, on devait te tuer pour sauver le monde entier, je serais sans doute celui qui hésiterait le moins ». Il la regarde sans sourciller. Ce n'est peut-être pas tout à fait vrai. Mais Damian pourrait appuyer sur la détente d'une arme ou lui ouvrir la gorge d'un coup de katana. Parce qu'il a été élevé comme ça. Et que même si Bruce tente de faire de lui quelqu'un de plus pacifique, certains instincts sont plus tenaces que d'autres. « Être humain, c'est avoir le droit de faire des erreurs, non ? Ce n'est pas parce que tu as des pouvoirs qui tu as moins le droit de te tromper que d'autres ». Cela est injuste en réalité. Pourquoi donc Zatanna devrait être plus parfaite que tout le monde, sans jamais pouvoir faire un faux pas ? Il reprend la parole : « Ce n'est pas parce que tu as des pouvoirs que ça te rend responsable des autres. Je sais que tu le penses, que tu te sentirais coupable de ne rien faire. Mais je continue à penser que c'est une erreur de voir les choses comme ça. Bruce n'a pas de pouvoir, pourtant, il est responsable de Gotham d'une certaine façon. Parce qu'il l'a choisi ». Ils ont déjà eu cette conversation, sur le toit d'une Église. Cette conversation si étrange. Il hausse les épaules et dit : « Il y a des choses qui nous dépassent dans ce monde. Si tu es là, c'est que c'est la place où tu dois être. Peut-être que tu pourrais profiter de cette chance pour vivre pour toi, pour une fois. Et pas pour les autres ». Après tout, c'est toujours ce qu'elle a fait, vivre pour les autres, et vu où ça l'a mené, ce n'est sans doute pas le meilleur choix. « Dans le fond, j'ai eu ce que je voulais, non ? Que tu sois plus égoïste. Cela te paraît horrifiant, mais en réalité, ça l'est sans doute moins que ça n'y paraît. Et si tu es heureuse de revoir John, alors au moins, cela n'a pas été vain ». Il marque une pause. Damian se détend un peu, finalement. Il ne va pas mentir. Bien que savoir qu'elle ait tué des innocents ait quelque chose d'un peu dérangeant. « Oh et... la prochaine fois, essaie de tuer quelqu'un d'autre, il y a déjà suffisamment de personnes qui m'ont sur leur liste noire... ». Il aurait pu aussi lui conseiller de prendre des vacances la prochaine fois qu'elle voudrait être égoïste. Mais franchement, il y a déjà eu bien pire. Il hausse les épaules et dit : « Et puis... depuis qu'on est rentrés, c'est le chaos... Les gens n'apprennent rien, ils continuent à être égoïstes et odieux, à se foutre des autres. Alors dans le fond, tu n'es pas pire que les autres ». Des scènes de pillage, des attaques, des gens qui profitent de la faiblesse de la planète pour s'enrichir, pour devenir plus fort, pour être plus cruels. Est-ce que ce monde mérite vraiment d'être sauvé ? Il en doute. Damian se pose vraiment la question quand il voit que les choses dégénèrent à ce point. L'humanité devrait se sentir plus forte, être plus soudée, mais non. Les gens continuent à être de véritables idiots finis qui ne pensent qu'à eux. Pourquoi devrait-on reprocher à Zatanna de l'avoir été ? À bien y réfléchir, Damian se rend compte qu'il ne lui en veut pas vraiment. Même s'il aura probablement un peu de mal à lui refaire confiance.

