stuck in between (jason)

Steve soupire en attendant l’ascenseur. Il est impatient, il tapote son pied droit contre le sol. Et surtout, il regrette de ne pas avoir pris son iPod avec lui pour passer le temps. Seulement de quoi aurait-il eu l’air avec ses écouteurs dans les oreilles et son document confidentiel à remettre à l’ambassadeur ? Il n’avait plus quinze ans. Il avait déjà dû troquer son uniforme pour une tenue plus formelle – une chemise et un pantalon oscillant entre le jean et le pantalon droit classique – ce n’était pas pour mettre en péril son professionnalisme avec des écouteurs blancs et une danse des mains en rythme avec la musique. Encore plus lorsque la situation est de plus en plus grave. Si la menace de Darkseid semble désormais lointaine – quelle ironie, franchement – celle du Syndicat du Crime pèse beaucoup dans la balance. Comme si les Etats Unis, et a fortiori le monde, a besoin de combattre des copies maléfiques de certains héros puissants de la Justice League. Une copie de Superman, une copie de Diana – rectification, une copie de Lois avec les pouvoirs de Diana. Comme si Lois avait besoin de pouvoirs pour être menaçante – une copie de Batman, une copie de Flash et autre. Une copie des héros les plus importants de la Justice League en somme. Sa tête tourne à cette pensée. Le combat est imminent et s’il le redoute, ce n’est pas ça qui lui pose problème. Non, l’agent d’A.R.G.U.S. n’aime pas ce sentiment d’impuissance, d’être dépassé par tous ces événements, sans réelle défense. Il n’est qu’un simple humain après tout, sans pouvoir pour le protéger ou pour être réellement efficace. Et parfois, surtout ces derniers temps à vrai dire, Steve regrette n’être qu’un simple humain. Il se surprend à rêver de pouvoirs pouvant défendre et combattre de manière plus efficace. Un mélange des pouvoirs de Clark, Barry et Diana. Mais il n’a plus quinze ans, et encore une fois, il s’ordonne d’arrêter de tergiverser sur des situations qui n’arriveront jamais.

Et ce fichu ascenseur qui ne vient toujours pas.

Cling ! Comme pour le faire mentir, ou se jouer de lui, l’ascenseur qu’il attendait depuis maintenant plusieurs minutes décide enfin d’ouvrir ses portes pour le laisser monter. Il retient un grognement et pénètre dans la cage en métal vide. Steve n’a aucune patience aujourd’hui, sans réellement savoir pourquoi. Ou alors peut-être que si, il sait, seulement il n’a pas envie de se laisser y penser. Pas le moment, pas le bon endroit. Le tintement de l’ascenseur l’aide d’ailleurs à ne pas y songer et il arrive beaucoup plus rapidement qu’il ne l’a anticipé devant le bureau de l’ambassadeur. Tout comme leur échange et la remise du document. Tout se passait plus rapidement que l’attente de ce fichu ascenseur dans la tête de Steve. Du moins c’est son impression alors qu’une poignée d’heures plus tard, il se retrouve seul, dans le couloir, à attendre ce même ascenseur. Cet objet métallique qui visiblement apprécie se jouer de lui. Et il perd patience à nouveau, à regarder les chiffres changer pour arriver à son étage. Cling ! Cette fois, l’ascenseur arrive plus vite, vide. Steve entre et ne retient pas son grognement d’agacement cette fois en appuyant sur le bouton pour le rez-de-chaussée. Il a une réunion dans une petite heure, un besoin de café et d’une pause entre les deux. Au moins pour se calmer. Cling ! L’ascenseur s’arrête à un étage. Si Steve s’en agace intérieurement – vraiment, personne ne voulait lui accorder une pause ? – il expire un peu plus bruyamment que d’habitude (mais pas assez pour qu’on l’entende, il n’est pas fou) à la vue de la tête familière qui pénètre dans l’ascenseur. « Todd », dit-il avec calme, le visage fermé, hochant la tête en direction de Jason, étrangement bien loin de l’agacement qu’il ressent depuis tout à l’heure. Evidemment il se retrouve au même moment que Jason dans ce bâtiment, dans cet ascenseur. Jason. Le fiancé, voire le mari paraît-il. Steve avait entendu les propos de la part d’Etta qui ne savait pas tenir sa langue lorsqu'on insistait, mais ne s’en était pas formalisé. Ou du moins avait fait semblant. Il avait après tout tacitement promis à Diana qu’il ferait un effort. Mais faire un effort ne remplaçait pas le pincement au cœur. Sa seule félicitée dans cette histoire est que ce pincement est moins présent. Comme s’il disparaissait petit à petit, pour de bon cette fois. Est-ce que Steve commençait réellement à tourner la page de son histoire avec Diana ? Oui, clairement, il n’avait pas besoin qu’on le psychanalyse pour répondre seul à cette question. La discussion qu’il avait eue avec elle lui avait fait du bien. Leur avait fait du bien, même s’il avait été le plus apaisé dans cette histoire. Complètement vidé lorsqu’elle avait quitté son appartement, certes, mais apaisé. La page se tourne, ils repartent sur de bonnes bases. Il faut simplement lui laisser plus de temps pour accepter Jason. Probablement parce que Jason n’est pas l’homme le plus avenant du monde, avec sa mine renfrognée et sa jalousie qui n’avait jamais eu lieu d’être. Ce n’est pas parce que Steve avait eu du mal à tourner la page qu’il allait tout faire pour reconquérir Diana. Pourquoi chercher à reconquérir celle qui vous a brisé le cœur car elle ne vous aimait plus comme lui ? Steve n’était pas masochiste et ne se faisait surtout pas d’illusions, même s’il aurait voulu être à la place de Jason quelque part pendant un temps. Alors qu’aujourd’hui, pas f-

