Girls just wanna kick some ass || Dinah

girls just wanna kick some ass

Le barman lui lança un drôle de regard en déposant le troisième martini sur le comptoir devant elle, vu qu’elle n’avait même pas encore eu le temps de boire les deux premiers. Elle lui renvoya un regard amusé, haussant les sourcils, ce à quoi il la gratifia d’un hochement de tête neutre et absolument pas ouvert à la conversation, de sorte que toutes velléités de flirt qu’elle entretenait depuis une heure qu’elle était dans ce bar branché du centre-ville de Star City s’envolèrent en fumée. Pourtant, c’était bien pour cela qu’elle s’était assise au comptoir – enfin, pour ça et parce qu’elle était toute seule. Mais bon, elle savait bien qu’elle s’attaquait à un plan drague difficile. Les barmans et barmaids du monde entier savaient bien que fréquenter des clients était bien la dernière chose à faire s’ils tenaient à leur job, ou à tout le moins à leur pourboire. C’était comme la règle sacro-sainte des dealers qui n’étaient pas censés toucher à leur came. Zee pivota sur son tabouret de bar, renversant la tête en arrière en soupirant. Comme à chaque fois qu’elle donnait un spectacle dans une ville quelque part, elle n’avait pas pu rentrer directement à l’hôtel une fois le rideau tombé. Trop d’adrénaline dans les veines. Elle avait commencé par boire un coup avec son équipe, mais tout le monde était rentré se reposer ou était reparti à la salle de spectacle pour démonter la scène, et elle s’était retrouvée toute seule. Elle avait jeté son dévolu sur ce bar downtown qui était totalement ce qu’elle cherchait, clean, neutre, sans âme. Et si elle avait eu une conversation agréable avec le barman, ça n’était pas allé plus loin, et le fait que trois inconnus en une heure lui aient payé un martini ne l’avait pas aidée non plus. Elle tourna la tête sur la droite, où un type en bout de comptoir lui lança un signe de tête, attendant visiblement de sa part des remerciements pour le verre qu’il venait de lui payer alors qu’elle ne lui avait rien demandé. Elle répondit par un petit sourire factice, le genre qui sauverait les apparences pour lui comme pour elle, s’il savait se contenter de ça.

Bon sang, ce qu’elle pouvait s’ennuyer ! Elle n’en était pas à espérer une fin du monde ou l’apparition soudaine et malvenue d’une Mme Xanadu, les manches pleines de terribles prophétie, mais presque. « Mademoiselle… » Elle regarda sur sa droite l’inconnu qui venait de s’accouder au bar à côté d’elle, l’air d’attendre quelque chose. C’était le premier type qui lui avait payé un martini. Ou le deuxième. Elle ne savait plus. « Monsieur… » Elle attendit qu’il enchaîne, mais il se contentait de la regarder comme s’il attendait quelque chose. Pas trop moche. Pas trop mal. Complètement marié. Le genre à la suivre n’importe où et à partir avant elle le lendemain matin, parce qu’il avait l’habitude et connaissait les codes. Ce serait facile. Ce serait comme si ce n’était pas son histoire à elle, mais celle de ce type, et elle, elle ne serait qu’un personnage secondaire sans visage ni nom, vite oubliée, ce qui était exactement ce dont elle avait besoin. « Hey ! » Le barman était revenu, et déposait un quatrième martini à côté des trois autres en secouant la tête, comme si c’était sa faute à elle. Le type en désigna un autre assis à une table et qui la salua d’un geste. Dieux et déesses. C’était le bar de la perdition. Le bar des morts de faim. Elle aurait mieux fait de lire les critiques Yelp avant de venir. Le type se leva pour la rejoindre et le premier se racla la gorge. Celui au bout du comptoir s’agita d'un coup, l'air inquiet. « Vous savez quoi ? Vous pourriez tous rentrer ensemble et faire de nouvelles expériences, pendant que je reste ici à boire tout cet alcool. C’est ça ou un plan à cinq. Non ? »

Deux minutes plus tard, elle était de nouveau seule et esseulée. Pas un seul de ces messieurs n’était partageur, apparemment. Le barman revint la voir et elle lui offrit un de ses martinis, avec un peu d’espoir dans le regard, mais il but le verre et la remercia sagement sans rien lui donner d’autre, même pas un sourire sincère. Pfff, elle n’était pas mieux que ces mecs. Et après tout qu’est-ce que ça pouvait bien faire ? Ils étaient humains, tous. Enfin, sauf ce foutu barman qui persistait à lui résister, bordel ! Elle se retourna de nouveau, accoudée au comptoir, face à l’entrée du bar. Il n’y avait donc personne ici, personne dans cette ville qui pourrait venir la sauver et lui donner ce dont elle avait besoin ? Elle ne demandait pas grand-chose, pourtant, elle n’était pas si difficile que ça à satisfaire. Elle tourna sur son tabouret comme une gamine sur la chaise à roulettes de son père. Le monde sans magie était triste, vraiment triste. Elle se souvenait d’un autre bar, d’une autre ville, d’un autre temps, où un puissant magicien lui avait montré comment on pouvait se servir de la magie pour pimenter une soirée, aux dépens d’inconnus – d’innocents… Elle ricana toute seule. Heureusement qu’elle était sage. Heureusement qu’elle avait grandi. Ces types-là ne savaient pas à quoi ils échappaient. Elle finit par gober un de ses martinis et laissa échapper un gros soupir. Elle n’aimait même pas les martinis tant que ça, en plus. Ce n’était pas sa boisson. Personne ici ne savait ce qu’était sa boisson.

