against all odds (BRUCE)

Quand Ivy rouvre enfin les yeux, il faut un instant à sa vision pour s'adapter à la pénombre de la pièce. Elle grimace et se redresse doucement, les mains sur les genoux – ses membres sont douloureux, elle peut déjà deviner que de nombreux hématomes sont en train de naître sur tout son corps. Depuis la disparition du soleil, elle est faible. Trop faible, de moins en moins capable de se défendre, rapidement épuisée par l'utilisation de ses dons. Le Green lui aussi s'affaiblit, et elle en pâtit naturellement. Sans soleil, pas de photosynthèse, pas de chaleur... La flore se meurt lentement, doit puiser dans ses réserves, bien trop tôt dans l'année pour espérer pouvoir survivre longtemps. Ivy secoue la tête et passe une main dans ses cheveux. Elle n'a pas la moindre idée d'où elle se trouve. D'où ils ont bien pu la conduire. Ce maudit Syndicat du Crime est venu s'en prendre à elle, parce qu'elle a refuser de courber l'échine face à eux. Mais après la petite démonstration de force d'Owlman à Gotham, elle ne comprend pas pourquoi elle est encore en vie. Du moins, elle ne comprend pas tout de suite – probablement la faute au coup qu'elle a pris sur la tête. Si elle est est encore en vie, c'est qu'ils veulent se servir d'elle, d'une façon ou d'une autre. Impossible de s'en empêcher, elle ricane. Comment comptent-ils parvenir à un tel tour de force alors qu'ils l'ont privée de son énergie en faisant disparaître le soleil derrière la lune ? De toute évidence, leur équipe n'est pas composée des plus brillants cerveaux... Dommage qu'ils soient aussi puissants, cependant. Elle prend une profonde inspiration. Elle se trouve dans une étrange cellule aux parois transparentes, probablement faites de quelques centimètres de plexiglas. Elle donne un petit coup dessus pour en tester la solidité et soupire ; privée de ses forces, elle ignore comment elle parviendra à sortir de là. Sa connexion au Green est faible, de même qu'elle sent peu de présence végétale autour d'elle.

Ivy prend une profonde inspiration, pleine de lassitude, et se retourne. Là, elle frôle l'arrête cardiaque quand une silhouette bouge dans le coin le plus sombre, et si elle ne l'était pas déjà, elle serait devenue verte d'effroi. « Oh pour l'amour du ciel ! » La stupeur passée, c'est un juron qui lui échappe. Et puis un sourire, imperceptible dans le noir de la pièce, prend place sur ses lèvres carmin. « Je ne pensais pas dire cela un jour, mais... Heureuse de te voir, Batman. » Évidemment. Elle regrette presque d'avoir cru un instant à la comédie du Pingouin et d'Owlman, mais il faut bien admettre que leur petit numéro était convainquant. Difficile d'imaginer le Chevalier Noir réduit au statut de prisonnier, lui qui semble posséder un don pour ressurgir au pire moment – ou au meilleur, tout n'est qu'une question de point de vue. « Presque tout Gotham te pense mort. Il faut dire que le Pingouin a organisé une petite réception pour célébrer ta disparition... Avec ton remplaçant en invité d'honneur. » Un sifflement furieux échappe à Ivy, qui se laisse ensuite glisser contre la paroi de leur cage. « Owlman a revendiqué ta précieuse Gotham. Et tous ceux qui osent contester son régime terminent avec une lame dans la gorge ou une balle dans la tête. À dire vrai, j'ignore pourquoi je suis encore en vie. » Ivy soupire, presque agacée par ses propres propos. « Cela m'écorche la langue de te le dire, mais je te préfère largement à ces psychopathes du Syndicat. J'ai refusé de me plier aux règles de leur jeu sordide, d'où ma présence ici. Je ne sais pas ce qu'ils me veulent, cependant. Ce n'est pas comme si je pouvais encore... Oh, mais j'oubliais. Tu ne sais sans doute pas... » Elle secoue la tête et fronce les sourcils. « Le soleil a disparu. Ultraman a déplacé la lune entre la Terre et Venus pour bloquer ses rayons, apparemment il y est vulnérable... Cela a eu des conséquences dramatiques. » Toute la planète a été touchée, mais Ivy n'était qu'à Metropolis. Et cela lui a bien suffi. Loin d'être sensible, elle n'est pourtant pas prête d'oublier les horreurs de ce tsunami monstrueux. « Metropolis a été frappée par un tsunami, elle a manqué de disparaître sous les eaux de façon définitive. Courtoisie de Sea King et Ultraman. » Elle rit avant de secouer la tête et de retrouver son sérieux. « On parle d'un million de morts, et d'au moins autant de disparus. Enfin, toutes proportions gardées, sur onze millions de personnes... Je suppose que c'est un sauvetage réussi. »

L'Empoisonneuse soupire longuement. C'est bien sa vaine, se retrouver prisonnière du Syndicat en compagnie de Batman lui-même. C'est bien une option à laquelle elle n'avait absolument pas songé. Tant mieux ? Ses chances de s'en sortir sont probablement plus élevées si elle peut compter sur l'aide de la Chauve-Souris. Après tout, ils sont dan le même camp, non ? Et puis, il doit certainement avoir les orphelins dont elle s'occupe en tête. « J'ai dû déplacer les enfants, le parc n'était plus sûr... Je les ai emmenés à Toxic Acres. Pas de panique, ils sont tous immunisés contre mes poisons... Mais ils sont seuls. Il faut que je sorte d'ici. » Comme piquée au vif, Ivy se relève d'un bond et frappe un grand coup contre la paroi. « Je refuse de croire que toi, d'entre tous, tu n'as pas un plan pour sortir d'ici. Qu'est-ce que tu fiches encore là, d'ailleurs ? Gotham est plongée dans le chaos, c'est un véritable bain de sang ! » Elle s'emporte, parce que pour la première fois depuis une éternité, elle a peur. Peur de ce qui risque d'arriver à ces enfants qu'elle a recueillis sans sa protection, peur que le Green ne se meurt par la faute du Syndicat, peur que Selina et Harley ne fassent quelque chose de terriblement stupide qui ne finisse par leur coûter la vie. « Il faut que nous sortions d'ici. Les enfants ont besoin de moi et... Et même si ça me tue de le dire, le monde a besoin de Batman. Et vite. »

