Du bout des doigts, Ivy pianote lentement et à rythme régulier sur le comptoir du bar. Le cliquetis de ses ongles contre la glace est exaspérant, presque angoissant. Les sourcils froncés, elle observe avec attention les convives qui l'entourent, sur ses gardes. L'Iceberg Lounge. Club ultra select du Pingouin, dans lequel on n'entre pas sans y avoir été invité ou sans avoir avancé une épaisse liasse de billets. Ce soir, l'établissement est rempli de clients pour le moins... Particuliers. Cobblepott a rassemblé la foule criminelle de Gotham, c'est donc une foule de psychopathes en tous genres qui s'ébat joyeusement dans le club, cocktail en main, mascarade presque macabre pour Poison Ivy qui n'a pas touché au verre que lui a gracieusement offert le serveur derrière le comptoir. Les yeux légèrement plissés, elle observe les individus qui l'entourent avec une attention particulière et entière. Les gants en cuir noir de Black Mask brillent d'une étrange lueur écarlate – du sang. Assis seul à une table, Harvey Dent parle seul, en faisant tourner sa pièce entre ses doigts. L’Épouvantail ricane, visiblement amusé par la conversation qu'il entretient avec les sbires du Joker. Bane se tient dans l'ombre de la pièce, comme un prédateur prêt à bondir. Ra's al Ghul et Lady Shiva se déplacent à travers la salle lentement, on s'écarte sur leur passage. Ivy secoue la tête. Ennemis à gauche. Ennemis à droite. Tous les hommes et les femmes rassemblés à l'Icerberg Lounge ont essayé de s'entretuer au moins une fois. Elle même a tenté de les empoissonner plus de fois qu'elle ne peut le compter. Le Pingouin doit avoir perdu l'esprit, pour vouloir tous les rassembler dans un endroit froid et confiné. À moins qu'il n'ait une proposition si intéressante à leur faire à tous qu'ils ne pourront pas y résister et se résoudront à mettre leurs différends de côté. Que dit l'invitation, déjà ? Ma chère Poison Ivy. Tu es conviée à une réception mémorable ce mercredi à vingt-heures précises. Tenue élégante exigée. Alors les voilà tous, dans leurs costumes et robes hors de prix, à pavaner comme des paons en attendant que le couperet tombe. Ivy a revêtu une robe de soie verte, dont la teinte émeraude n'est pas sans rappeler sa carnation. Elle ne sait pas si elle est habillée pour fêter quelque chose, ou si c'est une tenue de funérailles.
Un éclat de rire attire son attention, elle attrape son verre et se lève, quittant ainsi le comptoir du bar et la proximité gênante avec le serveur qui ne cessait de la regarder avec un mélange de crainte et d'envie. Elle se faufile à travers la foule, adressant des sourires hypocrites aux uns et des sourires assassins aux autres, jouant le jeu des apparences comme chacun ici. Elle suit le rire cristallin, et quand elle distingue finalement la demoiselle concernée, elle sourit après avant de grimacer. Où il y a Harley Quinn, il y a généralement le clown psychopathe et meurtrier qu'elle persiste à appeler "Puddin' ", comme si ce pervers avait quoi que ce soit à voir avec un dessert sucré. Mais pas de Joker à l'horizon. Et Ivy ne sait pas si ce n'est finalement pas plus inquiétant. Elle s'approche de la jeune femme, l'attrape par le bras avant qu'elle ne monte sur une table comme elle semblait partie pour le faire. « Harley ! » Le ton est mi-enjoué, mi-réprobateur. Tantôt inquiet, tantôt charmeur. Elle est entourée des sbires du Joker, en bon possessif maladif qu'il est, mais Ivy les rend amorphes d'un simple lâcher de phéromones. Les hommes restent les bras ballants, le regard vide, momentanément privés du peu de cervelle qu'ils possèdent. « Bonsoir, Crazy. » Le premier sourire sincère de la soirée, c'est à Harley qu'Ivy l'adresse. « Jolie robe. Je suppose que toi aussi, tu as reçu l'invitation du Pingouin ? » Elle, ou le Joker. Peu importe, elle s'en moque. Elle refile son verre au serveur qui passe à côté d'elles avec un plateau, avant d'entraîner Harley à l'écart de la foule. Ivy siffle à la façon d'une vipère quand elle sent le regard de Mr. Freeze se poser sur elles – retourne te languir du fantôme de ta femme, songe-t-elle avec acidité. « Bon, écoute-moi bien, Harley. Si les choses devaient mal tourner, on ne prend pas part aux festivités et on fiche le camp, compris ? Ce n'est pas une fête. Au pire, c'est un piège, au mieux, un coup tordu. Je suis très sérieuse. » Elle prend le visage de la jeune femme entre les mains, les sourcils froncés pour bien lui faire comprendre qu'elle ne plaisante absolument pas. « Bien. Viens avec moi, il manque encore quelqu'un. » Elle prend Harley par la main, le plus naturellement du monde, l'entraîne à sa suite.