Sa réflexion se perd dans le bruit que fait l’ascenseur. Ils venaient à peine de descendre de quelques étages que l’ascenseur se paralysa net dans un boucan d’enfer, les secouant bien trop pour que ce soit un comportement normal. Evidemment. Ce fichu ascenseur, en plus de lui avoir fait perdre patience, a décidé de lui pourrir le reste de sa journée. Instinctivement, et parce qu’il est le plus proche des boutons, Steve appuie longtemps sur le bouton d’alarme. Une fois. Deux fois. Trois fois. Pas de réponse. La quatrième fois, parce que Steve est têtu et n’abandonne pas, une petite voix fluette lui répond que sa demande est enregistrée mais que l’intervention ne sera pas pour tout de suite. « D’ici une heure, au minimum », dit-elle avant de couper la communication. Steve soupire, retient son poing de s’abattre contre la paroi par frustration et s’assoit. « On va en avoir pour un moment », dit-il plus pour lui-même que pour faire la conversation. Bien que cette phrase semble plus pour communiquer avec quelqu’un, même si ce quelqu’un est Jason, qu’autre chose. Il soupire, pour la énième fois depuis son arrivée à l'ambassade. Il faut qu’il appelle pour décaler cette réunion aussi. Evidemment.

Steve & Jason

Excuse me, which level of hell is this ?

Assis dans un fauteuil douillet, les doigts croisés sur tes genoux, tu attends le retour de Diana. Quand Etta t'a certifié qu'elle serait là d'ici une quinzaine de minutes, le temps que sa réunion se finisse, tu aurais dû te douter qu'il s'agissait en vérité d'au moins une bonne heure. Etta Candy n'a pas la notion du temps. Ou du moins, pas celle du commun des mortels. Plongée dans ses papiers, ou une main sur le clavier, le téléphone dans l'autre, elle s'apparente pour toi à une redoutable machine. Une machine administrative. Tu l'as vu à l'oeuvre, il y a quelques jours, quand elle est parvenue à vous organiser un mariage de a à z en seulement un après-midi, voyage de noces compris. Femme épatante, et précieuse amie de Diana. Mais là tout de suite, bien que tu apprécies sa compagnie et ses marmonnements – adressés à elle-même –, ta patience te fait défaut.  C'est donc résigné que tu te lèves, malgré son apparente déception de te voir quitter la pièce Tu passais dans le coin, le but était d'embrasser ta femme, et de repartir aussitôt. Rien de pressant, juste une marque d'affection et d'attention. Rien, qui finalement, ne pourrait attendre ce soir. Derrière la porte du grand bureau à la table ovale, tu entends plusieurs voix s'élever – une majorité d'hommes, est-ce réellement une surprise ? Pourtant, celle que tu distinctes le mieux, c'est évidemment celle de Diana, qui s'exprime en langues qui te sont inconnues. Ce n'est pourtant pas faute d'en maitriser quelques unes. Tu te racles la gorge, navré que cette réunion se passe aussi mal. Bonne raison de partir, ou de rester ? T'aimerais être son lot de consolation après le calvaire, mais c'est bien connu, quand il y a des désaccords, les négociations se rallongent considérablement. Promis, tu seras doublement attentif à ses besoin quand elle rentrera ce soir.