Cette voix qui résonne, familière, séduisante. Par la passé, il l’avait trouvé dangereuse, trop dangereuse en dépit d’un idéal qu’il pouvait comprendre, en dépit d’un discourt écologique qui parlait à la fibre idéaliste du chevalier sombre, assez pour la défaire, pour l’emprisonner, pour la boucler à Arkham, et redouter son association avec Harley, ou pire, avec Hush, le Pingouin ou Double Face. A présent, il songeait à ce danger, à cette séduction lascive agressive comme à une arme, une arme contre le syndicat du crime. Ses yeux usé et cerné de violet se tournèrent vers elle. Le masque cachait les bleus et les marques des coups, Ivy ne cachait rien, de son triste état. Ils ne l’avaient pas torturés, du moins, ce n’était pas de leurs mains qu’elle devait sa peau flétrit, sombre, à l’agonie. Il pensait savoir ce qui lui arrivait. Privée de lumière du jour, privée d’air frais, privée de photosynthèse. Ivy était devenue plus proche de ses chères plantes que d’une humaine, même si, les hommes aussi finissent par souffrir de l’obscurité. L’enfermement loin de la lumière du soleil rendait les hommes fous. Il l’avait vu dans les geolle de la ligue des assassins. La folie ronger les esprits, lentement, sûrement. Gotham, à sa manière, produisait le même effet. Tout à l’intérieur pourrissait, tout finissait par être rongé par la folie, en dépit des efforts qu’il fournissait. Tout ce qu’il pouvait faire, c’est embrasser la folie, tenter de la comprendre, et de la plier à sa volonté, à son idéal. Transformer l’horreur en supportable. En regardant Ivy dans son triste état, il se demanda s’il n’avait pas définitivement échoué. S’ils n’avaient pas tous échoués. Batman avait besoin d’être défaitiste, de toucher le fond, d’embrasser l’abysse afin de tuer le monstre à plusieurs têtes, à la racine. Malheureusement, ceux qui le suivaient dans sa croisade ne s’en sortaient pas toujours.

Cette fois-ci, c’est lui qu’on pensait mort. Il écoute Ivy raconter le récit des évènements qu’Owlman s’était déjà fait un plaisir de lui conter. Batman avait poussé son diabolique frère issu d’une dimension parallèle où la ligue de la justice formait le syndicat du crime à se confesser. L’ego surdimensionné d’Owlman était quasiment équivalent au sein. Le Batman nécessitait une dose d’ego. Mais pour rivaliser de cruauté, il en fallait plus encore, pour tenir tête à un monde entier, et le rançonner, il fallait un ego tel qu’il n’y en avait d’équivalent que dans une mauvaise série B. Owlman adorait s’écouter. Il aimait à se sentir supérieur à Batman, à lui démontrer combien il était ingénieux, meilleur que lui. Si cela était douloureux d’entendre, d’imaginer la décrépitude de sa ville, il avait néanmoins recueillis de précieuses informations qu’il comptait user pour défaire le syndicat, mais pour cela, il fallait sortir d’ici. Ivy ignorait à quel point elle tombait bien. Le récit des exploits d’Ultraman, il les connaissait déjà, par le prisme de ce que Owlman avait pu lui raconter, visiblement les exploits de Ultraman le passionnaient moins que les siens. Batman y voyait une sacrée faille à exploiter. Mais les entendre, détaillés, de la bouche d’Ivy n’avait rien de plaisant. Il serra les dents, avala la douloureuse pilule, en la regardant droit dans les yeux. Ivy pouvait lire en lui, le masque n’était là que pour masquer son identité, pas ses émotions. Celles-ci étaient accentuées, souvent théâtralisées. Mais il n’avait pas d’effet de manche à produire, le spectacle était devenu intimiste soudainement.

Batman sourit quand elle lui demande s’il n’a pas un plan pour sortir d’ici. Vu le sujet abordé juste avant, les bains de sang et les millions de morts, le sourire n’est peut-être pas de bon goût, mais le chevalier noir n’a jamais eu cure d’avoir du tact. « J’avais besoin de récolter des informations. » révèle le Batman sachant qu’elle l’avait sans doute deviné. Elle connaît ses méthodes à force. « Le syndicat a toujours trois pas d’avance sur nous, il fallait que je les rattrape. » En disant cela il s’approcha de la vitre les séparant. Sous son gant, des petites griffes apparurent. Il devait admettre que ce gadget il l’avait piqué à Selina, enfin piqué, s’était fortement inspiré de ce qu’elle avait créer pour son costume. Il usa de ses griffes pour ouvrir un rond dans la vitre, qu’il récupéra avant qu’elle ne tombe au sol et ne se brise. Il était presque aussi délicat que Selina, presque. « Justement, j’ai un plan, mais j’ai besoin de toi pour l’appliquer. Ton corps n’a pas vu le soleil depuis longtemps, tu dois sécréter une sacrée dose de dioxyde de carbone non ? » en disant cela il enleva son gant et le lui tendit. « Pourrais-tu ouvrir ta cage ? Partager ce poison avec nos amis ? » Son geste exigeait une sacré dose de confiance. Elle pourrait n’en rien faire, attendre qu’il ne soit plus capable de retenir sa respiration qu’il soit à court de gadget. Certes, il avait maintenant des techniques pour empêcher ses ennemis de le déposséder de ses gadgets, comme ce détonateur relié à son masque et à sa ceinture par exemple, mais il ne pouvait avoir un arsenal sur lui en permanence. Il avait besoin d’elle, et elle de lui. La question était, peuvent-ils se faire confiance ? Il espérait que oui.

Fut un temps où Ivy aurait donné n'importe quoi pour voir un quelconque criminel la débarrasser définitivement du Chevalier Noir, qu'elle trouvait constamment sur son dos. Mais les temps ont changé, et elle aussi. La voilà quasiment en train de le supplier de l'aider à s'échapper de la prison du Syndicat, pour qu'elle puisse retourner auprès de ses enfants – tous ses enfants. « Quoi ? Tu veux dire que tu es là de ton plein gré depuis le début ?! » Un sifflement furieux échappe à l'Empoisonneuse, qui tape un grand coup contre la vitre. « As-tu seulement idée de ce que Gotham subit depuis ta prétendue mort ? Pour l'amour du ciel... Bon sang, Selina a bien failli se faire tuer tant elle était perturbée par la nouvelle ! Peu importe qui tu es sous le masque, tu n'es parfois qu'un grand idiot égoïste ! » Elle secoue la tête. Comment a-t-il pu ne rien dire à Catwoman ? La petite réunion de Cobblepot à l'Icerberg Lounge avait bien failli virer au carnage, et les trois Sirènes ont échappé de justesse aux humeurs massacrantes d'Owlman. « Je ne te comprends pas... Je ne te comprends vraiment pas. » Plus que ceux de n'importe quel autre humain, les mécanismes de l'esprit de la Chauve-Souris lui sont étrangers. « Le Syndicat a peut-être quelques coups d'avances contre vous, mais ils sont complètement désorganisés. Je reconnais au moins ça à ta Ligue, vous êtes une réelle équipe. Owlman est venu me trouver, accompagné de leur espèce de Green Lantern pathétique. Ils ont passé davantage de temps à se cracher mutuellement au visage qu'à tenter de me convaincre de les rejoindre. » Elle hausse les épaules. « Mais puisque tu es là depuis un moment, je suppose que tu le savais déjà. » Elle ricane, moqueuse. Elle ne comprend pas comment l'ont peut se faire passer pour mort et ainsi faire souffrir intensément les gens qui nous aiment. C'est cruel, même elle n'oserait pas agir de la sorte.