Ivy repère la silhouette féminine et féline très vite, et elle ne peut s'empêcher de rire tout bas, amusée par le subtil tour de passe-passe dont elle est le témoin. Quelques paroles, des gestes habiles, et un bracelet de diamants disparaît. Ivy conduit Harley auprès de Selina, laquelle semble être engagée dans une conversation passionnante – ironie – avec un couple, qui leur lance à toutes les deux un regard horrifié avant de décamper. L'Empoisonneuse lève les yeux au ciel, habituée mais toujours agacée par ce genre de réactions. Cependant, elle ne tarde pas à sourire et passe un bras autour de Selina, et l'autre autour d'Harley. « Dis-moi, chaton, combien vas-tu pouvoir tirer de ce bijou ? J'espère au moins que ce sont des vrais. » Les Sirènes de Gotham réunies, Ivy se sent plus à l'aise. Pas forcément rassurée, mais au moins elle n'est pas seule en terrain ennemi. « Je me demande vraiment ce que Cobblepott. Nous veut. La dernière fois que Black Mask et l’Épouvantail se sont retrouvés dans la même pièce, j'ai cru qu'ils allaient s'étriper. » Elle hausse les épaules. « Dommage que Fries les ait séparés avant, nous aurions été débarrassées. »
Elle se tait subitement, quand le Pingouin apparaît sur la scène de l'Icerberg Lounge et tapote le micro pour appeler au silence. Ivy hausse un sourcil, sceptique face à temps de manières. Mais elle se tait, et lâche Harley et Selina pour croiser les bras sous sa poitrine, expression lasse sur le visage. « Mes chers... Collègues. » Bah voyons. « Vous vous demandez certainement ce qui vous amène à l'Icerberg Lounge ce soir, et ce que ne fêtons. C'est bien simple ! Pour la première fois depuis près de deux décennies... Nous voilà enfin libérés du fléau qu'était Batman ! » Silence. Ivy arque davantage son sourcil, ce qui lui donne un air presque cartoonesque. L'annonce fait l'effet d'un soufflé raté. Cobblepott s'éclaircit la gorge, avant d'éclaircir ses propos de façon pour le moins... Inattendue ? Radicale ? « Batman est mort ! » Ivy veut rire. Elle veut rire, vraiment, elle en a très envie. Mais elle n'y arrive pas. Sa gorge se serre et l'air s'en échappe quand le Pingouin brandit le masque à moitié déchiré du Chevalier Noir, comme un trophée de chasse. C'est un faux, songe-t-elle. Et puis elle l'aperçoit. La silhouette tapie dans l'ombre, quelques pas derrière Cobblepott. Immanquable. Comme tout le monde, elle l'a vu sur les écrans télévisés quelques jours plus tôt, avec le reste du Syndicat. Owlman. Alors, non. Elle ne rit pas.
« Ma chère Harley Quinn. Tu es conviée à une réception mémorable ce mercredi à vingt-heures précises. Tenue élégante exigée. » Il y avait également une petite note personnelle en bas du mot que je tenais entre mes doigts. Il disait qu’il avait volontairement évité d’inviter le Joker à cette soirée et qu’il me serait appréciable si j’évitais de lui en dire un mot. Je soupirai quelques instants avant d’en faire une petite boule de papier et de le jeter par terre, levant les yeux en direction de l’enseigne glaciale de l’Iceberg Lounge. Je réajustais ma robe rouge et noire, une tenue que je n’appréciais pas vraiment car elle me gênait au niveau de mon buste, m’empêchant de faire les gestes que je désirais. Mais heureusement, j’avais tout prévu si cela venait à se corser. Car oui, qu’espérait donc Cobblepot ? Réunir tous les dégénérés de la ville sous le même toit ne pouvait qu’être une folie ! Ooh, j’adorais ça ! C’est avec un grand sourire, entortillant une de mes couettes entre mes doigts que j’avançai jusqu’à l’entrée de l’Iceberg Lounge où les grands costauds me laissèrent entrer, non sans un regard sur moi et sur mes hommes qui me suivirent. Mes talons s’entrechoquèrent avec le sol froid et livide de cette boîte de nuit où, d’origine, je n’étais clairement pas conviée. Disons qu’il n’aimait pas trop mon Puddin’ qui gênaient beaucoup ses affaires.
D’ailleurs, un des hommes de Cobblepot s’approcha de moi, l’air froid. « Monsieur Cobblepot espère que vous avez honorée sa note personnelle qui se trouvait sur votre invitation, mademoiselle Quinn. » Dit-il en me regardant. Bien évidemment, je ne puis me retenir d’éclater de rire, un rire qui se fit entendre dans une bonne partie de la pièce et qui dirigea les regards vers moi, se disant que la folle dingue était déjà là, avec son lot d’ennuis. Mais ici, tout le monde apportait son lot d’ennuis. « Vous direz au petit Pingouin qu’il n’a pas d’ordres à me donner ! Vous voulez peut être que je grimpe sur la table pour leur dire que je suis seule ? Noon ! Attendez, je vais faire une blague en disant que le Joker a prévu une surprise ce soir ! Haha ! Si, l’ambiance est un peu trop triste à mon goût ! Ça manque de sourire ! » Dis-je en glissant mon index sur les lèvres de cet homme, comme pour y dessiner un sourire agrandi. Je n’eus pas le temps de poser ma deuxième jambe sur la chaise qui se trouvait à côté de la table avant qu’une main attrape mon bras. J’aurais pu la repousser mais en sentant ce toucher délicat et en entendant la voix s’adresser à moi, j’eus un sourire. « Ivy ! » Dis-je excitée alors que le ton de Pamela était moins enjoué que le miens, probablement pour m’éviter de faire une bêtise. Et puis, elle me mit en garde sur le fait que si ça dégénérait, on allait ficher le camp sans prendre part aux festivités. Elle semblait, ensuite, vouloir chercher quelqu’un. « Maaaais, j’allais faire une blague, là. » Mais je ne m’interposais pas, suivant Ivy en tenant sa main douce, alors que je vis la silhouette féminine qu’elle devait certainement chercher : Catwoman. Je lui fis un petit signe de la main, sourire aux lèvres alors qu’Ivy se demandait ce que Cobblepot nous voulait.
« Il doit vraiment avoir un truc de dingue à nous dire pour réunir autant de dingues sous le même toit ! On se croirait presque à Arkham ! Haha ! » Dis-je enjouée en détournant le regard, voyant quelques têtes connues qui avaient séjournés dans l’asile pendant un petit temps. « Mais bon, Cobblepot est givré, de toute façon. Et puis, je crois qu’il ne m’aime pas beaucoup ! » Je n’eus pas le temps d’en balancer davantage sur le Pingouin car il apparut sur la scène, commençant son discourt qui se termina par les mots durs « Batman est mort ! » J’eus envie de rire comme une folle mais Ivy ne disait rien, comme froide. Ce n’était pas une blague ? J’avais certainement loupé une étape. Le masque du Chevalier Noir était pourtant là, déchiré… Et la seule chose que je pus dire fut : « Mais avec qui on va jouer, maintenant ? » Il me fallait juste dix secondes pour digérer l'info!