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr

girls just wanna kick some ass

Elle avait déjà une idée assez précise de comment cette soirée allait se terminer, maintenant. Elle allait rentrer à son hôtel cinq étoiles, monter dans sa suite au dernier étage, commander tout ce que la carte du restaurant de l’hôtel avait de sucré au room-service et tout manger vautrée devant la saison 2 de Doom Patrol qu’elle ne regarderait que d’un œil, tout en swipant à gauche comme une maniaque sur Tinder, parce que bien sûr, elle passait son temps libre à essayer de mettre le grappin sur un homme idéal surréaliste et inexistant dont elle n’avait même pas envie en vérité. Mais mieux valait ne pas trop s’approcher de la vérité. Elle n’était parfois pas très plaisante à regarder en face. Elle regardait tristement ses martinis, créant de petites vagues à leur surface du bout du doigt, quand un manhattan apparut devant elle. Elle se redressa, son visage s’éclaira, et avant qu’elle ait pu se retourner pour chercher du regard qui était son bienfaiteur, elle sentit une présence dans son dos, et une voix chaude et familière à son oreille. Elle pivota sur son tabouret pour se trouver face à Dinah, vêtue d’une spectaculaire robe rouge et d’un blouson en cuir beaucoup plus familier sur sa personne que le reste. Le tout renvoyait une impression tout à fait légitime, et Zee sourit d’une oreille à l’autre. Elle s’empara d’un des martinis et le tendit à son amie pour pouvoir trinquer avec elle. « Il n’y a clairement que toi qui me comprennes, dans cette ville. C’était tout ce dont j’avais besoin. » Et elle plongea ses lèvres dans le nectar alcoolisé, savourant la sensation à mesure que le cocktail la réchauffait de l’intérieur.

Depuis combien de temps n’avait-elle pas vu Dinah ? Elle ne savait même plus. Toutes les deux avaient des vies de dingue, littéralement. Zee savait qu’entre son travail au SCPD et son rôle à la Justice League, sans parler des affaires personnelles, Dinah ne devait pas avoir le temps de se poser. Quelques fois, en ce genre d’occasions, quand elles se croisaient toutes les deux quelque part, elles s’accordaient une soirée et une nuit entre filles et rattrapaient le temps perdu. Elles avaient beaucoup de points communs, beaucoup de choses à se raconter en général, et n’hésitaient jamais à se donner un coup de main le moment venu. Apparemment, le moment était venu. Zee observa son amie de la tête aux pieds et hocha la tête avec entrain. « On dirait que tu as de grands projets. Tu quittes un dîner avec le maire, ou tu t’y rends ? » Peu importait en vérité. Seules comptaient les paroles de Dinah, qui lui promettait déjà qu’elle allait l’emmener « ailleurs ». Zee se fichait bien de où était cet ailleurs, elle savait simplement qu’avec Dinah, la nuit, dans Star City, ce ne pouvait être qu’une bonne nouvelle, la promesse de s’amuser ou, à défaut, et c’était peut-être encore mieux, de se défouler. Elle termina son manhattan en deux gorgées et sauta de son tabouret.

D’une formule brève prononcée à l’envers, et sans se cacher aucunement – elle était une magicienne, après tout, non ? bien connue dans le pays, qui venait de faire un spectacle dans Star City –, elle transforma ses vêtements en une robe bustier courte et noire, des bas en résille et des bottines en cuir à talons aiguilles. Elle écarta les bras comme Cendrillon tout juste rhabillée par sa bonne fée. « Est-ce que ceci est à votre goût, mademoiselle ? Est-ce que cela convient à vos plans ? Où est-ce qu’on va ? » Une soirée organisée par le grand, le riche Oliver Queen, peut-être ? Une réception chez un ambassadeur ? L’anniversaire d’un baron du crime international réfugié en centre-ville ? Tout était possible avec Dinah, après tout.

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr

girls just wanna kick some ass

Elle trouvait ça drôle, d’offrir ses offrandes à Dinah. Elle voyait bien que les types qui lui avaient payé ces verres boudaient un peu, mais bien sûr, pour eux, Zee, ou Dinah, ou n’importe quelle femme à leur goût, ne changeait rien. Aucune différence, et probablement que dans leur tête, à un moment, ils songèrent que puisque la gothique ne voulait pas d’eux, alors la blonde bien habillée qui buvait présentement des martinis qu’eux avaient payés serait peut-être plus conciliante. Puisqu’ils avaient payé. Et que ce genre de geste valait bien des remerciements – et plus que la petite tape sur la tête maternaliste qu’ils méritaient. Zee se moquait intérieurement, même si elle ne leur voulait pas de mal, en vérité. Seulement cette reconnaissance perpétuelle que les hommes attendaient de la part des femmes la fatiguait, des fois. Et de toute façon, Dinah mit fin à leurs films d’un baiser au coin de ses lèvres – ou plutôt, elle lança un autre genre de film dans leur tête. C’était leur donner l’excuse rêvée pour le râteau qu’ils s’étaient pris ce soir, chacun à leur tour, mais de toute façon, la magicienne ne prêtait plus attention à eux. Son amie était là, elle avait des plans grandioses, et toutes deux étaient désormais sapées comme elles le méritaient. Elle gratifia Dinah d’un sourire radieux, et d’un appel à l’aide dans le retard, du genre « je t’en prie, mets des paillettes dans ma vie ». Vraiment, elle s’ennuyait à mourir, ici. Heureusement, son amie prononça une phrase qui annonçait une nuit mouvementée. Botter des culs. La magicienne n’avait rien contre. Cela dépendait de quel cul, de quelles circonstances, aussi. Enfin, elles étaient du côté du bien, tout ça, blabla, et malheureusement, le simple fait qu’un type était énervant ou stupide ne méritait pas – encore – de se faire massacrer par toute la Justice League.