Après avoir chaleureusement dit au revoir à Etta, tu regagnes le long couloir qui mène jusqu'à l'ascenseur. Par chance, il s'arrête à ton étage, peu de temps après avoir appuyé sur le bouton d'appel. Mais rapidement, et à ton plus grand désarroi, tu constates que ta chance n'était qu'un leurre. Une fourbe blague. Face à face avec Steve Trevor, la fuite n'est pas une option. C'est donc tête haut que tu pénètres à l'intérieur de l'espace confiné, lui rendant son hochement de tête en guise de salutation, miroir d’impassibilité. « Trevor. » Finalement, valait t-il sans doute mieux attendre des heures sur cette chaise que de devoir côtoyer l'agent A.R.G.U.S. Bien heureusement, vous n'aurez pas à vous supporter bien longtemps. Une fois tous deux arrivés au rez-de-chaussée, vos chemins se sépareront à nouveau. Et en espérant qu'ils ne se recroisent pas de si tôt. Il n'est pas ton ennemi, il n'est même pas ton rival, pourtant, l'animosité que tu éprouves à son égard est bien réelle. Tu n'es pas jaloux de sa relation actuelle avec elle, ou de ce contact qu'ils ont gardé, mais de ce qu'ils ont partagé par le passé. Il l'a connu pendant des années, il lui a appris à adopter et dompter ce monde qui n'était pas le sien. Toutes ces facettes d'elle que tu ne reverras plus, plus comme lui les a vues. Tout change en une décennie. Sa naïveté n'est plus que passagère, et son espoir en l'humanité s’effrite chaque jour un peu plus. La Diana d'il y a dix ans est à mille lieux de la Diana d'aujourd'hui. Et même si tous les privilèges te sont désormais accordés, à toi seul, tu ne peux t'empêcher de jalouser cette partie d'elle-même disparue à jamais. Sa simple présence suffit à fermer tes traits, ta mine se renfrogne, et intérieurement, tu insultes ce maudit ascenseur, qui refuse de d'entamer plus rapidement sa descente. Pire, il s'arrête, dans un bruit strident de freins qui patinent, suivie d'une sévère secousse. « Bordel de merde. » Tes jurons contrastent avec ton apparence presque calme. Une apparence seulement, puisqu'en vérité, c'est un volcan en ébullition qui vient de jaillir en toi. Ne pas voir Diana, comme tu l'aurais voulu, a déjà grandement nourri ta frustration, mais là, c'est clairement le summum de la contrariété. Foutu karma. Tandis que Steve s'évertue à appeler de l'aide, ton regard parcoure l'habitacle à la recherche d'un échappatoire. Tu repères la trappe au-dessous de vous, mais même pour toi, ce serait un petit peu excessif. Bien que l'envie soit vive. Très vive. Tu notes cette possibilité dans un coin de ton esprit, si jamais la situation dégénère au point de vouloir fuir le plus rapidement possible. Deux coqs dans un même espace, ça n'a jamais fait bon ménage. « Une heure, parfait. » Tu ne masques pas l'ironie dans le son de ta voix. Et tu caches à peine le peu de réjouissance que te procure l'idée de rester une heure seul à seul avec lui. Tu n'es pas du genre à faire des efforts quand tu n'en as pas l'envie. Et Steve Trevor est bien le dernier homme sur terre pour qui tu es enclin à en faire. « Si on n'est pas coincé entre deux étages, on peut essayer de sortir. » Non, vraiment, une heure c'est beaucoup, beaucoup trop long. Alors pendant qu'il reste assis à patienter, tu entreprends d'ouvrir les portes de l'ascenseur. Qui sait, peut-être que cela fonctionnera. Et c'est toujours préférable à taper la discute avec le blondinet à la mèche tendance. « Tu viens m'aider ou tu préfères te tourner les pouces le cul par terre? » L'amabilité n'est clairement pas l'une de tes qualités. La franchise, en revanche, en est une.