« Cat, tu as du courrier. » Sourcil arqué, œil inquisiteur. Sa tête avait légèrement pivoté, avant que sa main se tende dans le vide. « Du courrier? » « Oui. C'est arrivé tout à l'heure, un oiseau étrange est venu la poser à la fenêtre. » Cobblepot. L'air curieux qui flottait sur son visage avait rapidement laissé place à du sérieux, presque de l'inquiétude. Qu'est ce que ce vieil oiseau déplumé veut encore. A l'aide d'une de ses griffes affûtées, Selina avait ouvert l'enveloppe pour en sortir l'invitation. « Ma chère Catwoman. Tu es conviée à une réception mémorable ce mercredi à vingt-heures précises. Tenue élégante exigée. » Petit rire, avant que l'invitation ne flotte quelques secondes dans les airs, avant de trouver sa place sur le sol. « Vingt-heures. Qui donne encore des invitations à vingt-heures. C'est quoi, une boom? » Alors qu'elle secouait la tête, son indic' riait de bon cœur. « Tu vas vraiment y aller ? Tu crois que c'est une bonne idée? » Le large sourire de la voleuse avait effacé toute trace d'inquiétude sur son visage. « Je ne manquerai ça pour rien au monde. »
Iceberg Lounge, dix-neuf heures et quarante-trois minutes. Perchée sur un toit, Catwoman observait. Son assurance quant à l'invitation n'excusait pas un manque de prudence ; elle se devait de rester sur ses gardes, prête à sortir des griffes à tout moment. En bas, un véritable défilé. Derrière ses lunettes, ses sourcils se fronçaient. Black Mask. Cet immonde individu qu'elle avait juré tuer, avant qu'il ne resurgisse d'entre les morts. Ra's Al Ghul, Bane, Mr Freeze. Une belle brochette. Si tu voyais ça, Bruce.... Enfin, une figure plus douce, rassurante ; Ivy avançait, gracieuse, telle une nymphe. Sa robe semblait avoir été dessinée pour elle. L'arrivée de son amie avait signé la fin de son espionnage ; Catwoman allait rejoindre l'affreuse fête des vilains. Avec une agilité déconcertante, Selina avait dévalé l'immeuble, se frayant un chemin parmi quelques rues secrètes que peu osaient emprunter. La porte d'entrée, très peu pour elle. Elle n'a pas pris la peine d'honorer la règle de la « tenue élégante » ; elle n'avait que faire des codes. Malgré beaucoup de précautions, son intrusion à l'intérieur de la boite privée n'était malheureusement pas passé inaperçue. Retenue par le bras par un maton énorme, la voleuse s'était violemment retournée, prête à attaquer. « Bats les pattes, vieux gorille. » « Les intrus ne sont pas les bienvenus. » « Alors dégage. Mets-toi dehors tout seul, j'ai une invitation. » D'un geste rapide, elle avait sorti l'invitation de son célèbre décolleté de cuir, avant de la plaquer sur le torse de l'ours devant elle. « Vous n'avez pas le code vestimentaire nécessaire. » Elle l'avait jaugé du regard une seconde, avant de se rapprocher de lui avec un grand sourire. « Je n'ai pas d'ordre à recevoir d'un homme avec un costume de supermarché. Et encore moins de celui d'un oiseau si périmé qu'il sème ses plumes partout. » Après un long jeu de regard, le garde avait fini par lâcher le bras fin de la voleuse. « J'espère ne plus te recroiser. » Ton désinvolte, démarche affolante ; le chat allait rejoindre la fête, une jolie montre dans la poche.
Tous se mêlaient entre eux, formant parfois des couples improbables. Selina se contentait de rouler les hanches, avançant avec lenteur dans la foule. « Catwoman ! » Arrêt ; elle avait tourné la tête, avant d'esquisser un parfait sourire. Un mafieux, dont elle avait oublié le nom. « Comment allez-vous ? Je vous présente ma femme? » Grande blonde, des yeux superbement maquillés, des talons de quinze centimètres de haut et une poitrine siliconée. « Non, je vous remercie. » Après avoir toisé la jeune femme de la pire façon possible, la voleuse avait reposé son regard sur le quarantenaire. « Je...Ahah ! Comme vous êtes drôle ! Vous n'avez pas perdu votre humour. » Sourire forcé de la concernée, avant de croiser les bras sur sa poitrine, glissant par la même occasion un bijou à la ceinture. La blonde, elle, n'avait toujours pas perdu son sourire idiot. « Vous ne portez pas de robe, ce soir ? Comment se portent vos affaires ? » D'un regard détaché, le chat regardait ses griffes. « J'adore le cuir, je ne m'en lasse pas. Il serait difficile de faire mieux, c'est une seconde peau. Et parlant de ça, je pense bientôt me lancer dans le business de la peau. De la taxidermie. Oui, comme pour les chats. Oui, c'est très drôle, n'est-ce pas ? Non, pas pour les animaux. Pour les humains, voyez-vous. Un peu comme votre femme. » Silence, avant un réel regard d’effroi, avant de s'excuser et de prendre congés. Bande d'attardés. Si elle pensait que c'était son affreuse farce qui les avait fuir, elle s'était trompée ; très vite, le bras de son amie était venu s'enrouler autour d'elle, provocant un sourire éclatant de la voleuse. « Ce bracelet ? Je ne sais pas, mais une petite fortune, je pense. » Rire. « Tu ne peux pas savoir à quel point je suis contente de te voir. » Pendant une seconde, elle avait posé sa tête sur son épaule. « Tu es radieuse, cette robe te va à ravir. » Selina profitait de sa souplesse pour se pencher un peu en arrière, souriant à la partenaire du Joker. « Heureuse de te voir, Harley. Tu as toujours l'air...aussi folle. » Tendre sourire ; elle avait toujours eu beaucoup d'affection pour Harley, et ce malgré sa haine pour le Joker. Elle avait toujours vu en elle une enfant en manque d'affection, amoureuse d'un fou à lier dont elle ne pourrait jamais se détacher.