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Juste comme ça, Damian délégitimait tous les actes de Zee. La mort faisait partie de la vie. Et il avait raison. Ce n’était pas quelque chose qu’elle aurait dû entendre venant de lui, qui était si jeune, sauf qu’il n’était jeune qu’en apparence, cet enfant. C’était un constat qui n’acceptait aucun contre-argument, aucune remise en question. Une vérité pure, simple, évidente, et que pourtant la grande majorité des gens n’acceptaient pas, et cherchaient à contourner. Mais la mort faisait partie de la vie, c’était même la seule certitude que les êtres humains possédaient, et ça aurait dû être rassurant, non ? De savoir quelque chose avec certitude. Elle le savait. Elle pensait être en paix avec ça. Mais finalement, comme tous les autres, elle avait fini par essayer de s’opposer à cette vérité – à la mort et au fait qu’elle n’avait d’autre choix que de l’accepter. Elle avait besoin qu’on le lui rappelle, et c’était venu de Damian, et de personne d’autre. Comme une enfant, elle aurait pu se rouler par terre, refuser cette vérité. C’était un peu ce qu’elle avait fait en ramenant John des enfers et en invoquant Nebiros. Elle s’était opposée à la mort comme partie intégrante de la vie, et la nature en avait été bousculée, et elle, elle avait été punie. Et elle avait besoin de se l’entendre dire. Elle avait besoin de se faire réprimander, parce que ça lui semblait plus dans l’ordre des choses – dans son ordre des choses – que le pardon ou la compréhension inconditionnelle. Hypocritement, elle se raccrochait à la tolérance de John, qui ne lui en voulait pas, qui pas une seconde ne l’avait jugée ou n’avait semblé horrifié par ses actes. Mais elle avait tout autant besoin que quelqu’un lui tape sur les doigts, et aussi étrange que cela paraisse, c’était bel et bien Damian qui endossait ce rôle – un peu comme l’aurait fait son père à sa place. Malgré tout, elle continuait d’admirer le calme avec lequel il évoquait des choses qui paraissaient évidentes pour lui. Il la tuerait sans hésiter pour sauver le monde, disait-il, sans détourner le regard. Cela la fit frissonner. Pas tant l’idée qu’il la tue que celle qu’il imagine pouvoir le faire sans que ça lui fasse rien.

Mais n’était-ce pas là le propre de cette abnégation dont ils avaient déjà parlé ? Tous, autant qu’ils étaient, ils étaient censés être prêts à tout pour sauver l’humanité. Mais en même temps, pour Zee, toute vie était sacrée. Elle continuait d’y croire, même après tout ça. Et elle continuait donc à se heurter à cette frontière infranchissable, quand les deux situations se télescopaient – sauver l monde au prix d’une vie. Ce que John avait fait, mourir pour sauver le monde, et ce qu’elle n’avait pas accepté. Damian, lui, semblait franchir cet obstacle moral avec facilité. Elle ne trouvait pas que c’était très bon signe pour sa santé mentale, mais en même temps, elle-même devenait folle quand elle réfléchissait à la question, alors que lui semblait en paix avec ça. Tuer et mourir. Les deux étaient acceptables à ses yeux d’enfant qui n’avait même pas quinze ans. Comme si l’un comme l’autre ne lui coûtait rien. Elle se retrouva, comme avant, comme il y a un million d’années, à vouloir le serrer dans ses bras, mais ces choses-là étaient irréalistes, en ce moment. Elle ouvrit la bouche pour le contredire quand il reprit la parole : bien sur que ses pouvoirs l’obligeaient à rendre plus de comptes que les autres, à être irréprochable, et responsable des autres. Tout comme on attendait à quiconque était censé veiller sur les autres une attitude irréprochable – politiques, policiers… Si ce n’est que quand ceux-là échouaient à être irréprochables, les conséquences étaient minimes, tragiques, mais minimes. Quand elle se trompait, quand elle pensait à elle avant les autres, elle pouvait déclencher l’apocalypse. Mais il lui accorda ce point-là. Il savait déjà qu’elle n’était pas d’accord avec lui, et elle sourit pour la première fois. Et oh, comme cela était apaisant de s’entendre dire qu’on avait le droit d’être égoïste, le droit de ne penser qu’à soi… Ce serait bien si c’était vrai. Et elle excellait à faire semblant d’y croire. « J’ai l’impression que moi aussi, j’ai eu ce que je voulais. Mais, ironiquement, ça ne me satisfait toujours pas. » John cessant d’être le type égoïste qu’il avait toujours été et sacrifiant sa vie. Damian essayant de la ramener des limbes dans lesquelles Nebiros l’avait envoyée au lieu de tuer le démon, et elle avec, comme il l’aurait fait avant.