« Une heure, parfait. » L’ironie dans la voix du Todd lui fait rouler des yeux. Que croit-il ? Que cela fait plaisir à Steve de se retrouver coincé dans cet ascenseur avec lui ? Que ça l’amuse ? Adossé contre l’une des parois de l’ascenseur, assis sur le carrelage sûrement cher, Steve soupire, comme il aime le faire depuis le début de cette journée. Comme un tic de personnalité, à force. Toute la situation lui tape sur le système et bébé Todd l’impatient encore plus. Le voir s’agiter de la sorte agace un Steve déjà sur les nerfs – mais après tout, qu’est-ce qui n’agace pas Steve chez Jason ? Outre le fait qu’il est plus jeune que lui d’une dizaine d’années – Steve avait d’ailleurs ri jaune après le gala en apprenant son âge, il n’aurait jamais pensé que Diana tombe dans ce cliché du pauvre type cinquantenaire qui préfère les petites jeunes de trente ans de moins que son âge. Il a depuis effacé cette pensée de son système nerveux, bien trop injuste envers l’amazone qui est un cas bien trop à part pour la comparer à ces êtres abjects. Cependant cela ne signifie pas qu’il accepte vraiment bien le fait que Jason ait dix ans de moins que lui – ce sont le caractère impatient, sanguin voire enfantin et l’amabilité d’une porte de prison du bébé Todd qui agacent le plus le numéro deux d’A.R.G.U.S. Et surtout, Steve ne comprend pas son animosité à lui. Ce devrait être lui, à sa place, à s’agacer pour un rien en sa présence, à l’envoyer paître dans une réplique bien placé. C’est après tout lui l’ex, le déchu, celui qui s’est fait larguer à l’aube de la demande en mariage qu’il avait minutieusement préparée. Lui, qui avait eu le cœur brisé et qui devrait lui en vouloir d’avoir pris sa place. Car Steve n’a jamais rien fait pour récupérer Diana, ni avant qu’elle se mette avec Jason ni après. Il n’a même jamais voulu essayer, sachant pertinemment qu’il ne pouvait pas forcer les sentiments de Diana à revenir – s’ils étaient déjà arrivés un jour… Oh Steve, arrête, ne commence pas. Il y a après tout une différence entre ne pas réussir à tourner la page et être complètement masochiste. Chose que visiblement semble être ce cher Jason Todd. « Si on n'est pas coincés entre deux étages, on peut essayer de sortir. » Coincés entre deux étages ? Essayer de sortir ? A-t-il perdu la boule ou est-il aussi désespéré que ça de sortir de cet ascenseur pour ne pas y rester une heure avec Steve ? Probablement un mélange des deux. Si Steve pense cependant à une blague de la part du Todd quelques instants, il est forcé d’admettre que la plaisanterie du brun rebelle n’en est pas une lorsqu’il le voit s’approcher des portes de la cage métallique. A s’exciter un peu trop pour essayer de les ouvrir. Interdit et consterné, essayant tout de même de ne pas lever les yeux au ciel, ce n’est que lorsque le jeune adulte l’interpelle avec toute la délicatesse dont il sait faire preuve – comprendre : aucune, évidemment – que Steve retrouve l’usage de la parole. Sans pour autant quitter le sol, d’ailleurs. « Ah parce que tu es putain de sérieux en plus ? » Quitte à laisser l’amabilité de côté, autant la laisser tout de suite au placard des deux côtés – manque de patience, vous dites ? Il faut avouer que si Jason commençait aussi à lui à lui casser les pieds à vouloir faire le malin, le numéro deux d’A.R.G.U.S. n’allait pas réussir à rester calme encore longtemps. « Tu crois que ça m’amuse d’être dans cet ascenseur, Todd ? Tu crois que je n’ai pas d’autres choses à faire plutôt que de rester le « cul par terre », comme tu dis ? » Ou que ça me plaît d’y être coincé avec toi ? Steve, sans bouger d’un iota de sa position, se retient in-extremis de continuer sa phrase. Même si ce fait est admis entre les deux hommes, il n’a pas forcément envie de donner le bâton pour se faire battre sur ce point. Encore moins lorsque Jason trouvait tout seul un sujet de discorde. « Tout comme tu crois vraiment que c’est malin d’aller essayer d’abîmer l’ascenseur de l’ambassade tout ça pour sortir plus rapidement et faire deux ou trois pirouettes pour atteindre je ne sais quel étage ? Contrairement à toi, visiblement, j’ai des responsabilités et je ne peux pas me permettre de me mettre ni l’ambassade, ni l’ambassadeur même à dos. Alors libre à toi d’essayer de sortir d’ici avant une heure mais ne compte pas sur moi. » Merde à la fin, ce n’est pas comme si Steve voulait qu’il s’assoit tranquillement pour lui taper la discut’ ! Ce n’est que du bon sens de devoir prendre son mal en patience lorsqu’un ascenseur tombe en panne – même si cela peut être, certes, assez compliqué, Steve étant le premier à ne pas supporter la situation. Mais pas au point de trouver un stratagème pour les sortir de là. Après tout, ni l’un ni l’autre n’est en danger de mort immédiat. Steve soupire et sort ton téléphone portable pour prévenir son assistante de son empêchement et de décaler ses réunions en l’excusant auprès des autres. Alors qu’il tapote son message, Steve ne peut que se demander comment est-ce que Diana a pu épouser un type aussi égoïste et immature. « Surtout que tu t’y prends mal pour essayer d’ouvrir ces fichues portes. » Il ne le regarde même pas, laissant son regard fixé sur son écran lorsqu’il lui rétorque cette phrase pleine de défi dans la voix. Même s’il ne comptait pas la prononcer de vive voix au départ.