Les paroles d'Ivy avaient été libératrices : Selina était heureuse de savoir qu'elle n'était pas seule à douter de l'invitation de Cobblepot. « Je la sens pas, cette soirée. C'est trop gros. Beaucoup trop gros. » Et le Pingouin était venu apporter de quoi attiser leur curiosité. Seul sur scène, micro en main, il avait une annonce à faire. « Mon dieu, qu'il est ridicule... » Paroles à moitié camouflées, avant le coup de grâce : « Nous voilà enfin libérés du fléau qu'était Batman ! » Il était impossible de lire l'expression sur son visage, et Selina se bénissait de ne pas avoir retiré ses épaisses lunettes. Ses sourcils froncés, la colère montait doucement en elle. Elle aurait voulu partir, prétextant une supercherie. Elle aurait voulu partir, dévaler les toits à la recherche de son Chevalier. « Batman est mort! » Électrochoc. Son cœur s'arrête de battre une seconde, sa gorge se noue. « Foutaises. » Plusieurs fois, Batman avait été annoncé comme mort. De nombreuses fois ; mais jamais comme celle-ci. Ses yeux avaient manqué de s'embuer de larmes, mais ils étaient trop occupés à fixer ce masque qu'elle connaissait si bien. Les poings serrés, Selina ne ressentaient pas même la douleur que les griffes acérées de ses gants lui procuraient dans la paume de sa main. Plus rien de compter autour. Il n'y avait plus rien, autour. Refais face. Ce n'est qu'un masque, Selina. Ce n'est pas Bruce. Ce n'est pas lui. En une seconde, elle avait relevé le visage, prenant une inspiration avant de laisser un rire s'échapper de ses lèvres rouges. « Encore ? Je parie que c'est un masque que tu as trouvé grâce à tes taupes. Tu nous fatigues, Pingouin. Ça fait des années que tu as le même discours. » Bien sûr, elle voulait s'en convaincre. Elle refusait d'y croire ; mais pour la première fois, le doute s'était immiscé en elle, comme un poison dont personne ne connaît le remède.
Batman, mort ? Ivy secoue la tête, elle refuse d'y croire. C'est bien la première fois que le sort du Chevalier Noir lui importe tant. Mais avec la menace du Syndicat c'est un fait, Gotham a besoin de lui. Mieux vaut un justicier au code moral douteux qu'une bande de psychopathes sans foi ni loi. Un masque ce n'est rien, ce n'est pas une preuve. N'est-ce pas ? Le Pingouin aurait pu demander à n'importe quel couturier un peu talentueux de le confectionner, et ce ne serait pas la première fois que l'un d'entre eux se vanterait de la mort du Batman. La réaction d'Harley est naturellement la plus naïve, Ivy la dévisage une seconde en faisant la grimace avant de secouer la tête. Rien de tout cela n'est drôle, rien de tout cela ne ressemble à un jeu. Ou alors, les règles de la partie sont floues et changent constamment. Instinctivement, elle attrape le poignet d'Harley, pour l'empêcher de bouger, au cas où l'envie lui prendrait de se mettre à sautiller de joie au milieu de l'assemblée. Puis elle lance un regard à Selina, consciente de ce qu'elle doit traverser. Si l'Empoisonneuse ne porte pas Batman dans son cœur, elle sait que son amie entretient avec lui un tout autre genre de relation. « Selina... » Son prénom lui échappe dans un murmure, comme une mise en garde. Pitié, ne fais ou ne dis rien de stupide. Mais Catwoman n'obéit à rien ni à personne, elle remet déjà en question la parole de Cobblepot. Sans doute est-ce de la folie au milieu de ses sbires, mais Ivy prend sur elle de la soutenir avant que d'autres ne se retournent contre elle, et espère ainsi créer un mouvement de foule. « Catwoman a raison ! Ne nous prends pas pour des imbéciles, Pingouin, tu aurais pu ramasser ce masque n'importe où ou le faire faire toi-même. Combien de fois avons-nous cru être débarrassés de la chauve-souris ? Et à chaque fois il est revenu d'entre les morts pour nous botter le cul royalement ! » Plusieurs personnes à côté d'elle acquiescent. Elle n'exagère même pas, à chaque fois qu'ils ont cru Batman disparu ou mort, il est toujours revenu pour leur foutre une raclée colossale et leur rappeler qui contrôle réellement Gotham. Discrètement, elle pose une main dans le dos de Selina pour tenter de la rassurer. C'est bien la première fois de sa vie qu'Ivy se surprend à prier pour que Batman se porte bien – voire même pour qu'il débarque dans la minute pour tous leur donner une bonne leçon. Mais impossible d'ignorer la présence d'Owlman juste derrière le Pingouin. S'il est là, c'est pour une bonne raison. Ou une mauvaise, selon le point de vue.
« C'est bien beau tout ça », finit par lâcher Black Mask après un petit ricanement malsain, « Mais si Batman a bel et bien claqué, ça va remettre un tas de choses en question. L'organisation de Gotham, par exemple... J'aime mon business, alors vous m'excuserez, mais je n'ai pas spécialement envie de me retrouver au beau milieu de la Cour des Hiboux et de la Ligue des Assassins, sans compter sur cet emmerdeur de Red Hood qui pointe encore le bout de son nez pour faire sauter ma marchandise et descendre mes dealers. » Ivy fronce les sourcils. Elle a beau haïr Black Mask, et se retenir difficilement de l'étrangler avec une racine, ses remarques sont pertinentes. Sans le Chevalier Noir pour maintenir l'ordre, Gotham risque de vite être plongée dans le chaos, de devenir un véritable champ de bataille. Et Ivy sait qu'elle n'y trouvera pas son compte. Autrefois, le sort de cette maudite ville lui aurait été égal, mais à présent qu'elle doit veiller sur les orphelins du parc, les choses sont bien différentes. « Pardonnez-moi si je donne l'impression de défendre Batman, mais sans lui, qui empêchera tous les malades de la ville de chercher à imposer leurs règles ? Presque tout le monde dans cette pièce cherchera à prendre sa part du gâteau, quitte à devoir tuer les autres pour ça. » Elle lève les yeux au ciel. « Oh ça va, pas la peine de me regardez comme ça, vous avez tous l'air d'imbéciles hypocrites ! » Un sifflement agacé échappe à Ivy. C'est même un miracle qu'ils ne se soient pas tous jetés les uns sur les autres à la minute où le Pingouin leur a présenté le supposé masque brisé du justicier. Tous ou presque son opportunistes. Si le Joker avait accompagné Harley, il aurait certainement commencé à tirer sur tout le monde pour "réchauffer l'atmosphère glaciale".