En même temps, elle avait aussi dit « sale enfoiré ». Alors, il y avait probablement une vraie raison à tout ça. Elle connaissait Dinah. Elle ne se laissait pas marcher sur les pieds, elle avait le coup de poing facile et n’avait que très, très peu de patience pour les crétins et encore moins les criminels. Malgré tout, elle n’aurait pas franchi certaines limites. Là-dessus aussi, toutes les deux se retrouvaient. En plus d’entretenir des sentiments contreproductifs envers des blondinets mal rasés, elles avaient un réel sens de la justice. Les moyens étaient différents, et parfois les chemins empruntés également. Zee avait décidé de retourner dans l’ombre quand Dinah brillait à la Justice League, entre autres. N’empêche que la finalité était la même : elles étaient justes. Et Zatanna faisait totalement confiance à son amie. Ce soir, elles flirteraient peut-être avec certaines frontières, mais au final, elles n’iraient pas trop loin. Et si parfois c’était tentant de jeter ces beaux principes à la poubelle, l’une rappelait toujours à l’autre ce qu’il en était au final. « Quelle chance j’aie, tu m’offres un enfoiré ! » Zee monta sur la moto de Dinah les yeux fermés, d’autant plus que là-dessus aussi elle avait confiance en elle. Elle-même avait une moto également, même si à l’heure actuelle, elle passait plus de temps dans le garage de Dutch, mais c’était un point commun de plus que les deux femmes partageaient, de sorte que pour la magicienne, ce petit trajet fut un délice. Cela faisait longtemps qu’elle ne s’était pas sentie aussi libre, ne serait-ce que parce qu’elle savait que si là, tout de suite, au sortir d’un virage, elle annonçait à son amie que finalement, elle voulait rentrer, ou aller boire un verre, ou au cinéma, ou planter des tomates dans un parc, Dinah ne lui en voudrait pas le moins du monde. C’était ça, la vraie liberté : ne pas avoir à toujours tenter d’être ce que les autres, et souvent les hommes, attendaient de vous.

Mais ce soir, pas de tomates ou de ciné, elle était décidée à botter un cul d’enfoiré. Elles se garèrent devant un nightclub et Zee descendit de la moto et rendit son casque à Dinah avant d’observer la façade. Pas dégueu du tout. Elle répondit à la question de son amie par un regard entendu. « Est-ce que je t’ai déjà fait défaut quand il s’agit de danser ? Je crois que de côté-là, notre réputation n’est plus à faire, enfin à part ici, je ne suis jamais venue. On n’a plus qu’à marquer les esprits. » Elle s’avança vers l’entrée, suivie par Dinah. Elles passèrent devant tout le monde pour se planter devant le videur qui s’occupait des entrées. Honnêtement, Zee n’avait pas du tout envie d’influencer son esprit pour qu’il les laisse entrer, et elle avait d’autres moyens pour ça, mais le videur hocha la tête sans un mot et s’écarta pour les laisser passer. Ah ! Elles avaient encore du game, les trentenaires ! Elle se saisit de la main de Dinah et la tira dans le club. La musique était assourdissante, mais pas désagréable, du genre à prendre toute la place dans tout votre être, à faire battre votre cœur, rythmer votre respiration, faire frémir votre peau, jusqu’à ce que vous n’ayez plus envie que d’une chose : danser, danser comme une folle, les yeux fermés, coupée du monde dans une bulle cacophonique et complètement imperméable aux soucis du quotidien. Il y avait un bar, quelques tables, mais la plupart des clients étaient sur la piste de danse. Un jeu de vapeur léger donnait une ambiance atmosphérique à l’endroit, loin du kitsch d’une soirée DJ bas de gamme. Elle leva les yeux vers l’étage ou quelques VIP buvaient et discutaient et accrocha quelques regards : certains d’entre eux observaient les clients, la force de l’habitude, probablement.

Elle descendit sur la piste de danse, entraînant son amie. Franchement, en ce qui la concernait, cette soirée était déjà une réussite, et si elles se contentaient de gigoter au milieu de la foule toute la nuit, ça lui suffirait. Mais elle savait que tout en dansant, Dinah scannait les lieux et les gens. Qu’elle repérait probablement les portes de secours, les employés du nightclub susceptibles d’être des videurs et, bien sûr, sa fameuse cible. Zee aussi observait, mais franchement, quelle tête ça avait, un enfoiré ? Alors en attendant que son amie ait trouvé ce qu’elle cherchait, la magicienne dansait comme une cinglée, exactement comme elle l’avait prévu.

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr

girls just wanna kick some ass

Elle dansait et dansait et dansait aux côtés de Dinah, complètement abandonnée, sachant très bien que son amie s’occupait du repérage, et lui expliquerait tout le moment venu. Elle était tout pour travailler de jour comme de nuit, mais il fallait aussi savoir s’amuser. Pour le moment, elle ne prêtait pas vraiment attention à ce qui l’entourait, une attitude qu’elle n’aurait certainement pas adoptée si elle avait été seule, évidemment. Puis elle sentit son amie se rapprocher d’elle, et se pencha vers elle pour l’écouter. Son regard allait et venait sur l’endroit qu’elle lui indiquait et elle repéra le type en question, une grimace de dégoût sur le visage. Forcément. Combien y en avait-il, des comme lui, combien qui depuis des années traumatisaient des femmes et traversaient la vie comme s’ils n’avaient jamais à répondre de leurs actes ? En l’occurrence, celui-ci n’avait clairement jamais eu à répondre de ses actes. C’était pour cela que Dinah était là, et Zee comprit qu’il s’agissait là d’une mission officieuse. Voilà où était la limite. Voilà où était le genre de frontière souple avec laquelle on pouvait jouer, sans se brûler. Zatanna n’y voyait pas d’inconvénient. Elle sourit, tendit la main et effleura une mèche de cheveux de Dinah. « Alors c’est pour lui, ce nouveau look… Je comprends mieux. » Elle faisait confiance à son amie. Si celle-ci avait mené son enquête, alors c’était solide. Bien sûr, quelque part, c’était mal. Le concept de justice individuelle était un terrain dangereux, miné, qui pouvait déboucher sur les horreurs les plus absolues. Mais Zee n’était pas flic. Et elle n’était pas un ange. Et elle ne comptait pas blesser ou tuer qui que ce soit – si ce n’était massacrer un ego. Rien d’illégal à ça, non ?