Steve & Jason

Excuse me, which level of hell is this ?

Pour sûr, il y a de l'électricité dans l'air, mais elle n'a rien d'alchimique, elle se rapproche plutôt de la foudre qui fend les cieux dans un grondement assourdissant. Une menace prête à s'abattre à tout moment. Un domaine que connait bien beau-papa, et dont tu aurais aimé pouvoir emprunter les talents pour faire taire l'arrogant Steve Trevor. Qui l'aurait cru ? Tu pensais qu'entre vous deux, tu serais le plus impétueux. Mais c'était sans compter sur le dédain insoupçonné de l'agent de Waller. Même si ce serait plus simple pour toi de te laisser aller à cette première impression, tu ne peux croire que l'homme qui a partagé la vie de Diana pendant huit ans se résume à... ça. Un homme qui te prend de haut, sous prétexte de de quoi ? D'être plus âgé ? De porter un uniforme gradé ? Tu n'as aucun respect pour lui, mais tu en as énormément pour Diana, c'est donc à elle que tu vas te fier pour ne pas juger trop hâtivement Trevor, à la passivité toute aussi agaçante que son orgueil. Mais lui laisser le bénéfice du doute ne veut pas dire pour autant te laisser faire. Peut-être que tu as commencé ce petit jeu de coqs. Ou peut-être pas. Peu importe qui en est à l'origine, tu n'es pas du genre à porter le masque du diplomate – malgré l'ironie du lieu où vous vous trouver – ni à tendre l'autre joue. Lion en cage, impression de déjà étouffer, et incapable de supporter la présence d'un homme pour qui tu n'éprouves rien de plus que de l'animosité, tu sens ton impatience se transformer dangereusement en colère palpable. Parfois, ses mots te font serrer les poings. Si tu veux sortir d'ici au plus vite, c'est pour surtout pour ne pas lui péter le nez. Entre autres choses. Parce que oui, ça te démange depuis l'instant même où ce foutu ascenseur a décidé de venir gâcher ta journée. « J'en ai strictement rien à faire de tes responsabilités, Trevor, ou de ce que l'ambassadeur pourrait penser de ta petite personne. » Tu laisses échapper un rire moqueur, et c'est moindre quant à tout ce que tu pourrais lui répondre. Comme si tu te préoccupais des conséquences que pourraient avoir ta méthode bourrine sur l'image de Steve Trevor. Qu'est-ce que tu en as à foutre de ce putain d'ascenseur ? C'est pas ton problème, cette foutue merde avait qu'à fonctionner correctement ! Ta respiration se fait de plus en plus forte, à mesure que tu tentes de garder ton calme. Un calme difficile à maitriser, gangréné par l'attitude de celui qui partage ton inconfort. Huit ans. Huit ans avec cet homme. Tu fais vraiment l'effort d'essayer comprendre, mais vraiment, parfois, tu n'y parviens pas. Il ne te trouve visiblement pas assez bien pour elle. Pire, il s'imagine t'être supérieur, pour quelques raisons inconnues et sans aucun doute non valables. Ses grands airs. Son mépris. Cette insupportable façon qu'il a de te refuser un regard, préférant se focaliser sur son téléphone. Il adopte le comportement qu'il fallait absolument éviter en se retrouvant en tête à tête avec toi.