Ivy hausse un sourcil quand Batman se rapproche de la vitre qui fait office de cloison entre leurs deux cellules, pour ensuite découper un rond dans le plexiglas à l'aide d'un gadget avec lequel elle était familière, et dont la vue lui arrache un sourire. « Eh bien, eh bien... Si ce n'est pas là une inspiration féline et féminine, je ne m'appelle plus Poison Ivy. » Quand il commence à lui expliquer son plan, Ivy soupire longuement en levant les yeux au ciel. « Je rêve, ou tu me demandes si mon agonie est exploitable ? » Elle affiche une expression parfaitement outrée pendant quelques secondes, avant de lui sourire en récupérant le gant qu'il lui tend. « Évidemment qu'elle l'est. » Cependant, un tel effort ne sera pas sans conséquences sur sa santé déjà fragilisée. Batman espère-t-il faire d'une pierre deux coups, s'échapper tout en se débarrassant d'elle ? Elle va devoir lui faire confiance, elle aussi. Elle décroche une fleur de son bustier, semblable à un gros lys avec de longues extensions tentaculaires, et la tend à Batman à travers l'ouverture. « Laisse-la s'accrocher à ton visage. Elle va filtrer le dioxyde de carbone et te permettre de respirer normalement. Mais je ne sais pas combien de temps elle pourra le faire avant de mourir. Alors... Tant que tu le peux, retiens ton souffle. » C'est bien la première fois qu'elle sacrifiera l'une de ses fleurs pour Batman. Mais en temps désespérés, mesures désespérées. « Une dernière chose... Comme tu l'as si vite remarquée, je suis mourante. Je ne sais pas combien de temps je tiendrai sans soleil. Alors... Si le pire devait arriver, promets-moi que tu ne laisseras rien arriver à mes enfants. Tous mes enfants. » Les orphelins de Gotham comme les plantes, la flore du parc dont elle s'est soigneusement occupée pendant des années. Peut-être ne comprend-il pas plus que les autres sa connexion au Green, mais il n'en a pas besoin. Elle veut simplement avoir sa parole que si elle meurt en l'aidant à s'échapper, ses enfants seront protégées.

Usant du gadget de Batman, Ivy ouvre une petite fenêtre à travers la vitre, et s'en rapproche après le lui avoir rendu. Elle prend une profonde inspiration et pose ses mains contre la paroi. « C'est le moment où tu arrêtes de respirer, mon cher. » Les lèvres pratiquement collées à l'ouverture, elle souffle longuement, expirant une dose importante de dioxyde de carbone concentré, en même temps que des phéromones qui anéantiront momentanément tout réflexe de fuite que pourraient avoir les gardes censés les surveiller. Elle souffle, encore et encore, presque jusqu'à l'épuisement, sa peau déjà foncée adopte une teinte d'un vert profond et c'est mauvais signe. C'est le signe qu'elle s'auto-intoxique, le signe qu'elle n'est plus capable de réguler les poisons qui coulent dans ses veines. Ce sont les restes de son humanité qui la rattrapent, les limites de sa nature d'hybride atteintes. Quand elle estime avoir libéré une dose suffisamment conséquente de dioxyde, et surtout qu'elle n'en peut plus, elle se laisse glisser contre la paroi de sa cellule. Épuisée, elle ne tient pour le moment plus debout. « A toi de jouer... Sors-nous d'ici. » Son ton est bas, sa voix rauque et cassante. Le doute n'est pas permis, elle est bel et bien mourante, sans soleil ses jours sont comptés. À moins qu'il ne s'agisse plus que d'heures, à présent ?

Ivy était furieuse d’apprendre qu’il s’était volontairement laissé emprisonner par le syndicat. Bruce n’avait en effet pas songé à ce qu’il se passerait en son absence, mais il savait ce qu’il se passerait s’il ne faisait rien. Quand il avait vu de quoi ils étaient capables, il avait compris qu’il leur faudrait plus que simplement unir leurs forces, il leur faudrait un plan, il leur faudra connaître les points faibles de leurs ennemis, il leur faudrait les retourner contre eux. Ivy l’engueulait, pensant à Selina. Il appréciait cela chez elle, son côté lionne protégeant ses enfants comme ses amies. Harley avait de la chance de l’avoir comme amie, cela Bruce l’avait toujours pensé. Le Joker empoisonnait l’esprit de Harley alors que Ivy la rendait forte. Bien que savoir que le trio des criminelles pouvait devenir une véritable épine dans son pied lorsqu’il était sous le masque, il savait qu’en son absence Selina avait pu compter sur ses amies. « Selina sait se débrouiller seule. » répondit-il simplement. Ils ne formaient pas un couple parce qu’il était nettement plus dangereux pour eux d’être ensembles que séparés. Selina savait en effet survivre seule, et le faisait infiniment mieux en indépendante qu’avec lui à ses côtés. Comme il savait que chaque membre de la bat-family pouvait se débrouiller en son absence. Il n’était plus si jeune que cela, et un jour, il ne serait peut-être plus là pour eux. Ils devaient savoir s’organiser en son absence. Evidemment, face à Owlman cela avait dû être compliqué sans doute.