« Je te suis, évidemment. J’ai besoin d’un relooking, moi aussi ? » Elle lui adressa un sourire espiègle alors qu’un reflet roux traversait sa chevelure brièvement avant de disparaître. Elle détaillait un peu plus les lieux, maintenant qu’elle en savait plus. Elle voyait les quelques types qui n’étaient pas là pour danser ou boire, ni même s’amuser. Qui ne souriaient pas, bougeaient à peine et scannaient la foule sans se cacher. Si Campbell était bien l’homme que Dinah décrivait, et Zee n’en doutait pas une seconde, il ne serait pas difficile à approcher. Ce serait plus compliqué en revanche de l’attirer quelque part, encore que… Les hommes comme lui se pensaient sincèrement intouchables. Ils pensaient sincèrement qu’ils obtiendraient ce qu’ils voulaient, aussi. Il y avait un genre de naïveté chez ces animaux, qui faisait que jamais, ils n’imaginaient une seule seconde qu’une de leurs victimes pouvait un jour se défendre. Campbell avait de toute évidence une petite armée de gros bras avec lui pour assurer ses arrières et pourtant, Zee savait déjà que ce serait du gâteau. Aucun d’eux ne semblait réaliser que c’étaient aussi des femmes qui avaient vaincu Darkseid, le Syndicat du crime et le reste. Leur monde était bien trop étriqué pour cela.

Elle attira son amie jusqu’au bar, un peu plus au calme, et se pencha au-dessus pour attirer l’attention du barman par un geste du bras avant de lever deux doigts sous son nez. Pour se donner de la force ce soir, deux tequilas avec une simple rondelle de citron. En attendant sa commande, elle jeta un coup d’œil vers le carré VIP. « Alors dis-moi, comment est-ce que tu veux la jouer ? » Devaient-elles y aller à deux, comme le duo de meilleures amies un peu délurées et forcément cliché dans l’œil d’un homme comme lui, qu’il se ferait un plaisir d’accueillir dans son petit royaume ? Ou bien devaient-elles se séparer, faire semblant de ne pas se connaître, jouer la carte de la surprise et voir s’il voulait faire un choix, ou s’il ne voulait justement pas en faire ?

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr

girls just wanna kick some ass

Bien sûr que Dinah avait un plan. Bien sûr, les plans ne fonctionnaient jamais comme on s’y attendait et finissaient toujours par sortir des rails. Cela dit, ça n’inquiétait pas trop Zatanna. Un pauvre type et ses gorilles, c’était littéralement de la petite bière pour Dinah toute seule, et encore moins que rien pour elles deux ensemble. Zee goba une tequila, puis une deuxième, avant de lever son verre bien haut avec un soupir de contentement. Elle reposa le shot sur le comptoir en clamant une formule, et ses cheveux devinrent d’un roux vif et clair, différent de celui de Dinah, juste au cas où monsieur ferait le difficile. Ils étaient désormais raides et lui arrivaient au menton en carré plongeant, ce qui changeait pas mal sa physionomie, mais cela l’arrangeait, elle était un personnage public après tout, et il n’était pas rare qu’elle soit reconnue ce qui n’aurait pas arrangé leurs affaires, en l’occurrence. Une mission sous couverture ! Façon police de Star City ! Comme c’était excitant ! Elle était prête à suivre Dinah partout. « Des photos, okay. Mais je suis sûre qu’on doit pouvoir le traumatiser si fort qu’on n’aurait même pas besoin de ça ! » Elle fit signe à son amie qu’elle était prête et repartit vers la piste de danse en se déhanchant sur la musique. Elle dansait à nouveau, elle ne pouvait pas s’en empêcher, mais elle avançait également vers le carré VIP, fendant la foule. Une fois près de l’accès à l’étage, gardé par un cordon mais aussi un vigile, elle se tourna vers Dinah et lui saisit les mains. « Allez, donnons-lui de quoi rêver… » Et elle reprit sa danse faussement ingénue, toujours plus près de Dinah, non sans éclater de rire au bout de quelques secondes, parce que vraiment, ce qu’il ne fallait pas faire pour attirer l’attention d’un homme… C’était bien peu, n’est-ce pas ?

« Je me serais bien fait pousser la moustache pour toi, mais je ne crois pas que ce soit le genre de notre pote Campbell. » Et puis, personne ne pouvait remplacer Ollie dans le cœur de sa belle. Il ne fallut que quelques minutes pour que le vigile s’approche d’elles, poussant les autres danseurs sans ménagement. « Mesdemoiselles… M. Campbell vous invite à le rejoindre à l’étage. » Zee leva les yeux vers ledit Campbell, qui ne les quittait pas des yeux et leva son verre à leur intention. Pour lui, il était évident qu’elles allaient accepter. Qu’elles prenaient ça comme un honneur de se faire ainsi inviter. Qu’elles savaient forcément qui il était – alors même que sans Dinah, Zee n’en aurait aucune idée. C’était pitoyable et en même temps incroyable, car il était réellement sincère dans ses croyances. Et si elles n’avaient pas été en mission, elles auraient refusé, bien sûr, et alors que ce serait-il passé ? L’ego brutalisé aurait-il accouché de violence ? Eh bien, elles le ne sauraient jamais, puisque bien sûr, elles acceptèrent. Zee afficha son air le plus ingénu et le plus fasciné, quand bien même elle trouvait ça ringard, quand bien même elle était sûre d’être plus riche que Campbell, d’avoir de meilleures bouteilles d’alcool dans sa cave et des fringues de meilleures qualités, si elle devait tomber dans la comparaison idiote.

Elles arrivèrent à l’étage, où les attendait le pacha : assis à une table, sur un canapé en demi-cercle. D’un geste, il fit s’écarter deux de ses gorilles qui l’encadraient, de sorte que Dinah et elle n’avaient plus qu’à s’asseoir de chaque côté de Campbell, mais avec un garde du corps de l’autre côté, charmante configuration pas du tout oppressante. Elle se tourna vers Dinah avec un haussement de sourcils. « Prenez place à ma table, mes chères. J’ai apprécié de vous observer sur la piste de danse, mais je préfère vous regarder de près. » Zee dut se forcer à ne pas rire. Avait-il conscience d’être insultant, pensait-il sortir là un réel compliment, même hypocrite ? Oh, peu importait. Ce n’était pas parce qu’il était odieux qu’il n’était pas un dangereux poison, alors ce n’était pas le moment de tout gâcher. Elle se glissa à côté de lui, observant d’un œil agacé le gorille se rasseoir ensuite à sa suite, lui coupant toute retraite si seulement elle avait voulu fuir… ou n’avait pas eu d’autres moyens de fuir que ses deux jambes.