Les mains au creux des deux portes, tentant de trouver une accroche à tes doigts pour une bonne prise, Steve se manifeste à nouveau pour se vanter – quelle surprise – d'une meilleure façon de s'y prendre. Ah, oui, tu avais déjà presque oublié qu'il faisait tout mieux que toi. Sauf parvenir à épouser Diana, visiblement. Bon joueur – ou du moins c'est ce que tu prétends – tu t'écartes des portes, et d'un geste, l'invite à prendre le relai. « J'ignorais qu'il existait plusieurs façons d'ouvrir un ascenseur, mais je t'en prie, puisque tu sembles briller sur le sujet, montre-moi donc comment il faut s'y prendre. » Si ça peut soulager son égo abîmé, grand bien lui fasse. Tu te fiche bien de savoir qui est le plus efficace pour sortir en temps record d'un ascenseur bloqué, tu n'as absolument rien à lui prouver. En vérité, ce qu'il pense de toi t'importe peu. Ce qui te dérange dans son comportement, c'est sous-entendre que Diana a fait un choix contestable et hâtif en s'unissant à toi. Ce n'est pas toi qu'il blesse avec ses allures prétentieuses, c'est elle. Comme si elle avait épousé le premier venu. Comme si elle venait de commettre l'erreur de sa vie. Comme si elle était stupide de s'être s'amourachée du véhément Jason Todd. Pour un homme qui a partagé pendant huit ans son quotidien, il semble finalement bien peu la connaître. Peut-être était-il moins con, fut un temps. Les bras croisés, tu lui laisses le champ libre, afin qu'il t'éblouisse de son incroyable prestation. Et agité, la langue qui claque contre ton palais, tu ne parviens plus à garder pour toi la carte maitresse de ton jeu. Parce qu'encore une fois, tu n'as pas la sagesse requise pour rester indifférent à l'attitude de Trevor. « Et pour ton information, j'ai moi aussi des responsabilités, je vais bientôt devenir père. » A t-il eu vent de la nouvelle ? Qu'importe, l'effet restera sans doute le même. Si tu ignores ce qu'il ressent aujourd'hui à l'égard de Diana – à la différence de son opinion évidente sur votre couple – ce sera là la parfaite occasion d'en avoir un petit aperçu. Lui casser le nez était peut-être trop sage, finalement.

Steve lâche un rire. Evidemment que Jason n’en avait strictement rien à faire de ses responsabilités. Ou de sa petite personne (même si « petite » n’est clairement pas le terme le plus approprié concernant Steve, soyons honnêtes). Tout est plus facile lorsqu’on n’a rien à faire dans ce bâtiment après tout. Pas besoin de faire attention à certaines choses, à certains gestes ou certaines paroles. Clairement, Jason se retrouve dans cette position, contrairement à Steve dans son costume, assis à même le sol dans cet ascenseur en panne. Seulement, exceptés les claustrophobes, personne ne se comporterait comme Jason coincé dans cet ascenseur. Son arrogance derrière son petit rire moqueur, irradie l’habitacle et agace Steve, dont le visage ne filtre pourtant rien. A quoi cela lui sert-il de se comporter ainsi ? Qu’a-t-il à prouver dans cet ascenseur ? Qu’il est le meilleur des deux hommes présents ? Qu’il a gagné ? Gagné quoi au juste ? Le fait d’être marié à Diana ? Certes, Steve avouera (mais uniquement à son reflet) que tout ceci est un coup dur, lui qui n’a pas obtenu tout ça en huit années de relation. Lui aurait-elle dit oui si Steve avait fait sa demande au bout d’un an et demi, comme Jason ? Non, sûrement pas. Pire, il y a encore peu, elle lui a rétorqué qu’elle ne croit pas à cette coutume humaine du mariage. Il faut croire que son opinion a bien vite changé. « Evidemment, où avais-je la tête, monsieur ne pense qu’à sa petite personne, suis-je bête. », rétorque-t-il du bout des lèvres, la mâchoire serrée, alors que son téléphone vibre dans sa main. Son assistante qui lui répond qu’elle prend tout en charge et qu’il n’a pas à s’inquiéter. Si seulement elle savait. Non pas que Steve ait peur de Jason, le numéro deux d’A.R.G.U.S. a clairement affronté pire comme « ennemi » dans sa vie. Mais si le Todd continuait à s’acharner sur ce pauvre ascenseur, Steve aura du mouron à se faire. Il ne retient d’ailleurs pas son soupir agacé lorsque Jason tente cyniquement de le provoquer à ouvrir les portes de l’ascenseur. Ce n’est pas parce qu’il s’y prend mal – à savoir tenter d’ouvrir les portes par le milieu en voulant les écarter, n’est pas Clark Kent qui veut n’est-ce pas –et qu’il le titille que Steve va pour autant bouger de sa position. Et également se ridiculiser car seul, il sait pertinemment que les portes ne bougeront pas plus. Alors, sans se lever, ses iris bleutés se plantent sur la silhouette de Jason, rangeant pour de bon son téléphone dans sa poche, qui se déplace pour lui laisser la place. Pour performer, pour cette noble cause que de tenter d’ouvrir ses portes. Ou comment donner l’impression que Steve s’en va retirer Excalibur de sa prison de pierre pour échouer lamentablement et entendre les moqueries. Non, il ne compte pas lui laisser ce plaisir. Tout comme il ne veut pas les mettre en danger. Il retient cette fois-ci un soupir à cette pensée. « Balance-moi toutes les répliques cyniques ou pleines de défi concernant cet ascenseur mais tu ne me feras pas changer d’avis : ne compte pas sur moi pour sortir de cet ascenseur avant que l’on vienne nous chercher. Moi aussi j’aimerais être ailleurs qu’ici alors ravale ton égo nombriliste à deux dollars et prend ton mal en patience. » Encore une fois, Steve se demande où est passé le bon sens de Todd. Et encore une fois, Steve se demande comment Diana a pu l’épouser lui, cette âme torturée et visiblement immature. Il n’y a qu’à le regarder après tout : il ne tient pas en place, n’est qu’une boule d’agacement et surtout d’impatience. A tel point qu’il renchérit sur une annonce qui fait l’effet d’une bombe : Jason va devenir père.