« Je crois que tu as changé, Damian. Je pense que ça va te compliquer la vie, mais… Ça me rassure, aussi. Quand je te regarde, je vois l’avenir. Je crois que tu seras bien meilleur que ton père. » Meilleur en tout, pas seulement dans son boulot. Et ça lui donnait de l’espoir, oui. Comme tout adulte dont le chemin était pavé d’erreurs mais qui voyait bien que la génération suivante saurait faire avec, aussi égoïste que ce soit. « Pour te dire la vérité, depuis mon retour de Terre-IV, je ne me mêle plus du monde, et je laisse l’humanité se débrouiller avec elle-même. Et si j’ai bien appris un truc, oui, c’est que je ne suis pas meilleure que les autres. J’avais tendance à le croire, en vérité. À me croire au-dessus du lot. » La réalité s’était chargée de la faire tomber de son piédestal. Elle sentit un peu de leur ancienne dynamique revenir alors qu’il parlait du monde tel qu’il était en ce moment – lui, si fataliste, et elle qui avait envie d’y croire malgré tout. « Les gens sont ce qu’ils sont. Et puis ils ont peur. Ils savent bien que tout ça n’est pas fini… » Pourtant, il n’y avait aucune excuse aux pillages, aux attitudes égocentriques, alors qu’en cette période, ils auraient tous dû s’aider. Elle haussa les épaules. « Cela veut seulement dire que les gens auront toujours besoin de nous. De toi. » Elle secoua la tête en croisant les bras comme pour se protéger de ce qu’il disait. « Et je ne compte pas tuer quiconque de sitôt. Ce n’était déjà pas dans mes projets avant. Je ne sais même pas comment vivre avec ces morts sur la conscience. Mais cette leçon, je l’accepte avec plaisir puisqu’elle vient de ta part. Et l’avenir va m’offrir des occasions pour essayer de racheter mes fautes. » Si seulement elle osait revenir à ce genre de choses, évidemment. Mais elle savait qu’elle ne pourrait pas s’en empêcher. Que Nebiros ne lui avait pas tout pris. « Tu te rends compte que tu as changé, n’est-ce pas ? Les gens sont toujours les égoïstes qu’on connaît, mais tu les aideras le moment venu. » Voilà à quel point le monde avait un peu basculé sur son axe. Mais elle l’avait déjà senti chez lui au Kahndaq. Et plus que jamais en cette seconde alors qu’ils se faisaient face.

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ft. Zatanna

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Quand il lui dit que ses pouvoirs ne la rendent pas responsable des gens, elle ouvre la bouche pour protester et lui, il roule les yeux. Il s'en doutait un peu en réalité. Mais elle ne dit rien. Tant mieux pour elle. Il aurait pu lui parler de tout un tas de super vilain dotés de pouvoirs qui ont choisi de faire le mal. De se servir de leurs dons pour s'enrichir ou simplement pour faire le mal. Il la regarde. Parce ces gens, ils ont choisi d'être égoïste. Ils ont repoussé leurs responsabilités. Et aussi discutable cela puisse paraître, dans un sens, Damian trouve qu'ils ont un peu raison. Ils se sont affranchis de tout ce qui pèse sur la conscience. Ils ont choisi de vivre comme ils l'entendaient. Ils sont des criminels, bafouent les lois bien sûr et à ce titre doivent être punis. Mais il y a une possibilité de vivre sa vie, sans enfreindre les lois, mais sans avoir besoin d'être une héroïne. Zatanna a le choix. Elle est libre de mener une vie paisible, en retrait du monde, ou en tout cas, suffisamment à distance pour penser à elle avant de penser aux autres. Il sait qu'elle ne l'accepte pas, mais il ne peut s'empêcher que cette façon de voir l'a menée à ça. À tuer alors qu'elle devait protéger. À se sentir coupable alors qu'elle devrait se sentir fière. Elle reprend la parole, et lui questionne assez rapidement, pour mieux comprendre : « Alors quoi ? Qu'est-ce qu'il te faudrait de plus ? ». Peut-être qu'elle ne le sait pas elle-même. N'est-ce pas le propre des insatisfaits ? De ne jamais trouver quelque chose les comblant mais sans savoir comment faire autrement ? Sans savoir quoi chercher ? Peut-être le trouvera-t-elle un jour. Ou peut-être pas.