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr

girls just wanna kick some ass

Tout cela était tristement banal, en fait. Campbell était loin d’être le premier à se comporter ici, Zee était loin d’être confrontée à une telle situation. Il y avait cependant de nouveaux paramètres. Par le passé, elle avait été jeune, elle avait naïve. Et par le passé, certaines choses étaient censées passer pour normales. Aujourd’hui, Zee n’avait plus dix-sept ans, elle n’avait plus l’âge de se laisser entraîner dans un bar et embobiner par un homme plus âgé, plus charismatique et qui n’avait pas l’habitude qu’on lui dise non comme elle l’avait été. Elle n’était plus une gosse, et en 2020, les hommes qui se comportaient comme Campbell étaient des dinosaures. En fait, qu’il ne se rende pas compte de l’absurdité de sa conduite était presque triste. Oui, presque, s’il n’y avait pas mis autant de violence, autant de moyen. Les gros lourds, aujourd’hui, n’avaient plus la cote. Mais celui-là avait le fric, le pouvoir, des hommes complices pour l’aider, tout un boys’ club pour servir sa cause moyenâgeuse. C’était impardonnable. Mais pour quiconque savait se défendre, c’était risible. Le problème était que toutes les femmes ne savaient pas, ne pouvaient pas, ne voulaient pas se défendre, et les mécanismes complexes qui entraient en jeu dans ces moments-là n’étaient pas à remettre en cause. Le coupable, c’était Campbell, ce serait toujours Campbell. La magicienne pouvait sentir la rage rentrée de son amie et s’étonnait franchement que l’autre vicieux ne le sente pas également, mais comment l’aurait-il pu ? Il ne prêtait pas attention à elle en tant que personne. Il avait vu sa poitrine, ses cheveux, ses fesses, sa robe, peut-être son sourire, et encore, et cela lui suffisait. Il aurait pu la croiser dans un couloir une heure plus tard qu’il ne l’aurait pas reconnue parce que pour lui, elle n’était pas une personne. Aucune de ses proies ne l’était.

Le champagne arriva, et de nouveau, un sourire ironique se dessina sur les lèvres de Zee. Oh non, vraiment ? Pas besoin d’être une magicienne pour connaître ce coup-là, être une femme suffisait. Pas une seule fille n’ignorait la règle d’or : ne pas boire ce qu’un mec lui servait si ça n’avait pas été ouvert ou servi devant ses yeux. Elle trinqua avec Dinah, avec Campbell, même avec ses gorilles. Ouiiii, à votre santé, bande d’abrutis ! C’était bon de savoir comment se terminerait cette soirée – tout le monde ici pensait savoir, mais certains se trompaient. Jouant son rôle, elle se redressa, ses grands yeux bleus écarquillés, quand Dinah demanda à Campbell s’il possédait l’hôtel d’en face, renversant un peu de son verre de champagne dans lequel elle n’avait pas trempé ses lèvres. « Vraiment ? Vous possédez l’hôtel ? L’hôtel entier ? » Une question d’une stupidité renversante, comme s'il allait lui répondre qu'il n'avait acheté que le garage à vélo, mais qui bien sûr flatta l’ego surdimensionné. Il se lança dans la liste des attributs de sa propriété, s’attardant sur les chambres, et surtout la suite royale avec son immense jacuzzi. Zee l’écoutait en hochant la tête, comme si elle n’était pas elle-même dix fois plus riche que lui, en se demandant encore comment il ne se rendait pas compte qu’elles se foutaient de sa gueule. Il fallait vraiment qu’il soit sûr de lui. Si sûr que jamais personne n’avait jamais osé s’en prendre à lui. Cela rendrait la leçon d’autant plus cuisante.

Comme cela commençait à tourner en rond, Zee s’adressa directement à Dinah. « Tu te rends compte, Barbara ? Un jacuzzi ! Olalaaaaa, je crois que je n’en ai jamais essayé de ma vie ! » Elle ne craignait plus d’en faire trop, au vu des réactions de Campbell. Et elle se marrait intérieurement parce que Dinah, elle aussi, d’une certaine façon, avait connu la richesse, et autant dire qu’elle n’en était certainement pas à son premier jacuzzi. Elle se tortilla quelques secondes sur sa banquette dont le cuir lui collait aux cuisses et ajouta : « Tu n’aimerais pas voir ça, toi ? » Plus timorée, les yeux baissés, un coup d’œil à peine perceptible pour Campbell et son sourire paternaliste. Fausse modestie de la fausse plébéienne qui n’aurait jamais rien connu de la vie, alors que la vie avait déjà eu le temps d’être une garce et d’en revenir, avec elle. Aussi, elle avait intérêt à ce que Babs n’entende jamais, jamais parler de cet épisode de leur vie, ou bien elle la tuerait rien que pour avoir emprunter son prénom et l’avoir mis dans la bouche du gros porc.

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr

girls just wanna kick some ass

On ne pouvait pas accuser Dinah de ne pas donner de sa personne. Zee dut faire un effort pour garder son sérieux quand son amie fit le coup du verre renversé à Campbell. Cet homme pensait vraiment avec sa braguette : Dinah et elle étaient bien assez spectaculaires et classes pour ne pas avoir à s’intéresser à lui, rien que ça aurait dû lui mettre la puce à l’oreille. Mais en plus de ça, elles suivaient toutes les deux à la lettre près le Petit manuel de la drague lourde, girls edition, chapitre par chapitre. Elles cochaient toutes les cases une par une que c’en devenait gênant de cliché et la magicienne s’attendait à tout moment à ce que l’homme voit clair dans leur jeu, mais non. Non ! Il semblait trouver ça parfaitement normal. Normal, aussi, le regard oblique qu’il lança au décolleté de Dinah. Zee lorgna aussi brièvement avant d’adresser un haussement de sourcils appréciateur à son amie : magnifique, ma belle. En toute sincérité et sans arrière-pensée. Là-dessus, le type leur fit enfin la proposition qu’elles attendaient, non sans les tripoter un peu au passage, et elle eut l’impression d’avoir la main coincée dans un piège à souris poisseux, ce qui ne l’empêcha pas de répondre à la proposition de Campbell par un regard plein d’étoiles, rolala ouiii, un jacuzzi. Pauvre minable.