Diana est enceinte de Jason.

L’information remonte au cerveau de Steve qui se félicite instantanément d’être encore assis sur le sol de l’ascenseur. L’information passe mal, quelque part, lui faisant encore se demander comment Diana a pu le remplacer pour Jason mais il ne laisse rien entrapercevoir. Car contrairement au plus jeune de l’habitacle, Steve sait comment contrôler les émotions. Première règle du parfait petit soldat qu’il a apprise et retenue depuis désormais bien longtemps : ne jamais laisser l’opportunité à l’adversaire de vous mettre à terre. Et ce n’est certainement pas Jason Todd qui aura le plaisir de le faire flancher. Steve se refuse encore plus de lui laisser cette satisfaction. L’expression de son visage reste donc neutre. « Félicitations » se contente-t-il de répondre à l’attaque, à l’annonce de cette nouvelle, osant même hausser rapidement des épaules pour faire croire que tout ceci ne l’atteignait pas.

Mais alors à quoi bon ? A quoi cela sert-il à Jason de le jalouser en fin de compte ? A quoi cela sert-il à Jason de le haïr de la sorte alors qu’il est marié avec Diana ? Alors qu’il la mise enceinte avec son accord ? Ces questions, Steve en est persuadé, n’auront pas de réponses, ou du moins pas par le concerné. Et au lieu d’y penser, Steve préfère enchaîner. « Et pour ton information, avoir des responsabilités signifient faire le bon choix et pas uniquement pour sa propre personne. N’apprends pas à ton futur enfant de crier, de s’agacer et de vouloir absolument sortir d’un ascenseur lorsque ce dernier tombe en panne. Ça vaut mieux pour tout le monde et surtout à ne pas faire n’importe quoi avec un ascenseur qui peut tomber. » Il n’a pas pu s’empêcher de faire sa morale alors que tout ceci lui faisait remonter des pensées étranges. Un mélange de souvenirs et de questionnements. Ce souvenir à l’enterrement de son père alors qu’il prend la main de Tracy, réalisant alors qu’il n’est encore qu’un adolescent qu’ils ne sont plus que tous les deux ; qu’il n’est plus qu’un simple grand frère désormais. Et ce questionnement concernant sa propre paternité. Deviendra-t-il un bon père ? Le sera-t-il un jour, même ? Si la première question reste facile – il a, après tout, pas trop mal géré sa petite sœur de trois ans sa cadette à l’époque de sa crise d’adolescence – la seconde reste encore en suspens. « J’ai dû élever ma petite sœur alors que je n’étais même pas majeur alors je sais de quoi je parle lorsque je mentionne mes responsabilités. » Cette phrase sort toute seule mais lui semble sur le moment nécessaire. Et tant pis si cela agace le Todd davantage.

Steve & Jason

Excuse me, which level of hell is this ?