« Il va un avoir une nouvelle hiérarchie en ville. » Ce n'est pas Cobblepot qui répond. Bien au contraire, il s'écarte précipitamment du micro, non sans avoir fait une petite révérence, pour laisser la place à son invité surprise, pour laisser la place à Owlman. Ivy se raidit légèrement, et raffermit sa prise sur le poignet d'Harley. Ne bouge pas, pitié, ne bouge surtout pas. « Gotham appartient désormais au Syndicat du Crime. » Voyez-vous ça. Ivy observe la foule autour d'elle. Les expressions sont sévères, les corps tendus. La présence de l'un des membres du Syndicat est inquiétante, mais pas étonnante. Gotham est toujours le théâtre de drames, n'est-ce pas ? Évidemment, que le Syndicat veut mettre la main dessus, elle est plus facile à prendre que sa voisine Metropolis. Du moins, en théorie. « Nous allons instaurer un nouvel ordre. Ceux d'entre vous qui accepteront de répondre au Syndicat du Crime seront récompensés, les plus loyaux d'entre vous tiendront les rênes de Gotham pour nous. » Cadeau empoisonné. Ivy secoue la tête, de façon presque imperceptible. Ce n'est pas une proposition. Owlman n'est pas venu pour leur proposer un marché. Il est venu pour les mettre en garde, et elle en a d'ailleurs la confirmation presque immédiatement. « Et il arrive quoi à ceux qui refusent de vous cirer les bottes ? » La réponse ne se fait pas attendre. Owlman bouge à peine, mais bientôt l'homme qui a parlé s'effondre, un simulacre de batarang – owlrang, peut-être ? allez savoir – planté dans la jugulaire. Voilà qui a le mérite d'être clair. Le sang a éclaboussé le visage d'Ivy, qui se pince la lèvre. « Il faut qu'on fiche le camp... », murmure-t-elle nerveusement à ses compagnes. Vite, avant que le massacre ne commence.
Si Poussin avait été là, il aurait probablement descendu Cobblepot pour calomnier de telles sottises. Pour lui, il devait être le seul meurtrier de Batman, il ne devait pas y en avoir d’autres et pourtant, au final, il était plutôt heureux qu’il soit encore présent, car sans Batou, il n’y aurait plus autant d’animation à Gotham. Il n’aurait pas apprécié de voir cette annonce-là, comme beaucoup d'ailleurs, car l’ambiance était devenue bien plus pesante qu’avant. D’ailleurs, je n’appréciais pas beaucoup Cobblepot et son air supérieur et ça, Pam le savait très bien… C’est pourquoi je pouvais sentir sa main sur mon poignet, une prise plutôt ferme qui était un signal d’alarme pour éviter que je fasse une bêtise… Car oui, j’en étais bien capable. Je m’en fichais un peu que tout le gratin criminel de Gotham soit présent ici. S’il fallait que je m’exprime, je n’hésiterais pas une seule seconde.
Selina fut la première à prendre la parole ouvertement, ne croyant pas un seul instant à cette soi-disant mort de Batman, appuyée ensuite par Ivy qui apportait d’autres arguments. Et moi, j’étais comme une enfant, ne pouvant pas dire mon mot, car Ivy semblait m’en dissuader complètement. Ah, ma jolie plante, je ne pouvais rien lui refuser ! Et puis, ce fut au tour de Black Mask d’ajouter son grain de sel, car il craignait pour ses affaires. La mort de Batman, si elle était fondée, allait grandement perturber Gotham. Mais pour qui il se prenait ce nigaud ? Oubliait-il mon poussin dans l’équation ? On n’en avait que faire de sa marchandise ! Mais ça serait l’anarchie, quoi qu’il arrive et ça, Ivy l’avait bien compris avant que Cobblepot reprenne la parole pour laisser une autre tête nous subjuguer de sa voix. Il faisait partie du Syndicat du Crime, une organisation qui faisait beaucoup parler d’elle ces derniers temps et je ne pus m’empêcher de lâcher un rire lorsqu’il répondit que la ville était, désormais, sous le contrôle du Syndicat. Je n’avais pas pu m’empêcher de rire, et ce, malgré la poigne raffermie d’Ivy.
Un homme tenta de faire valoir ses opinions et il se retrouva avec un objet similaire à un batarang planté dans le cou, éclaboussant les alentours de sang et surtout, Ivy. Ceci me fit quelque peu réagir, relâchant vivement la main d’Ivy pour faire un pas, malgré le fait qu’elle disait qu’il fallait partir, car l’ambiance commençait doucement à s’échauffer. « Hey, le hibou ! On n’a pas d’ordre à recevoir ! Gotham appartient à mon Poussin ! » Dis-je en sortant mon arme pour tirer, mais il réussit à esquiver les deux balles qui fusèrent vers lui, effleurant presque Cobblepot qui vociféra « Espèce de cinglée ! » Un simple geste d’Owlman et je compris tout de suite, saisissant un de mes hommes pour le mettre devant moi afin de me protéger. Une seconde après, il se retrouva au sol, l’objet ressemblant à un batarang planté dans son torse.