Elle parle à nouveau. Et ce qu'elle lui dit ne lui plaît pas spécifiquement tout en lui faisant monter une poussée d'arrogance. Meilleur que Bruce. Bien sûr, sans aucune hésitation. Plus dur. Plus flou. Mais meilleur. Il ne répond pas cependant. Il ne veut pas vraiment savoir ce qu'elle veut dire quand elle parle de changement. Puis, elle parle à nouveau. Il l'écoute avec attention. Il est plutôt heureux de l'entendre. De l'entendre dire qu'elle s'est tenue à distance, qu'elle a ouvert les yeux. Personne n'est parfait. C'est ce qui rend leur monde si intéressant. Et si instable également. L'imperfection des Hommes et la volonté d'une poignée d'entre eux à le faire évoluer dans un sens ou dans l'autre. Une guerre perpétuelle qui embrasera leur monde un jour, si des aliens ne le détruisent pas avant. Il sourit un peu. Puis, il dit : « Ce n'est pas si mal d'être comme les autres ». L'amusement le gagne un instant. Le sujet se poursuit. Elle dévie un peu pour expliquer ce qui rend l'égoïsme si complexe. Elle parle des gens. De leurs peurs. De leurs besoins. Il secoue la tête et lui dit : « Et pourquoi ça ? Les gens pourraient être leurs propres héros. Tous les justiciers n'ont pas de pouvoir. Ils auraient bien moins besoin de nous s'ils tendaient à faire le bien ». Lui n'a besoin de personne. Il ne choisit pas toujours la meilleure voie. Il ne choisit pas toujours d'être bon ou d'être bienveillant. Mais il n'a besoin de personne pour survivre. « Regarde les s'en prendre à la police. Bien sûr les forces de l'Ordre ne sont pas parfaites, je ne suis pas le dernier à les détester, mais ils font ce qu'ils peuvent et ils essaient de protéger ceux qui en ont besoin ». Les systèmes sont imparfaits, les sentences sont trop souvent partiales et injustes, mais au moins, ils ont le mérite d'essayer, non ? D'essayer de faire les choses, d'essayer de protéger ceux qui en ont besoin, tout en étant toujours, encore et encore pointés du doigt et dénigrés. Qui aurait la patience de supporter ça ? Pas lui.

La suite le laisse un instant songeur. Vivre avec toutes ces morts sur la conscience. Difficile lorsque l'on est aussi gentil et bienveillant que Zatanna. Malheureusement, il n'a rien à lui dire. Pas de conseil à lui donner. Lui est comme ça. On lui a appris à tuer. Il n'a jamais regretté. Il n'a jamais vraiment pensé à ces vies qu'ils prenaient. Comme si elles n'avaient pas d'importance. Car en réalité, elles n'en ont pas. Elles n'en ont jamais eu. Il fait un peu craquer sa nuque et termine son café par habitude. Puis il la regarde et dit : « Peut-être qu'il ne faudrait pas. Peut-être qu'ils ne le mériteraient pas. Ils ont peur et s'abandonnent à leurs pulsions les plus morbides. Pourquoi donc continuerions nous donc à les aider ? ». Il soupire un peu. Il se pose souvent la question. Quel intérêt ? Quel mérite ? Pourquoi aider ceux qui continuent à s'auto-détruire ? Il secoue un peu la tête et dit : « Je ne sais pas. Tu sais, j'ai l'impression d'être le même. D'en être toujours au même stade... ». Toujours en recherche d'une approbation qu'il n'aura jamais, parce qu'il ne sera jamais comme elle. Ou comme lui. Damian est différent. Il a été élevé comme ça. Et s'il n'est plus ce gamin colérique prêt à tuer tout le monde, il n'empêche qu'il est toujours prêt à tuer des gens. Et qu'il le sera probablement toujours. Mais il a changé de cibles. Les gens auxquels il s'en prend sont différents. Le fait-il pour les bonnes raisons ? Difficile à dire. Mais au moins il le fait. Il secoue la tête et dit : « On verra bien. Peut-être que je finirais par trouver les réponses un jour... ». Après tout, il est encore jeune et il a encore des tas de choses à découvrir. Un monde dans lequel grandir et évoluer, empli d'enseignements et de gens de qui apprendre des choses.