La bombe est lâchée, et c'est avec une réelle attention que tu observes sa réaction. Pas sa souffrance – qui finalement t'apporte peu tant ton intérêt pour Trevor est minime – mais plutôt la moindre remarque désobligeante qu'il pourrait avoir à l'encontre de Diana. Tu sais très bien ce qu'il pense de toi, et le peu d'estime qu'il te porte. Il ne comprend pas comment elle a pu épouser un homme comme toi. Et pire, porter son enfant. Mais si tu encaisses ses offenses avec un sang froid qui ne te ressemble pas, tu serais en revanche prêt à céder à la violence s'il venait à manquer de respect à Diana et ses choix. Tu n'as pas oublié leur entretien, tout ce qu'elle t'a raconté de ce moment de mise au point qu'elle lui a généreusement accordé après avoir appris malencontreusement ton existence au gala. Tu ignores si elle a osé tout t'avouer, mais le peu qu'elle t'a confié a suffit pour te mettre dans une rage folle. Une rage enfuie, mais qui pourrait jaillir à tout instant, comme un diable hors de son coffre. Steve ne le sait peut-être pas, mais ce qui lui pend au nez n'a rien de réjouissant. Et s'il te pense arrogant et instable, tu ne lui as encore rien démontré. La neutralité qu'il affiche est fausse. Le masque qu'il porte n'a rien de réel. Et c'est justement ce besoin flagrant de garder le contrôle sur ses émotions qui te prouve que la nouvelle vient de l'atteindre en plein cœur. Quel homme accepterait sans broncher une telle révélation ? Surtout après des années de relation, et un rejet après une demande en mariage avortée. Tout ce qu'il voulait, tout ce qu'elle lui a refusé, elle te l'a accordé en moins de temps qu'il lui a fallu. Tu pourrais comprendre l'amertume, mais le voir s'évertuer à tout cacher ne t'incite qu'à attaquer encore plus fort. Lors d'une torture, la seule façon de s'en sortir, c'est ne pas prétendre ne rien ressentir, parce qu'alors, l'adversaire se fera un plaisir d'intensifier le mal.

Est-ce qu'être son cadet fait de toi un débile profond ? Parce qu'à l'écouter, il semblerait que ses dix années en plus d'expérience soient suffisantes pour te donner cette morale aussi inutile qu'insipide. Tu sais ce que sont les responsabilité. Tout autant que l’altruisme. Tu ne risquerais pas ta vie toutes les nuits si tu étais l’égoïste qu'il se plait à penser que tu es. Il aimerait que tu sois cet homme qu'il dessine, ce portrait qu'il dresse de toi avec dédain. Mais quelque part, il doit savoir ce que n'est pas le cas. Que Diana n'aura pas épousé n'importe qui. Et c'est peut-être exactement ce qui le dérange. S'être planté sur ce qu'elle désirait réellement. Et ne finalement pas savoir grand chose sur ce dont elle a besoin et envie. « La prochaine fois que tu sous-entends que je ne serais pas capable d'élever correctement mon enfant, je t'explose les dents, Trevor. » Si ton ton est calme bien que particulièrement froid, ton regard lui est rempli d'une colère hardante. Tu n'as aucun conseil à recevoir de qui que ce soit sur la façon de t'occuper de ton futur enfant. Et encore moins de Steve Trevor, qui sous prétexte d'avoir élevé une sœur, s'estime déjà être un père idéal. Cette trop grande confiance en lui n'a pas fini de lui jouer des tours, et c'est probablement pour ça qu'il n'a pas vu Diana lui échapper. « Tu sembles si parfait, je me demande bien pour quelles raisons elle t'a quitté. » S'il s'amuse à pointer du doigt tes défauts, il semble en revanche peu enclin à se questionner sur son propre comportement. Le jeune impétueux versus le vieux sage. Grossièrement, voilà comment il résumerait la situation. Rien ne pourrait être plus erroné.

L'ascenseur ne s'ouvrira pas. Steve te l'a bien fait comprendre. Et si ton impatience était déjà palpable, la tension vient maintenant de grimper en flèche. Tu te fais de plus en plus agiter, signe d'une agressivité endormie sur le point de se réveiller. Il pense être un homme responsable. Il pense être quelqu'un de respectueux. Il pense pouvoir donner de précieux conseils au roquet. Il est là le problème. Il est clairement là le problème. Et tu t'étonnes que Diana ne l'ait pas largué plus tôt. Il a eu plus de répit qu'il n'en méritait. Il est peut-être un bon ami et un frère honorable, tu n'es pas apte à remettre ça en question, mais pour ce qui est du petit-ami, il n'a absolument rien a t'apprendre. « Tu sais, plutôt que te demander pourquoi elle m'a épousé, tu devrais te questionner sur pourquoi elle ne l'a pas fait avec toi. » Si au bout d'un an elle a accepté de t'épouser, c'est parce que t'as su lui donner ce qu'il a été incapable de lui offrir en huit ans. Huit ans. Si au début ce chiffre te donnait le tournis, finalement, il est bien triste. Huit ans à stagner dans une relation qu'il n'a pas pu sauver. Ce n'est pas toi le problème dans cette histoire. Tu n'es même pas responsable de cette rupture. S'il a perdu Diana, c'est par sa seule et unique faute. Mais évidemment, il est toujours plus compliqué de s'attarder sur ses propres fautes que sur celles des autres.