Il était clair que ceci allait davantage aggraver la situation et la proposition d’Ivy de ficher le camp n’était peut-être pas une mauvaise idée. Mais que voulez-vous, j’étais connue pour avoir des sautes d’humeur et je n’appréciais pas le ton que cet enfoiré venait d’utiliser et qu’il avait taché la jolie robe de ma petite rouquine favorite.
« Batman est mort! » Rumeur, triste rumeur. « Nous voilà enfin libérés du fléau qu'était Batman ! » Et puis les murmures, les regards qui ne savaient décrypter les émotions encore trop confuses ; l'annonce avait été rude, surprenante. Pourtant, ce n'était pas la première fois. Pas la première mort, pas la première disparation. Cette phrase, elle la connaissait bien, Gotham la murmurait souvent. Dans les rues, après une absence parfois trop remarquée du chevalier. La GCPD, les gosses errants, la pègre tranquille. Jamais elle n'y avait cru, souvent elle en avait ri. Son Batman ne pouvait mourir des mains de gigolos bons pour Arkham, et encore moins des habitants miteux de Gotham. Il était bien trop fort, bien trop rusé. Si elle était un chat, il était un renard. « Batman est mort! » Non, il était bien trop malin pour se faire attraper. Et si les vilains avaient déjà redoublé d'imagination pour capturer la chauve-souris, il s'en était toujours sorti. Elle en était sûre ; le Pingouin n'avait pas pu le coincer. Dans son esprit, il ne figurait plus sur la liste des personnes qu'elle craignait le plus, dans cette foutue ville : le Joker, Black Mask, et Falcone, si on excluait Batman lui-même. Et c'était Cobblepot qui parlait, ce soir. Cet oiseau minable qu'elle s'amusait à faire tourner en bourrique n'était pas capable de tuer la Némésis de tous ces pouilleux. Elle devait s'en convaincre, pour que personne ici ne croit la partie gagnée, pour que personne ne croit le vieil oiseau déplumé. Ivy était venue la soutenir ; qu'importe la situation, malgré leur désaccord, elle avait toujours été là pour elle. Ses paroles lui avaient sûrement sauvé la vie, camouflant ce côté sauvage qui l'empêchait de choisir entre ses semblables du crime et leurs ennemis à capes qui volent. « C'est toujours la même avec toi, oiseau de malheur. » Le contact de la main de l'empoisonneuse dans son dos avait agi comme une pommade ; les muscles s'étaient décrispés, son esprit apaisé. Il avait fallu un geste pour en avoir la certitude : elle n'était pas seule.
La voix de Black Mask était venue résonner dans l'enceinte du lieu privé. Une voix qu'elle maudissait, semblable à ses ongles de cristal qui crissaient sur un tableau d'école. Et même si ses mots étaient loin d'être stupides, elle ne pouvait se garder de se taire. « C'est toi qu'il devrait faire sauter, l'autre avec son masque rouge. » Mots à peine voilés, avant qu'elle n'étire un peu ses bras dans les airs. Nouvelle provocation envers son ennemi juré ; il pouvait bien tenter quelque chose, elle savait que ses deux partenaires se feraient un plaisir de mettre la main à la patte. Il n'avait pas eu le temps de répliquer ; la belle plante avait déjà renchéri, rendant l'annonce du Pingouin grotesque. Encore une fois, elle avait raison. Elle savait parfaitement que plus de la moitié de la salle voulait déjà lui sauter à la gorge, et Selina se serait fait un plaisir de se défendre. Qu'ils s'entretuent tous, Gotham revivrait. Tous chuchotaient, fusillant la rousse du regard. C'est finalement une autre voix qui vint faire taire les autres ; silence d'église, et des visages qui se liquéfiaient en apercevant la silhouette sur l'estrade. Owlman. Rictus de la chatte, jetant un regard inquiet à ses deux amies. « Gotham appartient désormais au Syndicat du Crime. » Ces oiseaux de malheur. Selina aurait préféré les avoir entre les griffes plutôt que devant les yeux. « Exprime-toi mieux, Owlman ! Vous en faisons un peu tous partis, non ? Le crime, c'est notre fond de commerce à tous. » Cette situation la rendait malade ; elle n'avait pas pris la peine de tourner la tête pour poser son regard sur l'imbécile qui avait ouvert la bouche. « Nous allons instaurer un nouvel ordre. Ceux d'entre vous qui accepteront de répondre au Syndicat du Crime seront récompensés, les plus loyaux d'entre vous tiendront les rênes de Gotham pour nous. » Froncement de sourcil. Un regard pour son amie rousse, avant que ses yeux s'écarquillent devant son amie blonde. Elle aurait voulu lui crier qu'elle se taise, mais c'était déjà trop tard. Et tout c'était passé très vite. « Harley! » Le molosse qui l'avait protégé s'était écroulé comme une feuille morte sur le sol, arme plantée dans le torse. Sans même y prendre garde, sa main s'était posée sur son fouet, prête à agir. « Recule-toi, Blondie. » Dans la foule, des plaintes. Protestations inaudibles, début de panique.
Trois coups de feu. C'était tout ce qu'il avait fallu pour faire taire l'assistance. « Silence, silenceeeee ! Vous allez donc vous taire ?! » Ce maudit oiseau. Elle rêvait de planter ses griffes dans sa gorge pour arrêter de le faire chanter. Il s'était encore arrangé pour profiter du gros gain, et se ranger du bon côté de la ligne. « Vous allez trop vite en besogne. Je ne crois pas à vos conneries. Qu'on ramène le corps de Batman, pas un simple masque. » Son objectif était clair : faire diversion, et tenter de rassembler ses semblables contre Owlman et Cobblepot. « Tu pourrais aussi simplement le rejoindre, Catwoman. Bien des fois, tu nous as trahis pour servir le bien. » Soupire de lassitude. De la provocation, encore. Et les regards la transperçaient, la dévisageaient. Ce n'était pas un temps pour répondre, ni pour s'amuser. La situation devenait dangereuse pour tous, et il n'était pas question de mettre en jeu la vie de ses amies ce soir. « Pour servir mes propres intérêts, Cobblepot. Maintenant, si vous voulez bien m'excuser... J'ai d'autres chats à fouetter. » Elle n'avait pas eu le temps de tourner les talons qu'une lame s'était plantée juste devant elle. Les yeux du chat s'étaient posés sur ses partenaires : il fallait agir au plus vite.