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Elle pensait savoir ce qu’elle voulait, mais elle avait eu l’occasion de se rendre compte qu’elle n’en savait rien. Elle n’avait aucune réponse à donner à Damian, de sorte qu’elle ne répondit rien. De toute façon, c’était plus une question rhétorique qu’autre chose. Elle voulait la paix dans le monde, le bonheur – même si elle ne savait pas ce qu’était pas propre définition du bonheur –, que tous les enfants aient de quoi manger… Oui, voilà, mais après ? Une fois ces utopies mises de côté, qu’est-ce qu’il restait ? Ceux qui trouvaient le contentement dans cette vie, se battre contre le crime, avaient de la chance, ils avaient de quoi s’occuper toute leur vie. Mais elle, elle n’aimait pas ça. Elle le faisait sans passion, mais poussée par un devoir chevillé au corps, aux gènes, même. Vu comme ça, c’était plutôt misérable. Et lui, qu’est-ce qui le poussait à se battre ? Un certain sens du devoir. Mais un peu de plaisir aussi ? Et de toute façon, est-ce que ce n’était pas en train de changer ? Elle aurait pu le lui demander, mais alors comment résister à la tentation d’essayer de l’imiter, de s’approprier ses raisons à lui en espérant qu’elles lui conviennent, à elle ? Malgré tout, elle retrouvait vraiment l’enfant qu’elle connaissait dans ses réponses, et se permit même un sourire en l’entendant balancer que les gens pouvaient très bien se défendre tous seuls. Il n’avait pas tort, évidemment. Enfin, selon les circonstances. Les guerres seraient beaucoup moins spectaculaires si pas un homme n’acceptait d’obéir aux ordres. Alors, on assisterait simplement à un duel entre deux chefs d’État… Mais face à une menace comme Brainiac, que pouvait bien faire un humain ? Ce même humain ne pourrait déjà pas se défendre contre quelqu’un comme Damian…

« Les gens sont ce qu’ils sont. On n’est pas très différents d’eux. Ce serait la pire des erreurs de croire le contraire. De notre vivant, on ne verra pas de société merveilleuse où tout le monde n’est que paix et amour. Je ne suis même pas certaine que ce soit réellement un souhait à faire… » Elle haussa les épaules. Cela lui rappelait une discussion qu’elle avait eue avec Teth-Adam et en cette seconde, le dirigeant du Kahndaq et Damian se ressemblaient étrangement. « Je ne peux plus vraiment me permettre de juger les gens. Même les meilleurs d’entre eux peuvent faire des choses terribles, poussés par toutes sortes d’émotions qu’on ne pourrait même pas comprendre. Il y a des ordures, c’est vrai. Mais il n’y en a pas tant que ça à mon avis. Il y a surtout des gens capables du meilleur comme du pire. » Des gens normaux, quoi. Si cela ne suffisait pas à leurs yeux de prétendus héros, alors oui, mieux valait peut-être qu’ils cessent de se battre pour eux. Mais cela suffisait à Zatanna. Là-dessus, elle le savait, l’adolescent et elle pouvaient débattre des heures. Elle esquissa un sourire en le regardant. « Tu as bien essayé de me sauver, moi. » Et pourtant, à ce moment-là, elle lui avait montré la pire facette de sa personnalité – un démon. Quelle différence entre elle et n’importe qui d’autre qui commet une erreur ou dépassent ses propres limites ? Qui savaient si les ordures ne l’étaient pas un jour pour ensuite devenir meilleures ? Dans le doute, les super-héros devaient se garder de supposer, ou de juger. Sinon, c’était la porte ouverte à d’autres genres d’horreurs.