Le chevalier noir hocha la tête. « Leurs différents ne m’a en effet pas échappé. Ce sera un atout durant la bataille. » Bien qu’il avait récupéré bien plus d’informations que cela, il se tut. Il était possible que le syndicat les écoute. C’était après tout une méthode couramment utilisée dans toutes les prisons du monde ou presque de laisser les détenus ensembles pour écouter leurs conversations. Bruce avait quelques gadgets sur lui mais rien pour dissimuler leur conversation. Autant être prudent. Il préféra s’affairer plutôt à creuser une ouverture comme l’aurait fait celle qui hantait ses nuits et parfois son lit. Il expliqua son plan puis se passa de paroles supplémentaires. Respirer était dangereux pour lui tant qu’ils ne seraient pas sortis de leur cage de verre. Mieux valait garder ses paroles et sa respiration. Poison Ivy sembla approuver son plan, il fallait dire que l’alternative n’était pas réjouissante. Il saisit la fleur délicatement et l’apposa à son visage sans hésiter. Il avait remis sa vie entre ses mains à l’instant où il lui avait confié son plan. Elle aurait pu alerter le syndicat et gagner des points auprès d’eux. Mais elle ne le ferait pas. Il savait qu’elle ne songerait qu’à rejoindre ses plantes. Le syndicat du crime se moquait bien de préserver la nature, au contraire.

« Je te promet de m’en occuper. » répondit-il sans mentir. S’occuper des plantes, il supposa qu’Alfred accepterait la mission sans grande objection, quand aux orphelins, ils lui tenaient également à cœur, n’avait-il pas financé l’opération depuis le début ? Bien sûr, elle l’ignorait. Elle ignorait que Wayne payait pour l’orphelinat et plus encore que Batman était Bruce Wayne même si, son amitié avec Selina finirait sans doute par lui mettre la puce à l’oreille. Il était étonné que Hush ne l’ai pas mise dans le secret. Il l’observe agir puis écoute les gardes tomber dans les pommes. Certains toussent mais personne n’arrive. L’alarme n’a pas encore été déclenchée. Batman en profite alors, sachant que leur fenêtre est courte. Owlman n’est pas présent, il en est persuadé à moins que ce dernier lui ai menti. Dans ce cas, tout ceci n’était qu’un piège et ils sont tous les deux morts. Tant pis, il faut foncer à présent. Il applique sur la vitre devant lui un gadget miniature qui développe des ultra son et infra basse. Se bouchant les oreilles et détournant son visage, il sent les vitres s’effondrer, exploser en mille morceaux. Pas que les leurs d’ailleurs. Les autres se fracturent. Batman se rappelle d’Asseau sur le central 13, un film où les malfrats et les flics font équipent face à des nettement plus méchants. C’est le moment de faire équipe avec les criminels notoires ayant refuser de suivre le syndicat et de lui obéir. Il brise quelques vitres et demande à ceux qu’il vient de libérer de faire de même aux autres vitres si possible, de les briser afin de libérer tous les prisonniers. Certains hésitent. Batman espère qu’ils le feront, par crainte de lui, ou par nécessité de survivre. Plus ils seront nombreux plus le syndicat serra surchargé et il sera plus compliqué de les pourchasser tous. Il se penche vers Poison Ivy et la prend dans ses bras.

Pour s’échapper d’ici, il lui a fallu étudier les lieux tout en restant dans sa prison de verre et sans pouvoir faire appel à Oracle ou à Alfred. Les bonnes vieilles méthodes ont du bon. Il s’est basé principalement sur le calcul des pas qu’il entendait, l’oreille collée au sol, sur les déductions les plus simples faites en observant les gardes. Heureusement que leur prison est en plein centre des opérations. Il a une bonne idée de où sont les toilettes, les lieux les moins protégés. Ivy repose inerte dans ses bras, il sent qu’elle aurait détestée le voyage si elle avait été consciente. Quand il la glisse dans le conduit d’évacuation des ordures, il a un sourire éphémère. A son tour, il la suit. Ce petit tour de manège leur vaut une sortie rapide et efficace bien que, ils en ressortent puant. Pourtant, Batman s’acharne à les recouvrir d’ordures et de saletés plus repoussantes les unes que les autres à croire que le voyage dans les conduits ne lui a pas suffit. Mais de son expérience, personne ne prête attention aux clochards et aux mendiants surtout quand ils puent affreusement. Pour le moment, il faut qu’ils soient invisibles. Dès qu’il peut il attrape des nippes dont il entoure Ivy. Le voyage est long, et il finit par la placer dans un caddie afin de leur assurer de la tranquillité. Pas de Batmobile pour les ramener chez eux. Batman agit comme il l’avait fait lors de la transformation de Gotham en No man’s land, il agit comme s’il n’existait plus aux yeux du monde. Même si celui-ci s’effondre sans son ombre planante dans le ciel.

Le voyage s’achève par un bus de nuit les amenant aux pieds des égouts de Gotham. Le réseau de tunnel qui a longtemps été investi par Killer Croc, parfois par la Ligue des Assassins, d’autres fois par des orphelins formant une sorte de cour des miracles sous l’égide d’un tortionnaire, s’ouvre à eux. Batman le connaît comme sa poche. C’est le plus efficace moyen de circuler à Gotham en étant totalement invisible. Toujours avec son précieux bien dans les bras, il sillonne les ténèbres puantes de Gotham. Par chance, ils ne croisent pas Killer Croc. Par les égoûts il parvient à rejoindre les entrailles de Wayne Corporation. Il pense avoir de quoi redonner à Ivy un peu de sa santé perdue dans le laboratoire de Lucius Fox. Il finit par attraper ce fusil à uv. Quand Bruce avait proposé sa production Lucius lui avait demandé s’il songeait affronter Dracula, ce qui avait fait sourire Bruce. En réalité, ce projet avait pour but d’aider les mineurs chinois. Mais à cet instant, il pouvait sans doute sauver Ivy. Il l’utilisa sur elle, lui tirant dessus. Les impacts libéraient une lumière concentrée d’uv. Il espérait que cela fonctionnerait. Il n’était pas un véritable scientifique, juste un amateur. Où était Barry quand on avait besoin de lui ?