Et donc, ils partirent tous en troupeau, Campbell, ses hommes et Dinah et elle. Il leur suffit de traverser la rue pour rentrer dans l’hôtel, certes bourgeois, mais pas non plus le luxueux que Zee avait jamais vu de sa vie, évidemment. Elle s’extasia malgré tout sur un peu tout et n’importe quoi, comme une routine un peu machinale, jusqu’à ce qu’elles se retrouvent seules dans la suite avec leur hôte. Captant le message de Dinah, elle se rapprocha de Campbell et entreprit de lui poser tout un tas de questions sur son costume de toute évidence de marque, lissant sa manche, effleurant sa cravate, attirant ainsi sans cesse son attention. Gucci, fanfaronna le type ; Dolce Gabbana, gros naze, eut envie de rétorquer Zee, mais elle se contint. Elle voyait Dinah revenir vers eux avec des verres quand celle-ci hurla. La magicienne ne vit pas de sniper, ne vit pas de point rouge nulle part, mais peu importait. Elle croyait son amie les yeux fermés, et si elle réagit à la milliseconde, c’est parce qu’elle lui faisait une confiance aveugle. Elle poussa rudement Campbell, mais sachant qu’elle n’arriverait pas à renverser sa masse par terre parce qu’elle se trouvait trop près de lui pour prendre son élan, elle y ajouta un mot lancé à l’envers – « reilcuoB ! » Puis elle entendit un bruit de verre brisé, puis plus rien. Campbell la repoussa avec colère, mais Zee s’en fichait. Elle resta près de lui pour que son bouclier invisible continue de le protéger, tout en regardant la fenêtre. Elle n’avait pas explosé comme dans les films. Mais un trou déchiqueté ornait désormais la vitre.

Elle avisa Dinah, qui s’était écartée en une seconde de la trajectoire. Qu’est-ce que tu en dis ? On continue de jouer le jeu, ou on prend les choses en main ? Il y avait encore une chance que Campbell n’ait pas réalisé que C’était Dinah qui, en repérant le sniper et en criant, lui avait sauvé la vie. Il pouvait encore croire qu’elles étaient deux simples idiotes. Son amie ne pouvait pas lui répondre de la même façon que Zee lui avait « parlé », par télépathie, mais Zee se contenterait très bien d’un signe de tête ou d’un haussement de sourcils. Pas question de laisser l’autre abruti mourir évidemment, et alors qu’il appelait ses gardes à l’aide, ceux-ci se mirent à tambouriner à la porte que leur patron avait verrouillée évidemment. Elles avaient quelques secondes pour prendre une décision – larguer l’idiot ici et partir toutes les deux à la poursuite du tireur, ou rester avec l’idiot pour le protéger. Si tu as repéré l’endroit d’où il a tiré, je peux nous y emmener de suite. Elle n’avait qu’un mot à dire.

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr

girls just wanna kick some ass

L’ambiance n’était plus du tout à la fête, donc. Campbell lui râlait dessus, mais Zee ne prêtait pas attention à ses doléances. Pendant quelques longues secondes, qui se transformèrent en minutes, elle attendit simplement, bouclier levé, juste au cas où le sniper tentait à nouveau sa chance. Elle en doutait, s’il s’agissait d’un professionnel. Il avait raté son coup, il devait s’enfuir. Et encore, « raté », pas tellement. Sans la magie, il aurait atteint sa cible, et il devait parfaitement le savoir. Pas que sa balle avait été stoppée par la magie, mais qu’elle aurait dû atteindre son but. Et comme elle ne l’avait pas fait, il devait se demander ce que c’était que ce bordel. S’il avait deux doigts de jugeote, il n’allait pas rester là à se poser des questions, il allait battre en retraite. C’était probablement déjà fait, et cela laissait quelques secondes à Dinah et à elle pour décider de ce qu’elles voulaient faire. Quelques secondes, c’était largement suffisant, elle le lut sur le visage de Dinah. Zatanna repoussa Campbell par terre, laissant tomber son bouclier, et l’abruti se précipita vers la porte pour la déverrouiller, laissant toute sa garde royale s’engouffrer dans la suite, armes à la main, prêts à défourailler. Peu importait ce que Campbell avait compris de ce qui venait de se passer ou pas, peu importait que les gardes du corps veuillent leur trouer la peau, juste au cas c’étaient elles qui étaient à l’origine de cette tentative d’assassinat. Parce qu’elles n’étaient déjà plus là.

Pendant que l’idiot se précipitait sur la porte, Zee rejoignit Dinah, passa son bras sous le sien en la gratifiant d’un sourire et l’entraîna à travers la fenêtre. Au moment où leurs pas allaient les mener dans le vide, elle les téléporta dans l’immeuble d’en face, dans l’appartement d’où le sniper avait tiré. L’appartement avait été habité : ses propriétaires gisaient désormais, assassinés. La magicienne émit un petit bruit méprisant. Il y avait trop de monstres dans ce monde. Elles n’avaient pas le temps de s’occuper du cas d’un pervers misogyne qu’un autre connard s’en prenait à des gens incapables de se défendre. Car comment se défendre contre un assassin quand on était une personne tout à fait normale ? On n’attendait pas d’une vie qu’elle vous apprenne à vous battre, voire vous dote de pouvoirs magiques. Dinah et Zee avaient la chance de savoir se défendre, mais la plupart des gens voulaient juste vivre leur existence en paix – un droit fondamental. Quand Dinah lui demanda si elle pouvait traquer le tueur, Zee hocha la tête sans un mot. Elle s’agenouilla à côté de la flaque de sang dans laquelle le couple baignait. L’autre aurait pu faire le travail proprement. Précipitation, ou volonté de commettre un tel massacre ? Toujours est-il qu’il était impossible que cette ordure ne porte pas sur lui au moins une micro-gouttelette du sang de ses victimes. D’un trait de magie, elle se coupa légèrement la paume de la main, puis plaça cette dernière à quelques centimètres du sang des victimes. « aL eigam ud gnas… » Le liquide pourpre frémit sous ses doigts, puis quelques gouttes s’arrachèrent du parquet tandis que quelques gouttes s’arrachaient dans le même temps de la paume de sa main. Elles se mêlèrent, formant une seule petite sphère qui s’étira vers le plafond, le traversa et disparut en y laissant une tache que la police scientifique aurait probablement du mal à expliquer. Zee resta immobile un instant, reliée magiquement à la petite sphère sanglante, puis elle sentit cette dernière s’immobiliser.