Un sifflement furieux échappe à l'Empoisonneuse. La situation ne va pas tarder à déraper complètement, nul besoin d'être devin pour le savoir. D'autant plus qu'elle sent Harley et Selina de plus en plus fébriles ; l'une sur le point de faire quelque chose de probablement très irréfléchi, et l'autre à la limite de la crise de nerfs. Non pas qu'elle puisse leur en vouloir, mais Owlman ne leur laissera certainement aucune chance. Il l'a prouvé tout de suite, le droit à l'erreur n'est pas permis. À présent, Gotham appartient au Syndicat et ceux qui désapprouvent seront éliminés sans autre forme de procès. De quoi s'assurer immédiatement la loyauté de la plupart, les grands barons du crime étant trop attachés à leur business pour vouloir risquer de perdre leurs têtes. Ivy a très vite compris qu'elles ont toutes les trois intérêts à la fermer, faute de quoi elles aussi finiront à baigner dans leur sang. Une perspective qu'elle ne trouve pas le moins du monde alléchante, quand bien même elle n'éprouve pas la moindre envie de se plier aux demandes d'Owlman et ses pairs. En attendant de trouver une solution convenable, jouer la comédie lui semble être la solution la plus raisonnable. Mais c'était sans compter sur Harley et son Syndrome de Stockholm, prête à défendre les intérêts du Joker – grand absent de la soirée. « HARLEY, NON ! » Elle ne l'écoute pas plus que Selina et les balles fusent vers Owlman, qui n'a évidemment aucun mal à les éviter. Idiote ! Si elle n'a jamais réussi à atteindre Batman, par quel miracle espérait-elle le toucher lui ? Probablement aucun, la folie ne connaît hélas aucune logique. Malgré tout prête à protéger Harley, Ivy n'en eut pas besoin, cette dernière usant de l'un de ses gardes du corps comme... eh bien, garde du corps. L'Empoisonneuse grimace quand le corps du colosse tombe à ses pieds, un autre simulacre de batarang planté dans le torse. Au cas où certains en auraient encore douté, Owlman ne plaisante pas.
« Je vous en prie, calmez-vous ! Nul besoin de nous mettre le cadavre de Batman ou de qui que ce soit d'autre sous le nez. » Elle prend une profonde inspiration, avant de cracher le plus gros mensonge de son existence – et Dieu sait que la liste est pourtant longue. « Il est mort, je vous crois. » Comme ça, le plus simplement du monde. Ah ah. « Mais si nous voulons réorganiser Gotham, faisons-le comme des êtres civilisés, cessons une minute de nous entretuer à tout va. » Non pas qu'elle trouve l'idée particulièrement dérangeante, mais en l'occurrence, ses amies et elles se trouvent être au beau milieu des tirs. Mais de toute évidence, les esprits étaient déjà bien trop échauffés, et rien ne changerait cela. L'Empoisonneuse soupire avec lassitude en levant les yeux au ciel quand Selina cherche à quitter l'établissement du Pingouin et qu'un gorille armé d'un couteau se plante devant elle avec un faux air de gros dur. « Très bien, vous ne pourrez pas dire que je n'ai pas au moins essayé d'être polie... » Il y a une chose contre laquelle toutes les personnes présentes dans la pièce ne peuvent rien. Ses phéromones. Nul ne peut les percevoir quand elle les relâche dans l'air, dans le but de tous les rendre catatoniques et incapables de leur faire le moindre mal. Un état qui ne dureras pas éternellement, alors elles doivent faire vite. Léger détail à régler cependant, si Harley est immunisée contre tous les poisons et autres toxines d'Ivy, ce n'est pas le cas de Selina. Sans en faire grand cas, elle se rapproche de la féline et pose ses lèvres contre les siennes pour lui administrer un remède instantané. « Navrée, chaton. » Elle lui sourit, avant d'attraper Harley par la main. « Maintenant, déguerpissons avant que ces clowns retrouvent leurs esprits. Sans vouloir t'offenser, trésor. » Il ne fait aucun doute qu'après cela, Ivy risque d'avoir de sacrés ennuis. Mais que ne ferait-on pas par amour...
Pressée par le temps, Ivy entraîne ses deux amies à l'extérieur de l'Iceberg Lounge, puis dans une ruelle envahie par les plantes grimpantes et autres fleurs exotiques carnivores. Maligne, Ivy a planté ses précieuses alliées un peu partout en ville, et notamment autour des repères des grands criminels de Gotham, au cas où elle aurait besoin d'aide urgemment. Sur le passage du trio, la végétation s'écarte puis se referme, et un escalier fait de racines s'ouvre sous leurs pieds, donnant un accès direct aux souterrains de Gotham. « Je suis pleine de ressources... Après vous, Mesdames... » Elle les laisse passer les premières, refermant l'entrée derrière elle d'un geste. « J'ignore pour combien de temps, mais nous sommes en sécurité. Mais sans nul doute qu'après ce soir, nous sommes toutes les trois sur la hit-list d'Owlman. » Ivy soupire longuement en se pinçant l'arrête du nez. En ce qui la concerne, c'est particulièrement problématique, étant donné qu'elle s'occupe et prend soin des orphelins de Gotham. « Il va falloir que je déplace les enfants. Mon ancien repère, peut-être... L'air y est trop toxique pour que quiconque n'étant pas immunisé contre mes poisons puisse y survivre, même en portant un masque. » Elle secoue la tête. « Selina. Toi qui le connais si bien, est-ce que tu penses que Batman puisse être encore en vie ? Que tout cela n'est qu'une mascarade savamment orchestrée pour que le Syndicat puisse prendre le contrôle de Gotham ? » Mais quand bien même... S'il est en vie, où diable a bien pu disparaître le Chevalier Noir ?