Ivy n'aurait jamais cru devoir un jour remettre sa vie entre les mains de Batman, et encore moins travailler avec lui pour devoir échapper au Syndicat du Crime. Pire, elle vient peut-être de se sacrifier pour lui permettre de sauver le monde. L'ironie de la chose n'échappe pas à Ivy, dans ses derniers instants de conscience avant qu'elle ne bascule dans l'inconscience, ou plutôt dans un coma d’auto-préservation, comme le font certaines espèces végétales. Batman et Poison Ivy, c'est une drôle d'histoire, une drôle de relation. Ils n'ont jamais été de véritables ennemis, n'est-ce pas ? Même lors de leurs affrontements passés, ça n'a jamais été personnel. Une guerre d'idéologies, peut-être, mais Ivy n'a jamais éprouvé une haine viscérale à son encontre. Et après quelques années, elle est même parvenue à l'apprécier – à sa façon. Mais elle n'imaginait pas un jour se retrouver à monter tout un stratagème avec lui pour échapper à des ennemis communs, c'est certain. Une chose est certaine, elle sait qu'elle peut compter sur lui pour tenir sa promesse et s'occuper des orphelins et de son  jardin si elle devait mourir, que ce soit en lui sauvant la vie ou en succombant aux poisons qui grouillent dans son organisme en l'absence de soleil et de photosynthèse. Elle entend à peine Batman se débarrasser des gardes et libérer les autres prisonniers, elle ne parvient plus à lutter pour rester éveillée. Mais étrangement, alors qu'elle vit peut-être ses derniers instants, elle est sereine face à la mort. Est-ce son côté plante qui l'empêche de paniquer, ou simplement la lassitude de lutter éternellement qui prend le dessus ? Elle n'en sait absolument rien, et quoi qu'il en soit elle sombre dans les ténèbres de l'inconscience, tout repose à présent entre les mains du Chevalier Noir.

L'Empoisonneuse est réveillée par une douleur insupportable qui lui donne l'impression qu'un incendie ravage ses entrailles. Elle ouvre les yeux et ouvre la bouche pour hurler, mais aucun son n'en sort. Son corps est secoué par de violentes convulsions insupportables, l'air brûle ses poumons et son sang semble bouillonner dans ses veines. La torture lui semble durer des heures, mais il ne doit en réalité pas s'écouler plus de quelques secondes avant que son corps ne retombe sur la table d'examen. Tremblante, et soumise à l'incompréhension la plus totale, Ivy a besoin d'un moment pour se souvenir de qui elle est, de ce qui est arrivé avant qu'elle ne sorte de son coma aussi brusquement. Le Syndicat. Batman. Leur évasion. Son sacrifice... ? De toute évidence, elle a survécu. Mais le comment demeure un mystère. Doucement, sa vision s'habitue à la lumière de la pièce dans laquelle elle se trouve, et qui lui est étrangère. La couleur d'un blanc immaculé du plafond suffit à lui confirmer qu'elle n'est jamais venue dans cet endroit. Elle prend une profonde inspiration, une fois que la sensation de brûlure s'est atténuée. « Aoutch », finit-elle par lâcher entre ses dents serrées. Doucement et avec précaution, Ivy se redresse et s'assoit sur le bord de la table, et tend les bras. « Oh, bon sang. » Sa peau a retrouvé sa teinte normale, pour elle, un vert pâle qui contraste beaucoup avec celui beaucoup plus foncé qu'elle arborait quelque heures plus tôt seulement. Plus étrange encore, elle se sent bien. Pas au mieux de sa forme, mais en tout cas bien mieux qu'elle ne s'est sentie depuis la disparition du soleil. Son organisme a été purgé des poisons qui le rongeaient, elle le sait, elle le sent. Mais ce n'est pas un miracle, du moins pas au sens strictement religieux du terme. Ivy relève les yeux, et sans surprise c'est Batman qui se tient devant elle, un drôle de fusil entre les mains. « Je ne sais pas ce que tu m'as fait, mais il semble que cela a eu l'effet désiré. Si tu n'essayais pas de m'achever, bien sûr. » Une Poison Ivy qui fait dans l'ironie est une Poison Ivy qui va bien. Pour la première fois depuis une éternité, un sourire sincère étire les lèvres de l'Empoisonneuse. « Je te dois la vie. Merci. »

Elle soupire. Et maintenant ? La lutte ne fait que commencer. Ivy se détourne de la Chauve-Souris un instant pour observer leur environnement. A priori, ils se trouvent dans un laboratoire de recherche technologique qui n'est pas fait pour le grand public. Du coin de l'œil, elle aperçoit quelques prototypes d'armement, mais ce n'est pas ce qui retient son attention et lui fait subitement écarquiller les yeux, c'est un logo. « Wayne Corporation ? » Ivy fronce les sourcils. Son regard fait l'aller-retour entre Batman et le logo. « Comment... Comment Batman a-t-il ses entrées chez Wayne Corporation... ? » Ils n'ont pas l'air d'être dans les lieux illégalement. Pas d'alarme déclenchée, pas de gardes assommés quelque part, le calme le plus total. Elle secoue doucement la tête, comme si la logique refusait de se faire dans son esprit. Elle est pourtant évidente, et de plus en plus difficile à ignorer. Ivy descend de la table et se rapproche de Batman de quelques pas, les sourcils froncés et les lèvres pincées, comme si elle cherchait à voir son visage à travers son masque. « C'est toi, n'est-ce pas ? » Elle hésite, sachant parfaitement qu'une fois qu'elle aura prononcé les mots, il n'y aura pas de retour en arrière. « Wayne. Bruce Wayne. »

Batman a agit sans l’ombre d’une hésitation. Il sait qu’à sa place d’autres auraient envisager de se débarrasser d’un coup du sort d’une de ses ennemies. Mais il ne la voyait pas ainsi. Comme avec l’écrasante majorité des détenus d’Arkham, il espérait encore les sauver. Certains ne voulaient pas l’être, certains aspiraient juste aux ténèbres et à voir brûler la cité. Mais Poison Ivy n’en faisait pas parti. Elle avait été un jour une brillante scientifique, et au fond d’elle-même, elle l’était encore. Elle prenait le parti de la nature, des plantes à qui elle avait consacré sa vie, mais voir un enfant écraser ne lui plaisait pas plus qu’à Batman. Oh elle était capable de s’acoquiner autant avec lui qu’avec Oswald ou Dent. Il n’ignorait pas qu’elle avait participer à plusieurs complots contre lui. Il n’était pas naïf, non, mais il n’était pas non plus idiot. Pour survivre, une femme dans cette ville devait être prête à tout. Comme il était prêt à tout pour réussir dans sa tâche. Il avait déjà menti, volé, et même trahi des amis afin de préserver la justice, préserver Gotham, au nom du bien de tous, au nom de sa croisade pour la justice. Et il continuerait à le faire. Tant que le jeu en valait la chandelle.