« Sur le toit. C’est un humain, mais il doit avoir quelques aptitudes spécifiques, ou du matériel, pour tenter de s’enfuir par les toits. » De nouveau, elle se saisit du bras de son amie, et une seconde plus tard, elles se trouvaient à l’air libre, au sommet de l’hôtel. Il faisait sombre et tout était calme, pourtant elle sentait sa petite sphère, comme un fil qui tirait directement sur son propre sang. Et puis, plus rien. « Oh. Il sait qu’on est après lui. » Et à peine avait-elle dit cela qu’un nouveau coup de feu retentit. Par réflexe, elle leva de nouveau un bouclier, sans savoir d’où venait la menace. « Tu le vois ? » Elle pouvait rester là à servir de cible s’il le fallait, aucune balle ne traverserait son bouclier, du moins tant qu’elles en finissaient vite, car c’était, bizarrement, le genre de magie qui lui demandait d’utiliser le plus d’énergie. Mais elle savait que Dinah, elle, n’avait pas peur de cette situation, et qu’elle serait bien plus mobile et agile qu’elle pour aller se confronter à l’ordure au fusil.

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr

girls just wanna kick some ass

Zee sourit d’une oreille à l’autre en tendant la requête partiellement formulée de son amie. Oui, malgré la situation, elle trouvait ça drôle, et tellement typique d’elle, et même de toutes les deux. Elles étaient là, en robe de soirée et talons aiguilles, complètement dépoitraillées, les cheveux dans les yeux et se collant à leur rouge à lèvres, les retenant d’une main, tenant les pans de leur robe de l’autre, le tout sur un toit froid et humide battu par le vent, et offertes aux tirs d’un ennemi invisible qui se fichait bien de savoir qui elles étaient et qui voulait clairement les trucider avant de tranquillement rentrer chez lui ou d’achever sa mission… Cette seule image était à se tordre de rire, mais en plus, Voilà que Dinah lui demandait de mettre fin à son supplice, et la magicienne pouvait bien comprendre pourquoi, mais c’était tellement fou comme situation qu’elle ne put s’empêcher d’éclater de rire. « nE eunet, ym evol ! » Et sur cette seule formule pas vraiment professionnelle, leurs vêtements changèrent, plus vite qu’un battement de cils. Toutes deux appréciaient les mêmes choses, de sorte qu’elles avaient un peu l’air de faire partie d’une micro Justice League – Female Leather édition, mais peu importait. On avait la classe ou on ne l’avait pas. Zee était désormais vêtue d’un pantalon de cuir moulant, de bottes à bouts ferrés et d’un débardeur en résille qui ne cachait rien de sa brassière noire en dessous, assorti d’une veste en cuir par-dessus. Quant à Dinah, Zee l’avait assez vue en action pour savoir ce qu’elle aimait, et surtout ce dont elle avait besoin en termes d’équipement, puisque c’était surtout cela l’important.

Tout ça n’avait duré que quelques secondes. « La diversion, c’est ma spécialité. Je te couvre, va ! » Elle leva un bras pour maintenir son bouclier et fit quelques pas sur le toit, s’éloignant de Dinah, éloignant aussi l’attention du tireur. Il ne la mitraillait pas, cela dit. Il avait bien comprit que quelque chose n’allait pas, et Zee vit qu’il tentait de viser différents points de son corps – d’abord, la tête, puis une balle s’écrasa au niveau de son cœur. Au bout d’une dizaine de seconde, une autre encore s’aplatit sur son bouclier à hauteur de sa bouche, ce que la magicienne trouva intéressant. Il n’était pas idiot, cet homme-là. Il tentait des choses, il avait bien raison. Ce n’était pas sa faute si c’était inutile. Et s’il n’était qu’un simple humain, dont Dinah allait se débarrasser en quelques secondes. Zee savait se battre au corps à corps, son père s’était assuré qu’elle maîtrise les bases de plusieurs arts martiaux, et combien de fois il l’avait réveillée aux aurores, enfant, pour la forcer à subir des entraînements dont elle ne voulait pas et qu’elle ne comprenait pas. « Papa, j’ai la magie, rien ne sera jamais plus fort que ça ! » Maintenant, elle savait à quel point elle était stupide, alors, et elle comprenait l’expression inquiète qui traversait le visage de son père à cette époque quand elle lui disait cela. Beaucoup de choses surpassaient la magie simplement parce que la magie était aussi puissante fiable et solide que l’esprit de la personne qui la pratiquait, c’était là son plus gros point faible, et Ze avait appris dans la douleur que la magie ne pouvait pas tout régler, ni protéger tout le monde. Mais cette fois, cela fonctionnerait. Elle se promit plus tard d’aller voir Damian pour un entraînement au corps à corps dont elle avait fort besoin. Fut un temps où Bruce avait tenté de la garder au top niveau mais franchement, Zee n’avait pas assez de volonté pour subir les entraînements de ce gros mufle.