Cela dit, même si elle n’insista pas, elle savait qu’elle ne changerait pas d’avis : elle le trouvait changé. Elle espérait que c’était pour le meilleur, pour lui, évidemment. Elle qui n’avait jamais considéré Bruce comme le parangon de vertus que certains voyaient en lui, qui ne s’était jamais gênée pour le lui dire et lui faire des reproches, elle en était de plus en plus persuadée. Pour le monde, elle ne savait pas, mais pour Gotham, au moins, il y aurait encore quelques belles années, avec cet enfant-là pour veiller sur elle. Enfin, en admettant que Brainiac ne les massacre pas tous. Elle soupira, comme une adulte pris au piège par une question innocente. « Ne te prends pas trop la tête avec les réponses. Je les cherche encore, de mon côté. Mais j’ai dans l’idée qu’il y en a une évidente : tu vas te battre contre Brainiac. Je le sais grâce à mes dons de prescience. » Elle plaisantait – mais à moitié. « Si tu me permets encore de m’inquiéter pour toi… j’espère que tu seras prudent. Souviens-toi des bienfaits de l’égoïsme dont on débat si souvent, toi et moi. » Est-ce que cela suffirait ? Est-ce que cela irait, entre eux, à l’avenir, après ce qu’elle lui avait montré, ce qu’elle lui avait fait subir ? Elle voulait le croire. Le connaissant, le simple fait qu’il l’ait laissée pénétrer dans la tour était une petite victoire pour elle, et un signe encourageant. Elle reviendrait. Elle s’en fit la promesse, tout en sachant que ses promesses, ces derniers temps, ne valaient pas grand-chose. Mais s’il y avait certaines personnes face à qui elle n’avait pas osé reparaître, pour ne pas dire toutes, lui n’en avait pas fait partie. Peut-être que c’était justement par égoïsme qu’elle était allée le voir pour lui demander son pardon. Mais, eh bien… lui parmi tous les autres, il ne le lui reprocherait jamais.

Codage par Libella sur Graphiorum

Invité Invité

ft. Zatanna

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Elle ne répond pas à sa question. Elle ne semble pas savoir ce qu'elle veut. Parce que c'est une question si difficile. Alors Damian n'est pas vraiment surpris qu'elle reste silencieuse. Si elle lui retournait la question, il ne pourrait pas répondre. Il ne saurait pas vraiment quoi dire. Parce que dans le fond, il ne sait pas ce qu'il veut. Il ne sait pas où il va. Et au final, il aurait bien du mal à dire s'il est heureux ou pas. Il est là, dans une ville où on l'a envoyé pour l'écarter d'un autre endroit. Mais il n'a jamais vraiment eu le choix, et il ne connait pas vraiment le reste. Il n'a pas assez d'expérience sur la vie. Il n'a pas essayé assez de choses. Et il continue à vivre dans une ambivalence permanente où on lui demande d'être un adulte et un enfant en même temps. Enfin, il finira sans doute par s'y accommoder. Peut-être. Ou dans ce cas-là, il s'en ira. Il ira voir ailleurs, vers d'autres horizons. « Cela serait mentir de dire que je vaux mieux qu'eux. Peut-être même est-ce le contraire dans le fond... Alors justement. Est-ce que les hommes n'auraient pas mieux à faire que de dépendre de quelqu'un comme moi ? ». Damian est loin d'être un exemple. Il n'est justicier que parce qu'il doit trouver une place quelque part, parce qu'il essaie d'avoir l'approbation d'un père comme jadis il essayait d'avoir l'approbation d'une mère. Et s'il ne cherchait plus à avoir l'approbation de quelqu'un ? S'il décidait de vivre pour lui ? Que deviendrait-il ? Qu'est-ce qu'il ferait ? Difficile à dire. Et comme justicier, il est loin d'être idéal. Il frappe. Il tue. Il ne se soucie pas vraiment d'une justice juste et équitable. Il se contente d'empêcher ceux qui font du mal sans utiliser les morales qu'on tente de lui apprendre. Alors dans le fond, il ne vaut pas vraiment mieux qu'eux. Il est plus fort, plus intelligent, mieux équipés, certainement. Et il est très fier d'être mieux formé. Mais il sait qu'il est différent de Bruce. En fait, il sait que l'assassin qu'on a fait de lui n'est jamais très loin et ne s'en ira probablement jamais. Dans le fond, c'est surement mieux ainsi. S'il devait vivre avec une conscience morale, il ne pourrait probablement plus se regarder dans une glace.