Ignorant le petit tacle de la rouquine, Batman reposa le lourd fusil. Il n’était pas comme Capitain Cold capable de se trimbaler avec un fusil au poids conséquent. En réalité, il préférait les gadget légers et compacts, ceux qu’on pouvait garder aisément sur soi, même dans l’antre de ses ennemis. Il a conscience qu’elle va tout ausculter à la loupe. La plupart des gens le font, pour assouvir leur curiosité mais aussi parce que la Bat-cave comme tout le reste est devenue mythique. Peut-être s’arrêtera-t-elle devant le costume de Jason qui était encore présent sous cloche même si Jason était de retour, en vie. Batman hésitait. Mais le Jason qu’il avait connu était bel et bien mort. Si Jason venait ici, peut-être couvrirait-il la cloche pour lui éviter le douloureux souvenir, mais il gardait le costume pour lui, pour se souvenir. Plus jamais ça. La scientifique s’attarde sur l’arme lui ayant sauver la vie. Elle semble comprendre. Quand elle lui pose la question, il se tourne vers elle prêt à lui donner dans l’habituel mensonge. Un bref instant il hésite, à quoi bon, après ce qu’ils viennent de vivre. Et puis il se rappelle, de Talia, et de comment tout cela s’est finit, il se souvient de ce que le Joker a fait à Alfred quand il a su, ce qu’il a fait à Jason. Il ne pouvait pas déroger à la règle. Jamais.

Se tournant vers elle, il l’observa avec un sourire. « Tu imagines sérieusement le millionnaire voltiger sur les toits ? » Il ricanne, un rire étrange, inhabituelle, comme une farce grostesque. « J’ai juste des contacts au sein de la branche recherche. » fit-il. Mais le mensonge qu’il servait à Gordon depuis des années était plus subtile encore, l’histoire de la grande amitié entre Batman et Bruce Wayne. Certains se doutaient qu’il devait y avoir anguille sous roche. Mais après tout, personne n’a jamais soupçonné Clark Kent alors qu’il était le seul à avoir des photos et des interviews inédites de Superman. « Lucius Fox est un bon ami. » Et son fils a même intégré la bat-famille, un temps, avant de prendre son indépendance. Il regarda Poison Ivy. Elle devait mourir d’envie d’examiner l’arme devina-t-il. « Il ne t’en voudra pas si tu jette un œil au prototype. Après tout, tu es la première sur qui il a été testé. » avoue-t-il. Poison Ivy n’est pas du genre à exploser de colère quand on admet l’avoir sauvé avec quelque chose qui aurait pu la tuer. Harley aurait en revanche piqué une crise. Mais amener Harley ici aurait été impossible. Poison Ivy est réfléchie, intelligente, froide aussi mais justement, il appréciait son sang froid en toute circonstance.

« Toi qui était dehors encore pas si longtemps, sais-tu qui est encore fiable à Gotham ? Qui pourrait t’offrir un abri ? Ici c’est trop risqué, Owlman comprendra vite que je suis sorti de ma cellule, et viendra en premier lieu ici. Il est mon double maléfique après tout, il pense comme moi, malheureusement. Mais il n’y a pas ton double maléfique ici Poison Ivy, profite en pour te protéger, te mettre à l’abri. » Il lui en avait déjà suffisamment demandé. Se sacrifier pour le faire sortir de prison, c’était bien plus qu’il n’aurait dû lui demandé. Elle l’avait fait en pariant qu’il l’amènerait dehors mais il aurait pu tout aussi bien la laisser là bas. Il aurait pu n’avoir rien pour la sauver ensuite. Elle avait fait un pari risqué, et tout cela pour qu’il sorte, qu’il sauve le monde. Il devait trouver un moyen de contacter la Justice League sans que le syndicat n’intercepte la communication. Ce serait risqué et dangereux.

Ivy fronce les sourcils. Elle a l'impression de s'être trompée. Ce n'est pas dans les entrailles de Wayne Corporation qu'ils se trouvent, c'est dans l'antre de la Chauve-Souris. Mais à présent qu'elle a fait le rapprochement, la chose semble évidente. « Un millionnaire peut-être pas, en revanche, un milliardaire... » Elle lui sourit, sans le lâcher du regard. « Des contacts, hein... » Elle secoue doucement la tête, peu convaincue. C'est tellement cliché. Mais évidemment qu'être Batman demande des moyens. Seulement voilà, Bruce Wayne... Difficile de le dissocier de son image de play-boy insouciant pour lui coller celle de Batman. C'est étrange, d'essayer de mélanger toutes ces personnalités pour n'en faire qu'un seul homme. Mais probablement pas plus délirant qu'essayer de voir Pamela Isley et Poison Ivy en une seule et même femme. Peu importe, en fin de compte, elle n'a de toute façon pas l'intention d'interroger Batman sur son identité secrète juste après qu'il lui ait sauvé la vie. « Je risque d'avoir de nouveau besoin de ce fusil d'ici quelques jours. Mais je ne peux pas l'emporter avec moi, ce serait bien trop dangereux. Je peux compter sur toi pour me tirer dessus une fois de plus quand le moment sera venu ? » Elle hausse un sourcil. Faire confiance à Batman, voilà une chose à laquelle elle ne s'attendait pas. Mais en fin de compte, c'est presque un soulagement. Ivy secoue la tête en frottant son bras, et un souvenir lui revient brusquement. « Quand ils m'ont pris, ils ont aussi pris mon sang. Je crois... Je crois qu'ils veulent exploiter les poisons de mon organisme. Probablement pour créer une nouvelle drogue ou un poison. Je ne vois pas pourquoi ils auraient voulu de moi en vie, sinon... » Elle soupire longuement. Elle a été plutôt claire, le petit jeu d'Owlman devrait se faire sans elle. De toute évidence, son non n'a pas été pris en considération. Réaction typiquement masculine.