Elle sut que Dinah avait touché au but, et se précipita pour la voir tabasser le sniper. Elle abaissa son bouclier et croisa les bras pour l’admirer en action – rapide, efficace, pas de mouvements en trop, pas non plus de coups retenus pour mieux en donner plus, non, pas ce genre de sadisme. De la violence efficace. Elle applaudit sur la fin. « Toi et moi, on sera toujours plus efficace que n’importe quel mec de la Justice League ! » Bon, elle s’avançait peut-être un peu. Mais peut-être pas, en fait. Elle pointa le menton sur le tireur, recroquevillé sur lui-même. C’était Campbell qui était censé apprendre cette leçon ce soir, mais peu importait en fait qu’un autre homme en ait bénéficié : on ne faisait pas ce qu’on voulait dans la vie simplement parce qu’on le pouvait, et on pouvait très bien se faire ramasser la face par des bonnes femmes. « Bon, comment est la police, dans ta ville ? On serait à Gotham, je ne te proposerais pas forcément de les appeler, mais j’imagine que les flics savent un peu travailler, ici ? On a encore le temps d’aller se faire quelques cocktails avant la fermeture des bars ! » La cerise sur le gâteau d’une soirée follement amusante. À moins bien sûr que Dinah ne veuille enseigner une dernière leçon à la pourriture de service qu’elles avaient larguée pour courir après celui-là.

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr

girls just wanna kick some ass

Comme c’était un peu vrai, que leurs villes étaient incomparables, Zee se contenta de lever les mains en guise de défense, un sourire aux lèvres. En toute honnêteté, elle connaissait quelques flics décents à Gotham, mais le travail dans cette ville était juste tout bonnement impossible à abattre, du moins il le serait tant que tous les organismes censés travailler à faire disparaître le crime ne seraient pas eux-mêmes débarrassés de leurs criminels. Le problème de Gotham, c’était que ses dirigeants, au plus haut niveau, étaient des voyous, et que cette mafia ruisselait jusqu’en bas de l’échelle, parce qu’après tout, quand on était un flic en uniforme de vint-cinq ans à qui on demander de risquer sa vie toutes les nuits pour cinq dollars de l’heure, sans prime, sans matériel et pour le compte de politiques pourris, pourquoi est-ce qu’on ne suivrait pas soi-même ce bel exemple et ne deviendrait-on pas pourri à son tour ? Ce n’était pas un hasard si Gotham City avait eu besoin d’un type comme Batman, et si Batman lui-même ne parvenait pas à renverser la tendance. Depuis le temps, le crime était devenu comme un pilier de la ville, au même titre que le commerce, la santé, la culture, le sport… Il était partout, à tous les niveaux, dans tous les commerces, dans toutes les rues, il était devenu un symbiote dont la ville se nourrissait autant que lui parasitait la ville, alors… Alors oui, Zee était sûre que les flics du coin étaient un peu plus décents. C’était comme ça. Cela changerait peut-être un jour, elle n’en savait rien. Cela ne l’empêchait pas d’aimer sa ville et de toujours y retourner.

Tout ce qui importait à la magicienne, là maintenant, c’était que Dinah semblait partante pour se changer les idées. La soirée avait assez bien commencé, mais s’était durcie avec la découverte de ce couple assassiné. Le fait qu’elles aient coffré le tueur mettait un peu de baume au cœur de Zatanna – Cambell ne serait pas puni, mais mieux valait attraper un tueur, et remettre  un autre jour le châtiment du crétin. Elles largueraient le sniper aux autorités, préviendraient ces dernières pour le couple mort dans son salon, et pendant que la famille de celui-ci vivrait la nuit la plus atroce de son existence, elles, elles boiraient et s’amuseraient et brailleraient dans un micro au karaoké. Parce que quand on faisait ce qu’elles faisaient, quand on se confrontait toujours les jours à ces situations désespérantes, on ne pouvait simplement pas se permettre de se complaindre dans le noir, non, il fallait célébrer la vie, et là tout de suite, Zee voulait la célébrer avec des Manhattan et son amie. « Cette fois, j’espère que tu nous trouveras un endroit plus classe que… » Impossible de finir une foutue phrase, dans cette ville !

Zee avisa les gorilles de Campbell qui venaient de s'inviter à la fête et eut un sourire radieux. Finalement, il semblait qu’elles allaient avoir l’occasion de terminer ce qu’elles avaient commencé, d’une certaine façon. Elle lança un regard complice à Dinah. « C’est trop d’honneur, ma chère. » Elle vérifia d’un coup d’œil que le sniper ne pouvait pas s’enfuir, mais avec ce que Dinah lui avait mis, ça ne risquait pas d’arriver. Il semblait qu’elles allaient faire une livraison groupée à la police de Star City, ce soir ! Elle leva les deux mains, droit vers les hommes qui levaient leurs flingues sur elles. « eL euqitsalp tse’c euqitsatanf ! » Bon, pas très écolo, certes. N’empêche, toutes les armes que brandissaient les idiots se transformèrent en pistolets en plastique, certains tirant un petit jet d’eau, d’autres faisant apparaître une fleur, d’autres encore des paillettes, dans le plus pur style magie de scène comme son père la lui avait apprise. Normalement, les gens applaudissaient quand elle faisait ce tour. Bizarrement, là, elle n’eut pas le même succès. « Le public est difficile, ce soir. Je crois qu’ils ont besoin qu’on les réveille un peu. » Ils étaient en nombre, certes, mais ils étaient désarmés, à présent, en tout cas de leurs armes à feu. Mais Zee savait que Dinah ne craignait pas les lames de couteau, et elle non plus, tant qu’elle les voyait arriver. Elle n’était pas aussi douée que son amie pour se battre au corps à corps, mais ça tombait bien, elle avait la magie avec elle. Laissant à Dinah le soin de s’occuper de ses propres adversaires, Zee se téléporta derrière deux types, qui ne la virent même pas arriver quand elle les saisit par le col pour les soulever dans les airs. « En route pour Neverland, mes amours ! » Les types poussèrent des hurlements terrifiés, et elle eut assez de peine pour les lâcher alors qu’elle se trouvait à cinq ou six mètres du sol, pas plus. Deux de moins ! Elle retourna dans la mêlée, en se disant qu’elles auraient bien mérité leurs Manhattan, après ça.

Codage par Libella sur Graphiorum - Images tumblr