Elle reprend la parole et il écoute. Il dit simplement : « On juge sur ce que l'on connait et ce que l'on est. Avec nos qualités et nos défauts. Et j'en connais un rayon en mauvaises actions... ». Cela rejoint ce qu'il vient juste de dire d'une certaine façon. Et lorsqu'elle remarque qu'il l'a sauvée elle, il dit : « Il faut bien des gens comme toi pour contrebalancer les gens comme moi... Même si je continue à penser que tu aurais le droit d'être un peu plus en retrait et de moins porter le poids du monde sur tes épaules. Je pense qu'il ne faut pas s'y sentir obligé ». C'est quand même très difficile, même si elle n'est pas seule à le faire. Et encore moins à se sentir responsable. Il y a des gens qui le font par vocation. Ils sont nés pour aider, ils sont nés pour protéger. Et il y en a qui se sentent obligés pour des raisons diverses : enfants de militaires qui ne veulent pas changer la tradition familiale, et autres choses du genre. Mais pour autant, les gens devraient être libre de faire leurs choix.

Elle lui parle de changement et il répond. Il continue à se poser des questions, à chercher des réponses. Il continue à se chercher dans le fond, à tenter de trouver sa route. Mais au final, il est toujours dans le noir, il se débat avec tout ce qui l'entoure, avec toutes les influences, toutes les personnes qui sont autour de lui. Il fait craquer sa nuque et elle répond. Elle lui dit qu'elle-même cherche encore de son côté. Puis, elle lui donne une évidence. Prescience ou non, elle lui suggère d'être prudent et de se rappeler des bienfaits de l'égoïsme. Il sourit un peu amusé et dit : « Je ne suis peut-être pas parfait, mais j'espère bien vivre encore quelques années, histoire de voir ce que je peux devenir. Alors oui, je prendrais part aux combats contre Brainiac. Pour les risques, on verra bien de quoi sera fait demain... ». Il sourit amusé. Il ne donnera pas sa vie pour n'importe quoi ou n'importe qui. Mais si cela pouvait changer réellement l'issue du combat pour sauver la planète, peut-être. Qui sait ? Lui-même serait prêt à tuer, et même s'il accorde beaucoup d'importance à sa personne, il n'est pas totalement idiot non plus. Il vaut mieux ne pas se monter de plan sur ce qui pourrait se passer parce que lui n'est pas capable de prescience. Il n'est qu'un humain, et il vit au jour le jour, c'est bien tout ce qu'il peut faire. Il reste silencieux un moment à la regarder. Tout ça, ça le dépasse un peu. Il en connait des choses, et pourtant, il sait qu'il ne sait rien de la vie et de son sens. Il hausse les épaules et finalement, il se redresse un peu en la regardant. La magicienne s’est invitée chez Barbara et est entrée sans se préoccuper des portes. Il la regarde et dit : « Tu devrais utiliser la porte la prochaine fois Zatanna. Et surtout, prend soin de toi… ». Il la regarde simplement en se redressant pour poser ses coudes sur ses jambes en regardant la magicienne. Il n’y a plus grand-chose à dire pour ce soir. Ils ont surement de quoi réfléchir tous les deux. Il est encore un peu en colère, mais en même temps, il peut comprendre, et surtout maintenant qu’ils ont parlé, il prend conscience qu’il trouve ça bien que pour une fois elle ait écouté ses envies. Il s’agit maintenant d’équilibrer les choses, en se rappelant qu’elle est quand même un peu plus qu’une simple humaine. Et il se lève cette fois, pour la raccompagner jusqu’à la porte, histoire qu’elle parte d’une façon plus traditionnelle.

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