« Je rêve, ou tu t'inquiètes pour moi ? » L'Empoisonneuse dévisage le Chevalier Noir un instant, avant de secouer doucement la tête. « Ne t'en fais pas pour moi. J'ai un endroit où aller, là où personne ne peut s'approcher sans mourir empoisonné. À moins d'être immunisé, bien sûr. Toxic Acres. J'y ai déjà caché les enfants. J'ai aussi immunisé Selina contre toutes les toxines, afin qu'elle puisse venir s'y réfugier si elle en avait un jour besoin... » Elle tapote sa lèvre un instant, songeuse. « Je pourrai t'immuniser également, je suppose. Au cas où... Je l'ai déjà fait pour Red Hood. » Ivy croise les bras. « Tu ne t'es jamais demandé qui a continué à fleurir la tombe de Jason Todd, toutes ces années... ? » Elle a remarqué le vieux costume de Robin gardé sous cloche, elle l'a reconnu. « Et tu ne t'es jamais demandé pourquoi j'ai soudain cessé de m'associer aux autres criminels notoires de Gotham ? Avant, au début, nous avions une règle... Quoique nous fassions, nous ne devions pas toucher aux enfants, jamais. Quand le Joker a... Quand il a tué Robin, je ne l'ai pas supporté. » Ivy ricane, moqueuse envers elle-même. « Ce n'est pas le sujet, j'en conviens... Des personnes fiables à Gotham, il n'y en a pas beaucoup, mais ça n'a rien de nouveau. La plupart des criminels, et même les autorités locales, se sont soumises à la volonté d'Owlman. Selina n'a pas cédé, évidemment. Harvey non plus, aux dernières nouvelles... Mais les autres... Et quand je veux dire les autres, je ne parle pas des Hiboux ou des Assassins... Les autres ont trop peur pour chercher à résister. Et il y a ceux que cette alliance arrange. Les affaires du Pingouin et de Black Mask n'ont jamais été aussi florissantes. » Rien de tel qu'un commerce basé sur la souffrance d'autrui... « Il y a autre chose. Un autre Batman dans les rues de Gotham. Un remplaçant, pour donner l'illusion que tu étais encore en vie... Je ne l'ai croisé qu'une ou deux fois, mais je mettrais ma main à couper qu'il s'agit d'un de tes oisillons. Nightwing, sans doute ? » Brave gamins. Le moins que l'on puisse dire, c'est que la Chauve-Souris et ses alliés sont coriaces, et plein de ressources.

Ivy soupire. « Bien, écoute... Comme on dit, l'ennemi de mon ennemi est mon ami. Soyons amis, tu veux ? Je suis lasse de lutter contre toi. Je ne suis pas le monstre que tout le monde croit que je suis, et tu le sais. Tout ce que je veux, c'est qu'on laisse mes plantes tranquilles et qu'on ne touche pas aux enfants. Si je peux t'aider à faire quoi que ce soit pour faire sortir Owlman et ses acolytes de Gotham, je le ferai. Je vais voir si je peux en convaincre d'autres comme moi de faire de même. Après tout, nous ne sommes pas les seuls à détester qu'on vienne mettre le nez dans nos affaires. » Harley, Nygma, et peut-être Crane, elle pense pouvoir parvenir à les convaincre. Concernant les deux hommes, elle sait comment se montrer persuasive. Elle fera de son mieux, peu désireuse de voir l'influence du Syndicat du Crime causer des dégâts irréparables en ville. Et puis, à présent qu'elle s'est échappée, nul doute qu'Owlman voudra sa peau à présent. Faire alliance avec Batman, c'est aussi une question de survie. « Deal ? » Elle lui tend la main. C'est vraiment une drôle de journée. Mais c'est une journée victorieuse, non ? Ils ont réussi à échapper au Syndicat, elle est sauvée, et Batman va pouvoir reprendre les armes pour retourner à l'assaut. Cette journée, c'est un regain d'espoir, pour elle, pour lui, pour l'humanité.

Ivy le taquine, le titille. Elle croit avoir trouvé son secret, son plus grand secret. Il lui oppose un regard sombre, noir presque, et un air revêche. Ce type de jeu ne l’intéresse pas, et ils ont plus pressés à faire. Il espère qu’elle oubliera sa folle idée ou qu’elle la gardera pour elle. C’est le genre de détail qu’il ne voudrait pas voir tomber dans certaines oreilles, comme celle de Harley par exemple. Il n’ignore rien de l’amitié entre les deux femmes, qu’il encourage parce qu’elle éloigne Harley du Joker mais qui parfois l’inquiète. Surtout quand Cat se joint à elles. Elles forment alors un trio de femmes fatales dans le sens littéral du terme. Longtemps, Batgirl les a tenu à distance, mais Barbara est clouée dans un fauteuil roulant… Et il est hors de question de laisser Damian s’en charger. Il préférait l’enfer plutôt que voir son fils et sa maîtresse papoter tranquillement ou de manière agitée (ça serait forcément houleux pensait-il).

Parfois il oubliait la scientifique en elle. Comme lui, elle n’avait pas passé ce temps en cellule à se prélasser. Il paru soucieux quand elle lui annonça ses déductions. Elle avait sans nul doute raison. Ils allaient forcément exploiter ses capacités. Ils n’avaient pu obtenir d’elle ses poisons alors ils les prendraient directement dans son sang. Il secoua la tête, avec ça pas besoin du poison du Joker ou de l’épouvantail. Le sang de Ivy pouvait vous occire en silence, dans le calme, et la discrétion. Et ses phéromones pouvaient leur donner du pouvoir sur les gens. Batman possédait un antidote mais avait-il le temps d’en faire une production industrielle… lui non, mais Lucius sans doute ! « J’espère que nous n’aurons pas besoin de réutiliser ce fusil, mais si tu en as besoin, je reproduirais cette opération. » lui assura-t-il en songeant au vaccin qu’il allait devoir produire en masse, et vite !

« J’ai déjà de quoi me protéger, Ivy, j’ai dû fabriquer un antidote dans l’urgence. Je sais pas s’il supportera une production industrielle de masse, mais s’ils utilisent tes facultés pour créer un gaz ou un poison… Tu pourrais peut-être m’aider à créer un vaccin ? Lucius pourra les produire en quantité industrielle et Leslie m’aider à les diffuser. » Il réfléchissait à présent à voix haute. Mais il n’avait pas le temps de chercher à cacher à Ivy ses alliés. Elle les connaissait désormais tous ou presque. Quand elle lui avoua que c’était elle qui fleurissait la tombe de Jason, et qu’elle avait coupé ses liens avec le petit club des vilains de Gotham il eut un sourire reconnaissant. « Merci pour les fleurs. »

Ivy était intelligente, elle avait déjà compris. En cas d’absence, Dick reprenait le costume. C’était le code implicite qu’ils avaient passés. Batman avait des multiples plans de secours. La Bat-family pouvait aisément se passer de lui, du moins, sur le plan technique. Car sur le plan moral, c’était une toute autre histoire. Damian venait tout juste de retrouver son père et il avait failli le perdre, Jason venait revenir d’entre les morts, il avait conscience des conséquences de sa disparition. Il pouvait presque entendre le sermon de Alfred. Et elle lui proposait une alliance. Il se demanda si elle perdura après la chute du syndicat. Il l’espérait.