Harley avait empiré les choses. Selina le savait : elles n'étaient pas réellement les bienvenues dans cette assemblée de vilains. Chacune avait un côté qui tirait vers le bon, et après fait preuve d'intelligence quant aux derniers événements qui avaient ravagé la ville et ses alentours. Et le regard des invités ne présageaient rien de bon, tout comme le molosse qui s'était dressé devant le chat. « Ivy... » Ivy était une oratrice hors pair ; elle en avait déjà fait la démonstration à de nombreuses reprises, et ses pouvoirs étaient la seule solution pour sortir de cet enfer. « Très bien, vous ne pourrez pas dire que je n'ai pas au moins essayé d'être polie... » La voleuse n'avait pas réellement eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait que déjà, les lèvres de sa délicieuse amie s'étaient posées sur les siennes. « Navrée, chaton ». Le chat n'avait pas tardé de lui rendre son sourire, avant de suivre ses partenaires dans une course effrénée à travers la jungle végétale que l'empoisonneuse avait créé. Ses pouvoirs étaient incroyables, et la voleuse était ravie qu'elle puisse en profiter pour se faire la malle. « Rassure-moi Pam, tes plantes ne vont pas nous croquer, hein? » D'un œil inquiet, Selina observe les plantes refermer le passage derrière elles. « Tu sais que je ne suis pas une romantique, j'ai toujours eu un peu de mal avec les fleurs... » Elle ne pouvait s'empêcher de regarder autour d'elle, gardant une distance suffisante entre le mur de plantes et elle. « Oh, et...Merci. Sans toi, on aurait pas fait long feu. On était dans une position plutôt...Délicate. » Harley ne semblait pas secouée par la situation. Elle s'émerveillait devant les fleurs, laissant échapper quelques rires de sa gorge. « ...Elle est vraiment timbrée. Elle se met en danger et je suis même pas sûre qu'elle s'en rende vraiment compte. » Soupire désespéré, avant qu'elle ne s'étire un instant. Elle savait que l'empoisonneuse et l'arlequin étaient beaucoup plus proches qu'elle ne pouvait l'être de l'une ou de l'autre. Et si elle ne voyait pas forcément cette relation d'un œil serein, Selina ne pouvait s'empêcher d'être rassurée : l'une et l'autre se soutenaient, et briser les chaînes qu'on leur avait imposé dans le passé.
« J'ignore pour combien de temps, mais nous sommes en sécurité. Mais sans nul doute qu'après ce soir, nous sommes toutes les trois sur la hit-list d'Owlman. » Lourd soupire de la brune, forcée à admettre que le hibou deviendrait un prédateur redoutable. « Notre tête va être mise à prix, c'est sûr. » Visiblement inquiète, le chat s'était tournée vers l'ancienne terroriste écologique, les bras croisés sur la poitrine. « Tu as un endroit où aller ? Je veux dire, tu... Tu n'as pas d'identité secrète, toi. Tu ne peux pas te cacher derrière quelqu'un. » Elle refusait qu'elle coure des risques pour rien. Cible de choix, Ivy était puissante et faible à la fois. Beaucoup enviaient ses pouvoirs, et souhaitaient prendre possession d'elle pour des fins bien plus sombres. « Il va falloir que je déplace les enfants. Mon ancien repère, peut-être... L'air y est trop toxique pour que quiconque n'étant pas immunisé contre mes poisons puisse y survivre, même en portant un masque. » Elle avait froncé les sourcils une seconde, avant de poser sa main sur l'épaule teintée de vert de son amie. « Ivy, les enfants seront les bienvenus dans l'orphelinat que je finance le temps que les choses se calment. Je ferai réserver un quartier pour eux, peut-être que tu pourrais y résider, toi aussi. Ils seront en sécurité, et toi aussi. » Elle voulait aider. Après tout, Ivy lui avait sauvé la mise, ce soir. C'était son amie, et l'idée qu'on puisse lui faire du mal ne lui plaisait pas du tout.
« Selina. Toi qui le connais si bien, est-ce que tu penses que Batman puisse être encore en vie ? » Selina avait baissé la tête une seconde, retirant ses lunettes nocturnes de son visage. Sa romance avec le chevalier masqué n'était plus un secret pour ses amis, tout comme la plupart des vilains qui se trouvaient à la réception du pingouin. Les rumeurs s'étaient amplifiées, avant qu'elles ne meurent doucement avec l'arrivée de Talia dans la vie du justicier ; un mal pour un bien, laissant Catwoman hors des griffes des psychopathes. « Je ne sais rien. Du tout. » D'un geste, elle avait libéré sa chevelure, secouant un peu la tête comme pour reprendre ses esprits. « Je... Je ne l'ai pas vu depuis un moment. Les toits sont... Les toits sont vides de sa présence. Il n'est nul part. » Elle n'avait pas le courage de regarder ses amies dans les yeux. « Il est peut être parti en vacances ! Peut-être qu'il en avait besoin, tu sais la pression... » Harley avait un air désolé sur le visage, avant qu'un immense sourire ne vienne le chasser. « Peut-être qu'il a trouvé une fille ! Tu n'es plus assez méchante pour lui petit chat, tu es devenue bien trop sage. » Les bras croisés sur sa poitrine, l'arlequin riait de bon cœur ; une blague qui n'était pas au goût du chat. « Ferme-la, Harley. La situation n'est pas drôle du tout. Ivy a raison, si Batman n'est plus de ce monde... » Un soupire s'était échappé de ses lèvres, avant qu'elle ne s'assoit sur le sol, dos contre le mur bétonné. « Si Batman n'est plus, le chaos va prendre le contrôle de la ville. Ça sera une boucherie sans nom. » Il fallait qu'il soit encore en vie. Il fallait qu'il porte encore le costume. « Il faut qu'on le retrouve. On doit le retrouver. Un bain de sang se prépare, et je refuse de me mettre leur sale sang sur mes gants. » Et à contre cœur, Selina préférait imaginer qu'il avait retrouvé Talia, plutôt que la rumeur de sa mort ne soit vraiment avérée.
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