« Deal. » fit-il en lui serrant la main sans même hésiter, quelques années auparavant, il aurait flairé le piège. Mais il savait que Ivy avait changée. Elle n’avait sans doute pas eu le choix. « Rappelle leur que dans le monde d’où vient le syndicat, nos vilains sont des gentils, des gentils qu’ils ont exterminés, torturés. Ca devrait les aider, ou alors dis leur juste qu’ils n’auront peut-être jamais la chance d’avoir la JLA mais ils peuvent avoir nos doubles factices qui pensent pouvoir s’emparer de ce monde, de Gotham comme si elle leur appartenait. » Puis il sourit à la jeune femme. « J’aime cette nouvelle Ivy. » fit-il en lui adressant un clin d’œil bienveillant et encourageant.

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L'ennemi de mon ennemi est mon ami. Mais entre Batman et elle, ça a toujours été un peu plus compliqué que cela, n'est-ce pas ? Elle n'a jamais eu réellement envie d'empoisonner la Chauve-Souris, elle a toujours vu qu'à sa façon, il essayait de l'aider, quand bien même elle estimait ne pas avoir besoin d'être sauvée, parfaitement épanouie dans sa condition d'hybride mi-femme mi-plante. Cependant, elle ne se souvient pas avoir un jour éprouvé une quelconque haine viscérale à son encontre, aussi ennuyeux qu'elle puisse parfois le trouver. Et après tout, un homme qui cherche à mettre le Joker à l'ombre pour de bon ne peut pas être mauvais, n'est-ce pas ? Naturellement, elle juge ses méthodes parfois un peu trop douces, mais un autre que lui l'aurait certainement laissée mourir, alors elle ne peut s'en plaindre. Pour Batman, il semblerait que toutes les vies soient importantes... « Avec un peu de chance, nous serons débarrassés du Syndicat avant d'avoir besoin de réutiliser ce fusil, mais on ne sait jamais... » Autant dire qu'elle a hâte de voir Gotham être débarrassée d'Owlman et ses complices. Le Chevalier Noir va avoir du pain sur la planche, la ville a sombré dans le chaos après sa disparition, et cela même alors que ses petits protégés ont fait de leur mieux pour contenir la situation. Il faut bien l'avouer, Owlman est un ennemi redoutable, aussi avide de pouvoir qu'il est possible pour un homme de l'être, et complètement sociopathe en plus de cela. Même Black Mask a courbé l'échine face à lui, lui qui est pourtant le premier à vouloir s'émanciper du reste de la pègre de Gotham, pour mieux en prendre le contrôle. Mais il y a toujours un plus gros poisson... Et c'est bien ce qui inquiète Ivy. Après Owlman, qui leur tombera dessus ? Le pire ne cesse d'empirer, et il faut bien avouer que cela commence à devenir lassant. Les habitants de Gotham ne sont plus terrifiés, ils sont simplement devenus blasés. Plus personne ne s'étonne de voir Nightwing passer à travers la baie vitrée du salon, plus personne ne s'inquiète de voir Red Hood passer avec une arme dans la main droite et un bouquet de roses dans la main gauche. Et quand les gens voient Batman atterrir sur le capot de leur voiture et le ruiner, ils se contentent d'appeler leur assurance pour demander si elle couvre ce genre d'accidents. Elle a même entendu dire qu'un petit assureur d'East End a  fait fortune en proposant un forfait "Bat-related accidents" avec options super-vilains, du genre : "The Joker blew some shit up".

« Je t'aiderais à créer un antidote, oui. Je peux même m'en charger complètement. Je sais que l'on a tendance à l'oublier, mais j'étais scientifique avant de devenir Poison Ivy... Il me faudra avoir accès au matériel nécessaire pour créer le vaccin, et je laisserai ensuite à tes amis le soin de le produire et le diffuser. Le niveau de toxicité de mon sang lorsqu'il l'ont prélevé était extrêmement élevé... J'ai peur qu'ils ne sachent pas comment le manipuler, et tuent des milliers de gens en voulant uniquement les rendre plus dociles, ou simplement accrocs à une nouvelle drogue. » Elle hausse les épaules en soupirant. Elle n'imaginait pas redorer ainsi son blason, en se battant publiquement contre le Syndicat du Crime... Mais Gotham, c'est aussi sa ville, et elle n'est pas prête à voir un tyran qui n'est même pas né sur cette planète s'en emparer. Certes, elle ne pensait pas faire alliance avec Batman un jour, mais comme on dit, la vie est pleine de surprises... Des bonnes, des mauvaises, et des improbables. Sa vie est une suite d'improbables, et cela ne changera pas, sauf... Eh bien, un autre improbable. Mais en attendant, son deal avec la Chauve-Souris est passé, et elle a bien l'intention de le faire perdurer aussi longtemps que possible, même après qu'ils en aient fini avec leurs ennemis du moment.

« Tu sais, je pense que la plupart des rogues de Gotham ne sont pas capables de comprendre ce concept de réalité alternative où les rôles sont inversés. » Ivy hausse les épaules. Et puis, le monde du Syndicat a disparu, alors pourquoi se soucieraient-ils du sort hypothétique de leurs doubles ? « Mais le message sera passé. Je suis sûre que la perspective de cogner sur ton sosie leur fera faire des merveilles. » L'Empoisonneuse ricane en secouant doucement la tête. Le clin d’œil que lui adresse Batman lui arrache un éclat de rire. « Attention, cette nouvelle Ivy reste un peu caractérielle. » Cette alliance entre eux lui donne l'impression qu'on lui a ôté un poids des épaules. Elle n'aura plus à se méfier de lui, du moins pendant un temps, et ne pas avoir Batman sur le dos lui donne un réel avantage sur les autres criminels. Bien sûr, pour que cette nouvelle "amitié" perdure, elle va devoir lui donner des raisons de lui faire confiance. Ce qu'elle essaie de faire depuis l'attaque de Darkseid, mais il faut bien avouer qu'il y a eu quelques débordements... « Il faut que j'y aille. Il y a tout un tas de plantes et d'enfants qui m'attendent. Si j'entends quelque chose d'intéressant, je te transmettrai l'information. » Elle a hâte de pouvoir se reconnecter au Green, hâte de retrouver l'environnement avec lequel elle est familière. « Fais attention à toi... Bruce. » Elle lui adresse un clin d'œil à son tour, son humeur joviale retrouvée. Puis elle disparaît dans les méandres sous-terrains de Gotham, laissant derrière elle un parterre de fleurs colorées. Des fleurs plutôt que des épines, en signe de bonne foi.